Analyse de la conception logique d`un dossier patient partageable

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Groupe de recherche
interdisciplinaire en santé
Secteur santé publique
Faculté de médecine
Analyse de la conception logique
d'un dossier patient partageable
Évaluation du Projet vitrine : Dossier Patient Partageable
L'expérimentation d'un dossier patient électronique
au sein d'un réseau de soins intégrés
Étude comparée de la collaboration interorganisationnelle et de ses effets :
Claude Sicotte
Lambert Farand
Guy Paré
Pascale Lehoux
Duncan Sanderson
R05-02
Février 2005
Dépôt légal – 1er trimestre 2005
Bibliothèque nationale du Québec
Bibliothèque nationale du Canada
ISBN 2–921954–86–9
ANALYSE DE LA CONCEPTION LOGIQUE
D'UN DOSSIER PATIENT PARTAGEABLE
Évaluation du Projet vitrine : Dossier Patient Partageable
L'expérimentation d'un dossier patient électronique au sein
d'un réseau de soins intégrés
Claude Sicotte 1 , PhD
Lambert Farand 1 , Md, PhD
Guy Paré 2 , PhD
P a sca l e L e h o u x 1 , PhD
D u n ca n S a n d e rso n 1 , PhD
(1) Département d'administration de la santé &
Groupe de recherche interdisciplinaire en santé
Université de Montréal
(2 ) Chaire de recherche du Canada en TI dans le secteur de la santé
HEC Montréal
Février 2002
TABLE DES MATIÈRES
Résumé synthèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
Introduction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
1. Description du projet vitrine de Dossier Patient Partageable (DPP) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
2. Modélisation du Projet vitrine DPP . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
Le DPP, une innovation de l'information et de la communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
Potentiel informationnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8
L'adoption de systèmes informatisés chez les médecins : une opération difficile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
L'amélioration du continuum de soins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
Une meilleure prestation des soins . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
3. Résultats de l'analyse de la logique du projet vitrine DPP . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
Les enjeux technologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
Performance technique du DPP
Potentiel informationnel du DPP
L'interface utilisateur
Les enjeux cliniques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
Le DPP : un concept à raffiner et élargir
Utilité perçue : le médecin avant tout
Masse critique
Enjeu sensible : la qualité de la décision médicale
Les enjeux administratifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
Les enjeux légaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
Annexe 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
Résumé synthèse
Ce document présente les premiers résultats
d'une recherche évaluative menée en marge du projet
vitrine du Dossier Patient Partageable (DPP). Cette
recherche vise à produire une information utile apte
à cerner les enjeux professionnels, organisationnels et
technologiques associés au déploiement de la solution
technologique proposée par le projet vitrine. Ce premier
rapport de recherche s'attache d'abord à modéliser
les mécanismes par lesquels l'innovation technologique
que représente le DPP peut susciter les bénéfices
recherchés et il examine par la suite comment et
à quelles conditions le DPP peut permettre d'atteindre
les objectifs poursuivis.
Ce type d'analyse est utile à ce stade-ci du projet
car elle permet aux acteurs de réfléchir sur la logique
du projet et sur son développement de manière à vérifier
si les actions entreprises permettent d'atteindre les objectifs
fixés. Comme le projet est en cours, il est possible
d'entreprendre des actions permettant d'en renforcer
la cohérence. Dans cette perspective, la modélisation
du projet vitrine nous a permis d'identifier quatre grands
enjeux fondamentaux:les enjeux technologiques, les enjeux
cliniques, les enjeux administratifs et les enjeux légaux
(sécurité, confidentialité, gestion du consentement).
Ces enjeux gravitent autour d'un même point focal
essentiel à la réussite du projet : l'adoption par les
médecins du DPP. Deux facteurs demeurent névralgiques
au déploiement de la solution technologique proposée :
l'utilité perçue et l'alignement entre les nouveaux processus
d'affaires introduits par la technologie et l'organisation
du travail clinique. Afin de renforcer la qualité du projet
vitrine, notre analyse nous a permis d'identifier une série
de suggestions que nous résumons ci-dessous.
Premièrement, nous recommandons d'identifier
le plus rapidement possible les médecins futurs utilisateurs
du DPP : ceux qui utiliseront effectivement le système
lors de l'expérimentation prévue en contexte réel.
L'avantage de ce choix précoce est de pouvoir analyser
plus précisément leurs besoins en informations cliniques
et d'ainsi pouvoir augmenter le potentiel informationnel
du DPP et l'utilité perçue par ces médecins.
Deuxièmement, nous recommandons que des
simulations en laboratoire (in vitro) avec des données
réelles soient entreprises avec ces médecins utilisateurs.
Les résultats de ces simulations visent à personnaliser
l'interface aux besoins de ces utilisateurs. Ces simulations
devraient être réalisées avec des données réelles.
Troisièmement, nous recommandons que le concept
de Dossier Patient Partageable (DPP) qui met l'accent
sur le partage de données cliniques entre des organisations
différentes soit élargi de manière à également présenter
le DPP comme un Dossier Patient Informatisé (DPI) qui
peut être utilisé comme un dossier patient interne.
Cette recommandation vise à améliorer l'utilité perçue
et à mieux intégrer le nouveau système dans les routines
de pratique des médecins.
Quatrièmement, nous recommandons de créer
le plus tôt possible un réservoir de données cliniques
le plus large possible. Ce réservoir permettra dès les tous
débuts de l'expérimentation d'avoir une quantité d'informations cliniques sur un nombre élevé de patients
de manière à intéresser rapidement les médecins et,
du même coup, les inciter à utiliser le système.
Cinquièmement, nous recommandons qu'une analyse serrée soit menée de manière à s'assurer que
les nouveaux processus d'affaires exigés par le DPP
soient bien harmonisés avec les processus d'affaires
associés au dossier papier.
Sixièmement, nous recommandons de considérer
les processus de sécurité, de confidentialité et de gestion
du consentement comme faisant partie à part entière
de l'expérimentation. Ces mesures doivent donc être
flexibles et modifiées selon les difficultés rencontrées
par les utilisateurs – médecins et patients – lors de leur
application. Nous recommandons également de s'inspirer
a priori des mesures existantes qui ont été développées
autour du dossier papier de manière à s'adapter le plus
possible aux conditions usuelles de la pratique médicale.
3
Introduction
E
n janvier 2001 débutait un projet d'expérimentation
d'un nouveau système d'information et de communication au sein d'un réseau d'organisations
de santé partenaires : un Centre hospitalier universitaire
pédiatrique, deux hôpitaux de soins aigus spécialisés
pour adultes et enfants ainsi que cinq cliniques médicales
pédiatriques. L'objectif de ce projet est « d'expérimenter
l'intégration des données cliniques pour améliorer
le suivi des patients et être capable d'offrir les soins
appropriés, au moment opportun et aussi près que possible
des patients, le tout à un coût le plus efficace possible ».
L'infrastructure technologique de ce réseau repose sur
une solution proposée par la compagnie IBM : le système
Health Data Network (HDN). Ce système est une solution
d'intégration pour le domaine de la santé qui permet
de fusionner les données de systèmes hétérogènes tels
que les systèmes de laboratoire, les systèmes d'admission,
les systèmes de radiologie et les systèmes de transcription.
La solution HDN permet de personnaliser les gabarits
de présentation pour obtenir une interface conviviale.
Un second système informatisé, proposé par la compagnie Tekflow, assurera la saisie et la gestion d'images
dynamiques qui seront intégrées à la solution HDN.
En marge de ce projet, une recherche évaluative
est menée de manière à produire une information utile
apte à cerner les enjeux professionnels, organisationnels
et technologiques associés au déploiement d'une telle
solution technologique et ainsi mieux éclairer les décisions
futures de son déploiement à plus large échelle dans
le système de santé québécois. Ce document présente
un premier rapport de cette recherche. Il s'agit d'une
analyse de la logique sous-jacente à la conception et
au déploiement du DPP au sein du réseau interorganisationnel participant au projet vitrine. Cette analyse est
la première étape de la recherche évaluative. Cette
analyse s'attache d'abord à modéliser le rôle et les
mécanismes par lesquels l'innovation technologique
que représente le DPP peut susciter les bénéfices
recherchés et elle examine par la suite, pour le cas
précis du projet vitrine, comment et à quelles conditions
le DPP sous évaluation peut permettre d'atteindre
les objectifs poursuivis. En fait, ce type d'analyse vise
à vérifier dans quelle mesure la logique de fonctionnement du DPP – en fait, la théorie à la base de la solution
technologique proposée – est empiriquement viable.
