Pascal Morchain -Déterminants psychosociaux du racisme et de la discrimination- Rennes, 30 Octobre 2009
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manière »). Certains auteurs (voir De la Haye, 1998 ; Sales-Wuillemin 2006) estiment que les
dimensions sont affectif/évaluatif ; conatif ; cognitif. Dans ce cas, cette dernière dimension
renvoie aux connaissances que les personnes ont du contenu, et font alors référence au
stéréotype comme une dimension du préjugé. Si pour Allport (1954) le préjugé est négatif,
pour Saenger dès 1953, un préjugé peut-être favorable. Si le mot préjugé est souvent connoté
négativement, c’est parce que les chercheurs se sont évidemment intéressés aux préjugés
défavorables, en raison de leurs conséquences. Les effets des préjugés favorables ne sont pas
conçus comme problématiques.
Selon Ashmore et Del Boca (1981), le terme de « stéréotype » a été formé par
l’imprimeur français Didot en 1798. Formé du grec
στερεοσ
(solide), et
τψποσ
(caractère),
il désigne un bloc obtenu par le moulage d’une page entière d’un ouvrage composée en
caractères mobiles, et pouvant servir à plusieurs tirages. Etymologiquement donc, le
stéréotype est un terme d’imprimerie, dont le synonyme est « cliché ». En psychologie
sociale, on parle de stéréotype en matière d’opinion. Le terme apparaît chez le journaliste
Walter Lippmann (1922), et désigne les « images dans notre tête », qui s’intercalent entre la
réalité et la perception que nous en avons. Depuis Lippman, diverses définitions ont été
proposées. On s’accorde toutefois pour dire qu’un stéréotype est une croyance concernant les
caractéristiques communes des membres d’un groupe ou d’une catégorie sociale (voir par
exemple Stroebe & Insko, 1989 ; Leyens, Yzerbyt & Schadron, 1994, 1996). Ce type de
définition relie un contenu informatif (traits de personnalité, comportements, etc ...) à un
groupe social : je vais dire que les femmes sont « intuitives », « sensibles », « sensuelles », et
« bavardes », etc ... Les stéréotypes sont par ailleurs partagés, qu’on les utilise ou non
(Devine, 1989 a,b) et qu’on soit ou non d’accord avec leur contenu. En d’autres termes, il faut
dire tout de suite que l’on ne peut pas ne pas avoir de stéréotypes. Sans ces « images », on
ne comprendrait pas notre monde social, on ne pourrait pas interagir avec autrui. C’est le
contenu des stéréotypes qui peut vous amener à sourire à la boutade suivante : « Le Ciel ou
l’Enfer ? Le Ciel, c’est un endroit où les cuisiniers sont Français, les amants Italiens, les
policiers Anglais, les mécaniciens Allemands, et tout est organisé par les Suisses. L’Enfer,
c’est le lieu où les cuisiniers sont Anglais, les amants Suisses, les policiers Allemands, les
mécaniciens Français, et le tout est organisé par les Italiens ». Aujourd’hui, plus qu’à leur
contenu, on s’intéresse à la nature du lien entre le contenu et le groupe (Schadron, Morchain,
& Yzerbyt, 1996), au processus de stéréotypisation.