ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE D’ALFORT Année 2015 LA PRISE EN CHARGE DU SYNDROME DE DÉTRESSE RESPIRATOIRE AIGÜE : MODЀLES EXPÉRIMENTAUX ET APPLICATIONS POUR LA MÉDECINE HUMAINE ET VÉTÉRINAIRE THÈSE Pour le DOCTORAT VÉTÉRINAIRE Présentée et soutenue publiquement devant LA FACULTÉ DE MÉDECINE DE CRÉTEIL le 29 octobre 2015 par Amandine VIOLÉ Née le 16 avril 1990 à Paris 14ème JURY Président : Pr. LELLOUCHE Professeur à la Faculté de Médecine de CRÉTEIL Membres Directeur : Pr. Renaud TISSIER Professeur à l’ENVA Assesseur : Dr. Luca ZILBERSTEIN Maître de conférences à l’ENVA LISTE DES MEMBRES DU CORPS ENSEIGNANT Directeur : M. le Professeur GOGNY Marc Directeurs honoraires : MM. les Professeurs : COTARD Jean-Pierre, MIALOT Jean-Paul, MORAILLON Robert, PARODI André-Laurent, PILET Charles, TOMA Bernard. Professeurs honoraires : Mme et MM. : BENET Jean-Jacques, BRUGERE Henri, BRUGERE-PICOUX Jeanne, BUSSIERAS Jean, CERF Olivier, CHERMETTE René, CLERC Bernard, CRESPEAU François, M. COURREAU Jean-François, DEPUTTE Bertrand, MOUTHON Gilbert, MILHAUD Guy, POUCHELON Jean-Louis, ROZIER Jacques. DEPARTEMENT D’ELEVAGE ET DE PATHOLOGIE DES EQUIDES ET DES CARNIVORES (DEPEC) Chef du département : M. GRANDJEAN Dominique, Professeur - Adjoint : M. BLOT Stéphane, Professeur UNITE DE CARDIOLOGIE - Mme CHETBOUL Valérie, Professeur * - Mme GKOUNI Vassiliki, Praticien hospitalier - Mme SECHI-TREHIOU Emilie, Praticien hospitalier UNITE DE CLINIQUE EQUINE - M. AUDIGIE Fabrice, Professeur - Mme BERTONI Lélia, Maître de conférences contractuel - Mme BOURZAC Céline, Maître de conférences contractuel - M. DENOIX Jean-Marie, Professeur - Mme GIRAUDET Aude, Praticien hospitalier * - Mme MESPOULHES-RIVIERE Céline, Praticien hospitalier - Mme TRACHSEL Dagmar, Praticien hospitalier UNITE D’IMAGERIE MEDICALE - Mme PEY Pascaline, Maître de conférences contractuel - Mme STAMBOULI Fouzia, Praticien hospitalier UNITE DE MEDECINE - M. AGUILAR Pablo, Praticien hospitalier - Mme BENCHEKROUN Ghita, Maître de conférences - M. BLOT Stéphane, Professeur* - M. CAMPOS Miguel, Maître de conférences associé - Mme FREICHE-LEGROS Valérie, Praticien hospitalier - Mme MAUREY-GUENEC Christelle, Maître de conférences DISCIPLINE : NUTRITION-ALIMENTATION - M. PARAGON Bernard, Professeur DISCIPLINE : OPHTALMOLOGIE - Mme CHAHORY Sabine, Maître de conférences UNITE DE PARASITOLOGIE ET MALADIES PARASITAIRES - M. BLAGA Radu Gheorghe, Maître de conférences (rattaché au DPASP) - Mme COCHET-FAIVRE Noëlle, Praticien hospitalier - M. GUILLOT Jacques, Professeur * - Mme MARIGNAC Geneviève, Maître de conférences - M. POLACK Bruno, Maître de conférences - Mme RISCO CASTILLO Véronica, Maître de conférences (rattachée au DSBP) UNITE DE PATHOLOGIE CHIRURGICALE - M. FAYOLLE Pascal, Professeur - M. MAILHAC Jean-Marie, Maître de conférences - M. MANASSERO Mathieu, Maître de conférences - M. MOISSONNIER Pierre, Professeur - Mme VIATEAU-DUVAL Véronique, Professeur * - M. ZILBERSTEIN Luca, Maître de conférences DISCIPLINE : URGENCE SOINS INTENSIFS - Mme STEBLAJ Barbara, Praticien Hospitalier DISCIPLINE : NOUVEAUX ANIMAUX DE COMPAGNIE - M. PIGNON Charly, Praticien hospitalier UNITE DE MEDECINE DE L’ELEVAGE ET DU SPORT - Mme CLERO Delphine, Maître de conférences contractuel - M. FONTBONNE Alain, Maître de conférences - M. GRANDJEAN Dominique, Professeur * - Mme MAENHOUDT Cindy, Praticien hospitalier - M. NUDELMANN Nicolas, Maître de conférences DEPARTEMENT DES PRODUCTIONS ANIMALES ET DE LA SANTE PUBLIQUE (DPASP) Chef du département : M. MILLEMANN Yves, Professeur - Adjoint : Mme DUFOUR Barbara, Professeur UNITE D’HYGIENE QUALITE ET SECURITE DES ALIMENTS - M. AUGUSTIN Jean-Christophe, Professeur - M. BOLNOT François, Maître de conférences * - M. CARLIER Vincent, Professeur UNITE DES MALADIES CONTAGIEUSES - Mme DUFOUR Barbara, Professeur* - Mme HADDAD/HOANG-XUAN Nadia, Professeur - Mme PRAUD Anne, Maître de conférences - Mme RIVIERE Julie, Maître de conférences contractuel UNITE DE PATHOLOGIE DES ANIMAUX DE PRODUCTION - M. ADJOU Karim, Maître de conférences * - M. BELBIS Guillaume, Assistant d’enseignement et de recherche contractuel - M. MILLEMANN Yves, Professeur - Mme RAVARY-PLUMIOEN Bérangère, Maître de conférences - Mme ROUANNE Sophie, Praticien hospitalier UNITE DE REPRODUCTION ANIMALE - Mme CONSTANT Fabienne, Maître de conférences* - M. DESBOIS Christophe, Maître de conférences (rattaché au DEPEC) - Mme MASSE-MOREL Gaëlle, Maître de conférences contractuel - M. MAUFFRE Vincent, Assistant d’enseignement et de recherche contractuel - Mme EL BAY Sarah, Praticien hospitalier UNITE DE ZOOTECHNIE, ECONOMIE RURALE - M. ARNE Pascal, Maître de conférences - M. BOSSE Philippe, Professeur* - Mme DE PAULA REIS Alline, Maître de conférences contractuel - Mme GRIMARD-BALLIF Bénédicte, Professeur - Mme LEROY-BARASSIN Isabelle, Maître de conférences - M. PONTER Andrew, Professeur - Mme WOLGUST Valérie, Praticien hospitalier DEPARTEMENT DES SCIENCES BIOLOGIQUES ET PHARMACEUTIQUES (DSBP) Chef du département : M. CHATEAU Henry, Professeur - Adjoint : Mme PILOT-STORCK Fanny, Maître de conférences UNITE D’ANATOMIE DES ANIMAUX DOMESTIQUES - M. CHATEAU Henry, Professeur* - Mme CREVIER-DENOIX Nathalie, Professeur - M. DEGUEURCE Christophe, Professeur - Mme ROBERT Céline, Maître de conférences UNITE D’HISTOLOGIE, ANATOMIE PATHOLOGIQUE - Mme CORDONNIER-LEFORT Nathalie, Maître de conférences* - M. FONTAINE Jean-Jacques, Professeur - Mme LALOY Eve, Maître de conférences contractuel - M. REYES GOMEZ Edouard, Maître de conférences UNITE DE BACTERIOGOLIE, IMMUNOLOGIE, VIROLOGIE - M. BOULOUIS Henri-Jean, Professeur* - Mme LE PODER Sophie, Maître de conférences - Mme LE ROUX Delphine, Maître de conférences - Mme QUINTIN-COLONNA Françoise, Professeur UNITE DE BIOCHIMIE - M. BELLIER Sylvain, Maître de conférences* - Mme LAGRANGE Isabelle, Praticien hospitalier - M. MICHAUX Jean-Michel, Maître de conférences UNITE DE MANAGEMENT, COMMUNICATION, OUTILS SCIENTIFIQUES - Mme CONAN Muriel, Professeur certifié (Anglais) - M. DESQUILBET Loïc, Maître de conférences (Biostatistiques, épidémiologie)* - Mme FOURNEL Christelle, Maître de conférences contractuel (Gestion et management) DISCIPLINE : EDUCATION PHYSIQUE ET SPORTIVE - M. PHILIPS Pascal, Professeur certifié DISCIPLINE : ETHOLOGIE - Mme GILBERT Caroline, Maître de conférences UNITE DE GENETIQUE MEDICALE ET MOLECULAIRE - Mme ABITBOL Marie, Maître de conférences - M. PANTHIER Jean-Jacques, Professeur* UNITE DE PHARMACIE ET TOXICOLOGIE - Mme ENRIQUEZ Brigitte, Professeur - M. PERROT Sébastien, Maître de conférences - M. TISSIER Renaud, Professeur* UNITE DE PHYSIOLOGIE ET THERAPEUTIQUE - Mme COMBRISSON Hélène, Professeur - Mme PILOT-STORCK Fanny, Maître de conférences - M. TIRET Laurent, Professeur * REMERCIEMENTS Au Professeur Lellouche, de la Faculté de médecine de Créteil, président du jury Pour m’avoir fait l’honneur d’accepter la présidence de ce jury, Au Professeur Renaud Tissier Pour m’avoir aidée dans le choix de ce sujet de thèse, Pour sa disponibilité et sa réactivité à toute épreuve, Pour sa gentillesse et sa sincère implication dans l’aboutissement de ce projet, Toute ma reconnaissance à laquelle s’ajoute un grand merci. Au Docteur Luca Zilberstein Pour avoir accepté de prendre part à ce jury de thèse, Sincères remerciements. À ma maman et mon papa, ma famille, My darling, et mes amis. Un cocktail d’encouragements sans faille, d’entraide et de bonne humeur. Merci de m’avoir donné le goût de persévérer. TABLE DES MATIERES LISTE DES ABRÉVIATIONS .......................................................................... 5 TABLE DES ILLLUSTRATIONS .................................................................... 7 INTRODUCTION ............................................................................................ 11 I. Présentation du syndrome de détresse respiratoire aigüe (SDRA) ............ 13 A. Définition générale ........................................................................................................ 13 B. Étiologies du SDRA ...................................................................................................... 13 1. Chez les carnivores domestiques ............................................................................... 13 2. Chez l’Homme ........................................................................................................... 14 C. Physiopathologie du SDRA .......................................................................................... 14 1. Rappels ...................................................................................................................... 14 a. L’unité alvéolo-capillaire ....................................................................................... 14 b. Mécanique ventilatoire et propriétés du poumon ................................................... 15 i. Compliance et élasticité pulmonaires ................................................................. 16 ii. Fonction du surfactant ........................................................................................ 17 iii. Volumes et capacités respiratoires ..................................................................... 17 iv. Notion d’espace mort ......................................................................................... 18 c. 2. Rapport ventilation/perfusion (V/Q) ...................................................................... 19 Mécanismes pathogéniques du SDRA ...................................................................... 19 a. Phase exsudative .................................................................................................... 19 i. Implication des médiateurs de l’inflammation ................................................... 19 ii. Mise en place de l’œdème lésionnel inflammatoire ........................................... 21 iii. Comblement alvéolaire et altérations du surfactant ........................................... 22 iv. Shunt intrapulmonaire ........................................................................................ 23 b. Phase fibroproliférative et fibrose chronique ......................................................... 23 c. Phase de réparation et de résolution de l’œdème ................................................... 24 d. Conséquences sur la mécanique ventilatoire ......................................................... 25 i. Réduction du volume aéré et perte de compliance pulmonaire.......................... 25 ii. Hypertension artérielle pulmonaire .................................................................... 28 D. Approche clinique du SDRA......................................................................................... 28 1 1. Consensus internationaux .......................................................................................... 28 Chez l’Homme ....................................................................................................... 28 a. i. L’European American Consensus Conference................................................... 28 ii. Actualisations ..................................................................................................... 30 b. Chez les carnivores domestiques ........................................................................... 31 2. Diagnostic pratique en clinique vétérinaire ............................................................... 33 3. Épidémiologie ............................................................................................................ 35 a. Incidence et mortalité du SDRA ............................................................................ 35 i. Chez l’Homme ................................................................................................... 35 ii. Chez les carnivores domestiques ........................................................................ 36 b. II. Facteurs prédictifs de mortalité en médecine humaine .......................................... 36 Les stratégies thérapeutiques de prise en charge du SDRA ...................... 39 A. La ventilation mécanique chez l’Homme ...................................................................... 39 1. Rappels sur la ventilation mécanique artificielle ....................................................... 39 a. Mécanique ventilatoire assistée ............................................................................. 39 b. Notion de pression résistive, pression élastique..................................................... 40 2. Hétérogénéité pulmonaire inhérente au SDRA ......................................................... 42 3. Objectifs et limites de la ventilation mécanique artificielle ...................................... 43 a. Recrutement et dérecrutement alvéolaires ............................................................. 43 b. Le VILI ou Ventilatory Induced Lung Injury......................................................... 44 i. Mécanismes physiopathologiques ...................................................................... 44 ii. Manifestations macroscopiques et microscopiques ........................................... 46 iii. VILI et SDRA .................................................................................................... 48 4. Recommandations actuelles : la ventilation protectrice ............................................ 48 a. Courbe pression/volume au cours du SDRA ......................................................... 48 b. La ventilation protectrice ....................................................................................... 50 i. Choix du ventilateur et confort du patient .......................................................... 50 ii. Quelle fraction inspirée en oxygène (FiO2) ? ..................................................... 50 iii. Quel volume courant ? ....................................................................................... 51 iv. Quelle PEP ?....................................................................................................... 51 2 c. Bénéfice de la ventilation protectrice sur la mortalité en milieu hospitalier ......... 55 d. Techniques adjuvantes d’optimisation de la ventilation assistée ........................... 56 i. Manœuvres de recrutement alvéolaires (MRA) ................................................. 56 ii. Ventilation à haute fréquence ............................................................................. 59 iii. Ventilation liquide partielle (VLP)..................................................................... 60 iv. Monoxyde d’azote inhalé ................................................................................... 60 B. La ventilation mécanique chez les carnivores domestiques .......................................... 61 1. Recommandations en médecine vétérinaire .............................................................. 62 2. Evaluation de l’efficacité du positionnement en médecine vétérinaire ..................... 63 3. Report de cas cliniques. ............................................................................................. 63 III. Modèles expérimentaux du SDRA ........................................................... 67 A. Définition et conditions à la mise en œuvre d’un modèle animal ................................. 67 B. Modélisation du SDRA ................................................................................................. 68 1. Modèles étiologiques du SDRA ................................................................................ 69 Modèle à l’acide oléique ........................................................................................ 69 a. i. Mode d’agression pulmonaire ............................................................................ 70 ii. Mise en œuvre pratique ...................................................................................... 71 iii. Avantages et limites du modèle.......................................................................... 71 b. Administration de lipopolysaccharide (LPS) ......................................................... 71 i. Mode d’agression pulmonaire ............................................................................ 72 ii. Mise en œuvre pratique ...................................................................................... 74 iii. Avantages et désavantages ................................................................................. 74 iv. Glucocorticoïdes et antioxydants ....................................................................... 74 c. Autre modèle septique de SDRA : ligature et ponction du caecum....................... 76 i. Mode d’agression pulmonaire ............................................................................ 76 ii. Mise en œuvre pratique ...................................................................................... 77 iii. Avantages et désavantages ................................................................................. 77 Instillation intra trachéale d’acide chlorhydrique (HCl) ........................................ 77 d. i. Mode d’agression pulmonaire ............................................................................ 77 ii. Mise en œuvre pratique ...................................................................................... 78 iii. Avantages et désavantages du modèle ............................................................... 78 Modèle d’ischémie/reperfusion.............................................................................. 80 e. i. Mécanisme physiopathologique général ............................................................ 80 ii. Mode d’agression pulmonaire ............................................................................ 80 3 iii. Mise en œuvre pratique ...................................................................................... 82 iv. Modèle d’ischémie reperfusion non pulmonaire ................................................ 82 2. Modèles reproduisant la pathophysiologie du SDRA ............................................... 83 a. Modèle de déplétion en surfactant par lavage salin ............................................... 83 i. Mode d’agression pulmonaire ............................................................................ 83 ii. Mise en œuvre pratique ...................................................................................... 83 iii. Avantages et désavantages ................................................................................. 83 iv. Surfactant exogène ............................................................................................. 84 b. Modèle de fibrose pulmonaire : administration de bléomycine ............................. 85 i. Mode d’agression pulmonaire ............................................................................ 85 ii. Mise en œuvre pratique ...................................................................................... 86 iii. Avantages et désavantages ................................................................................. 86 3. Modèles centrés sur la thérapeutique du SDRA ........................................................ 87 Modèle d’hyperoxie ............................................................................................... 87 a. i. Mode d’agression pulmonaire ............................................................................ 87 ii. Mise en œuvre pratique ...................................................................................... 88 iii. Avantages et désavantages ................................................................................. 88 Modèle d’hyperventilation par volo/barotraumatisme........................................... 88 b. i. Avantages et désavantages ................................................................................. 89 C. Comparaison des modèles de SDRA ............................................................................ 89 D. Limites à l’utilisation de ces modèles ........................................................................... 90 CONCLUSION ................................................................................................. 91 BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................ 93 ANNEXES ...................................................................................................... 106 4 LISTE DES ABRÉVIATIONS AECC : American European consensus conference ADN : Acide désoxyribonucléique ALI : Acute lung injury CRI : Constant rate infusion ECG : Electrocardiographie EtCO2 : End tidal CO2 FiO2 : Fraction inspirée en oxygène Fc : Fréquence cardiaque Fr : Fréquence respiratoire HCl : Chlorure d’hydrogène ou acide chlorhydrique IL : Interleukine LBA : Lavage broncho-alvéolaire LBP : LPS binding protein LIS : Lung injury score LPS : Lipopolysaccharide MEC : Matrice extracellulaire MODS : Multiple organ dysfunction syndrome NO : Monoxyde d’azote PaO2 : Pression partielle artérielle en oxygène PAO2 : Pression partielle alvéolaire en oxygène PA : Pression artérielle systémique PAF : Platelet activating factor PAP : Pression artérielle pulmonaire PNN : Polynucléaire neutrophile PEP : Pression expiratoire positive 5 Pplat : Pression de plateau ROS : Reactive oxygen species SDRA : Syndrome de détresse respiratoire aigüe SIMV : Synchronized intermittent mandatory ventilation SIRS : Systemic inflammatory response syndrome SpO2: Saturation partielle en oxygène TF : Tissular factor TGF : Tumor growth factor TNF : Tumor necrosing factor TUNEL: TdT-mediated dUTP nick end-labeling VM : Ventilation mécanique VILI : Ventilatory induced lung injury VPP : Ventilation à pression positive Vt : Volume courant (tidal volume) 6 TABLE DES ILLLUSTRATIONS Liste des tableaux Tableau 1: Classification des facteurs de risque de développement d’un SDRA chez l’Homme................................................................................................................................... 14 Tableau 2 : Equation de Starling illustrant la relation entre les différents paramètres responsables des mouvements de fluide entre les capillaires sanguins et l’interstitium alvéolaire. ................................................................................................................................. 22 Tableau 3 : Critères de définition du SDRA selon l’AECC. .................................................... 29 Tableau 4 : Critères de définition du SDRA selon la conférence de Berlin ............................ 31 Tableau 5 : Critères de définition du SDRA en médecine vétérinaire ..................................... 33 Tableau 6 : Principales manœuvres de recrutement alvéolaires réalisables en pratique .......... 57 Tableau 7 : Répartition de l’utilisation des différents modèles animaux dans les études expérimentales sur le SDRA rapportées dans PubMed entre 2003 et 2007. ............................ 69 Liste des figures Figure 1 : Représentation schématique de la cloison inter-alvéolaire et de la barrière air- sang .................................................................................................................................................. 15 Figure 2 : Diagramme de compliance chez un individu sain mettant en évidence la relation volume/pression du poumon en conditions physiologiques.. ................................................... 16 Figure 3 : Représentation des volumes mobilisés au cours d’un cycle respiratoire chez l’homme et des capacités associées .......................................................................................... 