Dans cette perspective, ce rapport comporte trois
sections. Une première section présente les principales
caractéristiques du projet vitrine Dossier Patient Partageable
qui fait l'objet de la présente évaluation. La seconde
section dresse une modélisation du projet vitrine. Il
s'agit ici de rendre explicite les mécanismes ainsi que
leurs interrelations qui permettent d'atteindre les effets
recherchés. Ensuite, nous dressons un bilan évaluatif
des forces et faiblesses du modèle adopté dans le cadre
du projet vitrine. Ce bilan permet de jauger la valeur
de chacun des mécanismes mis en place et de discuter
de leur cohérence logique les uns par rapport aux autres.
Afin de mener à bien cette analyse, nous avons,
d'une part, pris connaissance de la littérature spécialisée
traitant de divers projets de conception et d'implantation
de systèmes de dossier patient informatisé ainsi que
la littérature sur l'émergence de réseaux interorganisationnels autour des nouvelles technologies de l'information
et de la communication. De plus, nous avons documenté
et analysé le concept du DPP de manière à rendre
explicite sa conception logique. À cet effet, nous avons
eu recours à différentes sources d'information de manière
à bien comprendre la logique de fonctionnement qui
est mise en action dans le cadre du projet vitrine DPP.
Ainsi, nous avons procédé à (1) une analyse documentaire
des documents administratifs produits, à ce jour, sur
le projet vitrine ; (2) l'observation non participante
à diverses réunions portant sur la conception et
le déploiement du DPP ; et (3) des entrevues semistructurées auprès d'une série d'acteurs-clés impliqués
dans le projet. Il s'agit d'un matériel riche qui, grâce
au croisement entre divers points de vue, observations
et perceptions, permet de bien préciser la logique
de conception qui est mise en œuvre dans le projet vitrine.
Il est par contre utile de faire la mise en garde suivante.
Ce matériel est valide au moment de la rédaction
de ce rapport. Le projet est en cours et en constante évolution. Il est donc normal que la conception du système
évolue et se modifie. Nous présentons donc ici, au meilleur
de nos connaissances, les faits tels qu'ils nous sont apparus.
D'ailleurs, nous espérons que ce rapport contribuera
à cette évolution et saura apporter un apport utile à
la conduite de ce projet novateur et complexe.
1. Description du projet
vitrine de Dossier Patient
Partageable (DPP)
Le projet vitrine de Dossier Patient Partageable
est un projet d'expérimentation qui vise à déployer
un dossier patient informatisé partageable au sein d'un
réseau d'établissements offrant des soins maternauxinfantiles de 1ere, 2e et 3e lignes. Ces établissements sont
un CHU pédiatrique, l'Hôpital Ste-Justine ; deux hôpitaux
de soins généraux spécialisés adultes et pédiatriques,
le centre hospitalier St-Eustache et Cité de la santé
qui intègre un centre hospitalier ambulatoire : le CHAL ;
ainsi que cinq cliniques médicales pédiatriques où
pratiquent des médecins associés aux deux hôpitaux
St-Eustache et Cité de la santé.
4
Comme le nom du projet vitrine l'indique, le cœur
de ce projet est le dossier patient partageable qui se présente
sous format électronique. La solution informatisée vise
à surmonter les contraintes usuelles associées au dossier
papier et à capturer le potentiel de données électroniques
en matière de gestion et de communication de l'information. Le caractère novateur du présent projet est
de proposer un dossier patient qui est développé sur
la base d'un concept récent en système d'information :
l'entrepôt de données (“Data warehouse”). Cette solution
informatique offre plusieurs avantages aux plans informationnel et communicationnel : le principal étant
de mettre à profit les technologies issues de l'internet
afin de s'affranchir de l'incompatibilité existant entre
des systèmes différents et des barrières spatiales usuelles
entre des services d'une même organisation ou des organisations différentes. Ces technologies permettent en
effet l'échange d'informations entre des plates-formes
technologiques différentes utilisant leurs logiciels propres.
De surcroît, grâce à des réseaux de télécommunications,
cet échange peut également être réalisé sans contraintes
de distance. Ainsi, dans un contexte de soins hospitaliers
et ambulatoires, il est possible à des équipes localisées
en des sites différents de consulter, en utilisant les systèmes
informationnels qui leur sont familiers, des données
cliniques d'un même patient saisies et entreposées sur
un support informatique commun:l'entrepôt de données
cliniques.
La solution technologique offrant cet entrepôt
de données est une solution développée par la compagnie
IBM : le système HDN (Health Data Network). Les composantes principales du système HDN sont :
• L'index patient maître : Il permet d'identifier
chaque personne du système par un numéro d'identification unique. Il contient un outil de recherche sophistiqué
qui permet l'utilisation de plusieurs paramètres pour
identifier ces personnes.
• Un dictionnaire d'entités médicales:Il constitue
une des pièces maîtresses de la solution HDN. Il agit comme
un filtre qui permet, entre autres, la normalisation des
appellations et des valeurs.
• Les données cliniques : Elles sont représentées
en fonction du rôle (profil) de l'utilisateur du système.
• La sécurité : Cette fonction permet d'appliquer
les règles de confidentialité et de protection de l'information.
• Les fonctions administratives : Ces fonctions
permettent, entre autres, le traitement des rencontres,
l'enregistrement des nouveaux patients, la vérification
de l'admissibilité, ...
• La gestion des références:Cette fonction permet
de diriger un patient vers un spécialiste en plus de lui
donner accès aux données cliniques pertinentes.
• La gestion des documents cliniques : Cette
fonction consiste à acheminer les nouveaux résultats
de tests de laboratoire ou radiologie au médecin traitant
sitôt qu'ils sont disponibles sur HDN.
Une seconde solution technologique est également
expérimentée dans le cadre du projet. La compagnie
Tekflow offre une solution d'archivage et d'emmagasinage
des images dynamiques. Elle servira à la gestion
de données de télémédecine et servira de fichier source
alimentant l'entrepôt de données HDN.
Dans le cadre du projet vitrine DPP, la solution
HDN vise à permettre la diffusion des données-patients
suivantes aux intervenants identifiés et certifiés :
• Données démographiques et de visites aux
établissements
• Rapports de laboratoires
• Rapports de radiologie, incluant les rapports
de télésanté fournis par la solution Tekflow
• Rapports transcrits (transcriptions), y compris
les rapports stockés dans Lotus Notes dont le sommaire
des dossiers
• Examens d'imagerie médicale stockées dans
la solution Tekflow ainsi que dans le système PACS
que l'Hôpital Ste-Justine déploie actuellement au sein
de son site.
Cette liste de données forme l'essentiel des données
qui feront l'objet de l'expérimentation du DPP.
Toutefois, les discussions se poursuivent encore pour
vérifier s'il est possible d'ajouter d'autres données.
Afin de permettre la diffusion des données qui
seront mises dans le système HDN, le projet vitrine doit
implanter une série de fonctions :
• Interfaces aux systèmes existants – radiologie
(RIS), laboratoires, admissions, transcriptions
• Sécurité – Authentification, définition des rôles
et profils de sécurité
• Administration – ouverture de dossiers, déplacement des données et fusion de données des patients
• Dictionnaire des données médicales
5
• Transfert des données
• Gestion du consentement
• Index maître (MPI) – Création d'un numéro
unique d'identification qui permet de faire la correspondance avec les identifiants à l'aide des services suivants :
• Services de résolution (PRS)
• Services de répertoire
• Algorithmes de résolution
1. Favoriser l'échange d'information entre les
différentes organisations prestataires de soins de santé
dans le but d'améliorer le continuum de soins
2. Améliorer la présentation des données sur
la santé des patients et les interventions, à l'échelle
de la communauté médicale
3. Diminuer la redondance en matière d'examens de laboratoire, en facilitant l'accès aux diagnostics et
ainsi diminuer les coûts
4. Diffuser l'information via des protocoles
de soins afin de promouvoir l'adoption de normes
• Détection des doublons
• Liens des identifiants d'autres systèmes aux
personnes identifiées dans HDN.
