doi: 10.1684/epi.2009.0273
Contraception, contragestion
et épilepsie
Jean-Louis Thomas
Service de Médecine Interne I - Unité de Diabétologie et dEndocrinologie, hôpital Henri-Mondor,
51, avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil cedex, France
Résumé. Les méthodes contraceptives les plus employées sont désormais celles qui utilisent les hormones. Au
cours du temps, des modifications ont été apportées portant sur la nature et la dose des stéroïdes, la durée dadmi-
nistration au cours du cycle menstruel ou la voie dadministration. Les différentes méthodes sont rapidement décri-
tes, incluant la contraception du lendemain et la contragestion. Il est important de connaître les interactions entre
antiépileptiques et contraceptifs hormonaux avant dinstaurer une contraception chez la femme en âge de procréer
traitée pour épilepsie. Les antiépileptiques inducteurs de lisoenzyme 3A4 du cytochrome accélèrent le métabolisme
des stéroïdes contraceptifs et augmentent ainsi le risque de grossesse non désirée. Inversement, les pilules estro-
progestatives diminuent la biodisponibilité de la lamotrigine en accélérant son élimination. Les neurologues doivent
tenir compte des interactions, qui peuvent se produire dans les deux sens entre contraceptifs hormonaux et anti-
épileptiques, et informer leurs patientes.
Mots clés :contraception hormonale,mifépristone,antiépileptiques,interactions pharmacocinétiques
Abstract. Contraception, contragestion and epilepsy
Hormonal contraceptives are now the most widely used reversible form of contraception. In the evolution, many
changes have been made concerning nature and dose of steroids, regimen use during the menstrual cycle and route of
administration. The different methods of hormonal contraception (including emergency contraception and contra-
gestion) are briefly described. It is important to know the pharmacokinetic interactions between some antiepileptic
drugs (AED) and hormones before initiating contraception in women of childbearing age with epilepsy. AED which are
cytochrome 3A4 isoenzyme inducers accelerate the metabolism of steroids used for contraception and thus increase
the risk for unexpected pregnancy. On the other hand oral combined contraceptives reduce the bioavailability of
lamotrigine by increasing its elimination. The bidirectional interactive potential of AED and hormonal contraceptives
needs to be taken into account by neurologists and known by patients.
Key words:hormonal contraceptives,mifepristone,antiepileptic drugs,pharmacokinetic interactions
La contraception hormonale est choisie par
une femme sur deux en âge de procréer, et
90 % des femmes y ont recours à un moment
ou à un autre pour éviter ou différer une gros-
sesse. Cest en effet une méthode fiable et
réversible qui a radicalement changé la vie
des femmes. Elle est globalement bien tolérée,
à condition den respecter les contre-
indications. Il importe aussi de connaître les
interactions des hormones utilisées en contra-
ception avec les autres médicaments. Cest
notamment le cas chez les patientes traitées
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pour épilepsie, car plusieurs antiépileptiques peuvent modifier
lefficacité des contraceptifs. Les modifications de la biodispo-
nibilité de certains antiépileptiques par la pilule existent aussi,
bien que moins fréquentes.