18 Figure 4 : Représentation schématique d’une unité alvéolo-capillaire physiologique et pathologique ............................................................................................................................. 21 Figure 5: Coupe tomodensitométrique d’un poumon atteint de SDRA.. ................................. 25 Figure 6 : Courbes pression/volume comparées d’un poumon rempli d’une solution de chlorure de sodium et d’un poumon en conditions physiologiques ......................................... 27 Figure 7 : Corrélation entre la concentration de procollagène III (PCP III) dans le lavage broncho-alvéolaire d’individus malades et la compliance linéaire mesurée à une pression expiratoire positive (PEP) donnée.. .......................................................................................... 27 Figure 8 : Radiographie thoracique (incidence latérale) d’un chat atteint de SDRA.. ............. 34 Figure 9 : Taux de mortalité rapporté des patients souffrant de SDRA dans les études prospectives et les essais thérapeutiques entre 1981 et 2004 . ................................................ 36 7 Figure 10 : Illustration de la pression d’entrée des voies aériennes au cours d’un cycle respiratoire en ventilation mécanique contrôlée. ...................................................................... 40 Figure 11 : Hétérogénéité pulmonaire au cours du SDRA après une manœuvre ventilatoire. 43 Figure 12 : Evaluation du coefficient de filtration capillaire (Kfc) en fonction de valeurs croissantes de pression de crête appliquées sur des poumons de chien isolés ......................... 45 Figure 13 : Lésions macroscopiques sur un poumon de rat sain ventilé avec une pression de crête de 45 cmH2O à To, To+ 5minutes et To+ 20minutes.................................................... 46 Figure 14 : Courbes pression/volume comparées chez un individu sain et un individu atteint de SDRA.. ................................................................................................................................ 49 Figure 15: Distribution du volume courant entre les zones pulmonaires ventrales et dorsales de patients atteints de SDRA à différents niveaux de PEP. ..................................................... 53 Figure 16: Proportion de patients ayant survécu au SDRA en fonction du temps parmi ceux ayant reçu une ventilation protectrice versus classique............................................................ 55 Figure 17: Radiographie thoracique en vue ventro-dorsale ..................................................... 65 Figure 18 : Pourcentage de survie en fonction du temps de deux lots de souris : le premier ayant reçu une injection seule de LPS, l’autre ayant reçu également un inhibiteur des caspases (Z-VAD.fmk) ........................................................................................................................... 73 Figure 19: Concentration en granulocytes neutrophiles dans le LBA de souris traitées à la déxamethasone (Dex 10 mg/kg) et/ou à la N-acétylcystéine (NAC 500 mg/kg) soit 1 heure avant (a) ou 1 heure après (b) l’instillation de LPS (0.1 mg/ml) ............................................. 76 Figure 20: Concentrations en médiateurs pro-inflammatoires (TNF-α, IL-1β et IL-6 respectivement de gauche à droite et de bas en haut) après lavage broncho-alvéolaire et analyse ELISA à 6h, 24h et 48h chez différents groupes d’étude : ACID, SNAP, CASP, NS. .................................................................................................................................................. 79 Figure 21 : Modifications de la pression artérielle pulmonaire en oxygène (P aO2) au cours du temps (ischémie puis reperfusion durant 4h) sur des poumons ventilés (inflated) ou collabés (deflated ) au cours de la phase d’ischémie ............................................................................. 81 Figure 22 : Evaluation de la pression artérielle en oxygène (PaO2) dans un modèle de déplétion en surfactant au cours du temps et des manœuvres ventilatoires engagées (PEP dégressive de 8 à 0 cmH2O). .................................................................................................... 85 8 9 10 INTRODUCTION Le syndrome de détresse respiratoire aigüe ou SDRA correspond à la survenue d’une défaillance respiratoire aigüe associée à un œdème pulmonaire non cardiogénique. Le diagnostic est essentiellement clinique et s’appuie sur la mise en évidence d’une hypoxémie majeure ainsi que la présence d’opacités pulmonaires bilatérales à la radiographie. L’étiologie de ce syndrome est multiple, ce qui rend d’autant plus difficile sa compréhension et son exploration clinique. C’est toutefois une complication majeure susceptible de se déclarer chez des patients présentant une pathologie sous-jacente sévère et qui occasionne une hospitalisation en unité de soins intensifs. En médecine humaine de nombreuses études ont émergé depuis sa première description en 1967 : celles- ci ont permis de recueillir des données épidémiologiques et cliniques ayant contribué à une meilleure détection du syndrome. Bien que les taux de mortalité aient significativement diminué depuis 1967, le pronostic des patients reste mitigé et intimement corrélé à la sévérité du SDRA. L’incidence du SDRA est peu renseignée en médecine vétérinaire. Cependant, de nombreux spécialistes de médecine d’urgence reconnaissent actuellement cette affection comme une entité clinique à part entière. Très peu de recherches cliniques ont été faites et les traitements mis en place sont largement inspirés des acquis en médecine humaine. De plus, l’engagement émotionnel et financier requis constitue souvent un facteur limitant à la prise en charge des animaux sur le long terme. Pour comprendre la physiopathologie du SDRA et proposer de nouvelles stratégies thérapeutiques chez l’Homme et l’animal, le recours aux modèles animaux est indispensable. Cette thèse s’attache à répertorier les modèles animaux de SDRA et à mettre en lumière les applications qui en découlent, en médecine humaine et vétérinaire. Dans une première partie, nous nous intéresserons au SDRA chez l’Homme et les carnivores domestiques en faisant une mise au point sur son étiologie, sa physiopathogénie et son diagnostic clinique. Dans un second temps, nous porterons une attention toute particulière à la ventilation mécanique protectrice, seule méthode reconnue pour soutenir efficacement la fonction respiratoire. Les autres options thérapeutiques seront également évoquées. Enfin, dans une troisième partie, nous exposerons les différents modèles animaux qui ont enrichi le support des connaissances actuelles du SDRA. 11 12 I. Présentation du syndrome de détresse respiratoire aigüe (SDRA) A. Définition générale Le syndrome de détresse respiratoire aigüe se manifeste par une insuffisance respiratoire, d’apparition soudaine qui se déclare à la suite d’une agression initiale d’origine pulmonaire, dite primaire, ou systémique, dite secondaire (Chevrolet et Tassaux, 2004). Celui-ci est caractérisé par un œdème pulmonaire non cardiogénique qui conduit à une altération notable des échanges gazeux. Les patients présentent une hypoxémie majeure qui compromet leur pronostic vital à court terme. Le traitement actuel par ventilation mécanique consiste à optimiser les échanges gazeux de manière à ce qu’ils soient compatibles avec la survie du malade. La définition du SDRA repose sur des paramètres cliniques, paracliniques et radiologiques. Celle-ci a été proposée, tout d’abord en médecine humaine puis des années plus tard en médecine vétérinaire, à l’occasion de conférences internationales regroupant des spécialistes en soins intensifs et médecine d’urgence. Cette définition consensuelle a par la suite été utilisée dans la majorité des essais thérapeutiques et des enquêtes épidémiologiques récentes (Papazian et Roch, 2008). En médecine humaine, de nombreuses données ont ainsi pu être recueillies et ont agrémenté le socle des connaissances, sans cesse actualisé. A contrario, chez les carnivores domestiques, le SDRA n’a été reconnu comme une réelle entité clinique qu’à partir de 1996. Bien que la physiopathologie soit en partie connue grâce à l’apport des modèles expérimentaux animaux, les cliniciens vétérinaires n’ont que très peu de recul sur l’incidence, les facteurs de risque et la mortalité de ce syndrome. B. Étiologies du SDRA En médecine humaine et vétérinaire, de multiples étiologies sont reconnues, ce qui rend d’autant plus difficile son identification. Ce syndrome est le résultat d’une cascade de mécanismes inflammatoires aboutissant à une atteinte diffuse du tissu pulmonaire. Un ensemble de pathologies sévères peuvent ainsi conduire à un SDRA. Celles-ci sont communément classifiées en deux entités distinctes : les affections d’origine primaire pulmonaire et celles d’origine secondaire systémique (Hernandez et Poncet, 2012). 1. Chez les carnivores domestiques Les atteintes d’origine primaire touchent directement le parenchyme pulmonaire. Les pneumonies d’origine infectieuse (bactérienne, virale, parasitaire), les bronchopneumonies par fausse déglutition, l’inhalation de gaz, de fumées toxiques et les traumatismes thoraciques sont autant de facteurs de risque d’apparition d’un SDRA. Les affections d’origine secondaire sont extrapulmonaires mais entraînent indirectement des lésions pulmonaires par voie systémique. Celles-ci incluent : sepsis, coagulation intravasculaire disséminée (CIVD), syndrome de dilatation-torsion de l’estomac, pancréatite, intoxications, pathologies digestives infectieuses aigües type parvovirose, anémie hémolytique à médiation immune. Des cas de SDRA consécutifs à une intoxication au paraquat (herbicide composé de dérivés chlorés) ont également été rapportés (Darke et al., 1977). La forte réponse inflammatoire mise en jeu peut aboutir au syndrome de réaction inflammatoire systémique (SIRS). Si l’organisme ne réussit pas à juguler une agression initiale et qu’elle se généralise à d’autres organes, le SDRA peut alors être la conséquence d’un syndrome de dysfonctionnement multi-organique (MODS). 13 Les pneumonies bactériennes, les bronchopneumonies de fausse déglutition, et l’état de sepsis ont été reconnues comme les principales affections mises en cause chez les chiens atteints de SDRA (Parent et al., 1996). Peu de facteurs de risque ont été répertoriés chez le chat. Cependant, des lésions pulmonaires compatibles avec celles décrites dans le SDRA ont été retrouvées à l’autopsie chez des chats décédés de sepsis sévère (Brady et al., 2000). Dans l’étude récente de Sauvé et al. (2004) incluant sur dix ans 65 chats ayant présenté un SDRA, l’examen post mortem permettait de mettre en exergue différentes affections primaires sous jacentes. Concernant les atteintes les plus fréquentes, onze chats présentaient une pathologie infectieuse systémique, huit une pathologie respiratoire primaire, huit autres un processus néoplasique avancé. Pancréatite aigüe, traumatismes et sepsis étaient également rapportés. 2. Chez l’Homme En médecine humaine, dans 70% des cas, les causes les plus fréquentes de SDRA sont les suivantes : bronchopneumonie par fausse déglutition, pneumonie infectieuse d’origine bactérienne, sepsis généralisé et traumatismes multiples (Villar, 2011). Un patient sera d’autant plus susceptible de déclarer un SDRA qu’il combine plusieurs facteurs de risque. Ceux-ci sont synthétisés dans le tableau 1. Tableau 1: Classification des facteurs de risque de développement d’un SDRA chez l’Homme (d’après Chevrolet et Tassaux, 2004). Atteinte pulmonaire directe Aspiration de contenu gastrique Contusions pulmonaires Inhalation de gaz toxique Noyade Pneumonie Irradiation thoracique Ischémie-reperfusion pulmonaire Embolies graisseuses Etc… C. Atteinte pulmonaire indirecte Sepsis sévère Traumatismes majeurs Transfusions multiples Pancréatite aigüe Overdose Brûlure Circulation extracorporelle État de choc de toute origine Etc… Physiopathologie du SDRA Afin d’envisager au mieux la physiopathologie du SDRA, il est nécessaire de faire un rappel préalable sur la structure du système respiratoire et de la mécanique ventilatoire. Les explications suivantes sont valables en médecine humaine ainsi qu’en médecine vétérinaire. 1. Rappels a. L’unité alvéolo-capillaire Le système respiratoire assure l’apport d’oxygène et l’élimination du CO2, produit du métabolisme de base de l’organisme. Ces échanges se réalisent au niveau des alvéoles pulmonaires, conduits terminaux de l’arbre respiratoire, qui présentent une grande extension de surface. L’unité alvéolo-capillaire est le siège de l’hématose. Histologiquement, celle-ci est constituée d’un épithélium alvéolaire (pneumocytes I à 90%), d’un endothélium capillaire et de leurs membranes basales respectives, séparés par une cloison interstitielle. Le réseau 14 capillaire est abondant et tapisse l’intégralité de la surface alvéolaire. La diffusion des gaz est rendue possible par la finesse de la barrière alvéolo-capillaire. La figure 1 représente cette structure fonctionnelle. L’efficacité des échanges gazeux réside dans l’adéquation entre la ventilation et la perfusion des alvéoles pulmonaires. En outre, l’intégrité de la barrière alvéolo-capillaire est essentielle : celle-ci assure en effet le maintien de l’homéostasie liquidienne et de la protection immunitaire du poumon. Figure 1 : Représentation schématique de la cloison inter-alvéolaire et de la barrière air- sang (d'après Dellmann’s, 2006). Capillaire Membrane basale du capillaire Pneumocyte I Membrane basale de l’alvéole b. Mécanique ventilatoire et propriétés du poumon L’apport d’oxygène aux poumons implique l’existence d’un gradient de pression entre l’extérieur (air atmosphérique) et les alvéoles pulmonaires. Ce gradient est corrélé aux modifications de volume du thorax liées à l’action des muscles thoraciques inspiratoires et expiratoires. La pression transpulmonaire représente la différence de pression qui règne entre les alvéoles (Palvéolaire) et l’espace pleural (Pintrapleurale). La pression intrapleurale est toujours négative ce qui assure le « vide pleural » et l’accolement des poumons à la cage thoracique. La différence de pression transpulmonaire en début et en fin d’inspiration est à l’origine de l’augmentation du volume pulmonaire et de l’expansion alvéolaire (Storck, 2014). Les poumons présentent deux propriétés physiques qui modulent les variations de pression/volume décrites ci-dessus : la compliance et l’élasticité. 15 i. Compliance et élasticité pulmonaires La compliance représente la capacité qu’ont les poumons à s’étirer. Elle est définie comme la modification de volume pulmonaire (V) résultant d’un changement de pression transpulmonaire (P) (Lefèbvre, 2011). La courbe pression/volume représentée dans la figure 2 reflète cette propriété. L’inverse de la compliance correspond à l’élastance pulmonaire. Compliance pulmonaire (ml/cmH2O)= ᴧV / ᴧP Figure 2 : Diagramme de compliance chez un individu sain mettant en évidence la relation volume/pression du poumon en conditions physiologiques. La courbe de remplissage du poumon à l’inspiration ne se superpose pas à celle de sa vidange : c’est la notion d’hystérésis (d’après Lefèbvre, 2011). Volume (l) Expiration Inspiration P transpulmonaire (cmH20) L’élasticité pulmonaire dépend de deux facteurs : de la tension de surface présente à la surface des alvéoles et de la composition structurale des parois alvéolaires (Storck, 2014). Celles-ci contiennent en effet des fibres élastiques constituées de protéines fibrillaires telles que le collagène, l’élastine ou la réticuline. Cependant, ce facteur n’est pas le principal déterminant de l’élasticité pulmonaire. À la surface des alvéoles se trouve une interface gaz-tissu alvéolaire (équivalente à une interface gaz-liquide) qui génère une forte tension de surface. Celle-ci peut être assimilée à une force élastique qui tend à réduire la surface des alvéoles et provoquer leur collapsus. D’après la loi de Laplace rappelée ci-dessous, la tension de surface (T) est proportionnelle à une pression (P) nommée pression de distension, c'est-à-dire celle nécessaire à l’expansion de l’unité alvéolaire. À tension de surface identique, une alvéole de petit diamètre nécessiterait donc une pression plus importante pour rester ouverte qu’une de grand diamètre. Du fait de l’hétérogénéité de calibre des alvéoles, certaines d’entre elles auraient donc tendance à se collaber et à se vider vers des alvéoles contigües de taille supérieure, dans lesquelles la pression est plus faible. 16 Loi de Laplace Au cours de la ventilation mécanique artificielle d’un patient, l’enjeu est donc d’obtenir une pression de distension optimale au recrutement alvéolaire et compatible avec les capacités d’extension de la cage thoracique. ii. Fonction du surfactant La surface épithéliale est recouverte d’une fine couche liquidienne composée d’une phase aqueuse et d’une phase lipidique, le surfactant. Le surfactant est une substance complexe, de composition protéo-phospholipidique produite par les pneumocytes II de l’épithélium alvéolaire. Ce film présente des propriétés tensioactives qui abaissent considérablement la tension de surface régnant au sein des alvéoles (Epaud et Fauroux, 2004). En outre, la concentration du surfactant est plus importante dans les alvéoles de petit diamètre, égalisant ainsi les pressions de distension entre alvéoles de calibre différent. La réduction de la tension de surface minimise la force élastique en jeu et contribue ainsi à l’amélioration de la compliance pulmonaire. La pression de distension, uniforme, est abaissée et compatible avec les capacités ventilatoires du patient (Storck, 2014). De plus, en s’opposant à la diminution de pression interstitielle autour des capillaires liée au collapsus alvéolaire, le surfactant limite le phénomène de transsudation à l’origine de l’œdème (Roch et Allardet-Servent, 2007). Il joue également un rôle anti-infectieux local. La déplétion en surfactant objectivée dans le SDRA, est à l’origine d’une diminution de la compliance pulmonaire. Ce processus implique la création d’un gradient de pression plus important et donc d’un travail respiratoire accru pour assurer une ventilation alvéolaire adéquate (Günther et al., 1996). iii. Volumes et capacités respiratoires Au cours d’un cycle respiratoire, des volumes d’air statiques sont mobilisés. La somme de ces différents volumes définit des capacités, comme schématisé sur la figure 3. On note ainsi : Volume courant (ml) : volume mobilisé lors d’une inspiration ou d’une expiration au repos. Il est d’environ 200 ml chez le chien, 30 ml chez le chat et 400 ml chez l’Homme (Lafarge, 2001). Volume de réserve inspiratoire et expiratoire (ml): volume additionnel que le patient peut inspirer en plus du volume courant, en forçant respectivement son inspiration ou son expiration. Volume résiduel (ml) : volume d’air restant dans les poumons après une expiration forcée. Il est d’environ 40 ml/kg chez le chien et d’1,2 l chez l’Homme (Lafarge, 2001). Capacité vitale (ml) : volume maximal mobilisable au cours d’un cycle respiratoire forcé. S’ajoutent donc le volume courant, le volume de réserve inspiratoire et celui de réserve expiratoire. Capacité pulmonaire totale (ml) : capacité vitale à laquelle s’ajoute le volume résiduel. 17 Capacité résiduelle fonctionnelle (ml) : volume d’air qui reste dans le poumon après une expiration normale (volume de réserve expiratoire auquel s’ajoute le volume résiduel). Cette capacité permet de maintenir les alvéoles ouvertes en fin d’expiration. Le renouvellement de l’air alvéolaire est partiel à chaque cycle inspiratoire en raison de la dilution du volume courant dans le volume résiduel. Le débit de ventilation alvéolaire correspond au volume d’air nouveau qui parvient aux alvéoles à chaque minute. D = FR × (Vt – Vm) D (l/min) = débit de ventilation alvéolaire. Vt (l) = volume courant (« tidal volume » en anglais). Vm (l) = volume résiduel. FR (cycle/min) = fréquence respiratoire. Figure 3 : Représentation des volumes mobilisés au cours d’un cycle respiratoire chez l’homme et des capacités associées (Lafarge, 2001). iv. Notion d’espace mort L’espace mort anatomique correspond au volume des voies aériennes (excepté bronchioles et alvéoles) qui ne participent pas aux échanges respiratoires. Cet espace mort, fixe, joue non seulement un rôle dans la conduction de l’air, réchauffé et humidifié jusqu’aux alvéoles, mais aussi dans le phénomène de régulation thermique. Le chien est en effet une des espèces qui régule sa température corporelle par polypnée thermique. L’espace mort alvéolaire correspond au volume des alvéoles ventilées mais non perfusées. En conditions physiologiques très peu d’entre elles sont perfusées de manière inadéquate (Lafarge, 2001). L’espace mort alvéolaire est ainsi négligeable. 18 c. Rapport ventilation/perfusion (V/Q) L’analyse de l’adéquation entre la ventilation et la perfusion alvéolaire est le reflet de l’hématose. Pour une oxygénation efficace, ce rapport doit physiologiquement être égal à 1 et similaire au sein de chaque unité alvéolaire. Deux situations peuvent conduire à une inhomogénéité de ce rapport (l’annexe 1 schématise ces deux états) : Un effet « SHUNT » (V/Q tend vers 0) : ce phénomène se produit lorsque certaines alvéoles, bien que perfusées, ne sont plus correctement ventilées. Celles ci sont collabées et l’hématose altérée. La modification de ce rapport est responsable d’une hypoxémie majeure : en conséquence, du sang non hématosé est renvoyé vers le cœur gauche. Le mécanisme réactionnel de vasoconstriction pulmonaire hypoxique limite la perfusion des territoires non ventilés. Il conduit à la vasoconstriction des artérioles précapillaires apportant du sang aux alvéoles hypoxiées (Storck, 2014). Un effet « ESPACE MORT ALVEOLAIRE » (V/Q tend vers ∞) : ce phénomène se produit lorsque certaines alvéoles, bien que ventilées, ne sont plus correctement perfusées. La ventilation de ces alvéoles est inutile car les gaz ne peuvent participer aux échanges. Leur volume se rajoute à celui de l’espace mort anatomique : la somme de ces deux volumes constitue l’espace mort physiologique. Le pouvoir d’hématose est ainsi réduit. 