Au niveau de l'équipement informatique, un
environnement partagé sera mis en place entre
les établissements participants. Cet environnement
comprend un serveur de configuration, un serveur de test,
un serveur de formation, un serveur de production et
une unité de prise de copie.
Finalement, il est important de souligner que
le projet va au-delà de la mise en place d'une infrastructure technologique. L'expérimentation comprend
également une phase d'expérimentation en contexte
réel. L'objectif est d'amener des médecins à utiliser
le DPP dans le traitement de leurs patients. Les nombres
d'usagers visés sont les suivants : 50 utilisateurs
à l'Hôpital Ste-Justine, 15 utilisateurs à Cité de la santé,
5 utilisateurs à St-Eustache et 5 utilisateurs de chacune
des cliniques pédiatriques.
L'échéancier du projet s'étale sur une période
de 28 mois. Cinq phases sont prévues : Phase 1 – Analyse
des données (4 mois : Février - Mai 2001) ; Phase 2 –
Analyse fonctionnelle (4 mois : Juin - Septembre 2001) ;
Phase 3 – Configuration qui comprend l'élaboration
du dictionnaire d'entités médicales (MED) (9 mois :
Octobre 2001 - Juin 2002) ; Phase 4 – Test (6 mois : Juillet Décembre 2002) ; Phase 5 – Implantation (6 mois :
Janvier - Juin 2003).
Fort de cette solution technologique, le projet vitrine
s'est fixé une série d'objectifs qu'il compte atteindre
grâce aux nouveaux systèmes informationnels et
communicationnels qui seront déployés. Ces objectifs
sont au nombre de cinq :
5. Faciliter la prestation du niveau de soins
adéquat, au bon endroit et en temps opportun, avec
les informations exactes.
2. Modélisation du Projet
vitrine DPP
De manière à bien comprendre et pouvoir
analyser de quelles façons les solutions technologiques
proposées peuvent permettre d'atteindre les cinq objectifs
visés par le projet vitrine, nous avons modélisé l'ensemble
du projet afin de rendre explicite les mécanismes grâce
auxquels ce projet peut atteindre les objectifs qu'il s'est
fixés. Cette modélisation de l'expérimentation est
présentée à la Figure 1. On y retrouve les dimensions
importantes et les interrelations entre ces dimensions.
Dans ce chapitre, nous décrivons le modèle pour
permettre au lecteur d'en saisir la portée. Dans le chapitre
suivant, nous nous servirons de ce modèle pour
analyser les enjeux entourant le projet vitrine DPP
et examiner la plausibilité que les effets recherchés se
produisent. De cette manière, nous comptons identifier
les enjeux du projet tels qu'ils se présentent à ce
moment-ci et suggérer des voies de solutions permettant
d'assurer le succès de l'expérimentation en cours.
Le DPP, une innovation de l'information
et de la communication
Le concept central d'un dossier patient partageable
(DPP) est de réunir une information clinique utile et
de qualité et de pouvoir communiquer cette information
au personnel clinique, ici des médecins, afin qu'ils puissent
mieux traiter leurs patients. Un DPP conjugue donc
deux capacités fondamentales : une capacité informationnelle – la notion de dossier patient – et une capacité
communicationnelle – la notion de dossier partageable
qui peut donc communiquer à distance –. Comme nous
6
Figure 1 : Modélisation du projet vitrine : Dossier Patient Partageable
Solutions technologiques
Architecture informationnelle
du DPP
Attributs des données
Nature des données
Technologies Internet
LOGICIEL DDP
• Interfaces Systèmes
existants
• Dictionnaires données
• Sécurité
• Index maître
• Gestion consentement
• Entrepôt de données
LOGICIEL IMAGERIE
MÉDICALE
• Gestion images
télémédecine
RÉSEAU DE
TÉLÉCOMMUNICATIONS
• RTSS
Performance technique
du DPP
• ADT
• Résultats laboratoires
• Radiologie (RIS)
Pertinence
des données
Volume des données
Interface
Utilisateurs
• Nature & volume
de patients
• Nombre
d’établissements
Masse critique
(Nature des données:
variété & exhaustivité
+ volume de patients)
• Facilité d’accès
• Ergonomie
de l’interface
• Performance
temps réponse
Qualité
des données
(Validité, fiabilité,
accessible au
moment opportun)
Traitement des données
Amélioration présentation
des données cliniques
et des interventions
(Obj # 2)
Valeur informationnelle
Potentiel informationnel du DPP
© Sicotte et coll., 2002
Alignement Technologie – Organisation du travail clinique
Processus d’affaires
(Tâches cléricales)
• Intégration
dossier papier
et DPP
• Gestion du
consentement
Utilité
perçue
Alignement
Technologie –
Organisation
du travail
Processus
de production
(Tâches cliniques)
Adoption du DPP
Utilisation du DPP
Indices:
• Nombre de
patients
• % de clientèle
totale
• Fréquence
quotidienne
• Nature
données
consultées
Modifications des pratiques cliniques
Favoriser
l’échange
de données
entre les
organisations
Amélioration
du continuum
(intra & inter
organisationnel)
de soins
(Obj # 1)
Diminution
de la
redondance
des analyses
de laboratoires
(Obj # 3)
Faciliter la prestation
des soins
• Niveau adéquat
• Bon endroit
• Temps opportun
(Obj # 5)
Diffusion
protocoles
de soins
(Obj # 4)
Résultats intermédiaires
Résultats ultimes
© Sicotte et coll., 2002
7
l'avons déjà souligné, la solution technologique adoptée
dans le présent projet repose sur un concept récent
en systèmes d'information : l'entrepôt de données
(“Data warehouse”). Dans le secteur de la santé, cette
technologie représente une innovation à un double titre
: au niveau de l'informatisation du dossier traditionnel
et au niveau des communications à distance.
L'entrepôt de données représente une solution
technologique intéressante en matière de dossier
patient. Premièrement, le concept d'entrepôt de données
cliniques permet de pallier à trois des principaux
facteurs qui ont traditionnellement freiné la conception
du dossier patient informatisé:
1- l'existence de différents modèles d'architecture
des données (modèle pharmacie, modèle laboratoire,
modèle médical, modèle infirmier, ...). Ces modèles
différents rendent difficile la réalisation d'une architecture
conceptuelle unique que cherchent usuellement à réaliser
les équipes tentant de développer un dossier patient
informatisé ;
2- la présence de multiples utilisateurs aux besoins
informationnels variés et différents. Le dossier patient
informatisé doit répondre aux exigences du personnel
infirmier et médical évoluant sur les unités de soins
ainsi qu'aux besoins du personnel exerçant sur les unités
périphériques (pharmacie, laboratoires)
3- le caractère névralgique de l'information. Il s'agit
d'informations requises à l'intervention clinique. Les
professionnels ne peuvent accepter aucun compromis
sur la qualité (exhaustivité, précision, temps-réponse)
de cette information car la qualité de l'acte professionnel
en dépend et donc la santé des patients.
Deuxièmement, le concept d'entrepôt de données
cliniques allié à la disponibilité de réseaux de télécommunications sécurisés de type intranet offre une solution
intéressante aux problèmes de circulation et partage
d'informations au sein de réseaux d'organisations
de santé offrant des soins aux mêmes patients. L'écueil
principal à l'échange de ces informations entre différents
points de services est la dispersion de ces informations
sur des systèmes informatisés différents et localisés dans
des organisations distinctes. Une perçée technologique
récente permet maintenant de surmonter le problème
d'accès à ces données cliniques qui sont dispersées
parmi plusieurs systèmes d'information souvent situés
en des lieux physiques différents. Il s'agit de l'émergence des nouvelles technologies de communication
de type Internet. Ces technologies permettent en effet
de réaliser une intégration informationnelle de données
dispersées en reliant entre eux ces systèmes grâce à
un réseau de télécommunications sécurisées:un Intranet.