Méthodes hormonales en contraception
et contragestion
Les estrogènes et les progestatifs sont les stéroïdes les plus
utilisés en contraception, rejoints récemment par les modula-
teurs spécifiques des récepteurs de la progestérone, dont fait
partie la mifépristone utilisée en contragestion. La contracep-
tion hormonale fait régulièrement lobjet dadaptation ayant
pour but daméliorer la tolérance et lacceptabilité, tout en
maintenant lefficacité ; ces modifications portent sur la dose
et la nature des composants hormonaux, la durée dadministra-
tion au cours du cycle menstruel ou encore la voie dadminis-
tration (Blumenthal et Edelman, 2008 ; Quereux et al., 2009 ;
Practice Committee of American Society for Reproductive
Medicine, 2008)
Contraception estroprogestative par voie orale
Introduite, il y a une quarantaine dannées, la pilule estro-
progestative est la méthode contraceptive la plus fréquemment
utilisée en Europe. Elle consiste à administrer simultanément
et de façon cyclique (21 ou 24 jours sur 28) un estrogène et
un progestatif. Ladministration cyclique a pour but de faire
apparaître après larrêt de la séquence hormonale une hémorra-
gie de privation mimant une menstruation. La pilule estropro-
gestative donnée de façon continue, destinée à supprimer les
hémorragies de privation est disponible aux États-Unis, mais
pas en France. Les pilules contenant les mêmes doses destro-
gène et de progestatif durant la totalité du cycle sont dites
monophasiques. Afin de réduire lincidence des saignements
intermenstruels et daméliorer lacceptabilité, on fait varier
dans certaines pilules les doses initiales des deux composants
soit à une reprise (pilules biphasiques), soit à deux reprises
(pilules triphasiques) (Petitti, 2003).
Estrogène
Lestrogène utilisé jusquà maintenant est toujours léthi-
nylestradiol (EE), molécule de synthèse ayant une activité
estrogénique environ 100 fois plus élevée que lestradiol (E2)
naturel. Dans le but de réduire les effets secondaires, la dose
dEE de la pilule a été régulièrement diminuée. Les premiers
contraceptifs oraux contenaient 100 µg dEE ; on est passé
ensuite à 50 µg (pilules dites normodosées), puis à 30 ou 35
et à 20 µg (pilules minidosées ou minipilules). Depuis quelques
années, il existe une pilule à 15 µg dEE. On verra très prochai-
nement arriver sur le marché des pilules à base dE2, lestro-
gène naturel chimiquement identique à lhormone produite
par les ovaires.
Progestatif
Le progestatif utilisé pour la contraception orale est égale-
ment un stéroïde de synthèse. Plusieurs molécules sont utili-
sées, quon classe par générations, terme qui rend compte de
leur ordre darrivée sur le marché mais aussi de leur structure
chimique et de leurs propriétés pharmacologiques.
Les progestatifs de première génération sont des dérivés de la
19-nortestostérone : norethistérone, acétate de norethistérone
et norgestrel, utilisés à des doses de 0,5 à 1 mg. Ils ont une acti-
vité androgénique résiduelle notable.
Le progestatif de deuxième génération est le lévonorgestrel,
isomère lévogyre du norgestrel, administré à la dose de 50 à
150 µg. Il garde une affinité pour le récepteur androgénique.
Les progestatifs de troisième génération sont également des
dérivés de la 19-nortestostérone qui ont une plus forte sélecti-
vité progestative et qui, utilisés aux doses du lévonorgestrel,
ont des effets androgéniques beaucoup plus faibles. Ils sont au
nombre de trois : le désogestrel, le gestodène et le norgesti-
mate.
Dautres progestatifs dépourvus deffet androgénique,
quon pourrait qualifier de quatrième génération, sont utilisés
dans la pilule estroprogestative. La drospirénone, dérivé de la
17α-spironolactone, possède une faible activité antiminéralo-
corticoïde et antiandrogénique. Lacétate de cyprotérone est
un dérivé de la 17-hydroxyprogestérone qui possède une forte
activité antiandrogénique. Il est utilisé depuis longtemps en
association avec lEE comme contraceptif en Europe mais
nest officiellement indiqué que dans le traitement de lacné.
Lacétate de nomégestrol et le dienogest sont les progestatifs
qui entrent dans la composition des pilules à base dE2 en
cours de développement.
Dans les pilules, lestrogène et le progestatif exercent en
synergie leur effet antigonadotrope. Ils freinent à la fois la sécré-
tion de la FSH, doù linhibition de la croissance folliculaire, et
celle de la LH, qui se traduit par labolition du pic ovulatoire.
Le progestatif renforce laction contraceptive par ses effets péri-
phériques en rendant la glaire cervicale hostile aux spermatozoï-
des et la muqueuse utérine inapte à une éventuelle nidation.