2. Mécanismes pathogéniques du SDRA Trois phases s’échelonnent au cours du temps dans le SDRA : Une phase aigüe dite exsudative qui dure environ 6 jours. Une phase subaigüe fibroproliférative se superposant à la phase précédente en cas de non résolution. Elle peut varier de 4 à 10 jours. Une phase chronique fibrosante qui peut s’étendre sur plusieurs semaines. Une grande variabilité existe quant à leur durée et à leur chevauchement. Par ailleurs, tous les patients ne présentent pas forcément ces trois phases, un rétablissement étant possible dans le temps (Schwarz, 2001). a. Phase exsudative i. Implication des médiateurs de l’inflammation Quelque soit l’agression initiale à l’origine du SDRA, cette phase est caractérisée par une forte réponse inflammatoire locale conduisant à l’augmentation de la perméabilité de la membrane alvéolo-capillaire. De multiples pathologies peuvent être à l’origine d’une réponse inflammatoire systémique, comme évoquées dans le paragraphe « Etiologies ». La sévérité de l’atteinte pulmonaire est d’ailleurs directement corrélée à l’intensité du processus inflammatoire résultant (Bhatia et Moochhala, 2004). Ainsi, un syndrome de réponse inflammatoire systémique (SIRS pour Systemic Inflammatory Response Syndrome), mécanisme physiologique de réponse à une agression organique, peut conduire à un syndrome de dysfonctionnement multi organique (MODS pour Multiple Organ Dysfunction Syndrome). Les formes les plus graves de SDRA sont généralement la conséquence d’un MODS. 19 Des phénomènes complexes sont mis en jeu parmi lesquels l’activation en cascade du système macrophagique, consécutif au SIRS. Le recrutement de cellules immunitaires incluant macrophages et polynucléaires neutrophiles (PNN) se réalise au niveau du site lésionnel puis ceux-ci sont véhiculés par voie sérique jusqu’aux capillaires pulmonaires. L’activation des macrophages est à l’origine du relargage de nombreux médiateurs de l’inflammation parmi lesquels l’interleukine 1β (IL-1β) et le TNF-α (Tumour Necrosis Factor). Ces cytokines pro-inflammatoires ont été reconnues comme les deux principaux médiateurs impliqués dans le choc septique. Leur libération induit la production en cascade d’autres molécules comme l’IL-8, facteur chimiotactique pour les polynucléaires neutrophiles. Les PNN qui affluent au poumon présentent une activité transcriptionnelle augmentée, notamment pour l’IL-8 qu’ils synthétisent en retour. Celle-ci joue un rôle très important dans le SDRA dans la mesure où elle inhibe l’apoptose des PNN, d’où une amplification du phénomène inflammatoire (Bhatia et Moochhala, 2004). L’IL-1β est quant à elle impliquée dans la modulation de l’activation du système d’adhésion entre les cellules endothéliales et les neutrophiles. Les PNN synthétisent des composés tels qu’élastases, protéases et métalloprotéinases qui régulent la synthèse et la dégradation des composants de la matrice extracellulaire, socle de l’épithélium et de l’endothélium alvéolaire. En situation pathologique, leur expression compromet ainsi l’architecture cellulaire. Par ailleurs, le TNF-α induit l’activation de certaines isoformes de protéines kinases C qui, de part leur action destructrice sur le cytosquelette des cellules endothéliales, promeuvent la perte d’intégrité de la barrière (Piantadosi et Schwartz, 2004). L’inflammation généralisée est également à l’origine d’un stress oxydatif important. Macrophages et neutrophiles actifs sont la source principale de radicaux libres de l’oxygène (ROS) et de l’azote (NOS), dont l’action a été démontrée comme hautement toxique vis-à-vis de l’endothélium et de l’épithélium pulmonaire (Szabo et Saunders, 1997). Cependant le rôle des PNN en phase aigüe n’est pas réellement connu. Sont-ils à l’origine du SDRA ou leur afflux n’est-il que la conséquence du syndrome ? Cette question semble légitime dans la mesure où des études ont rapporté que des patients neutropéniques pouvaient souffrir de SDRA (Mokart et al., 2003). Toutefois, chez les sujets présentant une neutrophilie marquée, il a été montré que la concentration de neutrophiles recueillis dans le liquide broncho-alvéolaire était corrélée à la gravité du syndrome (Steinberg et al., 1994). L’équilibre entre les médiateurs pro et anti-inflammatoires, oxydants et anti-oxydants module l’intensité de la réaction inflammatoire locale et le cas échéant, en assure la persistance ou la fait cesser. L’annexe 2 ainsi que la figure 4 synthétisent la cascade d’évènements pathologiques du SDRA. 20 Figure 4: Représentation schématique d’une unité alvéolo-capillaire physiologique et pathologique (d'après Chevrolet et Tassaux, 2004). ii. Mise en place de l’œdème lésionnel inflammatoire En conditions physiologiques, un « facteur de protection contre l’œdème » existe. Ses effets reposent sur l’action anti-œdémateuse du surfactant ainsi que sur les capacités d’accommodation capillaire et d’absorption interstitielle et lymphatique. Le phénomène d’accommodation capillaire correspond à l’absence relative d’augmentation de pression hydrostatique sanguine face à une hausse du débit sanguin. La diminution de la résistance périphérique totale est assurée par le recrutement et la dilatation des vaisseaux sanguins. PAh = DC × RPT avec PAh = pression artérielle hydrostatique DC = débit cardiaque RPT = résistance périphérique totale Au cours du SDRA, l’œdème est favorisé du fait de l’altération de la perméabilité alvéolo-capillaire consécutive à l’action synergique des cellules pro-inflammatoires. Pour comprendre les paramètres régissant les mouvements de fluide entre l’endothélium et l’interstitium, le tableau 2 rappelle la loi de Starling. Au cours de la phase exsudative, l’intégrité de la barrière, dont dépend le coefficient de réflexion osmotique moyen, est endommagée. La valeur de ce dernier diminue fortement, ce qui entraîne une extravasation de liquide des capillaires vers l’espace interstitiel, alors que la valeur de pression hydrostatique vasculaire reste dans les normes. L’augmentation au-delà d’un certain seuil du volume de l’interstitium excède les capacités de réabsorption du système lymphatique. Le phénomène de transsudation s’ensuit et conduit au remplissage des alvéoles par un liquide riche en protéines plasmatiques et en cellules inflammatoires. Les cellules épithéliales rendues jointives par des jonctions serrées, sont abîmées et ne remplissent plus leur fonction primaire 21 de filtre sélectif. En outre, la dérégulation des canaux ioniques situés au niveau des membranes basales des pneumocytes de type I et II impacte les capacités de résorption hydrique (Rouby et Lu, 2005). Une corrélation inverse établie entre la clairance alvéolaire et la mortalité du SDRA témoigne des conséquences de cette perte d’homéostasie liquidienne (Chevrolet et Tassaux, 2004). Tableau 2 : Equation de Starling qui illustre la relation entre les différents paramètres responsables des mouvements de fluide entre les capillaires sanguins et l’interstitium alvéolaire. Equation de Starling : QT = quantité de fluide filtrée par unité de temps. L’augmentation de QT est à l’origine de la formation d’œdème. Kf = perméabilité des vaisseaux aux fluides. PmC = pression hydrostatique des capillaires pulmonaires. Pl = pression hydrostatique de l’espace interstitiel. s = coefficient de réflexion osmotique moyen, dépendant de l’intégrité et de la perméabilité de l’endothélium vasculaire. pmC = pression oncotique des capillaires pulmonaires. pl = pression oncotique de l’espace interstitiel. iii. Comblement alvéolaire et altérations du surfactant La présence de dépôts de fibrine le long des parois alvéolaires est une des caractéristiques lésionnelles du SDRA. Ces dépôts font suite à l’activation de la cascade de la coagulation consécutivement à la réponse inflammatoire. L’intervention d’un facteur appelé « facteur tissulaire » (TF pour Tissular Factor), principal activateur de la coagulation au niveau des sites lésionnels, est à ce jour bien connue. Celui-ci est produit constitutivement par les cellules épithéliales et les fibroblastes de la MEC et est également surexprimé par les cellules endothéliales sous l’influence de cytokines pro-inflammatoires (TNF-α ET TGF-β notamment). L’interaction entre le TF et le facteur VII activé déclenche la cascade de coagulation aboutissant à la synthèse de thrombine puis à la conversion du fibrinogène en fibrine (Chevrolet et Tassaux, 2004). En parallèle, l’apparition de molécules antifibrinolytiques inhibe le système de la fibrinolyse d’où une baisse de clairance de la fibrine intra-alvéolaire. L’accumulation de fibrine, de débris cellulaires, d’éléments figurés du sang participe à la formation de membranes hyalines obstruant l’espace alvéolaire et conduisant au blocage des échanges gazeux. De plus, une synthèse plus importante de thrombine est responsable d’effets procoagulants délétères. La formation de micro-thrombi vasculaires est favorisée et interrompt la perfusion pulmonaire en aval, d’où une ischémie des territoires concernés (Rouby et Lu, 2005). Par ailleurs, la quantité et la qualité du surfactant sont altérées au cours SDRA. Günther et al. (1996), ont analysé le surfactant isolé à partir de lavages broncho-alvéolaires de 153 patients atteints de SDRA, de pneumonie sévère ou d’œdème pulmonaire cardiogénique. Une diminution de la concentration de phospholipides et des apoprotéines constitutives, notamment la SP-A a été prouvée dans le SDRA. Ces apoprotéines qui exercent 22 une grande part de l’activité de réduction de la tension de surface sont quantitativement moins présentes, d’où un déficit fonctionnel évident. Les nombreux radicaux libres, protéines et enzymes libérés dans la lumière alvéolaire sont par ailleurs reconnus pour inactiver le surfactant, tout comme la présence de fibrine intra alvéolaire. Conjointement, les lésions des pneumocytes II de l’épithélium contribuent à une diminution de sa production. Des modifications similaires sont décrites dans la maladie des membranes hyalines du nouveau né. Les prématurés présentent une immaturité du système pulmonaire avec une déficience du surfactant en quantité et qualité. Cette anomalie congénitale aboutit en partie à une atélectasie à l’origine d’une détresse respiratoire aigüe (Paut et al., 1998). iv. Shunt intrapulmonaire L’abondance de l’infiltrat et des dépôts intra-alvéolaires aboutit à la création de territoires pulmonaires peu ou non ventilés. Le rapport ventilation/perfusion V/Q évoqué précédemment est fortement diminué et provoque un « effet SHUNT ». La diffusion de l’oxygène vers les capillaires pulmonaires est impossible et explique l’hypoxémie caractéristique du SDRA. L’étude de Lamy et al. (1976), a mis en lumière une corrélation entre le degré d’hypoxémie clinique de 45 patients (mesure du ratio P aO2/FiO2) et le type de lésions pulmonaires identifiées à l’histologie après biopsie et/ou autopsie. Les modifications du parenchyme distinctives de la phase exsudative du SDRA (destruction des cellules épithéliales, présence d’un œdème éosinophilique et de membranes hyalines le long des conduits alvéolaires et des septa inter-alvéolaires…) étaient observées chez les personnes présentant une hypoxémie sévère. Des lésions de fibrose pulmonaire étaient mises en évidence chez des patients pour lesquels l’hypoxémie était moins marquée. Parallèlement, ces zones étant perfusées inutilement, le phénomène de vasoconstriction pulmonaire hypoxique conduit à la réduction de la surface vasculaire utile aux échanges. L’hypercapnie constatée chez certains patients peut en partie être expliquée par cette redistribution des secteurs perfusés aboutissant à la constitution d’unités alvéolaires toujours ventilées mais non perfusées. Un effet « ESPACE MORT » lié à l’augmentation du rapport V/Q (vers ∞) en résulte. b. Phase fibroproliférative et fibrose chronique Dans le cas où le SDRA ne se résout pas à ce stade par résorption de l’œdème et renouvellement de la barrière alvéolo-capillaire, une deuxième phase subaigüe dite fibroproliférative se met conjointement en place. Comme son nom l’indique, celle-ci correspond à une étape de prolifération des pneumocytes de type II et des fibroblastes progressivement différenciés en myofibroblastes au sein des conduits alvéolaires. Leurs capacités prolifératives sont augmentées sous l’action des cytokines pro-inflammatoires, telles que le TNF-α et le TGF-β. Il a été montré que le TGF-β activait in vitro le promoteur du gène du collagène I. Ses taux se sont révélés très élevés au sein des liquides broncho-alvéolaires de patients malades (Budinger et al., 2005). Une néo-matrice extracellulaire provisoire localisée à l’interstitium, au septum et aux conduits alvéolaires, a fréquemment été décrite à l’autopsie sur des coupes histologiques de poumon (Chevrolet et Tassaux, 2004). Sa composition comprend majoritairement du collagène fibrillaire de type III et I. De nombreux arguments suggèrent que ce processus de fibroprolifération se met en place très précocement après l’agression. L’étude de Chesnutt et al. en 1997 a ainsi mis en évidence une élévation des 23 concentrations en procollagène III, marqueur biologique de la synthèse du collagène, dès les premières 24h de prise en charge ventilatoire des patients hospitalisés. Cette phase fibroproliférative peut par la suite évoluer vers une phase de fibrose pulmonaire ou vers une phase résolutive. Les mécanismes qui expliquent la survenue d’une évolution favorable ou non ne sont pas encore totalement connus. La diminution de l’activité pro-inflammatoire tout comme l’ajustement de la balance entre les facteurs pro et antifibrotiques conditionnent assurément les remaniements pulmonaires. En cas d’évolution vers la fibrose pulmonaire, la synthèse de collagène de type I, plus résistant que celui de type III, prédomine et est nettement supérieure à sa dégradation par des collagénases (Schwarz, 2001). 30 à 50% des patients humains présentent in fine, à des degrés divers, une fibrose du parenchyme pulmonaire (Chevrolet et Tassaux, 2004). Des séquelles majeures et un taux de mortalité supérieur y sont associés (Demoule et al., 2008). c. Phase de réparation et de résolution de l’œdème La résolution de l’inflammation passe indéniablement par l’élimination des cellules inflammatoires. Les polynucléaires neutrophiles sont éliminés par apoptose, tandis que macrophages et monocytes, après avoir rempli leur rôle de phagocytose des cellules apoptotiques, sont évacués par drainage lymphatique. Les fibroblastes subissent également ce mécanisme de mort cellulaire programmée. Le remodelage de la matrice existante est initié par la synthèse d’enzymes (métalloprotéinases 2 et 9 notamment) capables de digérer le collagène produit en excès. Les pneumocytes de type II jouent un rôle majeur dans la réparation de la barrière alvéolo-capillaire. Précurseurs des pneumocytes de type I, leur taux de renouvellement est accru en cas d’agression pulmonaire. La ré-épithélialisation passe ainsi par la multiplication et la différenciation des pneumocytes II en pneumocytes I, à l’origine d’une nouvelle architecture épithéliale. Par ailleurs, la réparation n’est possible que si la membrane basale nécessaire à la migration des pneumocytes régénérés est préservée : la matrice provisoire mise en place au cours de la phase fibroproliférative remplit ce rôle. Chimiokines et facteurs de croissance dont l’HGF (Hepatocyte Growth Factor) et le KGF (Keratinocyte Growth Factor) induisent et stimulent la colonisation des cellules épithéliales. L’étude de Verghese et al. (1998) a ainsi montré la présence très précoce de ces deux facteurs dans l’infiltrat inflammatoire de patients présentant un SDRA. Dans cette étude, des taux élevés d’HGF étaient associés à un pronostic favorable en début d’évolution. La restauration de l’épithélium assure la récupération des capacités de résorption des liquides par les cellules alvéolaires. Les pneumocytes de type I et de type II sont les principaux garants de l’homéostasie liquidienne : ils interviennent dans la régulation du transport transépithélial des fluides par la présence au niveau de leurs membranes de canaux, sodiques et chlore principalement, et de pompes telles que celle Na+/K+/ATP dépendante. Le transport de l’eau se réalise passivement de l’espace alvéolaire vers l’interstitium par voie paracellulaire et à travers les aquaporines des cellules de type I. La réabsorption des ions sodium met en jeu un transport actif transépithélial à travers des canaux sodiques sensibles dont le principal est le canal ENac. Son importance a été révélée par l’expérience de Hummler et al. en 1996. En effet, des souris mutées pour la sous unité α du canal ENac décédaient précocement de détresse respiratoire par défaut d’élimination des fluides pulmonaires. L’élimination des protéines ayant préalablement été filtrées, se fait par diffusion simple pour 24 les protéines solubles, tandis que celles insolubles subissent une phagocytose au sein des macrophages alvéolaires. Cette phase aboutit au long terme à la restitution ad integrum des fonctions pulmonaires. d. Conséquences sur la mécanique ventilatoire i. Réduction du volume aéré et perte de compliance pulmonaire Les propriétés mécaniques de l’appareil respiratoire sont modifiées au cours du SDRA. En médecine humaine, le concept du « baby lung » a été la première explication proposée à la chute de compliance objectivée dans le SDRA. Ce modèle s’est appuyé sur les premières coupes tomodensitométriques réalisées au chevet de sujets atteints. Étonnamment les premières lectures ont permis de constater que l’atteinte du parenchyme pulmonaire était inhomogène. La densité du tissu pulmonaire était ainsi plus élevée dans les zones déclives, emplies par l’œdème, tandis que certaines zones supérieures restaient normalement aérées (Figure 5). L’apport de la tomodensitométrie s’est donc révélé très précieux dans la mesure où cela a permis de mettre en évidence la réduction notable du volume pulmonaire disponible. La masse des secteurs pulmonaires correctement ventilés était équivalente à celle d’un poumon d’enfant, d’où l’appellation « baby lung » (Gattinoni et Pesenti, 2005). Figure 5: Coupe tomodensitométrique d’un poumon atteint de SDRA. En rouge sont entourées les zones déclives hyperdenses, en bleu les zones supérieures de faible densité (d’après Richard, 2010). 25 Une autre étude de Gattinoni et al. a attesté que la distribution des territoires non ventilés suivait deux gradients, l’un vertébro-sternal et l’autre céphalo-caudal (patient allongé sur le dos). Schématiquement, étaient distinguées : des zones pulmonaires pathologiques hyperdenses, comblées par l’œdème, condensées en région dorsale. des zones pulmonaires moins denses, partiellement collabées. des zones normalement aérées et fonctionnelles localisées en région ventrale et caudale. Il est évident que les anomalies de densité du parenchyme pulmonaire sont plus diffuses et non spécifiquement circonscrites comme décrites ci-dessus. Cependant, ces données permettent de comprendre un point fondamental : la perte d’aération d’un poumon atteint de SDRA n’est pas uniforme. Nous verrons dans une deuxième partie que cela a une incidence cruciale sur la conduite de la ventilation mécanique. Qu’en est-il de la compliance pulmonaire ? Ces travaux ont établi que la compliance mesurée était le reflet des zones pulmonaires normalement ventilées. La compliance spécifique (compliance corrigée en fonction du volume pulmonaire disponible) reste donc normale. Cela suggère que les territoires correctement aérés conservent une élasticité intrinsèque normale. À contrario la compliance totale est diminuée proportionnellement au volume de poumon accessible à la ventilation. Dans ce modèle, l’abaissement de la compliance dans le SDRA serait donc exclusivement déterminée par la réduction du volume aérien pulmonaire (Demoule et al., 2007). La capacité résiduelle fonctionnelle est consécutivement très diminuée. Cependant, cette hypothèse ne prend pas en compte les processus de remodelage du parenchyme pulmonaire, si ce n’est dans l’exclusion de certains territoires de la ventilation. L’analyse des courbes de pression/volume selon les stades successifs de la maladie a permis de mieux envisager l’évolution temporelle de la compliance de l’appareil respiratoire. À la phase précoce exsudative du SDRA, l’examen des courbes montre une disparition de l’hystérésis sans modifications de la compliance pulmonaire (Matamis et al., 1984). Ce constat peut être expliqué expérimentalement par la comparaison des courbes P/V d’un poumon rempli d’une solution salée isotonique et d’un poumon en conditions physiologiques. Le comblement des alvéoles par une solution saline annihile l’interface air-liquide usuellement présente, ce qui abolit les forces de tension superficielles. Nous remarquons sur la figure 6 qu’il n’y a pratiquement plus d’hystérésis et que la compliance du poumon rempli de solution salée est augmentée. Transposé au SDRA, l’inondation du poumon par l’œdème lésionnel justifie cet aspect de la courbe. 26 Figure 6 : Courbes pression/volume comparées d’un poumon rempli d’une solution de chlorure de sodium et d’un poumon en conditions physiologiques (d’après Bayat, 2014). Par la suite, au fur et à mesure de l’avancée de la phase fibroproliférative, une diminution de la compliance pulmonaire avec réapparition d’une hystérésis est constatée. Une corrélation claire a été établie entre la compliance linéaire mesurée sur la courbe P/V et la concentration de procollagène III, marqueur biologique de remodelage alvéolaire, comme le montre la figure 7 (Demoule et al., 2006). En effet, la phase fibroproliférative puis celle de fibrose chronique, sont caractérisées par des dépôts plus ou moins importants de collagène constitué de fibres très peu élastiques allant à l’encontre de la déformation du poumon. Figure 7 : Corrélation entre la concentration de procollagène III (PCP III) dans le lavage broncho-alvéolaire d’individus malades et la compliance linéaire mesurée à une pression expiratoire positive (PEP) donnée. La ligne pointillée verticale indique la concentration seuil de procollagène III au-delà de laquelle le pronostic est décrit comme plus sombre (d’après Demoule et al., 2006). 27 La réduction de la compliance pulmonaire est donc également corrélée au remodelage de la matrice extracellulaire pulmonaire. Le dépôt progressif de fibres de collagène limite le contingent d’alvéoles potentiellement recrutables pour la ventilation. ii. Hypertension artérielle pulmonaire L’apparition d’une hypertension artérielle pulmonaire est possible chez certains patients à des stades avancés du SDRA. Elle résulte de plusieurs mécanismes incluant la genèse de thrombi capillaires, l’augmentation des résistances vasculaires périphériques par vasoconstriction pulmonaire hypoxique et le relargage de médiateurs vasoactifs au cours de l’inflammation (Richard, 2010). L’ensemble des conséquences du SDRA sur la mécanique ventilatoire est synthétisé au sein de l’annexe 3. D. Approche clinique du SDRA 1. Consensus internationaux a. Chez l’Homme L’European American Consensus i. Conference L’émergence d’un consensus quant à la définition du SDRA a été nécessaire afin d’envisager au mieux la pathogénie de la maladie et de proposer une thérapeutique standardisée adaptée. La première évocation du terme SDRA en médecine humaine a été soulevée en 1967 à la suite d’une étude d’Ashbaugh et al. (1967). Sur 272 patients adultes admis en soins intensifs et placés sous assistance respiratoire, douze d’entre eux ne répondaient pas à l’oxygénothérapie initiée (sonde nasale ou respirateur). Cliniquement ceux-ci présentaient une diminution de la compliance pulmonaire s’exprimant par une tachypnée et une dyspnée majeure, une cyanose des muqueuses réfractaire à l’oxygénothérapie, et la visualisation radiographique d’infiltrats pulmonaires bilatéraux. Des similitudes notables ont rapidement été mises en évidence entre ce processus physiopathologique et celui du syndrome de détresse respiratoire des nouveaux nés (maladie des membranes hyalines). À la suite de cette étude, le terme de syndrome de détresse respiratoire a été transposé aux adultes, d’où l’acronyme SDRA (Syndrome de Détresse Respiratoire de l’Adulte). Un grand nombre d’études ont été conduites sur ce syndrome. En 1994, des critères précis ont été définis lors de l’American-European Consensus Conférence (AECC). L’acronyme SDRA a alors été spécifié comme Syndrome de Détresse Respiratoire Aigu et non plus Syndrome de Détresse Respiratoire de l’Adulte, cette pathologie pouvant être décrite à tout âge. Les critères de définition de l’AECC en médecine humaine sont les suivants (Bernard et al., 1994) et sont répertoriés dans le Tableau 3 : 28 - Survenue aigüe de l’atteinte respiratoire. Cependant, du fait des difficultés thérapeutiques souvent rencontrées, la défaillance respiratoire peut devenir chronique et ainsi se prolonger dans le temps. - Hypoxémie définie par un ratio PaO2/FiO2 ≤ 200mmHg (quelque soit la PEP imposée en ventilation assistée). L’hypoxémie correspond à une diminution de la quantité d’oxygène transporté dans le sang. Chez un sujet sain, la pression partielle artérielle en oxygène est égale à 100 mmHg. La fraction inspirée en oxygène dans l’atmosphère ambiante est de 21%. La valeur usuelle du rapport PaO2/FiO2 avoisine ainsi les 476 mmHg. - Absence hypertension artérielle pulmonaire consécutive à une insuffisance cardiaque gauche (pression artérielle pulmonaire ≤ 18mmHg, évaluée par cathéter artériel pulmonaire) et pouvant être à l’origine de l’œdème constaté (i.e. œdème non cardiogénique). - Infiltrats alvéolaires bilatéraux à la radiographie thoracique (incidence ventro-dorsale), compatibles avec un œdème pulmonaire. L’importance de l’infiltration pulmonaire, légère ou marquée, n’est pas ici prise en compte. La conjonction des signes cliniques, physiologiques et radiographiques chez un patient doit ainsi orienter le clinicien vers un diagnostic de SDRA. De plus, une définition de l’« Acute Lung Injury » (ALI) a été proposée conjointement au SDRA. Elle reprend les critères notifiés ci-dessus, excepté pour l’hypoxémie, définie par un ratio PaO2/FiO2 ≤ 300mmHg. Le SDRA correspond ainsi à une forme plus sévère d’ALI. Des patients présentant un SDRA ont donc systématiquement un ALI ; à contrario la présence de lésions pulmonaires aigües n’implique pas nécessairement un SDRA. Tableau 3 : Critères de définition du SDRA selon l’AECC (d’après Chevrolet et Tassaux, 2004). Début Oxygénation artérielle Radiographie thoracique Pression artérielle pulmonaire d’occlusion ALI Brutal PaO2/FiO2 ≤ 39.9 kPa (300 mmHg) quelque soit le niveau de PEP. Infiltrats bilatéraux. SDRA Brutal PaO2/FiO2 ≤ 26.6 kPa (200 mmHg) quelque soit le niveau de PEP. Infiltrats bilatéraux. ≤ 2.4kPa (18 mmHg) ou absence de signes cliniques parlant pour la présence d’une insuffisance ventriculaire gauche. ≤ 2.4kPa (18 mmHg) ou absence de signes cliniques parlant pour la présence d’une insuffisance ventriculaire gauche. 