Le Québec s'est récemment doté d'une telle infrastructure
communicationnelle dédiée au système de santé: le RTSS
(Réseau de télécommunications de la santé et des services
sociaux). L'entrepôt de données, qui est conçu sur
la base de technologies internet, peut donc mettre à
profit ce réseau de télécommunications pour assurer
un partage de données cliniques et ainsi réaliser le double
effet recherché dans le projet DPP : un dossier patient
et un dossier partageable.
Un accès, grâce à un entrepôt de données cliniques,
à des données partagées, accessibles à distance, pourrait
donc permettre de palier à plusieurs des problèmes
rencontrés dans la transformation actuelle de notre
système de santé qui met l'accent sur les soins ambulatoires et les réseaux intégrés de soins. En fait, un DPP
représente un outil informationnel et communicationnel
qui, en principe, peut permettre d'améliorer la réalisation
des grands objectifs des systèmes de santé à savoir
l'accessibilité, la continuité et la globalité des soins.
Potentiel informationnel
Pour être accepté, un DPP doit contenir une
information clinique utile. En cette matière, il faut
reconnaître que le volume de données cliniques électroniques était jusqu'à récemment limité dans le secteur
de la santé. Mais la situation se modifie. L'informatisation
de données cliniques devient un phénomène de plus
en plus largement répandu. La quantité et la variété
des informations disponibles sur des supports électroniques
progressent rapidement dans tous les systèmes de santé
des pays développés. Il s'agit de penser aux informations
tels les résultats de laboratoire et la médication qui sont
largement disponibles sur fichiers électroniques. À l'hôpital,
les notes de congé et de consultation, dictées par les
médecins, sont régulièrement transcrites sur des logiciels
de traitement de textes. Donc ces données existent,
de fait, en format électronique. Un phénomène encore
plus récent est le déploiement rapide au Québec
de systèmes informatisés en matière d'imagerie médicale
numérique, les systèmes PACS (Pictures Archiving and
Communication System). Somme toute, ces quatre types
d'informations réunies–résultats de laboratoire, médication, notes médicales et imagerie médicale – représentent
une partie substantielle du dossier médical.
Dans un tel environnement technologique,
conjuguant une quantité appréciable de données
cliniques disponibles sous forme électronique et un
réseau de télécommunications sécurisé, la technologie
du DPP peut permettre de constituer un dossier médical
parcellaire qui deviendra progressivement de plus en plus
complet, laissant entrevoir, à terme, un dossier médical
virtuel complet.
8
L'adoption de systèmes informatisés
chez les médecins : une opération difficile
La difficulté d'utiliser des systèmes d'information
informatisés en milieu clinique demeure une embûche
importante. La saisie directe d'informations par des
professionnels demeure difficile. Les solutions informatisées existantes reposent souvent sur la collaboration
d'un personnel clérical qui est responsable d'une partie
importante de la manipulation des données. Il faut
comprendre que la pénétration de ces technologies
dans l'univers de la pratique médicale en est encore
à ses premiers balbutiements. Cet état de fait n'est pas
un problème technologique à proprement parler,
ni un réel problème de résistance au changement.
La technologie disponible à l'heure actuelle possède
des fonctionnalités qui offrent des solutions intéressantes.
Mais l'industrie des soins de santé n'a pas encore maîtrisé
la formule permettant de choisir et d'adapter les bonnes
technologies à l'organisation du travail professionnel
pour obtenir une solution satisfaisante au contexte
de la production de soins de santé. Cet alignement
entre technologie et organisation du travail demeure
essentiel.
Par conséquent, le processus d'adoption du DPP
par les médecins représente un point charnière dans
la capacité de réaliser les objectifs visés par le projet.
Nous touchons ici des facteurs névralgiques au
déploiement de technologies de l'information au sein
de l'univers clinique. Ces facteurs sont : l'utilité perçue
et l'alignement entre les processus de production des soins
et les nouveaux processus d'affaires introduits avec
la nouvelle technologie.
D'abord les médecins doivent être « intéressés »
par le DPP. L'utilité perçue du DPP par les utilisateurs
est un facteur névralgique, une condition initiale
absolument nécessaire. La disponibilité et la qualité
des données cliniques sont centrales à l'exercice
de la médecine. Tout système d'information utilisé à
ce niveau doit offrir des informations pertinentes et
de qualité. La qualité de l'information détermine en large
partie la qualité de la décision clinique. L'utilité perçue
sera jaugée en fonction de ces caractéristiques. À ce niveau,
nous parlons d'alignement entre les processus de production des soins et les processus d'affaires que représente
l'ensemble des mécanismes de traitement et de communication de l'information clinique.
Également, le nouveau système doit offrir une plus
value au niveau de l'accessibilité à des informations
cliniques. Il ne faut pas perdre de vue que le DPP doit
s'insérer en complément d'un système existant :
le dossier papier. Le DPP et le dossier papier représentent
deux systèmes d'information contenant des informations
similaires. La complémentarité – ou l'alignement – entre
les deux systèmes doit être bien conçue. L'utilisation
du nouveau système doit donc être bien intégrée au sein
d'un ensemble plus large qui est l'ensemble des processus
qu'un médecin utilise pour obtenir les informations
dont il a besoin pour soutenir ses décisions médicales.
C'est dans la mesure où ces éléments sont bien agencés
que le DPP sera accepté et utilisé. Ceci implique également,
qu'au plan technique, le DPP doit démontrer une performance technique acceptable lorsque l'usager utilise
le système pour obtenir les informations recherchées.
Nous nous référons ici principalement à la facilité
d'accès, à l'ergonomie de l'interface (convivialité du
système) et au temps réponse.
L'amélioration du continuum de soins
Plusieurs raisons militent en faveur de l'adoption
de nouvelles technologies de l'information et de la
communication (NTIC) dans le domaine de la santé.
Premièrement, le volume d'informations cliniques
requises au traitement des patients ne cesse de croître
alors que les épisodes de soins sont de plus en plus
fragmentés. Ainsi, par exemple, les épisodes de chirurgie
qui se déroulaient traditionnellement en un seul séjour
hospitalier prolongé sont maintenant découpés en sousépisodes prenant place à des moments et des endroits
différents : investigation diagnostique pré-chirurgicale
en externe, court séjour opératoire à l'hôpital, suivi en
clinique externe et à domicile. Ces nouvelles pratiques
de soins nécessitent une gestion intensive et coûteuse
de l'information clinique contenue au dossier médical.
Dans un contexte de systèmes d'information disponibles
en format papier, cette gestion plus intensive de l'information a accru le fardeau des tâches cléricales assumées
par les professionnels de la santé.
En principe, le DPP peut permettre la transformation de processus de soins par l'introduction de divers
mécanismes novateurs dont les principaux sont :
• automatisation des transferts de données cliniques
(laboratoires, radiologie, pharmacie, sommaire de cas...)
vers le dossier patient ; donc circulation plus rapide
de l'information et minimisation des risques de mauvais
classement et d'erreurs de retranscription grâce au
remplacement des mécanismes cléricaux (processus
d'affaires) usuels de communication interprofessionnels,
interdépartementaux, interhospitaliers et extra-muros.
(Automatisation : Diminution du travail clérical dans
la saisie, transformation, communication et classement
de l'information).
• automatisation de la mise en forme et de
la transformation des données selon les besoins informationnels spécifiques du personnel clinique, donc
amélioration de la décision clinique.
9
• automatisation des transferts de données entre
les divers professionnels de l'équipe de soins (demande
de consultations des médecins traitants auprès des
médecins consultants ; mise à jour des plans de soins
infirmiers suite à des changements de la prescription
médicale), donc une meilleure coordination du travail
clinique.
identifier quatre types d'enjeux qu'il est important
d'appréhender de manière à mener une gestion de projet
qui permettra d'atteindre les objectifs visés par le projet
vitrine DPP. Ces quatre grands enjeux sont :
• Les enjeux technologiques
• Les enjeux cliniques (processus de production)
• délocalisation du personnel clinique grâce au
potentiel de consultation à distance des données contenues au dossier du patient. (Délocalisation:élimination
des barrières géographiques).
• accès à une information plus riche grâce à
la capacité de réunir en une seule base de données
les informations qui auront été recueillies dans d'autres
établissements de santé. L'entrepôt de données cliniques
offre effectivement l'opportunité de consulter les données
concernant un même patient qui auront été colligées
par d'autres professionnels oeuvrant dans d'autres
établissements.