Contraception estroprogestative par voie parentérale
Il est désormais possible dadministrer, par dautres voies
que la voie orale, les associations estroprogestatives à visée
contraceptive.
Le patch contraceptif (Evra
®
) est un patch hebdomadaire
qui délivre quotidiennement 20 µg dEE et 150 µg de norel-
gestromine, métabolite du norgestimate. Trois dispositifs sont
utilisés par cycle, un par semaine pendant trois semaines
consécutives, suivies par un intervalle libre dune semaine.
Lanneau vaginal contraceptif (Nuvaring
®
) est un dispositif
délivrant par jour 15 µg dEE et 120 µg détonorgestrel, méta-
bolite du désogestrel. Il est mis en place pour trois semaines et
changé après une fenêtre dune semaine.
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Ces deux contraceptifs combinent lEE et un progestatif qui
est le métabolite actif dun progestatif de troisième génération.
La contraception par patch transdermique ou par anneau vagi-
nal évite la prise quotidienne dune pilule, ce qui devrait amé-
liorer lobservance, à condition de ne pas prolonger lintervalle
libre dune semaine entre deux cycles de traitement.
Contraception progestative
Les progestatifs peuvent être utilisés seuls dans un but
contraceptif. Le premier contraceptif oral administré à des fem-
mes par Pincus était dailleurs un progestatif.
Le choix dune contraception progestative est motivé par
des raisons aussi diverses que la présence dune contre-
indication aux estrogènes, la recherche dun effet retard ou
encore le traitement dune pathologie gynécologique requérant
un progestatif (Jamin et Madelenat, 2008).
Quelle que soit la voie dadministration, la contraception
est assurée par les effets du progestatif sur la glaire cervicale,
la muqueuse utérine et accessoirement sur les trompes (réduc-
tion de la mobilité tubaire empêchant la migration de lovule).
Dans certains cas, si la dose du progestatif est suffisante, leffi-
cacité contraceptive est renforcée par linhibition de la fonc-
tion gonadotrope aboutissant à la suppression de lovulation.
Micropilule progestative
La contraception par micropilule consiste à ingérer quoti-
diennement et en continu une faible dose dun progestatif
dérivé de la 19-nortestostérone : acétate de norethistérone
(Milligynon
®
), lévonorgestrel (Microval
®
) ou désogestrel
(Cerazette
®
).
Lefficacité contraceptive est assurée par les seuls effets péri-
phériques. Linhibition gonadotrope est inconstante et partielle
sauf pour la micropilule à base de désogestrel. En effet, même
lorsque le pic ovulatoire est supprimé, ce qui sobserve dans 15
à 20 % des cas, la sécrétion basale des gonadotrophines persiste,
permettant la croissance folliculaire, doù une tendance à
lhyperestrogénie et parfois à terme au développement de kystes
ovariens. Leffet endométrial est primordial, car en sopposant à
leffet prolifératif de lE2 endone, les progestatifs créent un
endomètre hypotrophique impropre à une éventuelle nidation.
La contrepartie de cette action est la modification fréquente de
la chronologie des saignements génitaux.
La micropilule est prescrite en cas de contre-indication à
lEE, chez les femmes hypertendues, diabétiques, dyslipidémi-
ques, ayant des antécédents thromboemboliques ou qui
fument beaucoup. Elle est également indiquée dans la période
du post-partum, notamment chez les femmes qui allaitent.
Lefficacité contraceptive est inférieure à celle de la pilule estro-
progestative et, en cas déchec, le risque de grossesse extra-
utérine est accru.
Progestatifs normodosés
La contraception par des progestatifs de synthèse prescrits
de façon discontinue aux posologies habituellement employées
en gynécologie est une spécialité presque exclusivement fran-
çaise. Elle met à profit linhibition de lovulation par le proges-
tatif administré en séquences de 21 jours séparés dune
semaine. Cette contraception est indiquée en cas de contre-
indication aux estrogènes ou chez les femmes ayant une affec-
tion gynécologique requérant un traitement progestatif.
