
fonctions, pourtant vitales pour nourrir demain 10 milliards d'êtres humains et préserver le climat et la
biodiversité. D'ores et déjà, la surface totale des terres agricoles disponibles sur Terre stagne depuis
1991 et est même repassée sous les 1,4 milliard d'hectares.
Du "peak oil" au "peak all"
L'humanité brûle trop d'hydrocarbures. Pour se chauffer, se déplacer, produire, on consomme
toujours plus de pétrole, de charbon et de gaz, qui sont pourtant des énergies non renouvelables.
Des réserves constituées au cours de millions d'années sont ainsi gaspillées en quelques
générations. D'après l'Institut français du pétrole et des énergies nouvelles (Ifpen), le pic de
production de pétrole (le peak oil) sera atteint entre 2015 et 2025, entre 2025 et 2045 pour le gaz, et
en 2100 pour le charbon. Au-delà, la production de ces matières premières aurait tendance à chuter
irrémédiablement jusqu'à l'extinction des réserves accessibles.
D'autres ressources se raréfient inexorablement. Le cuivre, l'or, l'argent, le zinc, les terres rares (*) ,
l'uranium, les phosphates… ne pourront pas être extraits en quantités toujours croissantes. A tel
point que l'on ne parle plus seulement du peakoil (le pic de pétrole), mais aussi du peak all (le pic de
tout).
Par exemple, la disponibilité de l'uranium constitue une limite physique au développement de
l'énergie nucléaire, civile ou militaire. Présent dans une poignée de pays, comme l'Australie, le
Kazakhstan, la Russie ou le Niger, l'uranium s'épuiserait au bout de quelques décennies à peine si le
nucléaire se répandait au rythme annoncé il y a seulement quelques années. L'accident de
Fukushima, en rappelant les risques de cette énergie et en freinant nombre de projets, a sans doute
retardé de quelques années l'extinction du minerai. De même, l'économie dite immatérielle est
inenvisageable sans coltan pour produire des téléphones portables, ou sans terres rares pour nos
écrans plats. Même les énergies renouvelables ont besoin de ce groupe de minerais aux
particularités exceptionnelles, par exemple pour fabriquer les aimants des moteurs et des turbines
des éoliennes.
Le climat n'attend pas
La perspective d'un déclin du niveau de production des hydrocarbures arrive à grands pas, mais elle
se rapproche encore trop lentement pour sauver le climat. Depuis le premier rapport, en 1990, du
Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), le constat est connu : les
émissions de gaz à effet de serre d'origine anthropique (production d'énergie, déforestation…)
réchauffent l'atmosphère. Les températures auraient déjà augmenté de 0,74 °C depuis un siècle,
mais le pire est à venir. Si l'humanité ne parvient pas à diminuer ses émissions à partir de 2020, pour
les réduire de 50 % en 2050 par rapport à 1990, l'atmosphère se réchauffera de plus de 2 °C à
l'horizon 2100. D'après les dernières projections, on se dirigerait même plutôt vers une hausse de 4
°C, sinon plus. Les plus gros émetteurs historiques, comme les Etats-Unis, et les nouveaux, au
premier titre la Chine - devenue le premier émetteur au milieu des années 2000 - se renvoient la
responsabilité de l'échec chronique des négociations climatiques.
Le renchérissement du prix du baril de pétrole, au lieu d'inciter à économiser cette ressource,
entraîne la prospection d'hydrocarbures encore plus polluants, qu'il s'agisse du charbon, en plein
boom en Chine, d'hydrocarbures "non conventionnels" comme les sables bitumineux et le gaz et
l'huile de schiste sur le continent américain, ou de pétroles plus difficilement accessibles comme le
pétrole offshore au large du Brésil ou près du cercle polaire arctique.
Certes, chaque pays modère l'intensité énergétique de son produit intérieur brut (PIB), c'est-à-dire la
quantité d'énergie nécessaire pour produire une quantité de richesse donnée. Mais, d'une part, la
forte croissance économique des pays émergents annule ces gains énergétiques et, d'autre part, la
production mondiale se déplace de plus en plus vers les émergents, dont la production est moins
5