• coordination automatisée et instantanée des soins:
les données numérisées peuvent être électroniquement
transformées et mises en formes diverses selon les besoins
des professionnels devant assurer les soins à un même
patient.
Une meilleure prestation des soins
Le DPP permet donc, en principe, de diminuer
le fardeau clérical de l'équipe de soins tout en offrant
une meilleure organisation et coordination du travail
professionnel. Cela est rendu possible grâce à l'automatisation des liens communicationnels entre les professionnels au sein des unités de soins, avec les services
médico-techniques de l'hôpital, et entre des hôpitaux
différents ou tout autre établissement de santé. Cette
innovation peut accélérer les processus de soins et
assurer la dispensation de soins plus complets grâce
à une information plus riche. De même, les objectifs
intermédiaires, tels que la diminution des analyses
de laboratoires et la diffusion de protocoles de soins,
ainsi que l'objectif ultime du projet vitrine sont réalisables
dans la mesure où les mécanismes situés en amont
seront opérationnels et efficaces.
• Les enjeux administratifs (processus d'affaires)
• Les enjeux légaux (sécurité, confidentialité,
gestion du consentement)
Dans ce chapitre, nous allons présenter ces enjeux
à tour de rôle et proposer des avenues de solution. Il est
important de retenir que ces enjeux demeurent liés les uns
aux autres. Toute solution visant à résoudre un enjeu
en particulier doit également être analysée dans un
contexte plus large prenant en compte l'impact de celle-ci
sur les autres dimensions du modèle. Cette remarque
rejoint la notion d'alignement qui demeure une dimension
fondamentale à la modélisation que nous avons
présentée dans le chapitre précédent.
Les enjeux technologiques
Performance technique du DPP
Les enjeux technologiques sont bien sûr au cœur
du projet vitrine. Un dossier patient partageable, reposant
sur une technologie d'entrepôt de données, vise essentiellement à capturer les bénéfices offerts par cette solution
technologique de manière à améliorer la circulation
de l'information clinique nécessaire aux traitements
de patients.
3. Résultats de l'analyse
de la logique du projet
vitrine DPP
Comme nous l'avons souligné dans le chapitre
précédent, la conjugaison de la technologie de l'entrepôt
de données (les systèmes HDN et Tekflow) alliée à une
technologie de réseaux de télécommunications (le RTSS)
offre un potentiel intéressant et très bien adapté aux
objectifs poursuivis dans le présent projet. Le système
HDN est également conçu de manière à pouvoir supporter les divers types de données cliniques visées
par le présent projet. De même, le RTSS qui doit assurer
le partage d'informations entre les différents établissements partenaires est un système fonctionnel et éprouvé
dans la mesure où il est régulièrement utilisé dans
le système de santé québécois pour réaliser l'échange
d'informations.
Sur la base de la modélisation du projet vitrine,
élaborée dans le chapitre précédent, nous pouvons
Quant au système Tekflow, il s'agit d'un nouveau
système qui en est à sa première application dans
10
le domaine de la santé. Cette solution technologique
est à un stade moins avancé de développement que
les autres solutions technologiques du projet. Elle correspond, de fait, à une phase de recherche et développement.
Par ailleurs, ce système concerne un secteur bien délimité,
somme toute assez autonome, du projet. De cette façon,
il sera possible de bien distinguer les objectifs atteints
par cette composante spécifique du projet.
En cette matière, nous pouvons donc conclure
que le projet vitrine s'appuie sur des solutions technologiques adaptées et prometteuses.
Potentiel informationnel du DPP
L'infrastructure technologique ne représente
cependant qu'une partie de la solution. La nature
de l'information disponible grâce au DPP est une seconde
composante essentielle. Le défi est ici de proposer
une information clinique valable et attrayante pour
les médecins. En cette matière, le DPP met l'accent,
entre autres, sur les résultats d'analyses de laboratoires.
En soi, il s'agit d'une excellente décision. En effet, il est
clair que les médecins valorisent et tiennent à obtenir
rapidement cette information. À ce seul titre, le DPP
offre donc une valeur ajoutée intéressante.
À ce niveau, le défi est d'accéder aux informations
électroniques disponibles dans les systèmes informatisés
existants afin de les transférer dans l'entrepôt de données HDN. Cette stratégie est logique dans la mesure
où les informations qu'il est le plus facile de réunir
au sein d'un entrepôt de données sont, bien sûr, les données
électroniques déjà disponibles. Mais, une embûche
demeure. Les systèmes existants ont été développés
selon divers standards alors que le système HDN
utilise le standard HL7:un standard relativement récent,
répandu dans le domaine de la santé et qui permet
l'échange d'informations entre des systèmes différents.
Ainsi, malgré la présence de plusieurs systèmes informatisés, il faut prévoir des coûts supplémentaires pour
réaliser la conception d'interfaces permettant le transfert
des données électroniques existantes vers le système
HDN. Ce coût est d'autant plus important qu'il existe
un nombre significatif de systèmes différents qui ont été
développés au cours des années. Par contre, dès qu'une
interface vers le standard HL7 est conçue pour un type
de systèmes, cette interface devrait normalement être
réutilisable pour tous les établissements qui ont le même
type de systèmes.
L'utilisation des données électroniques déjà
disponibles représente un atout important. Non seulement
cette stratégie permet-elle d'accéder à des données déjà
disponibles, mais elle assure également des données
de qualité. En effet, les données électroniques existantes
sont produites grâce à des processus d'affaires et des
systèmes d'information éprouvés ; ce qui garantit
normalement une source d'informations valide et fiable.
Les médecins ont développé au cours des années une
connaissance et une confiance vis-à-vis ces informations ;
ce qui représente un élément pouvant faciliter l'acceptation
et l'adoption du DPP.
Comme nous l'avons vu dans le chapitre décrivant
le projet vitrine, le DPP contiendra d'autres informations
qui représentent, potentiellement, d'autres éléments susceptibles d'intéresser les médecins. En cette matière, toute
la difficulté est de choisir les bonnes informations,
celles qui sauront intéresser les médecins participants.
La réponse à cette question passe par une identification
des utilisateurs et de leurs besoins informationnels.
Nous revenons sur cet aspect dans l'enjeu suivant :
les enjeux cliniques. Mais auparavant, il est important
de traiter d'une autre dimension importante de la solution
technologique : l'interface utilisateur.
L'interface utilisateur
Cet enjeu demeure fondamental. À ce moment-ci
du projet, il est prématuré d'analyser la performance
de l'interface ; une activité qui deviendra réalisable
lorsque les utilisateurs commenceront à utiliser le système.
Nous nous contenterons de rappeler ici les enjeux principaux. Les médecins sont des utilisateurs exigeants
quant au volume et à la façon dont l'information leur
est présentée. De plus, ils sont très pressés par le temps.
Au niveau de l'interface, la facilité d'accès, la convivialité
générale du système et la rapidité du temps réponse
demeurent des facteurs cruciaux. En cette matière,
le système HDN offre un potentiel fort intéressant au
plan de la personnalisation des écrans. Cet atout doit
être exploité au maximum. À cet effet, nous recommandons que des simulations en laboratoire (in vitro)
avec des données réelles soient entreprises avec
les médecins. Les résultats de ces simulations visent
à personnaliser l'interface aux besoins des utilisateurs.
Ces simulations doivent être réalisées avec des données
réelles et avec les utilisateurs qui utiliseront effectivement
le système lors de l'expérimentation prévue en contexte
réel. Nous recommandons que ces simulations soient
entreprises le plus tôt possible de manière à ce que
les résultats influencent les décisions prises quant à
l'investissement des budgets prévus pour la personnalisation du système aux besoins et exigences des utilisateurs.
Les enjeux cliniques
Jusqu'à maintenant l'effort principal de l'équipe
du projet vitrine a été investi au niveau des solutions
technologiques. Tout en reconnaissant l'importance
11
de cet enjeu et la qualité du travail accompli en cette
matière, nous recommandons que soit entrepris, dès
maintenant, un effort important au niveau d'une autre
série d'enjeux que nous regroupons sous la rubrique
des enjeux cliniques. La portée de cette recommandation
est, à notre avis, cruciale pour le succès du projet.