Un seul progestatif, dérivé de la 19-nortestostérone a une
indication officiellement reconnue comme contraceptif « en
deuxième intention » : le lynestrénol (Orgametril
®
), prescrit à
raison de 10 mg par jour.
Plusieurs progestatifs dérivés de la 17α-hydroxyprogesté-
rone ou de la 19-norprogestérone, et de ce fait dénués deffets
androgéniques, inhibent lovulation lorsquils sont administrés
à dose suffisante en séquence de 21 jours : lacétate de chlor-
madinone (Luteran
®
), lacétate de nomégestrol (Lutenyl
®
)et
la promégestone (Surgestone
®
). Bien quils naient pas été
moins étudiés que le lynestrénol, ils ne sont pas officiellement
reconnus comme contraceptifs.
Contraception progestative par voie parentérale
Deux progestatifs peuvent être administrés seuls par voie
parentérale pour assurer une couverture contraceptive prolongée :
lacétate de médroxyprogestérone, en suspension huileuse
injectée par voie intramusculaire à raison de 150 mg
(Depo-Provera
®
) tous les trois mois ;
létonogestrel, métabolite actif du désogestrel, contenu à raison
de 68 mg dans un implant de 4 cm de long et 2 mm de diamètre
(Implanon
®
), destiné à être inséré sous la peau du bras à laide
dun applicateur, et dont la durée daction est de trois ans.
Lefficacité contraceptive des progestatifs ainsi administrés
repose à la fois sur linhibition de lovulation et les effets péri-
phériques. Ils conviennent aux femmes qui ne peuvent
sastreindre à des prises orales quotidiennes, qui ne désirent
plus denfants et ont une contre-indication au stérilet. Leur
efficacité contraceptive est satisfaisante mais ils ont linconvé-
nient dentraîner dans 50 % des cas des saignements génitaux
irréguliers parfois prolongés. Ils sont plus fréquents en début
de traitement, se raréfient avec le temps et font place à une
aménorrhée chez 20 % des femmes. La mise en place et le
retrait dImplanon
®
nécessite lintervention dun médecin
expérimenté afin de réduire la fréquence des incidents locaux.
On peut rapprocher de ces contraceptifs le stérilet au lévo-
norgestrel (Mirena
®
). Mis en place dans la cavité utérine, il
délivre le progestatif au contact même de lendomètre.
La contraception est assurée par le dispositif utérin et renforcé
par laction du progestatif sur la glaire et la muqueuse utérine.
Le stérilet au lévonorgestrel a lavantage de diminuer limpor-
tance des saignements menstruels chez les femmes et convient
à celles ayant des métrorragies.
Contraception du lendemain
Il sagit dune contraception durgence destinée à éviter
une grossesse après un rapport non protégé, potentiellement
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fécondant (Bastianelli et al., 2008). Cest une méthode dexcep-
tion beaucoup moins efficace que les autres méthodes.
Le seul progestatif autorisé pour la contraception durgence
est le lévonorgestrel administré à raison de deux comprimés à
75 µg (Norlevo
®
) à 12 heures dintervalle. La prise doit avoir
lieu le plus tôt après le rapport sexuel non protégé, pas au-
delà de 72 heures.
Un modulateur sélectif des récepteurs de la progestérone,
ayant une activité antiprogestative, vient dobtenir son autori-
sation de mise sur le marché dans la contraception durgence.
Il sagit de lulipristal (Ellaone
®
) (Gainer et Ulmann, 2003).
Il sadministre à raison dun comprimé à 30 mg le plus tôt pos-
sible, et au plus tard 120 heures (cinq jours) après un rapport
sexuel non protégé.
La contraception postcoïtale agit en inhibant ou en retar-
dant lovulation mais aussi en empêchant la nidation en cas
de fécondation. Les effets les plus fréquents sont les nausées
avec ou sans vomissements et la survenue de saignements
génitaux par perturbation du cycle menstruel.