29 ii. Actualisations En 2012, lors de la conférence de Berlin, un groupe de scientifiques de l’European Society of Intensive Care Medecine, a réactualisé la définition du SDRA (Ferguson et al., 2012). Dans la mesure où il n’existe pas de « gold standard » de référence pour attester de la validité de ses critères de détermination, des précisions supplémentaires à l’AECC ont été apportées. Cette révision a été menée afin d’optimiser la fiabilité accordée aux critères d’inclusion du SDRA et de rendre plus sensible sa détection. Trois catégories d’atteinte (légère, modérée ou sévère) ont ainsi été proposées afin d’adapter au mieux le traitement et le pronostic au cas par cas. Parallèlement, la notion d’ALI a été supprimée. L’AECC définit le SDRA par le ratio PaO2/FiO2 indépendamment de la PEP sélectionnée. Or, il a été prouvé que ce ratio pouvait être modifié par le choix des valeurs de PEP et de FiO2 en ventilation assistée. En 2007, Villar et al. ont montré que ces paramètres de ventilation appliqués au cours des premières 24h de prise en charge avaient une incidence sur la catégorisation de l’atteinte pulmonaire et du pronostic associé. Ainsi, des patients répondant initialement (à J0) aux critères de définition de l’AECC pouvaient par la suite (à J+24h) être séparés en trois groupes pour lesquels la sévérité de la défaillance respiratoire différait. Les taux de mortalité se révélaient également distincts. Il a donc été décidé au cours de la conférence de Berlin, que les trois catégories ci-dessous seraient définies pour une PEP supérieure ou égale à 5 cmH2O. Atteinte légère : 200 mmHg < PaO2/FiO2 ≤ 300 mmHg avec une PEP ≥ 5 cmH2O. Atteinte modérée : 100 mmHg < PaO2/FiO2 ≤ 200 mmHg avec une PEP ≥ 5 cmH2O. Atteinte sévère : 100 mmHg ≤ PaO2/FiO2 avec une PEP ≥ 5 cmH2O. La notion de syndrome « aigu » a été spécifiée, dans la mesure où l’AECC ne précise pas à quel délai (heures, jours, semaines) ce terme correspond. Il a été démontré que dans la majorité des cas, le SDRA était détecté dans les 72 heures, au maximum 7 jours, après la reconnaissance de facteurs de risque significativement associés à cette pathologie (Gajic et al., 2011). Une fenêtre d’une semaine entre l’apparition de troubles respiratoires (ou la détection d’une pathologie systémique intercurrente) et le diagnostic du SDRA a ainsi été considérée. Le biais de la variabilité de lecture radiographique inter-opérateur a par la suite été soulevé. Des critères de lecture plus précis et répétables ont été proposés et sont exposés dans le tableau 4. La tomodensitométrie pulmonaire a été proposée comme un outil diagnostic d’imagerie supplémentaire, bien que son coût soit en pratique un frein à son utilisation. Un fichier d’images radiographiques de référence a également été sélectionné par les scientifiques afin d’être mis à disposition de chaque clinicien. La valeur de la PAP comme témoin d’une défaillance cardiaque gauche a de plus été supprimée de la liste descriptive. Cet abandon s’explique par deux raisons : la première s’appuie sur le fait que les cathéters artériels pulmonaires nécessaires à sa mesure sont de moins en moins utilisés en soins intensifs. Deuxièmement, certaines études ont montré qu’un patient pouvait présenter conjointement à la fois un œdème cardiogénique et un SDRA. Les scientifiques ont donc statué qu’un patient dont la défaillance respiratoire (à la lumière de l’anamnèse et des examens complémentaires recueillis) ne peut être directement expliquée par une étiologie cardiaque est considéré comme présentant un SDRA. En cas de doute, le recours à l’échocardiographie peut s’avérer précieux. 30 Tableau 4 : Critères de définition du SDRA selon la conférence de Berlin (d'après Ferguson et al., 2012). Paramètres Critères 1. Hypoxémie PaO2/FiO2 ≤ 200 mmHg avec PEP ≥ 5 cmH2O. < 72 heures. Parenchymateuses bilatérales atteignant au moins 2 quadrants sur le cliché de face. Absence d’évidence clinique d’insuffisance cardiaque congestive (incluant les données du cathétérisme cardiaque et/ou de l’échocardiographie si cliniquement indiqués). Compliance statique du système respiratoire < 50 ml/ cmH2O (sur patient sédaté, Vt de 8 ml/kg et PEP ≥ 10 cmH2O). Présence d’un facteur connu de SDRA direct et/ou indirect. 2. Délai de survenue 3. Opacités radiologiques 4. Origine non cardiogénique 5. Diminution de la compliance pulmonaire 6. Facteurs prédisposants D’autres définitions du SDRA ont été proposées, notamment le « Lung Injury Score » ou le « Delphi System », basées sur des critères de diagnostic clinique similaires (Ferguson et al., 2005). b. Chez les carnivores domestiques Contrairement à la médecine humaine où de nombreuses études ont traité du syndrome de détresse respiratoire aigüe, très peu d’entre elles existent en médecine vétérinaire. Avec la démocratisation des soins apportés aux animaux et le développement de services spécialisés tels que les soins intensifs, de plus en plus d’animaux avec un syndrome similaire au SDRA humain ont été diagnostiqués. Sur la base des acquis en médecine humaine, il a alors été nécessaire de proposer une définition précise du SDRA applicable à la médecine vétérinaire et aux différentes espèces rencontrées en pratique. Une conférence regroupant de nombreux cliniciens compétents en médecine interne et soins intensifs a eu lieu dans ce sens en 2007 (Wilkins et al., 2007). D’après les conclusions de l’AECC en médecine humaine et l’expérience clinique des spécialistes, quatre critères ont été sélectionnés et constituent le socle de définition du SDRA vétérinaire (VetARDS). Ils sont synthétisés dans le tableau 5. 1 - Atteinte aigüe : au cours des 72 heures suivant la survenue d’épisodes de tachypnée ou de détresse respiratoire au repos. 2 - Reconnaissance de facteurs de risque étiologiques connus. 3 - Mise en évidence d’un œdème pulmonaire lésionnel. Cet œdème ne doit pas être la conséquence d’une insuffisance cardiaque gauche consécutive à une augmentation de la pression hydrostatique des capillaires pulmonaires. Chez les petits mammifères, une absence de signes cliniques (dyspnée, insuffisance à l’effort, toux, syncopes…) ou paracliniques (échographie cardiaque) d’une insuffisance cardiaque gauche permet de conclure. 31 Trois examens, à la convenance du clinicien, permettent de valider ce troisième critère : À la radiographie : opacité alvéolo-interstitielle diffuse et bilatérale du champ pulmonaire (plus d’un quadrant ou d’un lobe atteints). Les deux incidences, latérale et ventro-dorsale (ou dorso-ventrale) sont conseillées. Il a été démontré en médecine humaine que la localisation des lésions radiographiques était un critère assez spécifique de distinction d’un œdème cardiogénique ou non cardiogénique (Aberle et al., 1988). Des chiens avec un œdème de décompensation d’insuffisance cardiaque gauche présentent dans la plupart des cas une opacité péri-hilaire. Les localisations des lésions d’œdème non cardiogénique sont plus périphériques, préférentiellement au sein des lobes caudaux dorsaux. Ce critère semble moins fiable chez le chat. À la tomodensitométrie pulmonaire : augmentation bilatérale de la densité du champ pulmonaire sur les coupes obtenues. Mise en évidence d’un liquide riche en protéines (analyse au réfractomètre) dans les voies respiratoires hautes. 4- Altération de l’efficacité des échanges gazeux : Hypoxémie sans qu’une PEP ne soit appliquée et avec une FiO2 connue (air ambiant, cage à oxygène, ventilation assistée après intubation). Celle-ci est définie par un ratio PaO2/FiO2 ≤ 200mmHg pour le SDRA et ≤ 300mmHg pour l’ALI. L’augmentation de la ventilation d’espaces morts en ventilation assistée peut être également le témoin d’une détérioration des échanges gazeux. Un cinquième critère a été évoqué : il s’attache à la mise en évidence de marqueurs de l’inflammation pulmonaire évocateurs du SDRA à l’origine de l’augmentation de la perméabilité alvéolo-capillaire. La cytologie après réalisation d’un lavage broncho-alvéolaire ou trans-trachéal se révèle être un examen de choix avec observation d’une neutrophilie marquée. Cependant ce type d’examen n’étant actuellement pas réalisé en pratique, ce cinquième critère ne rentre pas dans la liste de définition. 32 Tableau 5 : Critères de définition du SDRA en médecine vétérinaire (traduit d'après Wilkins et al., 2007). Les quatre critères ci-dessous doivent être remplis. Le cinquième reste encore optionnel. - - - Apparition aigüe (<72h) d’un épisode de tachypnée ou d’une détresse respiratoire au repos. Présence de facteurs de risque connus. Mise en évidence d’un œdème pulmonaire d’origine non cardiogénique (PAP<18mmHg / absence de signes cliniques ou paracliniques d’une insuffisance cardiaque gauche) 1- Infiltrats bilatéraux diffus visibles à la radiographie thoracique. 2- Territoires pulmonaires hyperdenses bilatéraux à l’examen tomodensitométrique. Mise en évidence d’une altération des échanges gazeux : Hypoxémie à une FiO2 connue et sans application de PEP. 1- Ratio PaO2/FiO2 ≤ 200mmHg pour le VetARDS 2- Ratio PaO2/FiO2 ≤ 300mmHg pour le VetALI 3- Augmentation du gradient alvéolo-artériel en oxygène (PAO2 – PaO2 gradient) Inadéquation des rapports V/Q : effet SHUNT et ESPACE MORT. Mise en évidence d’un état inflammatoire pulmonaire diffus Neutrophilie, présence de biomarqueurs de l’inflammation au lavage broncho alvéolaire ou trans-trachéal. 2. Diagnostic pratique en clinique vétérinaire Un ensemble d’informations anamnestico-cliniques doivent être recueillies. Des examens complémentaires sont à la disposition des cliniciens et permettent d’obtenir certaines données paracliniques inclues dans les critères de définition du VetARDS. Le recueil des éléments ci-dessous est impératif : - Signalisation de l’animal. Âge, sexe, poids, race, antécédents médicaux notables doivent être répertoriés. Les données concernant le statut cardiaque de l’animal s’avèrent indispensables. La prévalence du syndrome en médecine vétérinaire étant peu renseignée, une base de données disponible pour de futures études rétrospectives est intéressante à créer. - Examen clinique complet. Une attention particulière doit être portée à l’auscultation cardiorespiratoire. Tachypnée, dyspnée restrictive, cyanose des muqueuses, orthopnée dans les cas les plus sévères sont des symptômes d’alerte. L’expectoration d’une mousse rosée est de mauvais pronostic (Declue, 2007). L’augmentation de bruits respiratoires expiratoires auxquels des bruits de crépitants s’ajoutent doit alerter le clinicien sur un potentiel œdème pulmonaire. L’auscultation cardiaque pouvant être masquée par l’augmentation des bruits pulmonaires, l’historique cardiaque de l’animal doit être renseigné. - Evaluation de la fonction des autres organes (foie, reins, appareil génital, appareil vasculaire). La recherche étiologique du SDRA passe par la prise en compte des dysfonctions organiques et systémiques majeures. Des examens de sang biochimiques et de numération formule sanguine sont classiquement disponibles en ce sens. 33 - Examens complémentaires d’imagerie. Les radiographies thoraciques (incidence latérale et ventro-dorsale) permettent d’évaluer la radio-opacité du champ pulmonaire (Figure 8). Le clinicien peut avoir recours à l’échographie cardiaque afin d’écarter une suspicion d’œdème cardiogénique. Figure 8 : Radiographie thoracique (incidence latérale) d’un chat atteint de SDRA. Noter l’opacité alvéolo-interstitielle majeure du champ pulmonaire (les flèches noires annotent des images de bronchogramme). L’examen du cœur ne montre pas d’anomalie (d'après Amy E. Declue, 2007). - Analyse des gaz du sang attestant de la fonction pulmonaire. Une prise de sang artérielle permet, grâce à un analyseur, d’obtenir les valeurs des gaz du sang (PaO2, PaCO2, pH, tCo2, HCO3-, valeur des électrolytes) ainsi que celle de l’hématocrite sanguin. La valeur de PaO2 est indispensable pour la réalisation du ratio PaO2/FiO2. En pratique cette prise de sang n’est pas évidente à obtenir à moins d’avoir le matériel et des spécialistes à disposition. Les prises de sang sont en effet majoritairement réalisées sur une veine périphérique. La mise sous ventilation assistée permet, grâce au capnographe et à l’oxymétrie de pouls d’avoir une bonne approximation de la PaO2 et de la PaCO2. L’oxymétrie de pouls est une méthode non invasive donc appréciable en soins intensifs sur des animaux présents au long terme. Cependant, ces mesures restent approximatives : ainsi une SpO2 de 95% est indicative d’une PaO2 voisine de 80mmHg (Hopper et Powell, 2013). L’étude récente de Calabro et al. (2013) rapporte une bonne corrélation entre le ratio SpO2/FiO2 et PaO2/FiO2 dans le diagnostic du SDRA. Communément, une hypoxémie, une hypercapnie (l’animal en détresse respiratoire hypoventile et ne réussit donc pas à éliminer le dioxyde de carbone produit par son métabolisme de base) ainsi qu’une acidose métabolique sont observées. Ces résultats sont cependant à moduler en fonction de la cause sous jacente au SDRA. 34 - Paramètres de ventilation assistée du patient. Une fois l’animal pris en charge et selon la technique d’oxygénothérapie souhaitée, les paramètres tels que la fréquence respiratoire, la FiO2, la pression de plateau, le volume courant et la PEP, sont à renseigner. D’autres examens sont réalisables comme l’analyse des sécrétions recueillies par lavage broncho-alvéolaire. Une analyse directe au réfractomètre révèle le plus souvent un liquide riche en protéines. L’analyse cytologique montre une population de cellules inflammatoires (granulocytes neutrophiles) en grande quantité. 3. Epidémiologie a. Incidence et mortalité du SDRA i. Chez l’Homme Il existe une grande hétérogénéité dans la littérature quant à l’incidence du SDRA en médecine humaine. Ce constat fait écho à l’absence de consensus jusqu’en 1994 (AECC), rendant difficile l’analyse des études réalisées jusque là. Les critères d’inclusion ont par la suite été modifiés, affinés, ce qui peut expliquer la variabilité du nombre de cas rapportés dans les différentes études. De plus le diagnostic de SDRA étant posé en réanimation, la mesure de son incidence est fortement dépendante du nombre de services et de places disponibles pour les malades. Sur la base des critères de l’AECC, Luhr et al. (1999), rapportent une incidence de 13,4 cas pour 100 000 habitants par an. Les recherches épidémiologiques menées avant 1999 font état d’une incidence plus faible (4,8 patients/100 000 habitants/ an dans une étude menée en 1995 dans l’état de l’Utah). Cette variabilité peut s’expliquer notamment par la sélection des patients sur un ratio PaO2/FiO2 différent (PaO2/FiO2 ≤200mmHg en 1999 versus PaO2/FiO2 ≤ 110mmHg en 1995). La dernière étude d’incidence européenne a été conduite dans 78 services de soins intensifs de 10 pays européens (Brun-Buisson et al., 2004). Tous les patients admis plus de 4h étaient examinés afin de déceler un ALI, et suivis dans les 2 mois suivant leur hospitalisation. L’inclusion des patients était réalisée sur la base des critères de l’AECC. Sur 6522 patients, 463 d’entre eux présentaient un ALI (soit 7,1%). A l’issue de 3 jours de prise en charge, 86,6% d’entre eux avaient rapidement développé un SDRA (401 patients considérés pour un ratio PaO2/FiO2 ≤ 200mmHg). À la lumière de cette étude, l’incidence du SDRA a ainsi pu être évaluée à environ 6% des patients introduits en unité de soins intensifs. Trente huit ans après la première évocation du SDRA, la mortalité associée à cette affection reste élevée et le pronostic mitigé, bien que celui-ci dépende de l’étiologie sous jacente. Là encore, les données sont très disparates. Phua et al., (2009) ont passé en revue les études prospectives et les programmes de recherche d’essais thérapeutiques menés entre 1984 et 2004. Ont été pris en compte les travaux qui incluaient 50 patients ou plus avec un ALI/SDRA et qui rapportaient un taux de mortalité. Deux périodes ont été considérées, de 1984 à 1994 puis de 1994 à 2004, une fois la définition de l’AECC reconnue. Il en résulte que : la valeur moyenne de la mortalité entre 1994 et 2004 s’élevait à 44% dans les études prospectives (intervalle de confiance à 95% [40,1 ; 47,5]). Elle s’abaissait à 36,2% dans les essais randomisés (intervalle de confiance à 95% [32,1; 40,5]) (Phua et al., 2009). La figure 9 rapporte l’évolution de la mortalité sur les périodes détaillées ci-dessus. 35 Mortalité totale pondérée Figure 9 : Taux de mortalité rapporté des patients souffrant de SDRA dans les études prospectives (cercles noirs) et les essais thérapeutiques (cercles blancs) entre 1981 et 2004 (d’après Phua et al., 2009). Année médiane des essais cliniques étudiés Dans l’étude de Brun-Buisson et al. (2004), la mortalité des patients atteints du SDRA et d’ALI s’élevait respectivement à 57,9% et 32,7% (p <0,05). Le pronostic à terme est modulé par la sévérité de l’atteinte pulmonaire. ii. Chez les carnivores domestiques Très peu d’informations existent quant à la mortalité et au pronostic en médecine vétérinaire. L’évolution va de la récupération complète de la fonction pulmonaire à une aggravation rapide de l’affection. Dans ce cas, l’issue est considérée comme néfaste. Les animaux présentés avec une détresse respiratoire aigüe nécessitant une assistance respiratoire au long terme décèdent fréquemment de sepsis ou de défaillance multi-organique. De plus, pour des raisons éthiques, techniques ou financières, il n’est actuellement pas envisageable de maintenir un animal sous ventilation assistée pendant plusieurs semaines b. Facteurs prédictifs de mortalité en médecine humaine Des indices pronostiques associés à des scores de gravité pulmonaire existent en médecine humaine. Leur intérêt réside dans la caractérisation de la sévérité du terrain médical de chaque patient afin d’ajuster au mieux la thérapeutique. Des scores de gravité non spécifiques du poumon tels que le « Simplified Acute Physiology Score » (SAPS) ou l’« Acute Physiology and Chronic Health Evaluation » (APACHE) sont utilisés en unité hospitalière. Le score « SAPS II » a été considéré comme le plus fiable pour prédire la mortalité du SDRA (Monchi et al., 1998). Différents paramètres anamnestico-cliniques sont pris en compte : âge, fréquence cardiaque, rapport PaO2/FiO2, pression artérielle systémique, score de Glasgow, valeur des électrolytes… Ils doivent être sélectionnés dans les 24h suivant l’admission en urgence-soins intensifs, dans un logiciel conçu à cet usage. Le pronostic est déterminé aux vues de la valeur du score obtenu. Plus ce score est élevé à l’arrivée, plus le pronostic est sombre. D’autres paramètres se référant à l’anamnèse sont considérés comme facteurs de risque de mortalité : l’âge du patient, si ce 36 dernier a préalablement séjourné à l’hôpital avant la survenue du SDRA ainsi que la présence d’un processus immunosuppressif concomitant. La normalisation des valeurs des gaz du sang et du ratio PaO2/FiO2 au cours de l’hospitalisation sont de toute évidence des marqueurs prédictifs positifs. L’étude de Monchi et al. (1998) soulève cependant que la valeur du ratio PaO2/FiO2 mesuré à J0 (soit le jour de l’admission) n’est significativement pas différente parmi les patients décédés et ceux ayant survécu. Ce ratio n’est donc pas un facteur pronostic initialement utilisable pour préjuger de l’issue du SDRA. Il a par contre été montré que l’index d’oxygénation est un indice prédictif offrant une bonne sensibilité en début d’évolution. Dans une étude de ventilation à haute fréquence, les patients décédés au cours de l’expérience présentaient à leur entrée un index d’oxygénation plus élevé (> 47) que les survivants (Fort et al., 1997). Cet index utilisé particulièrement en pédiatrie est facile à mettre en œuvre et d’interprétation aisée : son augmentation est signe d’une détérioration de l’oxygénation du patient. Index d’oxygénation = (Pmoy voies aériennes (mmHg) × FiO2 × 100) ÷ PaO2 (mmHg) La pression moyenne dans les voies aériennes est le reflet de la pression alvéolaire. Les scores de gravité et des paramètres comme l’index d’oxygénation sont bien corrélés avec le pronostic du SDRA. Ceux-ci ne sont pas décrits en médecine vétérinaire. L’issue doit être anticipée en prenant en compte l’affection étiologique à l’origine du SDRA et la réponse de l’animal à la thérapeutique engagée. Aucune étude ne fait état d’un taux de mortalité significativement différent selon l’origine primaire ou secondaire du SDRA. Cependant, la présence d’une déficience multi-organique semble de toute évidence être un facteur prédictif négatif de mortalité. 