L'organisation du travail médical est extrêmement
complexe et l'introduction de technologies de l'information
dans cet univers réclame une solution technique qui soit
bien adaptée aux réalités cliniques et organisationnelles.
Sur ce plan, deux éléments sont centraux : l'utilité perçue
du DPP par les médecins et la capacité de cette nouvelle
technologie, le DPP, à bien s'insérer dans les processus
de production des soins et les processus existants
de gestion de l'information, notamment le dossier médical
papier. L'alignement entre technologie et organisation
du travail demeure un facteur central et névralgique
dans le succès ou l'échec de ce type de projet.
Plusieurs de nos recommandations portent sur cet
aspect du projet. Nous les avons regroupées sous trois
thèmes :
• Le concept de DPP (Dossier Patient Partageable)
• L'utilité perçue des informations cliniques
La logique à la base du Dossier Patient informatisé
(DPI) est la même que celle qui s'applique à un réseau
d'organisations de santé. Un DPI peut améliorer la circulation de l'information, par exemple, à l'intérieur
d'un hôpital entre l'urgence, les unités d'hospitalisation
et les cliniques externes. Le DPP-DPI peut ainsi permettre
d'améliorer l'organisation et la coordination des soins
à l'interne.
Cette stratégie augmente la valeur utilitaire
du DPP en permettant d'en augmenter l'utilisation
au sein même de l'hôpital. Par exemple, une application
au niveau des cliniques externes de suivi post-opératoire
laisse entrevoir des gains intéressants dans un contexte
de DPP fournissant des résultats d'analyses de laboratoire
et des rapports transcrits de congé d'hospitalisation.
De surcroît, grâce au caractère électronique des données
cliniques utilisées à des fins internes, ces données deviennent partageables instantanément et à distance, à
l'extérieur des murs de l'hôpital, avec les médecins
qui traiteront les mêmes patients créant ainsi l'effet
d'un réseau interétablissement. Nous recommandons
même que soit envisagée la possibilité de prioriser
cet usage interne. De cette façon, et compte tenu du court
laps de temps consacré à l'intérieur du projet vitrine
à l'expérimentation en contexte réel, on augmente
l'attrait du système HDN pour les médecins et son
utilisation éventuelle.
• La masse critique des informations cliniques.
Le DPP : un concept à raffiner et élargir
Cette recommandation implique en fait que la notion
de « continuum de soins », qui est un des objectifs
poursuivis par le projet vitrine, soit élargie. Le DPP met
l'accent sur le continuum de soins visant à améliorer
la continuité des soins entre des organisations différentes.
Mais il est également possible de concevoir le continuum
de soins à l'intérieur même de l'hôpital. Ainsi, un même
patient est susceptible d'être soigné à l'urgence, sur
des unités de soins, en clinique externe. Le partage d'informations doit se faire entre ces unités. Le mérite
de concevoir le projet vitrine en y ajoutant cette dimension
est d'augmenter l'utilité du DPP pour les médecins
dans la mesure où un plus grand nombre de patients
sont concernés.
Comme nous le soulignons dans notre modélisation
du projet vitrine, les attributs des données – à savoir
les dimensions de « Pertinence des données », de « Masse
critique » et de « Qualité des données » – sont des facteurs
importants qui vont déterminer l'utilité perçue du DPP
par les médecins. Selon le concept de Dossier Patient
Partageable (DPP) tel qu'il est présenté dans le projet
vitrine, l'accent est mis sur le partage de données cliniques
entre des organisations différentes. Tout en reconnaissant
la pertinence de ce concept, nous proposons de l'élargir
de manière à présenter le DPP également comme un
Dossier Patient Informatisé (DPI) qui peut être utilisé
comme un dossier patient interne.
Utilité perçue : le médecin avant tout
Malgré le fait que le projet Arc-en-ciel mette l'accent
sur la notion de partage d'informations avec d'autres
organisations, le DPP demeure fondamentalement
un dossier patient. Nous proposons d'exploiter cette
situation en présentant le système HDN comme un Dossier
Patient informatisé interne aux médecins qui seront
les utilisateurs visés par cette expérimentation. Cette
stratégie a le mérite d'hausser l'utilité du DPP et donc,
son utilisation. C'est ainsi que l'utilisation du DPP
se glissera dans les routines de pratique des médecins.
Nous recommandons d'identifier le plus rapidement
possible les médecins futurs utilisateurs du DPP.
L'avantage de ce choix précoce est de pouvoir analyser
plus précisément leurs besoins en informations cliniques
et d'ainsi pouvoir augmenter le potentiel informationnel
du DPP en acceptant de modifier certains processus
d'affaires ou d'investir dans la production de certaines
informations qui présenteraient un excellent rapport
prix-valeur ajoutée du DPP. Cette décision permettrait
également d'éclairer des décisions qui doivent être prises
12
actuellement sur l'adaptation de l'interface HDN aux
spécificités du présent projet. Ainsi, malgré l'intérêt
de la stratégie qui vise à capturer le maximum des
données électroniques disponibles dans les divers
systèmes existants des organisations participantes,
il est important de compléter cette stratégie en procédant à une réflexion supplémentaire prenant pour base
le point de vue des médecins futurs utilisateurs du DPP :
les utilisateurs véritables, ceux qui expérimenteront
le système dans la phase finale de l'expérimentation.
Une fois ces utilisateurs identifiés, nous recommandons de procéder à une analyse fine de leurs besoins
en information. Jusqu'à maintenant, la personnalisation
du système HDN est principalement effectuée en
référence à un médecin indéterminé. Nous proposons
de mettre fin à cette imprécision et de définir, le plus
rapidement possible, les utilisateurs. Nous reconnaissons
qu'un comité des utilisateurs a été mis sur pied dès
les tous débuts du projet. Ce comité offre une contribution
significative à une meilleure adaptation de la solution
HDN au contexte d'expérimentation. Mais, malgré
l'utilité d'un comité d'usagers, il ne peut égaler la consultation des réels utilisateurs qui seront ceux qui
expérimenteront la solution HDN lors de la phase
d'expérimentation en contexte réel.
La question subsidiaire à cette recommandation
d'identifier les utilisateurs est de déterminer la base sur
laquelle faire le choix de ces utilisateurs. Sans pouvoir
en privilégier une, nous avons plusieurs pistes de réflexion
à offrir. La meilleure solution sera possiblement celle
qui permet de se placer dans un contexte où, compte
tenu des informations comprises dans le DPP, l'expérimentation du DPP pourra être menée auprès des
médecins qui y verront le plus grand avantage. Ce sont
les médecins chez lesquels l'utilité perçue risque d'être
maximale. Plusieurs logiques de choix peuvent être
explorées pour répondre à la question centrale suivante :
Dans quel contexte de pratique clinique, le DPP peut-il
être le plus utile ?
• Pour les médecins spécialistes d'un centre
hospitalier universitaire (Hôpital Ste-Justine)?
• Pour les pédiatres exerçant dans un hôpital
de soins aigus (Centre hospitalier St-Eustache ou
Cité de la santé) ?
• Pour les pédiatres oeuvrant dans une clinique
médicale ?
• Pour certaines spécialités médicales ?
• Selon la nature de la clientèle (patients chroniques
ou autres clientèles) ?
• Selon la nature des soins (hospitalisation,
cliniques externes, urgence) ?
• Selon les pratiques existantes de référence
des patients entre les médecins exerçant dans les
établissements participants ?
• Selon des filières de soins existant entre les
partenaires participant au projet vitrine (ex., d'épisodes
inter établissement : pré-opératoire en région / opératoire
au CHU / suivi post-opératoire en région) ?
Ces questions, de nature indicative, visent à donner
des exemples du type de questionnement qu'il est
important d'entreprendre à ce stade-ci du projet. Ainsi,
par exemple, les trois premières questions soulèvent
des perspectives intéressantes. Chez une majorité
des établissements participant au projet vitrine, il est
possible de rejoindre tous les médecins susceptibles
d'être intéressés à un DPP dédié à une clientèle pédiatrique ; et ce, avec un investissement financier, matériel
et humain, somme toute, restreint. En effet, le projet
vitrine se centre sur les départements de pédiatrie
des deux hôpitaux de soins aigus et sur un nombre
réduit de cliniques pédiatriques qui sont de plus petites
organisations comptant un nombre limité de médecins.