Contragestion
Le RU 486 ou mifépristone (Mifegyne
®
) est le seul médica-
ment utilisé en association avec un analogue des prostaglandi-
nes pour interrompre la grossesse. Cest le premier modulateur
sélectif des récepteurs de la progestérone ; par son action anti-
progestative, il bloque laction de la progestérone sur ses récep-
teurs utérins et interrompt limplantation de lembryon.
La mifépristone est donnée sous surveillance médicale à raison
de 600 mg en une seule prise orale, suivie 36 à 48 heures après
par ladministration dun analogue de prostaglandine.
Interactions entre hormones
et antiépileptiques
Les interactions entre les hormones utilisées en contracep-
tion et les antiépileptiques sont de nature pharmacocinétique ;
elles résultent de phénomènes dinduction enzymatique se tra-
duisant par la stimulation du métabolisme des hormones par
les antiépileptiques ou vice versa (Crawford, 2009 ; Dutton et
Foldvary-Schaefer, 2008 ; Schwenkhagen et Stodieck, 2008).
Effet des antiépileptiques sur le métabolisme des hormones
Les stéroïdes sexuels (EE, E2 et progestatifs) ont un point
commun : ils sont tous inactivés par des réactions dhydroxyla-
tions catalysées par le système du cytochrome P450 et notam-
ment par lisoenzyme 3A4 (CYP3A4). Cette isoenzyme est sti-
mulée par les inducteurs enzymatiques, dans la liste desquels
figurent les antiépileptiques anciens : le phénobarbital, la phé-
nytoïne, la primidone et la carbamazépine, qui ont une forte
activité inductrice et accélèrent linactivation des stéroïdes.
La concentration de lEE et des progestatifs se trouve diminuée
dau moins 50 %, ce qui a pour conséquence daugmenter les
saignements intermenstruels et de rendre inefficace les contra-
ceptifs oraux. Ce risque existe aussi pour des molécules plus
récentes : loxcarbazépine, le felbamate et le topiramate, bien
que leur activité inductrice soit moindre que celle des antiépi-
leptiques anciens. Lactivité inductrice du topiramate est moin-
dre et dose-dépendante ; il a été démontré quil ne diminuait
pas la biodisponibilité des contraceptifs jusquà la dose de
200 mg par jour (Bialer et al., 2004).
On ne dispose daucune étude dinteraction entre modula-
teurs sélectifs des récepteurs de la progestérone (mifépristone et
ulipristal). Néanmoins, on sait que le CYP3A4 intervient dans
leur métabolisme et il y a tout lieu de penser que leur efficacité
est diminuée lors de ladministration concomitante des antié-
pileptiques inducteurs.
Effet des hormones sur le métabolisme des antiépileptiques
La lamotrigine nest pas un inducteur enzymatique du
cytochrome P450 et na pas dinfluence significative sur la bio-
disponibilité des estrogènes et des progestatifs utilisés en
contraception. En revanche, la pilule influence le métabolisme
de la lamotrigine : elle stimule lisoenzyme 1A4 de luridine 5-
diphosphate-glucuronyl transférase qui la transforme en déri-
vés glucuronoconjugués inactifs qui sont éliminés dans les uri-
nes (Öhman et al., 2008 ; Sabers et al., 2001 ; Sidhu et al.,
2005). Cet effet, rapidement réversible, nest pas dû à la com-
posante progestative, mais à lEE, qui est également catabolisé
en dérivés glucuronoconjugués. Il a été ainsi démontré que la
pilule estroprogestative entraînait un doublement de la clai-
rance de lamotrigine, avec diminution par deux de ses taux cir-
culants. Inversement, entre deux cycles, durant la semaine
dinterruption de la pilule, les taux plasmatiques de la lamotri-
gine sont multipliés par deux environ. Cette interaction peut
se traduire par la survenue de crises comitiales lorsquon ins-
taure la contraception chez une femme antérieurement traitée
par lamotrigine ; elle explique aussi le risque accru dévéne-
ments indésirables liés à lantiépileptique dans la période
dinterruption de la pilule entre deux cycles.