37 38 Les stratégies thérapeutiques de prise en charge du SDRA II. A. La ventilation mécanique chez l’Homme La ventilation mécanique constitue le socle de la prise en charge thérapeutique du syndrome de détresse respiratoire aigüe. Celle-ci doit remplir deux fonctions : Améliorer les capacités ventilatoires du patient de manière à soutenir sa fonction respiratoire. L’efficacité de l’oxygénation et de la ventilation est une priorité. Le relais par un ventilateur permet de diminuer le travail des muscles respiratoires. Minimiser les impacts délétères de la ventilation afin d’empêcher l’aggravation des lésions alvéolaires préexistantes. Au cours du SDRA, l’hématose est impactée : l’objectif de cette assistance consiste à homogénéiser la ventilation, sans modification de la perfusion, et ainsi de rétablir les rapports V/Q. L’assistance respiratoire peut être soit totale (ventilation assistée contrôlée), soit partielle si le patient conserve une activité respiratoire. Ces dix dernières années, de nombreuses études se sont penchées sur le sujet et ont abouti à la publication de valeurs de référence concernant les paramètres disponibles en ventilation mécanique. Les progrès réalisés ont justifié d’adapter la prise en charge à chaque pathologie pulmonaire, à la lumière des mécanismes physiopathogéniques mis en jeu. Le SDRA reste une affection fréquente et sévère mais les stratégies de ventilation actuelles ont permis une réduction significative de la mortalité; elles font actuellement foi en médecine humaine. Cependant, du fait de la découverte de traumatismes induits par la ventilation pouvant aggraver les lésions préexistantes, l’un des objectifs de la ventilation mécanique est également de limiter les risques de complications en assurant un support ventilatoire le moins traumatique possible. Ces manœuvres sont réalisées dans l’attente de l’efficacité du traitement étiologique du SDRA. 1. Rappels sur la ventilation mécanique artificielle a. Mécanique ventilatoire assistée En ventilation spontanée, l’inspiration est un phénomène actif qui se fait à pression négative sous l’action des différents muscles thoraciques et du diaphragme. À contrario, la ventilation mécanique assistée est dite à « pression positive ». Lors de l’insufflation, la pression dans les voies aériennes augmente selon les réglages de la machine et des capacités ventilatoires du patient. Si le patient ne fait pas d’effort inspiratoire, le diaphragme subit l’augmentation de volume des poumons par le biais des pressions positives provenant du ventilateur. Dans cette partie, nous nous plaçons en ventilation assistée contrôlée. L’apport d’un certain volume d’oxygène au poumon engendre une pression positive qui peut être décomposée en plusieurs entités. On distingue la pression de crête maximale (Pmax), la pression de plateau (Pplat) et pression téléexpiratoire positive (PEP), annotées sur la figure 10. 39 Figure 10 : Illustration de la pression d’entrée des voies aériennes au cours d’un cycle respiratoire en ventilation mécanique contrôlée (d’après Jaber et al., 2007). Pression de crête (Pmax) = pression maximale atteinte à l’intérieur des voies aériennes pendant l’insufflation. Elle correspond à la somme de la pression de fin d’expiration, de la pression inspiratoire résistive et de la pression élastique, définies ci-dessous. Pression de plateau (Pplat) = pression alvéolaire maximale à l’issue de l’inspiration. Sa mesure se fait par une pause en fin d’inspiration. Pression expiratoire positive = pression alvéolaire résiduelle à l’issue de l’expiration. Sa mesure se fait par une pause en fin d’expiration. Il existe deux types de PEP : - La PEP intrinsèque correspond à la celle du patient placé sous ventilation assistée. Elle est la conséquence d’une expiration incomplète liée à un temps expiratoire insuffisant. Cette pression est supérieure à celle de la pression atmosphérique (Constantin et al., 2004). - La PEP extrinsèque, positive, correspond à la pression réglée intentionnellement par le clinicien sur la machine ventilatoire. PEP totale = PEP intrinsèque + PEP extrinsèque b. Notion de pression résistive, pression élastique Afin d’expliciter les notions de résistivité et d’élasticité, le système thoracopulmonaire peut être modélisé par un ballon de baudruche déformable. Initialement, il est nécessaire de souffler fort pour ouvrir le collet du ballon : une pression élevée est d’emblée mise en jeu afin de vaincre les forces de résistance au passage de l’air. Une fois le collet ouvert, l’effort pour gonfler le ballon, compliant, est moindre et requiert une pression dont l’augmentation est plus progressive. De même, lors de l’insufflation, le ventilateur doit contrer les forces de rétraction résistives et élastiques. Schématiquement, nous pouvons diviser l’arbre respiratoire en deux sections : 1/ Voies aériennes supérieures, trachée et bronches souches principales. 40 Au sein de ces conduits, l’augmentation de pression est directement liée au débit sélectionné. La résistance des voies aériennes est définie par la relation pression/débit : celle-ci s’oppose à l’écoulement de l’air dans le système respiratoire de conduction. 2/ Le secteur bronchio-alvéolaire. Au sein des bronchioles et alvéoles, l’augmentation de pression est directement liée au volume insufflé. La compliance pulmonaire est définie par la relation pression/volume, comme nous l’avons précédemment évoqué. L’analyse de la figure 10 ci-dessus, permet de définir la pression résistive liée aux résistances à l’écoulement du gaz dans les voies aériennes et le matériel de ventilation (sonde d’intubation) ainsi que la pression élastique liée à la compliance du système pulmonaire. Pression résistive = Pression de crête - pression de plateau, en fin d’inspiration. Pression élastique = Pression de plateau – pression expiratoire positive, en fin d’expiration. Nous pouvons ainsi aisément calculer la compliance (C) et la résistivité (R) du système si le débit inspiratoire (Dinsp) et le volume courant (Vt) sont connus : R = C= Pression résistive Dinsp é La pression résistive s’élève si le débit d’insufflation réglable sur le ventilateur et la résistance dans le matériel d’intubation ou les voies aériennes augmentent. La pression élastique s’élève si le volume courant réglable sur le ventilateur augmente ou si la compliance pulmonaire diminue. La pression mesurée par le ventilateur (P) répond à l’équation du mouvement respiratoire : P = (R × Dinsp) + ((1/C) × Vt) + PEPtot. Cette équation montre que pour un débit et un volume donnés, la pression des voies aériennes dépend des capacités mécaniques, dynamiques (R) et statiques (C) du système ainsi que de la PEP totale. Au cours du SDRA, la diminution de compliance a donc un impact sur les pressions mesurées par le ventilateur, Pcrête et Pplateau. L’altération des propriétés élastiques du poumon et la réduction de son volume aéré induisent une forte élévation de ces pressions pour un faible volume insufflé. 41 2. Hétérogénéité pulmonaire inhérente au SDRA La perte d’aération liée au SDRA peut prendre deux formes : une forme diffuse ou focale (Rouby et Lu, 2005). L’atteinte focale est la plus souvent retrouvée, que l’étiologie du SDRA soit primaire ou secondaire. La présentation diffuse fait principalement suite à une agression pulmonaire (Rouby et al., 2000). Les images radiographiques sont alors équivoques et prennent un aspect typique de poumons uniformément blancs. Dans cette situation, l’intégralité du parenchyme pulmonaire est touchée : en fin d’expiration, le poumon est donc exclusivement constitué de zones pauvrement aérées. Au contraire, en cas de perte d’aération focale, les lésions sont souvent unilatérales et ne condamnent qu’une partie du système pulmonaire. Ce constat se réfère aux études de Gattinoni et al. en 2001 qui ont mis en exergue une entité pathologique du SDRA : l’hétérogénéité de l’atteinte pulmonaire. En ce sens, l’apport de la tomodensitométrie pulmonaire a été un outil extrêmement précieux. Nous avons déjà évoqué dans la première partie de cet exposé la régionalisation des territoires ventilés : l’analyse des coupes tomodensitométriques a permis de mettre en évidence une augmentation des zones non aérées selon un axe antéropostérieur et crânio-caudal. En décubitus dorsal, la perte d’aération prédomine donc dans les lobes inférieurs diaphragmatiques. Ainsi, dans sa forme lobaire, le SDRA est une pathologie pulmonaire restrictive dans laquelle des zones « malades » coexistent avec des zones relativement « saines » (Figure 11). En parallèle, l’observation de ces images tomodensitométriques au cours de manœuvres ventilatoires révélait que ces territoires distincts s’ouvraient à des pressions différentes : de basses pressions de crête (≤ 10 cmH2O) assuraient le recrutement des zones saines tandis que de hautes pressions de crête (≥ 30 cmH2O) étaient requises pour des régions plus denses. D’autres zones, trop pathologiques restaient non disponibles pour la ventilation (Gattinoni et al., 2001). Les images scanner de patients atteints d’un SDRA d’origine pulmonaire montrent principalement des zones consolidées, difficilement recrutables. A contrario, concernant les SDRA d’origine extra-pulmonaire, les poumons semblent présenter majoritairement des territoires atélectasiés mais favorablement recrutables (Malarkkan et al., 2003). Cette inhomogénéité pulmonaire rend particulièrement difficile les réglages de la ventilation mécanique. En effet, si les zones collabées s’ouvrent avec l’augmentation du volume courant (ou de la pression inspiratoire), les zones saines risquent une surdistension, d’autant que les gaz apportés par la ventilation se répartissent préférentiellement dans les parties les plus compliantes, dont la pression d’ouverture est plus basse. 42 Figure 11 : Hétérogénéité pulmonaire au cours du SDRA après une manœuvre ventilatoire (d’après Jaber et al., 2007). Zones de consolidations et d’atélectasies (partiellement aérées) Zones surdistendues Zones normales 3. Objectifs et limites de la ventilation mécanique artificielle a. Recrutement et dérecrutement alvéolaires L’objectif principal de la ventilation est l’ouverture des alvéoles pauvrement aérées de manière à réduire le shunt intrapulmonaire : c’est ce que l’on appelle le recrutement alvéolaire. Ainsi, ce phénomène dynamique correspond à l’aération de territoires initialement non disponibles. L’expansion alvéolaire résulte : - De la pression de plateau qui règne dans les alvéoles en fin d’inspiration. - De la PEP, pression de fin d’expiration, qui maintient un certain volume résiduel dans les alvéoles. Les unités sont ainsi plus aisément recrutables au début du cycle respiratoire suivant. L’utilité de la PEP sera abordée par la suite. Le dérecrutement alvéolaire correspond au collapsus des alvéoles, court-circuitées des échanges gazeux. La réduction du volume pulmonaire aéré, caractéristique du SDRA, implique que de nombreuses alvéoles soient initialement dérecrutées. Un soutien ventilatoire est instauré afin de recruter ces zones, non mobilisables physiologiquement. Cependant, la ventilation mécanique peut également être à l’origine de phénomènes de dérecrutement, défavorables à l’optimisation des capacités ventilatoires du patient. Ainsi, une ventilation basée sur des pressions et volumes réduits n’est pas à même de contrer les forces thoracopulmonaires de rétraction élastique et conduit à l’affaissement téléexpiratoire des unités alvéolaires. D’autres manœuvres telles que la sédation et l’aspiration trans-trachéale perventilatoire sont également à même de favoriser le dérecrutement de certains espaces (Maggiore, 2003). Pendant longtemps, la préoccupation des cliniciens en médecine humaine a été de corriger les échanges gazeux défectueux. Afin de recruter au mieux les territoires d’atélectasie et de limiter le dérecrutement alvéolaire, de hauts volumes et pressions ont été utilisés. 43 Cependant, cette stratégie s’est rapidement révélée délétère du fait l’hétérogénéité pulmonaire constatée dans le SDRA. b. Le VILI ou Ventilatory Induced Lung Injury Un bouleversement des pratiques est survenu après que les cliniciens ont remarqué que l’application de pressions et de volumes élevés était à l’origine de graves lésions pulmonaires et d’une aggravation des anomalies préexistantes du SDRA. Ces lésions iatrogènes sont regroupées sous le terme de VILI, Ventilatory Induced Lung Injury (Dreyfuss et Saumon, 1998). Deux atteintes sont communément distinguées: le barotraumatisme, conséquence d’une surpression alvéolaire et le volotraumatisme lié à de hauts volumes insufflés. Les mécanismes lésionnels liés à la ventilation « traditionnelle » sont imputables à l’inhomogénéité du tissu pulmonaire. En effet, les pressions et volumes nécessaires au recrutement de territoires shuntés ne peuvent être appliqués de manière identique à des zones saines. Ces dernières risquent une surdistension alvéolaire survenant en fin d’inspiration. La pression de plateau est le reflet de la pression alvéolaire maximale de fin d’inspiration. C’est sa valeur qui doit être suivie car elle traduit le mieux le risque de surdistension. Grâce aux technologies actuelles, elle s’obtient aisément en réalisant une pause en fin d’inspiration. La pression de plateau est définie par rapport à la pression élastique et la PEP totale. La pression élastique dépend de la compliance du système pulmonaire, fonction de l’affection pulmonaire sous-jacente, et du volume courant. En pratique, la pression de plateau peut donc être modulée selon les valeurs du volume courant et de la PEP extrinsèque sélectionnées par le clinicien. La pression maximale (pression de crête) reflète à la fois la pression alvéolaire mais également la pression résistive c’est à dire celle régnant dans les voies respiratoires hautes et le circuit de ventilation. Cette variable est donc moins fiable pour suivre l’évolution de la pression au sein des unités alvéolaires. Des études basées sur des modèles animaux puis des essais randomisés et contrôlés ont progressivement déterminé l’impact de hautes pressions d’insufflation puis de grands volumes courants en ventilation mécanique artificielle. Cependant, il reste difficile d’évaluer l’étendue des lésions imputables au VILI : en effet, leur survenue dépend non seulement du type de ventilation délivrée mais également de l’atteinte pulmonaire sous-jacente sensibilisant l’arbre respiratoire. Les travaux ont donc été initialement menés sur des poumons sains puis sur des poumons atteints de SDRA. i. Mécanismes physiopathologiques Les premières expériences ont été réalisées en 1974 sur des rats sains, ventilés avec trois valeurs différentes de pressions de crête (Pcrête) : 14, 35 ou 45 cmH2O. Après une heure d’expérimentation, les rats recevant une Pcrête de 30 et 45 cmH2O avaient développé un œdème pulmonaire aigu dont la sévérité était corrélée aux valeurs les plus élevées. Ceux soumis à une Pcrête de 14 cmH2O ne présentaient pas d’anomalie (Webb et Tierney, 1974). En 1992, Dreyfuss et al. ont prouvé de manière similaire que l’application durant deux minutes d’une Pcrête de 35 cmH2O conduisait précocement à une altération de l’homéostasie pulmonaire comme en témoignait la récupération d’un liquide riche en protéines après lavage broncho-alvéolaire. 44 Une étude en particulier a alors émis l’hypothèse que cet œdème résultait du même mécanisme physiopathologique que celui impliqué dans le SDRA, à savoir l’altération de la perméabilité alvéolo-capillaire (Parker et al., 1984). Pour confirmer ce postulat, des poumons sains isolés de chien ont été soumis à des valeurs graduelles de pression de crête (de 3 à 65 cmH2O]) durant 20 minutes. La perméabilité de l’endothélium vasculaire était évaluée par des mesures successives du coefficient de filtration capillaire (Kfc). Il en résulte que la valeur de Kfc était nettement augmentée après l’application de hautes de pressions de crête, comme le rapporte la figure 12. Par ailleurs, ce coefficient n’était modifié qu’à partir d’une pression de 30 cmH2O ce qui suggère l’existence d’une valeur seuil au-delà de laquelle la perméabilité est altérée. Le coefficient de réflexion osmotique moyen, marqueur de la perméabilité alvéolocapillaire, était parallèlement évalué et sa valeur était diminuée pou r des pressions de crête supérieures à 30 cmH2O. Figure 12 : Evaluation du coefficient de filtration capillaire (Kfc) en fonction de valeurs croissantes de pression de crête appliquées sur des poumons de chien isolés (d’après Parker et al., 1984). Intervalles de pressions de crête (cmH2O) Pression de crête (cmH2O) 45 ii. Manifestations macroscopiques et microscopiques Conjointement, une description des lésions macroscopiques et microscopiques a été proposée dans le cadre d’études post mortem. Les modifications macroscopiques observables sur un poumon sain de rat soumis à une Pcrête de 45 cmH2O à To, To+ 5 minutes et To+ 20 minutes sont visibles sur la figure 13. À l’issue de vingt minutes de ventilation, ce poumon présentait une congestion notable associée à un œdème infiltrant expliquant l’augmentation de volume observée (Webb et Tierney, 1974). Par ailleurs, des lésions pulmonaires semblables à celles retrouvées en phase exsudative du SDRA ont été mises en évidence à l’autopsie de plusieurs cochons sains. Ces derniers avaient été monitorés avec une Pcrête de 40 cmH2O, une fréquence respiratoire de 20 mouvements par minute ainsi qu’une PEP de 5 cmH2O. L’analyse histologique dévoilait une infiltration neutrophilique, une prolifération macrophagique, des hémorragies alvéolaires ainsi que la présence de multiples membranes hyalines (Tsuno et al., 1991). Une altération diffuse des cellules épithéliales et endothéliales, détachées de leur membranes basales respectives a également été décrite en microscopie électronique (Dreyfuss et al., 1985). Figure 13 : Lésions macroscopiques sur un poumon de rat sain ventilé avec une pression de crête de 45 cmH2O à To, To+ 5 minutes et To+ 20 minutes (respectivement de gauche à droite) (d’après Webb et Tierney, 1974). Alors qu’initialement les cliniciens pensaient que seules de hautes pressions de crête pouvaient occasionner un VILI, la notion de volotraumatisme est ensuite née des travaux de Dreyfuss et al., en 1988. L’objectif était de déterminer l’implication respective de hautes pressions inspiratoires et de volumes courants importants. Pour y répondre, trois groupes de rats sains ont été séparés et ventilés selon les réglages décrits ci-dessous : 46 Groupe 1: HiP – LoV pour High Pressure/Low Volume. Groupe ventilé avec un Vt bas et une Pcrête élevée afin d’évaluer indépendamment l’impact de hautes pressions. Groupe 2: LoP – HiV pour Low Pressure/ High Volume. Groupe ventilé avec un Vt élevé et une Pcrête basse afin d’évaluer indépendamment l’impact de hauts volumes. Groupe 3: HiP – HiV pour High Pressure /High Volume. Groupe ventilé avec un Vt et une Pcrête élevés. Les résultats qui en ressortaient sont les suivants : à l’issue de l’expérimentation, le groupe 3 (HiP – HiV) avait développé un œdème pulmonaire aigu conséquent et des altérations pulmonaires à l’histologie compatibles avec celles décrites précédemment. Étonnamment, le groupe 1 (HiP – LoV) ne présentait aucune anomalie et l’ultrastructure des poumons se révélait normale en microscopie électronique. À contrario, le groupe 2 (LoP – HiV), soumis à des volumes élevés, présentait un œdème pulmonaire notable. L’augmentation du volume courant seul semblait ainsi responsable de lésions iatrogéniques, d’où l’introduction du terme volotraumatisme. L’existence d’un VILI à hauts volumes associé à de hautes pressions est maintenant clairement démontrée et est à l’origine d’une surdistension alvéolaire se manifestant en microscopie électronique par des lésions de la barrière alvéolo-capillaire expliquant l’œdème lésionnel retrouvé. Ces traumatismes peuvent conduire in fine à une rupture alvéolaire. Dans ce cas, un pneumothorax iatrogène est fréquemment mis en évidence sur les clichés radiographiques (Pierson et al., 1986). Plus tardivement, un autre processus lésionnel a été suspecté comme intervenant pour une grande part dans le VILI : celui d’un « stress alvéolaire » lié à une fermeture/ouverture cyclique de certaines unités alvéolaires instables (Maggiore, 2003). L’alternance d’un collapsus expiratoire suivi d’une réouverture inspiratoire est à l’origine de phases répétitives de dérecrutement. Ce phénomène appelé atélectraumatisme, est une conséquence de la réduction du volume courant, acte pourtant nécessaire aux vues de l’ampleur des lésions induites par la ventilation traditionnelle. Ce volume courant, réduit, est alors trop faible pour empêcher les alvéoles de ne pas s’affaisser à l’expiration. L’objectif des chercheurs a alors été de trouver un moyen de maintenir le poumon « ouvert » contre ce phénomène. L’utilité de la PEP a ainsi été évoquée. La présence d’un volume résiduel téléexpiratoire est en effet fondamentale. D’après la loi de Laplace, de moindres pressions d’insufflations sont nécessaires pour expandre des alvéoles préalablement ouvertes. Par ce biais, la PEP restreint les pressions utiles requises pour le recrutement et limite le VILI. L’atélectraumatisme est à l’origine de contraintes de cisaillement qui favorisent notamment la production de cytokines pro-inflammatoires. À titre d’exemple, dans l’étude de Chu et al. en 2004, la concentration en IL-6 et d’une protéine inflammatoire synthétisée par les macrophages était significativement plus importante dans le LBA de poumons de rats sains ventilés à bas Vt sans PEP par rapport à une PEP de 5 cmH2O (Chu et al., 2004). 47 Mécanismes à l’origine du VILI 1/ Existence de hautes pressions de plateau alvéolaires liées à une augmentation du volume courant et de la pression crête. Surdistention alvéolaire en fin d’inspiration. 2/ Existence de pressions alvéolaires en fin d’expiration chutant sous la valeur seuil du point d’inflexion inférieur et mobilisant des forces de distension très importantes pour rouvrir les alvéoles au cycle inspiratoire suivant. Phénomènes de dérecrutement/recrutement à chaque cycle. Lésions alvéolaires de surdistension et de cisaillement aboutissant à une altération de la perméabilité alvéolo-capillaire. L’annexe 4 reprend les mécanismes et conséquences du VILI. iii. VILI et SDRA Des poumons sensibilisés par une agression directe ou indirecte sont, de toute évidence, plus sensibles au VILI que des poumons sains. Les risques liés à une ventilation traditionnelle sont ainsi amplifiées. La baisse de compliance observée dans le SDRA s’accompagne d’une augmentation de la pression élastique d’où une élévation de la pression alvéolaire intrinsèque téléinspiratoire (Thille et al., 2005). Ainsi, plus la compliance pulmonaire est faible, plus les lésions causées par le baro/volotraumatisme sont majorées. Une comparaison des lésions post mortem retrouvées sur des poumons de patients atteints de SDRA, ventilés avec différentes valeurs de Pcrête et de Vt a été réalisée par Rouby et al. en 1993. La taille des lésions bulleuses de distension alvéolaire était significativement plus importante parmi les patients ventilés avec une P crête et un Vt plus élevés (Pcrête = [56 +/- 18 cmH2O] versus [44 +/- 10 cmH2O] avec p < 0,05, Vt = [12 +/- 3 ml/kg] versus [9 +/- 2 ml/kg] avec p < 0,05). Ces lésions étaient principalement visibles dans les zones non dépendantes du poumon, plus sujettes à la surdistension. Dans une étude incluant 5183 sujets ventilés pour diverses pathologies pulmonaires, l’incidence du barotraumatisme s’élevait à 6,5% des patients atteints de SDRA (Anzueto et al., 2004). En outre, le taux de mortalité était significativement plus élevé parmi les patients ayant subi un barotraumatisme (51,4% contre 39,2% avec un p<0,05 sur les 5183 sujets inclus dans l’étude). 4. Recommandations actuelles : la ventilation protectrice a. Courbe pression/volume au cours du SDRA La courbe pression/volume tracée sur la figure 14 est un instrument d’exploration physiologique et d’aide à la prise en charge ventilatoire des patients atteints du SDRA. Elle est actuellement fournie sur la plupart des ventilateurs disponibles en services de réanimation humaine. 