Cette situation est un atout pour le projet dans la mesure
où la conception du DPP et son implantation pourraient
être ciblés vers un petit groupe d'utilisateurs qui devraient
présenter des besoins en information relativement plus
homogènes que l'ensemble des spécialités médicales
exerçant au sein d'un centre universitaire. Cette perspective, en centrant l'attention sur les partenaires autres
que le CHU, représente une stratégie qui offre des
avantages. Elle renforce le partenariat entre les établissements partenaires et elle représente une meilleure
maîtrise sur le contrôle du projet dans un contexte
de courte période d'expérimentation dans la mesure où
un petit nombre de médecins utilisateurs est visé.
Afin d'explorer cette piste, nous suggérons
qu'une analyse des pratiques des pédiatres exerçant
dans les deux hôpitaux de soins aigus et les cliniques
médicales soit entreprise. Cette analyse viserait à identifier:
quelles sont les clientèles traitées par ces médecins ?
Quelles sont les clientèles qui sont traitées conjointement
avec l'Hôpital Ste-Justine ? Quels sont leurs besoins en
informations ? Et finalement, comment le contenu
informationnel du DPP pourrait-il les aider? Une analyse,
reposant sur des entrevues individuelles, est possible
tout en nécessitant un investissement minime. Cette
stratégie vise à pouvoir formuler une stratégie d'implantation adaptée au contexte clinique et offrant
un DPP mieux conçu en fonction des besoins des utilisateurs ciblés.
13
La même analyse pourrait poursuivre un objectif
secondaire permettant d'identifier des « champions » :
des médecins qui sont particulièrement intéressés
par le concept d'un DPP et qui peuvent devenir des
moteurs soutenant l'adoption du DPP dans leur milieu.
Il est reconnu par la littérature spécialisée en systèmes
d'information que la présence de « champions » fait une
nette différence dans le succès d'implantation de ces
systèmes. Ces champions participent possiblement déjà
au comité des utilisateurs, mais le fait de les singulariser
et de concevoir le DPP sur la base de leurs besoins
personnels ouvre la perspective d'une solution mieux
adaptée.
Masse critique
La masse critique est un facteur important
qui déterminera en large partie le caractère utilitaire
du DPP. La masse critique est liée à deux phénomènes :
la nature de l'information disponible pour chaque
patient et le volume de patients qui seront disponibles
dans le système HDN. Les médecins qui utiliseront
le système HDN doivent y trouver une masse critique
significative : les patients doivent représenter un sousensemble substantiel de leur clientèle (case-load). Si
le nombre de patients pour lesquels le système contient
de l'information utile demeure trop faible, les médecins
se désintéresseront rapidement du système. En cette
matière, il ne faut pas perdre de vue que (1) le volume
total de patients qui nécessitent des soins dans plus
d'un établissement demeure faible sur une année (voir
annexe 1) ; (2) le nombre d'établissements (n = 7)
du réseau est réduit ; (3) la durée de l'expérimentation
est limitée à 6 mois réduisant d'autant le nombre
de patients susceptibles de nécessiter des soins à plus
d'un point de services. Somme toute, la probabilité
qu'un médecin en particulier trouve de l'information
« partagée » – qui vient d'un autre point de services – est
faible, surtout au tout début de l'expérimentation alors
que l'entrepôt risque de contenir peu d'informations.
Afin de pallier à cette situation, nous recommandons de créer le plus tôt possible un réservoir de données
cliniques le plus large possible. Ce réservoir permettra
dès les tous débuts de l'expérimentation d'avoir une
quantité d'information clinique sur un nombre élevé
de patients de manière à intéresser rapidement
les médecins et, du même coup, les inciter à consulter
le système. Une centrale électrique hydraulique ne peut
être mise en opération que dans la mesure où le réservoir
d'eau alimentant le barrage a atteint un niveau
suffisant. Il en est de même pour le DPP et son entrepôt
de données. Sans cette mesure de création d'un réservoir,
le projet marquera un faux départ. En effet, on demandera
aux médecins d'utiliser le système au même moment
où les données commenceront à être accumulées dans
l'entrepôt de données. La disponibilité des données
sera inévitablement faible. L'utilisation risque alors
d'en souffrir, émoussant l'intérêt et les habiletés
des médecins qui perdront le peu d'habiletés acquises
lors des formations initiales qu'il faudra reprendre dans
plusieurs cas.
Enjeu sensible : la qualité
de la décision médicale
Le DPP demeure, à moyen terme, une solution
incomplète dans la mesure où toutes les informations
disponibles dans un dossier papier n'y sont pas
disponibles. Cette solution a l'avantage d'être une solution
pragmatique qui contourne la difficile question d'établir
quel devrait être le contenu d'un résumé de dossier
partageable. Elle évite également de devoir concevoir
de toutes pièces des processus d'affaires particuliers –
qui souvent imposent un poids supplémentaire aux
organisations et aux cliniciens – pour fournir de l'information au dossier partageable.
La mise en garde que nous voulons faire à cet
effet concerne le défi de fournir, dans un tel contexte,
une solution informationnelle incomplète mais sécuritaire. Il est important que les médecins aient confiance
aux données transmises par le système informatisé
et qu'ils ne soient pas induits en erreur par le système.
À ce niveau, le DPP devra clairement faire la distinction,
au sujet des informations non disponibles, entre celles
qui sont non disponibles parce qu'elles ne sont supportées
par le système HDN et celles qui sont absentes du fait
qu'elles n'ont pas été prescrites par un médecin. Le fait
de ne pas voir apparaître un test suite à une recherche
peut être un élément d'information pour un clinicien.
Dans ce dernier cas, l'absence de tests peut avoir
une signification clinique. Par conséquent, au-delà
de la validité des données, il faut prévoir des mécanismes
clairs pour rendre explicite ce qui est non disponible
dans le système.
Nous terminons cette section en rappelant
que le projet vitrine comporte un double objectif. D'une
part, il sert de banc d'essai technique pour démontrer
la faisabilité technique du concept. D'autre part, le projet
vise à réaliser une expérimentation en contexte réel où
des médecins vont utiliser le DPP dans leur pratique.
L'atteinte du second objectif repose sur l'utilité que les
médecins accorderont au nouveau système. Il est donc
important en cette matière de prendre le maximum
de mesures diminuant l'écart entre ce que peut offrir
le DPP et ce que recherchent les médecins visés par
le déploiement de la technologie. Cet élément ne peut
qu'avoir un effet positif sur la qualité de l'arrimage
entre la technologie et la clinique.
14
Les enjeux administratifs
Les enjeux légaux
Le projet vitrine demeure un projet fondamentalement complexe. Le DPP est un nouveau système
d'information qui se place au cœur de la pratique clinique;
et, de surcroît, il implique la coordination entre plusieurs
organisations peu habituées à fonctionner ensemble.
Le projet doit être réalisé dans un court laps de temps
et il comporte une envergure nationale. À titre de projet
vitrine, la conception du DPP et la question de la confidentialité des données cliniques ainsi que de la gestion
du consentement sont des enjeux que l'on désire
solutionner à une échelle nationale. Il est clair que cette
complexité représente une difficulté supplémentaire
sur la conduite du projet et que cet environnement
perdurera pendant toute sa durée.
Comme nous l'avons souligné précédemment,
un DPP demeure un outil qui doit être bien adapté
à l'organisation du travail clinique si on veut que
les médecins l'adoptent. Par conséquent, les nouveaux
processus introduits par le DPP en matière de sécurité,
de confidentialité et de gestion du consentement
doivent également bien conçus en fonction des contraintes et des façons de faire usuelles. Il ne faut pas
perdre de vue que cet élément, à lui seul, dans
la mesure où il est mal adapté à la pratique clinique,
peut devenir une contrainte suffisante empêchant une
utilisation pleine et entière du système.
À un niveau plus microscopique, d'autres enjeux
administratifs sont tout aussi importants pour le succès
du projet vitrine. Le DPP est un nouveau système
d'information et de communication qui doit s'insérer
harmonieusement dans les processus actuels de saisie,
de gestion et de communication de l'information clinique
qui ont été construits autour du dossier médical papier.