Par le même mécanisme, les estroprogestatifs diminuent les
taux circulants de lacide valproïque, mais de façon moindre,
avec de grandes variations dun sujet à lautre (Galimberti
et al., 2006).
On sait que lacide valproïque diminue lélimination de la
lamotrigine. Lacide valproïque annule aussi laccélération de
lélimination de la lamotrigine induite par les estroprogestatifs
(Tomson et al., 2006).
Attitudes pratiques
Parmi les inducteurs du cytochrome P450, seul le topira-
mate peut être associé aux contraceptifs hormonaux, à condi-
tion que la dose quotidienne ne dépasse pas 200 mg.
Pour les doses supérieures, comme pour tous les autres
antiépileptiques interférant avec ce système enzymatique (phé-
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nobarbital, phénytoïne, primidone, carbamazépine, oxcarcar-
bazépine), il y a un risque de grossesse non désirée. La copre-
scription avec les micropilules progestatives, limplant contra-
ceptif (Implanon
®
), le patch transdermique (Evra
®
), lanneau
vaginal (Nuvaring
®
) et la pilule du lendemain est formellement
contre-indiquée. Seules deux méthodes hormonales peuvent
être envisagées sans risque :
le stérilet au lévonorgestrel (MirenA
®
) parce que le dispositif
intra-utérin assure une grande part de leffet contraceptif et que
le progestatif agit localement (Bounds et Guillebaud, 2002) ;
la médroxyprogestérone injectable (Depo-Provera
®
) parce
que la dose administrée est forte et que la voie intramusculaire
minimise le processus dinduction enzymatique ; ce contracep-
tif ne peut cependant pas être donné de façon prolongée aux
femmes jeunes en raison du risque dostéoporose.
Lassociation des antiépileptiques inducteurs du cyto-
chrome P450 à la pilule estroprogestative na pas toujours été
contre-indiquée, à condition de choisir une pilule répondant à
une des trois caractéristiques suivantes : contenir au moins
50 µg dEE, contenir un progestatif à une dose supérieure à
celle inhibant lovulation, ou être administrée en continu
(sans intervalle libre entre deux cycles consécutifs). Ces recom-
mandations ne sont pas étayées par des études cliniques ; elles
sont, en outre, difficilement applicables en France, puisquil
ny a plus quune pilule fortement dosée en EE (Stediril
®
), que
la pilule à administration continue nest pas disponible et que
la dose des progestatifs contenue dans la pilule combinée a plu-
tôt tendance à diminuer. Chez les femmes traitées par un
antiépileptique inducteur du CYP3A4, il faut donc proscrire la
prescription de la pilule et sadresser à la contraception méca-
nique. Chez ces femmes, la seule contraception du lendemain
possible est la mise en place dun stérilet dans les jours qui sui-
vent un rapport non protégé.
Malgré labsence détude disponible, il y a tout lieu de pen-
ser que la biodisponibilité de la mifépristone est diminuée par
les antiépileptiques induisant les enzymes du cytochrome
P450. La contragestion est néanmoins possible chez la femme
épileptique en raison de la dose relativement élevée de mifé-
pristone quon administre en prise unique pour interrompre
la grossesse.
La prescription de la lamotrigine aux femmes prenant un
contraceptif estroprogestatif nest pas contre-indiquée, mais
un ajustement de la posologie simpose lorsquon initie la
contraception, quon change de contraceptif (notamment
lorsque la dose dEE est modifiée) ou à larrêt de la contracep-
tion orale. Ces recommandations ne sappliquent pas à la
contraception progestative.
Il convient enfin de rappeler que beaucoup dantiépilepti-
ques (tous ceux qui nont pas été cités ci-dessus) ninterfèrent
pas avec les contraceptifs hormonaux.
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