48 Figure 14 : Courbes pression/volume comparées chez un individu sain (courbe en pointillés) et un individu atteint de SDRA (courbe pleine). Le point vert représente le point d’inflexion inférieur. Le point rouge, le point d’inflexion supérieur (d'après Jaber et al., 2007). (CPT = Capacité pulmonaire totale) (CRF = Capacité résiduelle fonctionnelle) (VR = Volume résiduel) La courbe pression/volume est tracée au dessus d’un volume de référence traduisant la capacité résiduelle fonctionnelle du système respiratoire. En cas d’hyperinflation, ce volume correspond au volume pulmonaire téléexpiratoire. La courbe inspiratoire du SDRA, au-delà de la CRF, présente un aspect sigmoïdal en trois segments délimités par ce que l’on nomme les points d’inflexion inférieur et supérieur (Duperret et al., 2003). La pente de la courbe est le reflet de la compliance pulmonaire. Chez un sujet sain, cette pente est linéaire. Dans le cas du SDRA, la compliance linéaire est réduite ce qui se traduit par un aplatissement de la courbe. Le point d’inflexion inférieur représente un seuil au-delà duquel l’augmentation de pression entraîne des phénomènes de recrutement c'est-à-dire l’ouverture de territoires alvéolaires préalablement non ventilés. La partie linéaire de la courbe, comprise entre les deux points d’inflexion, correspond à l’ouverture successive des alvéoles survenant tout au long de l’insufflation. Enfin, l’augmentation du volume pulmonaire associée à l’ouverture itérative des alvéoles, laisse progressivement place à des phénomènes de distension alvéolaire au niveau de la zone d’inflexion supérieure. Au-delà de ce point, toute variation de pression s’accompagne de faibles variations de volume : cela indique que l’étirement de certaines unités alvéolaires a atteint son maximum, majorant le risque de surdistention. La pression du point d’inflexion inférieur a été définie comme la pression critique d’ouverture des unités alvéolaires collabées ; la pression du point d’inflexion supérieur comme la pression au-delà de laquelle la surdistention alvéolaire se produit. Des travaux ont cependant suggéré que le point d’inflexion supérieur serait plutôt un marqueur de fin du recrutement alvéolaire et que la surdistention pourrait survenir bien avant celui-ci (Dambrosio et al., 1997). 49 b. La ventilation protectrice L’enjeu de la ventilation mécanique consiste à déterminer les réglages optimaux de pression/volume afin de recruter les territoires pulmonaires faiblement aérés tout en évitant l’apparition du VILI au niveau de zones relativement épargnées par la maladie. C’est de ce défi qu’est née la notion d’une ventilation dite protectrice. L’objectif des stratégies ventilatoires actuelles concerne donc la protection pulmonaire vis-à-vis des traumatismes induits susmentionnés et non plus la normalisation à tout prix des échanges gazeux. La limitation de la pression de plateau en dessous du point d’inflexion supérieur et le réglage de la PEP au dessus du point d’inflexion inférieur sont actuellement les deux principales recommandations pour lesquelles un accord fort existe. i. Choix du ventilateur et confort du patient Il est recommandé d’utiliser un ventilateur permettant de régler aisément et de mesurer avec une bonne fiabilité les paramètres suivants : le volume courant, la pression de plateau ainsi que la PEP totale (PEP réglée à laquelle s’ajoute l’auto-PEP). Une ventilation en mode assisté-contrôlé sera préférée dans les phases critiques du SDRA. Dans ce cas, le ventilateur prend en charge la totalité du travail respiratoire, un volume précis est délivré et le monitorage de la pression de plateau est facilité. Par ailleurs, les malades sont fréquemment sédatés, spécialement dans la phase aigüe de la maladie. L’objectif est d’assurer un certain confort aux patients et que ceux-ci ne se débranchent pas de la machine ventilatoire (Boyadjiev et Albanèse, 2008). La sédation permet également de limiter les besoins en oxygène des principaux organes demandeurs et d’améliorer leur statut hémodynamique. La mesure des gaz du sang est indispensable afin de suivre la réponse de l’organisme aux manœuvres imposées. Les résultats permettent d’adapter au mieux les paramètres du ventilateur. ii. Quelle fraction inspirée en oxygène (FiO2) ? Bien que la standardisation parfaite des échanges gazeux ne soit pas recherchée, les réglages du ventilateur doivent tout de même s’attacher à corriger l’hypoxémie dominante du SDRA. Les objectifs consistent à obtenir une PaO2 comprise entre 50 et 80 mmHg et/ou une SpO2 de 90% à 95%. Aucune préconisation n’existe quant à la FiO2 « idéale » à délivrer. Alors qu’une toxicité liée à des fractions très élevées en oxygène (proches de 100%) a été démontrée dans des modèles animaux, celle-ci n’a pu être mise en évidence en médecine humaine. Cette toxicité serait consécutive à une exposition prolongée et attribuée à une production excessive de formes oxygénées activées et de radicaux libres au niveau de l’endothélium pulmonaire (Tsan, 1993). Cependant, chez les patients atteints de SDRA, une certaine « résistance » à de hautes fractions en oxygène a été notée. Ainsi, à l’issue d’une étude rétrospective de Capellier et al. en 1998, les sujets décédés avaient été exposés aussi longtemps à des FiO2 hautes (supérieures à 90%) que les survivants. Cette « tolérance » pourrait être expliquée par les propriétés antioxydantes du liquide alvéolaire modifié (Lykens et al., 1992). À ce jour, la raison invoquée à l’utilisation de FiO2 raisonnées est la survenue d’atélectasies dites de dénitrogénation. Ce phénomène est la conséquence de l’absorption complète de l’oxygène alvéolaire en l’absence d’un gaz inerte comme l’azote qui permet normalement d’empêcher, dans une certaine mesure, le collapsus alvéolaire. L’étude de Aboab et al., (2006) met ainsi en évidence une dégradation rapide du volume recruté et du rapport PaO2/FiO2 chez des patients ventilés avec une FiO2 de 100 % à PEP faible. L’impact de ces atélectasies de dénitrogénation a peu été détaillé en recherche. En deçà d’une FiO2 de 80% 50 le risque semble cependant négligeable ; en pratique, la valeur de la FiO2 doit être arrêtée en fonction des objectifs d’oxygénation poursuivis et avoisine souvent les 80%. iii. Quel volume courant ? La pression de plateau est le reflet le plus fiable de la pression alvéolaire maximale. Sa surveillance pluriquotidienne au cours de la prise en charge d’un patient est fondamentale. De manière à limiter les phénomènes de surdistension, celle-ci doit se situer constamment sous le point d’inflexion supérieur, à moins de 30 cmH2O. La pression de plateau dépend à la fois du volume courant et de la PEP sélectionnées sur le ventilateur. La réduction du volume courant est donc indispensable pour maintenir une pression de plateau acceptable. Mais quelles valeurs choisir pour une ventilation protectrice ? Les volumes courants utilisés en ventilation mécanique classique avoisinent les 9 à 12 ml/kg de poids vif (le poids idéal est pris en compte) et sont calibrés afin que les valeurs de la capnie et du pH associé soient dans les intervalles de référence. Il a été montré que l’utilisation de volumes courants traditionnels associés à une PEP de 10 cmH2O impliquait une pression de plateau en fin d’inspiration supérieure au point d’inflexion supérieur chez la majorité des malades atteints du SDRA (Roupie et al., 1995). Actuellement tous les experts s’accordent à dire que la valeur du volume courant à utiliser doit être comprise entre 6 et 8 ml/kg de poids idéal. En effet, la masse grasse n’interférant pas sur le volume courant à délivrer, celui-ci doit être réglé en fonction du poids théorique et non du poids réel. La limitation du volume courant à 6 - 8 ml/kg permet d’obtenir une valeur de pression de plateau sous le seuil de 30 cmH2O. Cependant, ce parti pris n’est pas sans conséquences. Il découle de la réduction du volume courant une hypoventilation alvéolaire et donc une relative hypercapnie. Pour autant, celle-ci est tolérée aux vues des bénéfices de la diminution du volume courant : on parle d’hypercapnie permissive (Network ARDS, 2000). Sa correction passe par l’augmentation de la fréquence respiratoire jusqu’à 30 à 35 cycles par minute ainsi que la réduction de l’espace mort instrumental (ablation du filtre et du raccord) (Richecoeur et al., 1999). L’augmentation du volume minute par la fréquence respiratoire doit cependant être raisonnée car elle peut générer une PEP intrinsèque. En effet, la hausse de la fréquence respiratoire réduit le temps disponible du patient pour l’expiration. Les alvéoles sont vidangées partiellement d’où une séquestration de gaz qui est à l’origine d’une pression positive surajoutée. La baisse du volume courant en deçà des valeurs traditionnelles est nécessaire mais a pour corollaire un dérecrutement alvéolaire, à l’encontre des objectifs de la ventilation mécanique. L’application conjointe d’une certaine valeur de PEP et de manœuvres de recrutement a pour effet d’inverser cette tendance (Richard et al., 2001). iv. Quelle PEP ? L’effet de la PEP sur les volumes pulmonaires a d’abord pu être quantifié par l’analyse des courbes de mécanique respiratoire puis, plus récemment, par tomodensitométrie pulmonaire. En 1981, les observations de Katz et al., indiquaient déjà que le volume pulmonaire téléexpiratoire enregistré était plus élevé avec l’application d’une PEP que celui prédit par la courbe pression-volume d’une ventilation sans PEP. Autrement dit, pour une 51 même pression, le volume pulmonaire au dessus de la capacité résiduelle fonctionnelle était plus important chez un patient ventilé avec une PEP. La figure 15 illustre la distribution du volume courant à différents niveaux de PEP après lecture de coupes de tomodensitométrie pulmonaire (Gattinoni et al., 1995). Sans PEP, le volume pulmonaire aéré est à minima deux fois plus important dans les zones ventrales non dépendantes du poumon que dans les zones dorso-caudales. À 20 cmH2O, la répartition de la ventilation est bien plus homogène. Ce constat suggère donc que la PEP permet d’obtenir un poumon « ouvert » en fin d’expiration, constitué d’unités alvéolaires disponibles pour le cycle suivant. Celle-ci limite le dérecrutement des alvéoles et facilite par la suite leur expansion. À cause de l’instabilité alvéolaire inhérente au SDRA, les poumons ont tendance à se collaber quand la pression transpulmonaire chute pendant l’expiration, en particulier dans les zones les plus dépendantes. La PEP conserve donc aérées des alvéoles recrutées au cycle précédent mais en aucun cas celle-ci ne génère le recrutement de zones collabées. Afin d’évaluer l’impact de la sélection d’une PEP en ventilation mécanique, Sandhar et al., ont travaillé sur un modèle de déplétion en surfactant par instillation d’une solution saline à seize lapins anesthésiés. Ces derniers présentaient ainsi une atteinte pulmonaire similaire à celle observée dans le SDRA. Deux groupes ont été formés : le premier ventilé avec une PEP comprise entre 1 et 2 mmHg, le second avec une PEP comprise entre 8 et 12 mmHg. Ces valeurs ont été sélectionnées respectivement en dessous et au dessus du point d’inflexion inférieur de la courbe pression/volume réalisée à cet effet. La pression de crête imprimée était stable aux alentours de 15 mmHg. Il en ressort que les lapins recevant une PEP supérieure au point d’inflexion inférieur présentaient une capacité résiduelle fonctionnelle nettement supérieure en fin d’expiration. De plus, à l’examen histologique post mortem, le comblement alvéolaire par des membranes hyalines était moindre dans le groupe à PEP élevée. La PEP constitue donc un facteur protecteur contre la réduction de la capacité résiduelle fonctionnelle du SDRA, aggravée par la baisse du volume courant. 52 Répartition du volume courant (%) Figure 15: Distribution du volume courant entre les zones ventrales (Upper) et dorsales (Lower) pulmonaires de patients atteints de SDRA à différents niveaux de PEP. (d’après Malarkkan et al., 2003). PEP (cmH2O) La relation entre la présence d’une PEP et l’amélioration des paramètres d’oxygénation est maintenant clairement établie. La PEP a pour objectif de restreindre le shunt intrapulmonaire, principal facteur en cause expliquant l’hypoxémie du SDRA. Dans la thèse de Maggiore datant de 2003, la réduction progressive de la PEP par paliers de 5 cmH2O (PEP initiale à 20 cmH2O) était significativement associée à une dégradation du rapport PaO2/FiO2. La variation de ce ratio était corrélée au volume dérecruté entre les deux niveaux de PEP choisis. La PEP est donc le moyen le plus efficace pour prévenir le dérecrutement induit par la réduction du volume courant. Mais quelle valeur de PEP sélectionner ? Le choix de la « best PEP » reste actuellement très controversé et de nombreuses propositions ont été soumises. Initialement, les recommandations se tournaient vers une PEP sélectionnée par rapport au point d’inflexion inférieur. Néanmoins, d’autres études rapportent que le recrutement alvéolaire se poursuit bien au-delà du point d’inflexion inférieur, pression pour laquelle l’ouverture alvéolaire serait minime (Jonson et al., 1999). Il parait pourtant contre intuitif de régler la PEP en fonction du point d’inflexion inférieur. En effet, la PEP est une manœuvre de fin d’expiration pour prévenir le collapsus téléexpiratoire. Le point d’inflexion inférieur correspond à une caractéristique de la partie inspiratoire de la courbe pression/volume. Par conséquence, la PEP devrait être réglée par rapport aux pressions de fermeture alvéolaire. En 2003, Maggiore a confirmé qu’il n’existait pas de relation entre le point d’inflexion inférieur et la fermeture alvéolaire et que la valeur de la PEP ne devait donc s’y référer. Idéalement une mesure continue de la pression œsophagienne permettrait d’évaluer la pression transpulmonaire (pression des voies aériennes - pression œsophagienne). Ainsi, la PEP serait réglée afin de maintenir une pression transpulmonaire téléexpiratoire positive pour limiter le collapsus alvéolaire (Jaber et al., 2010). Le débat reste donc ouvert. À 53 l’heure actuelle, les experts préconisent l’utilisation d’une PEP d’au moins 5 cmH2O dans la prise en charge du SDRA. Assurément le choix du niveau de PEP optimal doit impérativement tenir compte des potentielles répercussions hémodynamiques et du risque de distension alvéolaire (Jaber et al., 2010). Les paramètres clés de ventilation sont tous interdépendants : ainsi l’augmentation de la PEP ne doit en aucun cas se faire aux dépens d’une élévation de la Pplat au-delà de 30cmH2O. Chez l’adulte des niveaux de PEP supérieurs à 20 cmH2O sont très rarement utilisés. Il n’existe pas non plus de consensus quant à la sélection de la PEP en fonction du type d’atteinte du SDRA, diffuse ou lobaire. Une atteinte diffuse justifierait l’utilisation de valeurs de PEP élevées (12 à 20 cmH2O), le risque de surdistension étant minime. Le poumon se comporte en effet comme un seul compartiment dans lequel la distribution des pressions est homogène. À contrario une atteinte lobaire inciterait à recourir à des niveaux de PEP plus faibles (inférieurs 6 à 8 cmH2O) du fait d’une réponse hétérogène aux manœuvres ventilatoires. Récemment, l’étude française ExPress a comparé une stratégie de recrutement maximal à une autre de distension minimale. Pour ce faire, 767 adultes présentant un SDRA ont été recrutés dans 37 structures de soins intensifs entre 2002 et 2005 (Mercat et al., 2008). La première stratégie était basée sur une PEP réglée de telle manière à ce que la Pplat soit comprise entre 28 et 30 cmH2O. La seconde s’appuyait sur une PEP définie de manière standard entre 5 et 9 cmH2O. Le volume courant était maintenu à 6 ml/kg. Plusieurs critères ont été évalués: le taux de mortalité à 28 jours puis à 60 jours, la durée de prise en charge ventilatoire ainsi que le nombre de jours avant qu’une défaillance multi-organique ne se déclare. Les résultats n’ont pas montré de différence significative concernant la mortalité à 28 ou 60 jours. Par contre, les patients ventilés selon une stratégie de recrutement maximal, tout en limitant l’hyperinflation, étaient significativement placés moins longtemps sous ventilation assistée, et présentaient plus tardivement une défaillance multi-organique. Malheureusement, cette étude à grande échelle, comme les autres décrites dans la littérature, ne prenait pas en compte le type d’atteinte pulmonaire et l’origine étiologique du SDRA. À ce jour, aucune valeur « idéale » de PEP n’a été publiée : le clinicien s’orientera plutôt vers une titration personnelle de la PEP en fonction de la présentation clinique du SDRA et de la réponse du patient aux manœuvres engagées. Les réglages du ventilateur doivent être adaptés aux caractéristiques individuelles de la mécanique respiratoire déduites de la courbe pression/volume. Recommandations Réduire le volume courant à 6-8 ml/kg (poids idéal) afin de maintenir une pression de plateau inférieure à 30 cmH2O. Y associer une PEP suffisante de manière à prévenir le collapsus alvéolaire téléexpiratoire. Ces préconisations sont résumées dans l’annexe 5. 54 c. Bénéfice de la ventilation protectrice sur la mortalité en milieu hospitalier Des essais randomisés et contrôlés ont évalué à large échelle l’impact d’une modification des réglages ventilatoires sur le pronostic du SDRA en réanimation. En 2000, le réseau international de recherche sur le SDRA a ainsi publié une grande étude réalisée entre 1996 et 1999 dans 10 centres universitaires (Network ARDS, 2000). Les sujets étaient recrutés d’après une liste de critères, le premier étant l’expression d’un SDRA sur la base d’un ratio PaO2/FiO2 ≤ 300mmHg. Ces derniers étaient placés sous ventilation assistée contrôlée. Deux groupes ont été constitués : - l’un à ventilation mécanique classique. Le volume courant était initialement réglé à 12 ml/kg (poids idéal estimé selon des abaques précis) puis ajusté de telle manière à ce que la pression de plateau ne chute pas sous les 45 cmH2O (mesure réalisée après une pause d’une demiseconde en fin d’inspiration). - l’autre à ventilation mécanique protectrice. Le volume courant était initialement réglé à 6 ml/kg (poids idéal estimé selon des abaques précis) puis ajusté de telle manière à ce que la pression de plateau ne s’élève pas au-delà de 30 cmH2O (mesure réalisée après une pause d’une demi-seconde en fin d’inspiration). Les résultats ont été les suivants : le taux de mortalité était significativement moins élevé dans le groupe ayant reçu un volume courant de 6 ml/kg que celui à 12 ml/kg (39,7% vs 31,0%, p<0,05). La figure 16 représente, au sein des deux groupes, la proportion de patients ayant survécu à l’affection et ceux sortis de l’hôpital sans assistance respiratoire au cours du temps. Nous pouvons ainsi noter que le nombre de sujets ayant survécu était supérieur dans le groupe ventilé de manière protectrice. Les différences étaient notables dans les 20 premiers jours de surveillance qui correspondent aux jours critiques d’évolution du SDRA. Proportion de patients (%) Figure 16: Proportion de patients ayant survécu au SDRA en fonction du temps parmi ceux ayant reçu une ventilation protectrice (courbe noire pleine) versus classique (courbe noire pointillés) (d’après Network ARDS, 2000). Ventilation protectrice Survie Décharge à domicile Ventilation classique Survie Décharge à domicile Temps (jours) 55 Le bénéfice de la réduction du volume courant associé à une PEP sur la mortalité et le pronostic du SDRA a amplement été démontré dans d’autres travaux. Citons à titre d’exemple celui d’Amato et al. (1998). Deux groupes de patients étaient placés sous assistance respiratoire avec des réglages de ventilation traditionnelle (V t = 12 ml/kg, valeur de PEP non spécifiée, décrite comme la plus faible possible compatible avec l’oxygénation) ou de ventilation protectrice (Vt = 6 ml/kg, valeur de PEP supérieure de 2 cmH2O au point d’inflexion inférieur). À l’issue des 28 jours d’expérimentation, le taux de mortalité était significativement différent, à savoir 71% pour le groupe à ventilation conventionnelle contre 31% pour celui à ventilation protectrice (p<0,05). Etonnamment, d’autres études publiées dans la littérature n’ont pas mis en évidence de corrélation entre la réduction du volume courant et la baisse de mortalité du SDRA. L’analyse des protocoles expérimentaux apporte une explication partielle à ce constat. Un manque de puissance statistique découlait certainement d’une différence minime entre les volumes courants testés (Amato et al., 1998). d. Techniques adjuvantes d’optimisation de la ventilation assistée Si la stratégie basée sur la réduction du volume courant et l’application d’une certaine valeur de PEP supérieure à 5 cmH2O permet d’améliorer le pronostic des malades, celle-ci ne permet pas de pallier à tous les problèmes inhérents au SDRA. Ainsi dans les cas les plus sévères, la ventilation protectrice n’assure pas une oxygénation systémique compatible avec la survie. L’hypercapnie résultant de ce compromis s’accompagne parfois d’une acidose respiratoire sévère, source d’instabilité hémodynamique. De nouvelles techniques additionnelles ou alternatives font ainsi l’objet de recherches poussées. Manœuvres de recrutement alvéolaires i. (MRA) Le principal écueil de la réduction du volume courant, est la survenue d’un dérecrutement alvéolaire, contre lequel la ventilation est pourtant censée lutter. La fermeture alvéolaire est un processus dynamique qui se réalise progressivement à différents niveaux de pression, pour certains élevés. Ainsi le dérecrutement est-il inévitable dans certains secteurs pulmonaires et ce, malgré l’application d’une PEP haute (Maggiore, 2003). Les manœuvres de recrutement sont actuellement étudiées dans le but de s’opposer transitoirement au dérecrutement alvéolaire ainsi qu’à la baisse de PaO2 consécutive à la réduction du Vt. Plusieurs techniques existent pour réaliser des manœuvres de recrutement. Elles consistent toutes en l'administration de pressions intra-thoraciques élevées pendant un laps de temps court afin d’« ouvrir » le poumon, notamment les territoires les plus dépendants nécessitant des pressions de recrutement élevées. Une PEP y est ensuite associée afin de conserver ce poumon le plus disponible possible pour le cycle suivant. Ces techniques sont décrites dans le tableau 6. 56 Tableau 6 : Principales manœuvres de recrutement alvéolaires réalisables en pratique (d’après Jaber et al., 2007). Nom de la MRA CPAP (Continuous Positive Airway Pressure) Soupirs intermittents PEP croissantes PEP élevées Type de procédure Application d’une pression expiratoire positive de 40 cmH2O pendant 40 secondes. Alternative : pression entre 35 et 60 cmH2O pendant 40 à 60 secondes. Augmentation transitoire du volume courant/ de la pression d’insufflation, une, deux ou trois fois par minute, consécutivement ou non. Ex : 3 soupirs par minute à 45 cmH2O de pression de plateau. Augmentation de la PEP par paliers de 5 cmH2O en limitant la pression de plateau à 50 cmH2O, puis retour à la ventilation initiale. PEP réglée 10 cmH2O au-delà du point d’inflexion inférieur pendant 15 minutes. Réduction du volume courant afin que la pression de plateau reste < 40 cmH2O. Hauts niveaux de CPAP (Continuous Positive Airway Pressure). Cette technique consiste à imposer une PEP élevée de 30 à 60 cmH2O pendant un laps de temps très bref de l’ordre de 40 à 60 secondes. Le réglage en mode CPAP du ventilateur permet cette manœuvre. L’application rapide de cette pression assure l’ouverture des territoires alvéolaires les plus pathologiques. La PEP est par la suite re-diminuée à sa valeur initiale. Dans l’étude de Grasso et al. (2002), la réalisation de cette MRA pendant 40 secondes à 40 cmH2O se traduisait par une augmentation de 175% +/- 23% du rapport PaO2/FiO2 chez la moitié des sujets. Les résultats d’une ventilation protectrice avec MRA versus sans MRA ont été comparés dans une large étude, « The Lung Open Ventilation Study », au Canada, en Australie ainsi qu’en Arabie Saoudite (Meade et al., 2008). La manœuvre de recrutement consistait à fixer une pression de 40 cmH2O pendant 40 secondes, à 100% de FiO2. Le volume courant moyen était de 6 ml/kg, la PEP était réglée initialement à 20 cmH2O puis modulée entre 5 et 20 cmH2O, en fonction de la valeur de FiO2. Dans le groupe d’expérimentation, la MRA était initiée au début de la prise en charge respiratoire, puis réitérée à chaque déconnexion patient-ventilateur. Plusieurs paramètres ont été évalués et les résultats les suivants. Tout d’abord, la réalisation de ces MRA n’a pas montré d’effet bénéfique sur le taux de mortalité à 28 jours en service de réanimation. Les médecins avaient cependant statistiquement moins recours à la mise en place de traitements additionnels (décubitus ventral, monoxyde d’azote inhalé, ventilation à haute fréquence) chez les patients traités avec une MRA. De plus, parmi les causes de décès rapportées, l’hypoxémie réfractaire était significativement moins fréquemment invoquée dans le groupe de travail. Ces travaux ont également permis de prouver que les manœuvres de MRA n’étaient pas sans complications: hypotension, barotraumatisme et arythmies cardiaques étaient rapportés. 