Un des points forts du projet en cette matière est
le fait que les médecins n'auront pas à faire eux-mêmes
la saisie de données. Il est reconnu que cet élément
représente un des facteurs majeurs expliquant la faible
utilisation de plusieurs systèmes informatisés similaires
au DPP. Cette stratégie a le mérite de s'appuyer sur
les processus d'affaires déjà en place, développés pour
le dossier papier. Ainsi, le projet vitrine propose aux
médecins utilisateurs un changement organisationnel
moins drastique qui devrait faciliter l'adoption du
nouveau système de DPP dans cette phase initiale
d'expérimentation.
Nous recommandons qu'une analyse serrée soit
menée de manière à poursuivre sur cette voie et de s'assurer que les nouveaux processus d'affaires exigés
par le DPP soient bien harmonisés avec les processus
associés au dossier papier et bien adaptés au rôle essentiel
d'un dossier patient : la prise de décision clinique. Cette
analyse doit être spécifiquement menée pour les
médecins utilisateurs qui expérimenteront le système
HDN en contexte d'usage réel. Il ne faut pas perdre
de vue que l'enjeu le plus important au plan administratif
relève de l'incontournable complémentarité du système
HDN avec le dossier papier. Dans la mesure où il est
demandé aux médecins de consulter un poste informatique pour accéder à de l'information clinique, une attention
particulière doit être portée à la conception des processus
d'accès à l'information et à la complémentarité entre
le dossier papier et le dossier informatisé.
À ce niveau, nous recommandons de considérer
les processus de sécurité, de confidentialité et de gestion
du consentement comme faisant partie à part entière
de l'expérimentation. Ces mécanismes doivent donc
être flexibles et pouvoir être modifiés en cours
d'expérimentation. De cette façon, il sera possible
de comprendre et d'analyser comment ces règles
peuvent être appliquées de manière à améliorer la sécurité et la confidentialité.
En cette matière, plutôt que de décréter a priori
des façons de faire construites uniquement sur la base
de nouvelles fonctionnalités offertes par les systèmes
informatisés, nous recommandons de s'inspirer a priori
des mesures existantes qui ont été développées autour
du dossier papier et d'analyser comment ces mesures
pourraient être améliorées.
Dans cette ligne de pensée, un exemple intéressant est le débat autour de la question d'impression aux
points de services périphériques des données disponibles
dans le DPP. Une option serait que seule la consultation
à l'écran pourrait être tolérée. Sans dénier le niveau
élevé au plan de la sécurité d'une telle mesure, il faut
souligner que cette solution s'éloigne fortement du contexte
actuel au sein duquel sont habitués d'évoluer les médecins.
Aujourd'hui, les résultats de laboratoires destinés
aux cliniques médicales peuvent être transmis par télécopieur ; puis, placés dans un dossier papier. Il ne faut
pas perdre de vue que dès qu'un patient consulte
un médecin – même en clinique médicale – celui-ci
devient médecin traitant. À ce titre, le médecin est tenu
au secret et au maintien de la confidentialité des
dossiers qu'il possède sur ces patients. Par conséquent,
recevoir des résultats de laboratoires par télécopieur ou
électroniquement par DPP, les imprimer pour les placer
dans un dossier papier apparaissent être des situations
assez semblables du point de vue des médecins.
De surcroît, il ne faut pas perdre de vue, qu'une décision
de ne tolérer la lecture d'informations cliniques que sur
un PC peut poser une contrainte importante pour
15
les médecins pratiquant en clinique. Elle implique
pratiquement l'installation d'un poste informatique
dans le bureau de consultation. Or, l'usage de ce type
en présence de patients n'est pas une opération simple.
Un tel dispositif augmente sérieusement le risque
de faible utilisation du DPP.
En terminant, nous aimerions souligner un point
fort des procédures envisagées dans le cadre du projet
vitrine en matière de la gestion du consentement du
patient quant au partage d'informations entre les divers
partenaires participant au projet vitrine. Les procédures de gestion du consentement envisagées reposent
sur un consentement initial et un consentement partagé
entre les organisations partenaires. De plus, ces mécanismes seront mis en pratique par le personnel usuel
qui fait l'accueil des patients. Ainsi, le fardeau clérical
demandé aux médecins en matière de gestion du
consentement sera minime, sinon nul.
16
Références
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Université de Montréal.
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Annexe 1
Analyse des écarts entre
consommation des soins et
lieu de résidence
Visites hospitalières de patients pédiatriques
vivant à Laval, 1999
Hospitalisation
Hôpital St-Eustache
En 1999, 10 % des visites (urgence, hospitalisation et ambulatoire) faites au CHU Ste-Justine l'ont été
par des patients qui habitaient Laval et 2,5 % par des
patients habitant la région de St-Eustache. Donc un
maximum de 12,5 % des patients desservis au CHU SteJustine sont susceptibles d'être concernés par l'expérimentation d'un DPP.
Le tableau suivant présente les visites faites au
CHU Ste-Justine selon le lieu de résidence des patients
selon trois types de visites : hospitalisation, cliniques
externes et urgence. En 1999, 11.4 % des patients vus à
l'urgence de l'Hôpital Ste-Justine sont domiciliés à
Laval et à St-Eustache ; 13.2 % des visites en cliniques
externes sont également de ces deux municipalités
ainsi que 13.7 % au niveau de l'hospitalisation.
Visites à l'Hôpital Ste-Justine selon le lieu
de résidence, 1999
Lieu de résidence
du patient
St. Eustache
Laval
Total de tous
les patients *
Hospitalisation
373
Urgence
1 009
Cliniques
externes
79
Urgence
Cliniques
externes
820
611
Cité de la santé
1 518
5 551
5 609
Hôpital Ste-Justine
1 367
5 677
9 950
Total de tous
les patients *
4 019
18 595
31 888
(source : Données de l'étude RME, Tableau 2.3 b, c, d 2001 ; *Le total
est légèrement sous-estimé puisqu'il n'inclut pas pas les patients résidant
à l'est de Montréal)
Visites de patients pédiatriques demeurant
à St-Eustache aux 3 hôpitaux, 1999
Hospitalisation
Vers l'Hôpital
St-Eustache
537
Urgence
Cliniques
externes
4 634
3 058
Vers Cité de la santé
117
128
511
Vers l'Hôpital Ste-Justine
373
1 009
2 898
1 361
7 098
8 968
Total (incluant tous
les hôpitaux)*
(source : Données de l'étude RME, Tableau 2.3 b, c, d 2001 ; *Le total
est légèrement sous-estimé puisqu'il n'inclut pas pas les patients résidant
à l'est de Montréal)
2 898
1 367
5 677
9 950
12 642
58 702
97 217
(source : Données de l'étude RME, Tableau 2.3b, 2001 ; *Le total est
légèrement sous-estimé puisqu'il n'inclut pas pas les patients résidant
à l'est de Montréal)
Dans le dernier tableau, nous présentons les
transferts de patients qui ont pris place pour l'année
1999 – 2000. Comme le lecteur peut le constater, ces
transferts demeurent en nombres relativement
restreints.
Ce tableau permet de constater qu'il y a quatre
fois plus de patients qui vont à l'urgence que ceux qui
sont hospitalisés, et qu'il y a sept fois plus de patients
qui visitent les cliniques externes.
Transferts de patients entre les hôpitaux, 1999-2000
Les patients résidants dans les bassins de desserte
de l'Hôpital St-Eustache et de Cité de la santé ne
fréquentent pas nécessairement leur hôpital de proximité.
Certains vont au CHU Ste-Justine alors que d'autres
fréquentent d'autres hôpitaux de Montréal. Le tableau
suivant présente le lieu de fréquentation des enfants
résidants à Laval.
Hôpital
St-Eustache
74
Cité
de la santé
63
Vers
De
Hôpital
Ste-Justine
Hôpital
St-Eustache
17
Tous les
hôpitaux
Cité
Hôpital
Tous les
de la santé Ste-Justine hôpitaux
20
410
1 232
(source: Hôpital Ste-Justine)
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Adresse de correspondance
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Groupe de recherche interdisciplinaire en santé
Secteur santé publique
Faculté de médecine
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