57 Soupirs en ventilation mécanique artificielle Cette technique consiste à obtenir transitoirement de hauts niveaux de pression d’insufflation (soit une pression de plateau > 40 cmH2O) en augmentant la PEP ou le volume courant. Des cycles de « soupirs » sont réalisés pendant une certaine durée définie par le clinicien. Ainsi Pelosi et al., (1999) ont alterné deux heures de ventilation protectrice suivie d’une heure de MRA caractérisée par la mise en œuvre de trois soupirs par minute. Le volume courant était modifié de telle manière à maintenir une pression de plateau inférieure à 45 cmH2O. La PEP (titrée entre 10 et 15 cmH2O) et la FiO2 étaient constantes. À l’issue de l’heure dédiée à la MRA, la PaO2 était significativement améliorée (92.8 +/- 18.6 mmHg versus 137.6 +/- 23.9 mmHg, p < 0.05) et la PaCO2 diminuée. Ces résultats témoignent d’une rectification des échanges gazeux, bien qu’elle ne soit pas constante dans le temps : une heure après arrêt, les paramètres hémodynamiques étaient revenus à leurs valeurs de base. Ventilation posturale en décubitus ventral Positionner transitoirement un patient en décubitus ventral est un moyen efficace de potentialiser le recrutement alvéolaire et d’optimiser l’oxygénation artérielle. Sur le dos, la majeure partie des gaz délivrés se répartissent dans les zones antérieures thoraciques, les moins pathologiques du SDRA. Or, d’un point de vue anatomique, ce sont les zones postérieures déclives comblées qui sont les plus perfusées. Le décubitus ventral permet ainsi de redistribuer la ventilation vers ces zones postérieures caudo-diaphragmatiques. Quelques études se sont maintenant positionnées sur l’intérêt du décubitus ventral comme méthode additionnelle à la prise en charge des patients présentant un SDRA. Citons à titre d’exemple en 1998 celle de Jolliet et al. Dix-neuf patients hypoxémiques (PaO2/FiO2≤150 mmHg) étaient placés en décubitus ventral pendant 2 heures après une heure de décubitus dorsal. Onze d’entre eux ont répondu favorablement à ce changement de position et ont été maintenus ainsi 12 heures de plus. Le suivi des variables hémodynamiques a été fait en position initiale, 30 minutes après le début du décubitus ventral, puis 2 heures après. Une amélioration du rapport PaO2/FiO2 de plus de 20 mmHg était observée chez les sujets réceptifs à l’issue des trente premières minutes. En outre, les valeurs de F iO2 délivrées pouvaient être diminuées du fait de la correction des paramètres d’oxygénation (0.85 +/- 0.16 versus 0.66 +/- 0.18, p<0.05). Aucune détérioration n’était par ailleurs visible durant les 12 heures suivantes. La répétition de cette manœuvre a montré des résultats positifs identiques. Si la ventilation posturale a montré ses bénéfices, son bénéfice concernant la mortalité péri-hospitalière n’est pas clairement prouvé. Selon les recommandations d’experts, l’indication du décubitus ventral ne se discute que chez les patients les plus hypoxémiques et présentant un SDRA sévère. Une des principales limites à sa mise en œuvre est logistique : le changement de positionnement peut être délicat si le patient n’est pas stable, possède des drains chirurgicaux avec un risque de déconnexion patient machine supplémentaire. L’extubation entraine en effet un dérecrutement alvéolaire délétère. La plupart des études concernant les MRA sont issues de l’expérimentation animale ou d’essais randomisés à faibles effectifs et ne permettent donc pas d’avoir un recul suffisant. De plus en plus de travaux à grande échelle sont publiés et semblent attester de l’efficacité des MRA concernant l’hématose. Les résultats encourageants sont cependant à moduler en fonction du type d'atteinte respiratoire, du stade de l'affection et du niveau de PEP relai sélectionné. Aucune réduction de la mortalité hospitalière n’a pour le moment été constatée. 58 L’utilisation systématique d’une manœuvre de recrutement alvéolaire quelle qu’elle soit ne peut donc être systématiquement recommandée. Il reste à préciser quelle technique utiliser, à quelle fréquence et quelles valeurs sélectionner. ii. Ventilation à haute fréquence Le principe de la ventilation à haute fréquence repose sur l’insufflation rapide de faibles volumes courants, souvent inférieurs à l’espace mort anatomique (2-4ml/kg). Il en existe plusieurs types qui diffèrent par la fréquence respiratoire imposée au patient (Krishnan et Brower, 2000): ventilation par pression positive à haute fréquence (VPPHF) : Fr = [60-100] mouvements/min. ventilation par jet à haute fréquence (VJHF) : Fr = [100-200] mouvements/min. ventilation par oscillation à haute fréquence (VOHF) : Fr jusqu’à 2400 mouvements/min. Seule la ventilation par oscillation à haute fréquence est actuellement pratiquée, les autres étant plus anciennes. Contrairement à la ventilation conventionnelle, un oscillateur à haute fréquence est nécessaire pour mettre en œuvre une VOHF. Un débit constant de gaz frais est délivré au niveau du circuit inspiratoire. Ce débit et l’inflation plus ou moins complète d’une valve placée sur le circuit expiratoire détermine une pression moyenne permanente dans les voies aériennes. Elle varie usuellement entre 25 et 35 cmH2O de façon à maintenir le volume pulmonaire au-delà du volume de fermeture. Sur le circuit se trouve également un piston solidaire d’une membrane dont les oscillations entraînent l’insufflation et l’expiration d’un certain volume courant de gaz. Ce volume est conditionné par la fréquence et la puissance des mouvements du piston. La fréquence est réglée en hertz ; un hertz correspond à 60 mouvements/min. En VOHF, l’expiration est un phénomène actif ce qui minimise le risque de PEP intrinsèque lié à ces fréquences élevées. En outre, la ventilation à haute fréquence se réalise le plus souvent associée à une manœuvre de recrutement initiale afin d’aérer au maximum le poumon : à titre d’exemple une CPAP basée sur une pression de 40 cmH2O pendant 40 secondes peut être initiée. Tout l’intérêt de la VOHF réside dans le découplage de l’oxygénation et de l’élimination du CO2 : en effet, le réglage de la fréquence et de la puissance des mouvements du piston permet de faire varier la P aCO2 indépendamment de la pression moyenne, déterminant la PO2 (Jamal et al., 2004). Cette technique assure à la fois le recrutement du parenchyme pulmonaire et la normalisation de la capnie. La pression moyenne étant maintenue constante au-delà des valeurs de fermeture du poumon, la VOHF limite également les phénomènes de dérecrutement/recrutement observés en ventilation conventionnelle. Plusieurs études cliniques ont évalué l’efficacité de la VOHF chez des adultes présentant un SDRA marqué ne se résolvant pas en ventilation protectrice. L’index d’oxygénation était significativement amélioré et la P aCO2 réduite chez Fort et al. (1997). La seule étude multicentrique prospectrice réalisée (MOAT pour Multicenter Oscillatory Ventilation for ARDS Trial) a permis de montrer que l’utilisation de la VOHF était sûre et associée à une amélioration de l’oxygénation dans les 24 premières heures (Mehta et al., 2001). Pour autant, aucune réduction significative de la mortalité n’a été mise en évidence à 30 jours chez les sujets ventilés à haute fréquence. 59 Les découvertes laissent penser que la VOHF est un traitement prometteur du SDRA, particulièrement pour la population de patients ne répondant pas à la ventilation protectrice. Les bénéfices sur l’oxygénation semblent plus nets quand la VOHF est initiée dans les phases précoces du SDRA et combinée à une MRA. De vastes essais multicentriques en cours devraient apporter sous peu des précisions complémentaires. iii. Ventilation liquide partielle (VLP) Ce mode de ventilation est basé sur la combinaison d’une ventilation gazeuse traditionnelle et de l’instillation intra-trachéale d’une solution de perfluorocarbone. Le volume apporté varie entre 30 à 100% de la capacité résiduelle fonctionnelle du patient. Les perfluorocarbones sont des composés inertes et non métabolisables dont fait partie le perflubron, utilisé à l’heure actuelle. Les particularités physico-chimiques de ce produit sont sa faible tension de surface, sa densité élevée ainsi que la solubilité élevée de l’oxygène et du dioxyde de carbone. De fait, la tension de surface au sein des alvéoles est clairement diminuée par rapport à l’insufflation de gaz frais. L’application simultanée d’une PEP extrinsèque favorise la distribution périphérique du perflubron ce qui assure le recrutement des zones alvéolaires les plus dépendantes. De plus, le perflubron se répartit préférentiellement dans les zones déclives, alors maintenues ouvertes pour le prochain cycle inspiratoire : on parle de « PEP liquide » (Chiche et al., 2005). D’autres effets positifs semblent découler de l’utilisation du perflubron. In vivo, la VLP occasionnerait une diminution des concentrations sériques de cytokines pro-inflammatoires et inhiberait l’activation des PNN (Colton et al., 1998). La concentration des PNN, d’IL-1, d’IL-6 et d’IL-10 était ainsi abaissée dans le LBA de patients recevant une VLP chez Croce et al., en 1998. Bien que les données de la littérature mentionnent une nette optimisation de l’aération pulmonaire, aucune différence significative de survie par rapport à la ventilation protectrice n’a pour le moment été établie. Ce type de ventilation reste actuellement du domaine de l’expérimental. iv. Monoxyde d’azote inhalé Le monoxyde d’azote (NO) est un puissant vasodilatateur artériel pulmonaire. Physiologiquement, il est produit par les cellules endothéliales et module le tonus vasculaire pulmonaire chez les sujets sains. Dans le cadre thérapeutique, son administration par inhalation entraîne une diminution des résistances vasculaires pulmonaires ainsi qu’une baisse de la pression artérielle pulmonaire (Fierobe et al., 1995). L’intérêt de son utilisation dans le SDRA n’a été découvert que récemment mais semble avantageux selon les premiers résultats publiés. Son administration se fait par inhalations successives à petites doses (1 ppm) qui peuvent être progressivement augmentées (jusqu’à 10 ppm maximum). Le NO garantit la vasodilatation des zones pulmonaires correctement ventilées et améliore les rapports V/Q. De ce fait, l’oxygénation des patients qui en bénéficient est améliorée. L’étude de Michael et al., (1998) rapporte une amélioration transitoire du rapport PaO2/Fi O2 jusqu’à 36 heures après introduction du NO. De plus, l’action du NO semble potentialisée par l’application d’une PEP dans la mesure où celle-ci augmente le nombre de territoires aérés. Son effet sur l’inflammation alvéolaire est peu connu mais il semblerait avoir des propriétés antioxydantes intéressantes (Chollet-Martin et al., 1996). Son emploi doit cependant être raisonné. Dissout dans le liquide alvéolaire, le NO peut générer des radicaux libres cytotoxiques pour l’épithélium. Une fois dans le sang, il est rapidement fixé par l’hémoglobine et inactivé. Le complexe formé est appelé méthémoglobine dont les taux 60 sériques doivent être surveillés. Les publications actuelles ne permettent pas de recommander l’utilisation systématique du NO au cours du SDRA. Il peut être envisagé lorsque les moyens instrumentaux et posturaux ont été réalisés et qu’ils n’ont pas permis de rectifier l’oxygénation des patients en question. De plus aucune étude n’a démontré de bénéfices en termes de durée de ventilation mécanique, de temps de séjour à l’hôpital ni même sur la mortalité. La ventilation à haute fréquence, liquide partielle et le monoxyde d’azote restent du domaine des thérapeutiques d’avenir et quelques années d’évaluation sont encore nécessaires avant leur utilisation régulière. Quoiqu’il en soit, la prise en charge d’un individu atteint de SDRA doit faire l’objet d’une attention individuelle et respecter plusieurs étapes. Pour chacune d’entre elles, un contrôle de la réponse hémodynamique, des paramètres d’oxygénation et de la compliance statique est indispensable. Ainsi en cas de réponse favorable, la thérapeutique engagée peut être poursuivie ; à défaut une nouvelle manœuvre est à envisager. B. La ventilation mécanique chez les carnivores domestiques Aucune étude prospective à grande échelle n’a pour le moment été réalisée en médecine vétérinaire concernant les stratégies de prise en charge des animaux atteints de SDRA. Ainsi, les traitements actuellement entrepris reposent-ils en grande partie sur les connaissances acquises puis extrapolées à partir des données en médecine humaine. La physiopathologie du SDRA étant similaire chez les humains et les carnivores domestiques, les objectifs thérapeutiques s’en trouvent majoritairement identiques. L’identification de la cause sous jacente au SDRA est fondamentale. La ventilation à pression positive reste tout de même la pierre angulaire du traitement de l’œdème pulmonaire aigu non cardiogénique. Cependant, certaines limites inhérentes à la pratique vétérinaire compliquent sa gestion: Tout d’abord, le coût que représente la mise sous ventilation assistée d’un animal est assurément un frein à la mise en œuvre du traitement. La durée de prise en charge est souvent longue et les dépenses d’autant plus onéreuses. Celles-ci ne sont pas abordables par n’importe quel propriétaire. La disponibilité des machines ventilatoires limite l’accès aux soins d’urgences pour de nombreux patients. Bien que l’oxygénothérapie soit disponible dans de nombreuses structures, celle-ci n’est souvent pas suffisante pour soutenir à court terme les animaux en détresse respiratoire aigüe. Les ventilateurs adaptés ne sont disponibles que dans certaines structures hospitalières, tout comme le personnel compétent en la matière. Ces hôpitaux peu nombreux en France ne sont pas accessibles au plus grand nombre. Enfin, le SDRA étant nettement moins décrit en médecine vétérinaire qu’en médecine humaine, la détection des animaux présentant une atteinte respiratoire aigüe compatible avec les critères consensuels d’inclusion est généralement faite tardivement (Wilkins et al., 2007). Le nombre de cas annuels de SDRA est ainsi clairement sous-estimé. En médecine vétérinaire, le recours à la ventilation mécanique se justifie en cas de détresse respiratoire aigüe, d’hypoxémie réfractaire à toute autre mesure d’oxygénothérapie (PaO2 ≤ 60 mmHg à 21% d’oxygène), d’hypercapnie persistante (PaCO2 ≥ 60mmHg), ou de tout autre état nécessitant une assistance respiratoire à plus ou moins long terme (l’état de choc en est un par exemple). 61 1. Recommandations en médecine vétérinaire Les recommandations en médecine vétérinaire sont similaires à celles chez l’Homme à savoir l’adoption d’une ventilation protectrice dans la prise en charge thérapeutique du SDRA. Les effets délétères d’une ventilation inadaptée ayant été décrits grâce aux modèles animaux, il est admis que le VILI se manifeste également chez les carnivores domestiques Les ventilateurs disponibles permettent l’application d’une PEP chez les animaux présentant un shunt intrapulmonaire important. L’objectif est analogue, à savoir maintenir un contingent d’alvéoles ouvertes et prévenir les cycles lésionnels d’ouverture/fermeture afin d’optimiser l’oxygénation alvéolaire. La « best PEP » n’existe pas non plus en médecine vétérinaire : il est admis que la valeur de PEP la plus adaptée est celle qui assure le maintien d’une oxygénation optimale (SpO2 ≥ 92% minimum). L’utilisation de PEP trop élevées peut être préjudiciable et conduire à une surdistention des zones normalement ventilées. L’étude de Lanza et al. (2009), montre cependant qu’une PEP plus élevée permet le maintien d’une oxygénation satisfaisante sans conséquences délétères. Dans cette expérience, le SDRA expérimental était obtenu par administration d’acide oléique. La PaO2 était significativement supérieure dans le groupe ventilé à une PEP égale à 18 cmH2O que dans celui à 10 cmH2O (228.5 ± 72.4 mmHg vs 92.7 ± 29.7mmHg, p < 0.05). Combinées à la PEP, des manœuvres de recrutement alvéolaires (MRA) peuvent également être entreprises. Dans l’étude citée ci-dessus, un troisième groupe était soumis à la fois à une PEP élevée (18 cmH2O) ainsi qu’à une manœuvre de recrutement (élévation de la PEP à 50 cmH2O sur trois périodes en une minute). Non seulement la PaO2 étaient nettement augmentée par rapport aux autres groupes mais l’hypercapnie était également moins sévère après cette MRA. À noter que les paramètres utilisés étaient compatibles avec ceux d’une ventilation protectrice: Vt = 6 ml/kg, Fr = [25 ; 35] mpm, FiO2 = 100%. Tout le compromis résulte donc de l’utilisation d’une PEP suffisante pour éviter le dérecrutement alvéolaire mais sans engendrer de lésions de surdistension. Cette PEP assure une nette augmentation de la capacité résiduelle fonctionnelle. L’utilisation de MRA relève de la même nécessité qu’en médecine humaine, à savoir recruter brièvement mais efficacement l’intégralité des unités alvéolaires ne participant pas aux échanges gazeux afin de réduire le shunt intrapulmonaire. Au même titre que chez l’Homme, une ventilation en pression ou volume contrôlé est conseillée. La ventilation en pression contrôlée a l’avantage de minimiser les risques de surdistention alvéolaire dans la mesure où la valeur de la pression de crête est fixée et que la pression de plateau ne peut donc l’excéder. Aucune étude clinique prospective n’a à ce jour édicté de réglages spécifiques aux carnivores domestiques. La solution optimale est donc d’opter pour une ventilation protectrice associant un volume courant bas, une PEP supérieure à 5 cmH2O ainsi qu’une pression de plateau inférieure à 35 cmH2O. Alors qu’en médecine humaine ce mode de ventilation a prouvé ses bénéfices sur le taux de survie en structure hospitalière, aucune conclusion n’a été apportée en hôpital vétérinaire. Les pratiques actuelles découlent donc des certitudes acquises chez l’Homme. L’utilité des courbes de pressionvolume (PV) afin d’ajuster les paramètres de la ventilation selon les points spécifiques d’inflexion inférieur et supérieur, est actuellement controversée (Mueller, 2001). Leur obtention nécessite une phase d’apnée en fin d’inspiration d’environ une à deux minutes ce qui requiert la sédation poussée du patient. Chez les carnivores domestiques, ce point parait moins problématique que chez l’Homme dans la mesure où les animaux sont systématiquement anesthésiés à l’initiation d’une ventilation mécanique. En pratique, l’acquisition des points d’inflexion supérieurs et inférieurs n’est pas évidente et leur lecture peut varier d’un clinicien à l’autre. Parfois aucun point d’inflexion clair ne peut être obtenu ce qui suggère qu’au au sein d’un poumon très inhomogène, il existe une large distribution des 62 pressions alvéolaires d’ouvertures. Ainsi, les courbes PV sont-elles peu utilisées en médecine vétérinaire, et décriées en médecine humaine. Dans une étude rétrospective s’intéressant aux indications, à la réalisation et au pronostic des animaux ayant reçu une prise en charge par VPP, le groupe présentant une affection du parenchyme pulmonaire liée à un défaut d’oxygénation comme dans le SDRA, avait un taux de sevrage et de survie après décharge plus bas que les autres (20.5% taux de survie à domicile, contre 38.7% dans l’autre groupe, p<0.05) (Hopper et al., 2004). Ainsi bien que la ventilation soit la seule réponse adaptée, ce syndrome reste entaché d’un taux de mortalité important, d’autant plus en médecine vétérinaire. La décision de placer un animal sous ventilateur doit donc être prise en tout état de cause, aux vues de la maladie sous-jacente, des frais engendrés et des complications potentielles. Dans l’étude ci-dessus celles-ci incluaient le pneumothorax ainsi que les ulcérations buccales et cornéennes (liées au défaut de lubrification cornéen sous anesthésie). 2. Evaluation de l’efficacité du positionnement en médecine vétérinaire Alors qu’en médecine humaine, il est maintenant admis que le positionnement répété des patients sur le ventre améliore significativement l’aération pulmonaire, qu’en est- il en médecine vétérinaire ?! Peu d’études existent à ce sujet, excepté celle de Xu et al. en 2008. Le SDRA était modélisé par l’injection d’acide oléique chez plusieurs chiens répartis en quatre groupes. Ceux-ci étaient ensuite ventilés avec un Vt de 10 ml/kg et une PEP de 16 cmH2O. Le premier groupe était placé en décubitus dorsal, le second en décubitus ventral. Une MRA était également appliquée. Il s’avère que concernant les paramètres évalués - notamment concentrations sériques d’IL-8 et de TNF- α et le ratio du poids pulmonaire avant induction et après induction (wet/dry weight ratio) - le groupe placé en décubitus ventral présentait de bien meilleurs résultats que les autres. Ainsi, chez les carnivores domestiques, la mise en décubitus ventral semble également améliorer le rapport V/Q par redistribution de la ventilation vers les régions dorsales les plus perfusées. 3. Report de cas cliniques Le premier cas fait état d’une une femelle chihuahua entière de 5 ans présentée pour dyspnée mixte d’apparition aigüe évoluant depuis 5 heures (Kelmer et al., 2012). La chienne montrait des signes d’atteinte respiratoire chronique depuis quelques mois avec notamment une toux persistante et un écoulement nasal séreux bilatéral. La radiographie d’admission révélait une opacité alvéolaire diffuse en vue latérale et ventro-dorsale. À la gazométrie sanguine, le pH était dans les valeurs usuelles (pH =7.38), la PaO2 égale à 57 mmHg et la PaCO2 égale à 42.3 mmHg. La chienne a été immédiatement mise sous oxygénation au masque à une FiO2 de 40% d’où un ratio PaO2/FiO2 égal à 142.5. Aucun antécédent de pathologie cardiaque n’étant rapporté et l’examen clinique ne mettant pas en évidence de souffle cardiaque, un diagnostic de SDRA a été posé. Quatre critères sur les cinq édités dans le consensus international VetARDS étaient en effet remplis : 63 Apparition soudaine des troubles respiratoires. Présence de facteurs de risques au développement d’un SDRA, en l’occurrence, les troubles respiratoires chroniques laissant suspecter une atteinte pulmonaire pré existante. Détermination d’un ratio PaO2/FiO2 ≤ 200mmHg à PEP nulle et FiO2 connue. Mise en évidence d’un œdème pulmonaire lésionnel à la radiographie, de distribution diffuse. Une ventilation mécanique à pression positive en mode SIMV (Synchronized Intermittent Mandatory Ventilation) a par la suite été initiée. Dans ce mode, outre un nombre d’inspirations prédéfini délivré au patient, ce dernier peut également respirer spontanément et générer des cycles respiratoires. Les paramètres étaient les suivants : Fr = 20 mouvements par minute. FiO2 = 100% d’oxygène. Vt = 15 ml/kg. PEP = 5 mmHg. Ce traitement a été couplé à une prise en charge symptomatique à l’aide d’antibiotiques à tropisme pulmonaire et d’une fluidothérapie de type cristalloïdes isotoniques. À l’issue de sept heures de ventilation, la chienne avait répondu positivement aux traitements mis en place. En témoignent l’amélioration du ratio PaO2/FiO2 à 195.7 et la diminution de la FiO2 à 50%. Après trois jours de ventilation assistée, la chienne a été replacée sous ventilation spontanée à l’aide de lunettes nasales délivrant une FiO2 de 40%. Ses paramètres d’oxygénation sont restés stables. Les radiographies révélaient une nette amélioration du pattern alvéolaire bien qu’une consolidation du lobe moyen droit ait été visible. Il n’a pas été établi si ces lésions étaient primaires au SDRA ou induites par la ventilation mécanique (dans la mesure où le volume courant était assez élevé). Cette chienne a été rendue à ses propriétaires 5 jours après l’initiation de la ventilation, sous antibiotiques. Aucune rechute n’a été rapportée. Un case report rapporte également le cas d’une chienne labrador stérilisée de 7 ans amenée aux urgences après avoir été retrouvé inconsciente au bord d’une rivière, la tête quasiment immergée dans l’eau (Haas et Davidow, 2008). La chienne présentait un historique de crises convulsives n’ayant été ni explorées ni traitées. Dans ce contexte, il a été suspecté que la noyade était consécutive à la survenue d’une crise convulsive. L’examen clinique d’entrée révélait un animal hypotherme, aux muqueuses cyanosées, et tachypnéique. Des bruits surajoutés étaient audibles à l’auscultation respiratoire. Les premières valeurs de la saturation en oxygène par oxymétrie de pouls variaient autour de 60%, révélant une hypoxémie majeure. Un œdème pulmonaire était visible à la radiographie, d’origine à priori non cardiogénique aux vues des antécédents et de la clinique de l’animal (figure 17). Des lunettes nasales ont été posées et l’oxygène délivré à une FiO2 de 60% à débit inconnu. Devant l’absence d’amélioration clinique, une ventilation mécanique a été engagée sous anesthésie générale. Le choix s’est porté in fine sur un mode en pression contrôlée avec : 64 Fr = 16 mouvements par minute. FiO2 = 100%. Vt = 6.7 ml/kg. PEP = 7 cmH2O. Pmax = 18 cmH2O. Cette stratégie ventilatoire était associée à des séances de positionnement en décubitus ventral réitérées toutes les deux heures. Le suivi passait par des examens cliniques réguliers ciblés sur la fonction respiratoire et cardiaque (ECG) et l’annotation des paramètres hémodynamiques indiqués par le ventilateur (SpO2, EtCO2, pression non invasive). Les examens paracliniques incluaient principalement l’analyse des gaz sanguins artériels. Figure 17: Radiographie thoracique en vue ventro-dorsale. L’œdème pulmonaire est bien visible grâce aux nombreux bronchogrammes (flèches noires) et à l’opacification de la silhouette cardiaque. L’opacité alvéolaire est bilatérale et diffuse (d’après Haas et Davidow, 2008). Le maintien d’une ventilation adaptée a permis l’amélioration progressive du rapport PaO2/FiO2 et la diminution de la FiO2. À l’issue de trois jours de ventilation, la PaO2 était de 288 mmHg à une FiO2 de 40% pour un rapport à 720. Une acidose respiratoire liée à l’hypercapnie permissive a été détectée et résolue grâce à l’augmentation de la fréquence respiratoire et du volume courant à 10.3 ml/kg. La bactériologie du liquide récupéré au niveau de la sonde endotrachéale a révélé la présence de plusieurs germes, la plupart sensibles à l’antibiogramme associé. Il n’a pas été établi si ces germes étaient primaires ou secondaires aux manœuvres per-hospitalières. L’ensemble des traitements mis en place en parallèle de la ventilation mécanique ont permis la sortie de la chienne 5 jours après son admission. 65 Cet exemple décrit le cas d’un chien présentant un SDRA consécutif à une noyade partielle. Le SDRA est ici la résultante d’une atteinte pulmonaire primaire. L’aspiration d’eau salée et de corps étranger (sable, algues, autres…) conduit à des dommages directs de l’endothélium pulmonaire. La libération de médiateurs inflammatoires après activation endothéliale conduit à l’altération de la perméabilité capillaire. S’ensuit un œdème pulmonaire lésionnel à l’origine de modifications complexes de la mécanique respiratoire. Les animaux sont souvent présentés en hypercapnie par hypoventilation, acidose respiratoire et en hypoxémie majeure. L’emballement de la réponse inflammatoire peut s’accompagner d’un SIRS, élément alors propice au développement d’un SDRA. Il convient de savoir si de l’eau douce ou salée a été ingurgitée du fait de leur osmolarité différente. En effet, l’eau salée est un soluté hypertonique par rapport au plasma, entrainant par gradient de concentration un mouvement d’eau du compartiment intra-vasculaire vers les compartiments interstitiels et alvéolaires. Les conséquences incluent l’hypovolémie, l’hémoconcentration, l’altération du surfactant et le comblement alvéolaire. Une ventilation protectrice à base d’un volume courant bas et d’une PEP d’environ 5 cmH2O doit faire partie de la prise en charge d’urgence. En cas d’absence d’amélioration de l’oxygénation artérielle et de la persistance d’une acidose métabolique, les paramètres ventilatoires doivent être modifiés. Toujours est-il qu’un traitement de la cause sous jacente au SDRA, si elle est connue, doit impérativement être mis en place et sera le gage d’une résolution clinique la plus rapide possible. 66 III. Modèles expérimentaux du SDRA A. Définition et conditions à la mise en œuvre d’un modèle animal Le développement de modèles animaux est d’une importance fondamentale en recherche biomédicale. La complexité de la pathogénie du SDRA les rend nécessaires afin d’étayer sans cesse les connaissances pré existantes, compte tenu de l’absence de méthode alternative. Un modèle animal se définit comme suit (Guide for the Care and Use of Laboratory Animals, 1985): un modèle permettant l’étude de données de référence sur la biologie. un modèle chez lequel un processus pathologique spontané ou induit peut être exploré, celui-ci ayant un ou plusieurs aspects communs avec un phénomène équivalent chez l’Homme ou d’autres espèces animales. Cinq types de modèles existent et sont énoncés comme suit : Les modèles naturels dans lesquels les maladies sont présentes naturellement chez les animaux et identiques à des maladies ou affections humaines. À titre d’exemple le lapin Watanabe est un modèle naturel d’hypercholestérolémie chez l’Homme. Les modèles expérimentaux sont crées afin de reproduire expérimentalement une affection ou une maladie. Les animaux sont initialement en bonne santé puis sont soumis à une intervention (acte chirurgical, administration de médicament, d’agents infectieux) susceptible d’engendrer un état physiologique anormal. À titre d’exemple, l’administration de streptozotocine chez le lapin permet l’induction d’un diabète de type I. Les modèles génétiquement modifiés font appel à des animaux dont le code génétique a été modifié afin de provoquer la maladie désirée. L’insertion d’un ADN étranger, le remplacement (modèle knock-in) ou la neutralisation de certains gènes (modèle knock-out) font partie des techniques utilisées. Les modèles négatifs s’appuient sur des animaux résistants à une affection donnée. Des études sont ainsi entreprises sur cette « résistance naturelle » afin de comprendre son origine et ses fondements physiologiques. À titre d’exemple, le chimpanzé est un modèle négatif pour la maladie d’Alzheimer à laquelle ce dernier est peu sensible. Les modèles orphelins rassemblent des animaux qui présentent de manière congénitale une pathologie pour laquelle il n’existe aucun équivalent chez l’Homme. Les résultats obtenus à l’issue des explorations peuvent par la suite être extrapolés en médecine humaine dans le but de proposer de nouvelles applications thérapeutiques. Pour des questions évidentes d’éthique, la mise en œuvre d’études sur l’Homme est proscrite. Sur les animaux, ces expérimentations peuvent être entreprises à la lumière d’une réglementation très stricte et dans des conditions de laboratoire extrêmement contrôlées. Quand ils sont concluants, ces recherches permettent une meilleure compréhension des mécanismes physiopathologiques en jeu. Les modèles animaux sont alors le support de nouveaux essais thérapeutiques qui pourront par la suite être adaptés en médecine humaine ou vétérinaire. 67 Un modèle doit requérir certaines qualités indispensables à sa validité. Ainsi celui-ci se doit d’être soit : Isomorphe : les symptômes observés doivent être identiques à ceux de la pathologie humaine malgré les différences anatomiques ou physiologiques inhérentes à l’espèce. Homologue : la connaissance des mécanismes du modèle et de la pathologie doit assurer la comparaison avec l’Homme. Prédictif : la réponse du modèle animal aux traitements doit être similaire à celle de la pathologie humaine. Une fois un modèle validé d’après les critères définis ci-dessus, celui-ci peut être modulé au cours du temps. En effet, ce n’est qu’à l’issue des ajustements entrepris par les équipes de recherche qu’un modèle démontre sa pertinence et son analogie avec la pathologie humaine. Cette analogie reste cependant toujours imparfaite, d’où une transposition à l’Homme parfois délicate. Certaines limites sont inhérentes aux modèles animaux. Citons notamment des facteurs non expérimentaux liés à l’animal (racines génétiques, âge, sexe, état reproducteur, présence de stress, maladies intercurrentes…), physiques et environnementaux (température, humidité, ventilation, taille des cages et densité du milieu, stress lié au transport…) ou liés aux manipulations (anesthésie, type d’intervention, nursing per et post opératoire…). Ils sont susceptibles d’influer sur la réponse des animaux de laboratoire. B. Modélisation du SDRA Aucun modèle animal n’est à même de reproduire entièrement toutes les caractéristiques physiopathologiques du SDRA chez l’Homme. Seuls certains mécanismes des phases inflammatoire, fibroproliférative ou résolutive ont été modélisés. Cependant, sous réserve d’une interprétation tenant compte des limites du modèle expérimental, certaines données pertinentes ont pu être extrapolées et des éléments clés du SDRA clarifiés. L’étude du SDRA a été réalisée sur différentes espèces animales. Les mammifères comme les singes et autres anthropoïdes sont les plus intéressants de part leur proximité phylogénétique avec l’Homme. Cependant des considérations éthiques, techniques et financières limitent leur implication en recherche biomédicale. Lapins, rats et souris constituent actuellement les petits animaux les plus utilisés dans les modèles d’atteinte pulmonaire aigüe, et ce, pour de multiples raisons. Tout d’abord, ce sont des animaux de petite taille dont l’élevage est aisé et rapide. Ces derniers disposent d’une grande faculté d’adaptation, notamment environnementale. De part leur durée de gestation brève (21 jours pour les souris), plusieurs générations de rongeurs peuvent être obtenues à court terme. De plus, la majorité d’entre eux sont issus de lignées consanguines. Leur patrimoine génétique est donc identique (aux différences sexuelles près), à l’exception du ou des gênes d’intérêt sur lesquels l’étude porte. La création de lignées génétiquement modifiées permet ainsi d’annuler toute variabilité génétique et environnementale afin que l’analyse finale des résultats soit la plus fiable possible (Sigmund, 2000). Enfin, ce sont des espèces connues des chercheurs sur le plan anatomique, physiologique ou génétique, dont les altérations physiopathologiques sont aisées à comprendre. Pour autant, leur petite taille peut constituer un frein à certaines démarches paracliniques. En effet, la prise en charge à court terme d’un patient atteint de SDRA nécessite le suivi précis et régulier de ses paramètres vitaux (pression artérielle, fréquence cardiaque et respiratoire, température...) et biochimiques (gaz du sang, comptage des populations érythrocytaires et lymphocytaires, dosage de cytokines…). Récemment, des 68 dispositifs télémétriques se sont développés et permettent le monitorage des systèmes cardiovasculaires et respiratoires sur des animaux de petit format, vigiles. En outre, le prélèvement de sang n’est pas un acte anodin quand seul 1% du poids vif peut être prélevé. Par extension, les grands animaux type cochons, chiens, moutons sont des espèces plus adaptées à des suivis cliniques sur le long terme. Ils font partie de nombreux protocoles expérimentaux bien que ces derniers soient plus coûteux et difficiles à mettre en place. In fine, les spécificités anatomiques et biologiques de chaque espèce doivent être prises en compte avant de sélectionner la plus adaptée au modèle souhaité. Tous les modèles animaux de SDRA se basent sur la reproduction de facteurs de risque associés à sa survenue chez l’Homme, à savoir : le sepsis, les traumatismes, les réactions post transfusionnelles, les fausses déglutitions, les lésions pulmonaires d’ischémie – reperfusion et les traumatismes induits par la ventilation. Les différents modèles animaux rapportées dans la littérature sont synthétisés dans le tableau 7. Tableau 7 : Répartition de l’utilisation des différents modèles animaux dans les études expérimentales sur le SDRA rapportées dans PubMed entre 2003 et 2007 (d’après MatuteBello et al., 2008). Volo/Barotraumatisme induit par la ventilation mécanique Lipopolysaccharide Bactérie vivante Hyperoxie Bléomycine Acide oléique Ponction et ligature caecale Instillation intra trachéale d’HCl 1. Pourcentage (%) 30% 19% 16% 12% 10% 5% 4% 3% Modèles étiologiques du SDRA a. Modèle à l’acide oléique L’acide oléique correspond à l’acide gras mono-insaturé à chaîne longue le plus abondant de l’organisme des mammifères, utile à la synthèse d’acides gras à chaîne carbone plus longue. Ce modèle à l’acide oléique s’appuie sur l’induction d’un syndrome d’embolie pulmonaire graisseuse à l’origine d’une atteinte pulmonaire aigüe équivalente à celle du SDRA. Le syndrome d’embolie pulmonaire graisseuse est une complication fréquente à la suite d’un polytraumatisme incluant plusieurs fractures d’os longs et qui conduit à l’obstruction du réseau circulatoire par des micros gouttelettes de graisses insolubles (Mimoz et al., 1997). Cette libération d’acides gras libres mène à un SDRA par toxicité directe au niveau de la membrane alvéolo-capillaire. Ce modèle peut également reproduire l’agression pulmonaire consécutive à une pancréatite. 69 i. Mode d’agression pulmonaire L’endothélium vasculaire est la première structure touchée suite à l’administration d’acide oléique. Son injection au moyen d’un cathéter placé directement au niveau de l’artère pulmonaire s’accompagnait ainsi très rapidement de modifications structurales visibles en microscopie électronique (Motohiro et al., 1986). Celles-ci étaient mises en évidence grâce à l’utilisation d’une technique diagnostique s’appuyant sur un marqueur colorimétrique, l’« Evans Blue dye ». L’utilité de ce colorant réside dans sa forte affinité pour l’albumine. En conditions physiologiques, la membrane alvéolo-capillaire est imperméable à cette molécule de haut poids moléculaire qui reste cloisonnée au compartiment vasculaire. A contrario, dans cette étude, le test à l’acide oléique révélait une coloration « Evans Blue » au sein de l’espace sous-endothélial, témoin d’une extravasation anormale d’albumine au niveau de la barrière alvéolo-capillaire. L’administration acide oléique provoque donc une augmentation de perméabilité à l’origine de la formation un œdème riche en protéines similaire à celui décrit dans le SDRA. Ces altérations sont consécutives à une nécrose directe des cellules endothéliales par peroxydation lipidique au niveau de la membrane cellulaire. Le déterminisme de l’atteinte épithéliale n’est pas encore entièrement élucidé. Cet état s’accompagne d’un afflux maximal de polynucléaires neutrophiles à 24 heures, auxquels s’ajoutent de nombreux macrophages alvéolaires résidents. L’analyse de liquides de LBA de rats ayant reçu 30µl d’acide oléique dilué dans du sérum de bovins par voie intraveineuse corroborait ce processus inflammatoire (Hussain et al., 1998). Les PNN ne semblaient toutefois pas activés et indispensables à la genèse de l’agression locale. Sur le plan anatomopathologique, les lésions incluent des hémorragies alvéolaires, des modifications endothéliales avec des thromboses capillaires, la présence de membranes hyalines et d’infiltrats neutrophiliques. Cependant cette atteinte, bien que diffuse, est inégale et certaines zones restent épargnées, relativement saines (Matute-Bello et al., 2008). Vadász et al. (2005) ont par ailleurs montré qu’une fois l’œdème installé, l’acide oléique induisait un blocage des mécanismes de réabsorption transépithéliale. La résorption active au pôle apical et basal de l’épithélium étaient impactés, respectivement à travers les canaux EnaC-amiloride dépendants et la pompe Na +/K+/ATP. Le mécanisme moléculaire par lequel l’acide oléique inactive les canaux et la pompe reste encore incertain mais il semblerait qu’une interaction directe par fixation de l’acide oléique sur les sous unités canalaires soit une explication plausible. D’autres hypothèses ont aussi été soulevées notamment la stimulation de la synthèse de radicaux libres de l’oxygène par l’acide oléique. Ces composés influenceraient notamment l’expression et l’activité des canaux EnaC et de la pompe ATP dépendante (Matalon et al., 2003). Cliniquement, l’administration d’acide oléique se traduit in vivo par une détresse respiratoire aigüe dose dépendante. La fréquence respiratoire (Fr) et cardiaque (Fc) ainsi que la pression artérielle systémique (PA) ont été monitorées chez de jeunes cochons ayant reçu par voie intraveineuse différentes concentrations d’acide oléique (30-50-60-75-90µL). L’augmentation de la fréquence respiratoire était immédiate. À forte dose (supérieure à 75µL), une chute brutale de la FR et de l’index cardiaque était notée et se soldait par la mort des animaux sous une heure. Le suivi du ratio PaO2/FiO2 montrait une nette diminution de sa valeur (Akella et al., 2014). L’acide oléique entraine donc une hypoxie progressive associée à des effets cardiovasculaires marqués. 70 ii. Mise en œuvre pratique Pratiquement, l’administration d’acide oléique se fait soit au niveau d’une veine périphérique ou centrale soit directement dans l’atrium droit ou l’artère pulmonaire. Cette molécule nécessite d’être préalablement dissoute dans l’éthanol car sa solubilité est faible dans les solutés aqueux couramment disponibles (NaCl 0.9% et Ringer Lactate). Ses effets sont quasiment instantanés et dépendent de la dose administrée. Prenons l’exemple de lobes pulmonaires de chiens, isolés, ventilés et perfusés à l’aide de deux solutions d’acide oléique de concentration différente (1µl/kg versus 45µl/kg). Une solution saline servait de témoin. Une heure après l’injection, leur poids était évalué par pesée conventionnelle. Les résultats montraient une différence significative entre le groupe témoin et le groupe d’expérimentation. Les lobes perfusés avec la solution titrée à 45µL/kg d’acide oléique étaient significativement plus lourds que les autres (0.60g +/- 0.10 vs 0.31g +/- 0.07, p<0.05) (Ehrhart et Hofman, 1981). En outre, il a été prouvé qu’une administration unique occasionnait un état inflammatoire similaire à celui de la phase exsudative du SDRA, tandis que des administrations répétées aboutissaient à une fibrose plus tardive (Derks et Jacobovitz-Derks, 1977). iii. Avantages et limites Le modèle à l’acide oléique reproduit le socle de la physiopathologie du SDRA à savoir l’atteinte inflammatoire interstitielle et alvéolaire diffuse. La modification de la perméabilité alvéolo-capillaire en est à l’origine et se traduit cliniquement par une détérioration des échanges gazeux. La plupart des travaux sur la mise en œuvre de la ventilation assistée ont été portés à partir de ce modèle. De plus, il présente une bonne reproductibilité : ceci est un avantage majeur en recherche biomédicale du fait du nombre important d’essais à entreprendre. Toutefois, ce modèle présente un désavantage majeur : celui de sa concordance étiologique chez l’Homme. Peu de cas de détresse respiratoire aigüe consécutifs à un syndrome d’embolie graisseuse lié à un polytraumatisme sont en effet cités dans la littérature. Ce modèle s’avère peu transposable à d’autres étiologies du SDRA et aucune étude n’a pour le moment démontré que l’atteinte primaire induite par l’acide oléique (toxicité directe sur l’endothélium pulmonaire) était similaire à ce qui survient par exemple en cas de sepsis ou de fausse déglutition. Enfin, les injections intraveineuses d’acide oléique sont difficilement réalisables sur des petits mammifères type souris ou rats. Du temps et une certaine expérience sont requis pour manipuler ces animaux. En pratique, les lapins, chiens ou cochons sont plus employés. b. Administration de lipopolysaccharide (LPS) Ce modèle s’appuie sur l’injection intraveineuse de LPS (lipopolysaccharide) et a pour objectif de reproduire les conséquences pulmonaires d’une infection bactérienne systémique. Le sepsis est en effet l’une des étiologies principales du SDRA. Le LPS est un glycolipide présent à la surface des bactéries Gram négatives telles qu’Escherichia Coli ou Salmonella sp. C’est une endotoxine pyrogène composée d’un lipide A hydrophobe qui ancre le LPS à la membrane externe, et d’une chaîne latérale appelée 71 antigène O. Celle-ci se compose d’un groupement de deux triosides et d’un dioside qui se répètent de nombreuses fois. L’activité endotoxinique est portée par le lipide A, la spécificité antigénique de la souche bactérienne par l’antigène O. i. Mode d’agression pulmonaire Le lipide A est la partie responsable de l’induction de la réponse immunitaire non spécifique. Celui-ci a la capacité de se fixer sur une protéine ligand, la LPS binding proteine (LBP). Le complexe lipide A-LBP a pour cible première les macrophages sur lesquels il se fixe via des récepteurs spécifiques, dont deux principaux : le CD14 et le TLR-4 (Toll Like Receptor) (Wright et al., 1990). D’autres cellules immunitaires expriment à leur surface ces deux récepteurs. Des souris mutées pour le gène TRL-4 sont ainsi résistantes à l’action du LPS (Wang et al., 2007). L’adhésion du LPS entraine la synthèse en cascade de cytokines pro-inflammatoires comme l’IL-1, le TNF-α, l’IL-1β, l’IL-8 ou le PAF (Platelet Activating Factor) et de médiateurs de l’inflammation (leucotriènes, prostaglandines) (O’Grady et al., 2001). Un afflux majeur de PNN s’ensuit, activés sous l’action des agents cités précédemment. Leur accumulation est à l’origine de la production de dérivés oxydatifs qui aggravent les dommages existants par destruction des membranes cellulaires et des protéines nucléaires (Rocksén et al., 2000). Au cœur des mécanismes de régulation transcriptionnelle de cette cascade de l’inflammation, se trouve le facteur nucléaire NF-kappa B qui agit sur les ARN messagers responsables de la synthèse de toutes ces protéines de l’inflammation. Agir en amont sur des régulateurs transcriptionnels proches du NF-kappa B pourrait être un moyen de suspendre précocement certaines voies de la cascade inflammatoire. Contrairement au modèle à l’acide oléique dans lequel les cellules endothéliales et épithéliales subissent une nécrose toxique, le LPS semble vraisemblablement provoquer leur apoptose (Wang et al., 2007). Cette mort cellulaire survient à la suite de l’activation en cascade d’un schéma intrinsèque qui implique notamment une famille de protéines appelées caspases. Certaines d’entre-elles (citons par exemple la protéine « Bid ») dont l’action consiste à perméabiliser la membrane externe mitochondriale, entrainent la libération intracytosolique de médiateurs pro-apoptotiques. La balance entre facteurs pro et anti-apoptotiques conduit ainsi à une signalétique cellulaire spécifique. L’importance de ces protéines a notamment été soulignée par une étude portant sur des souris mutées pour le gène codant la caspase « Bid » (souris« Bid -/-»). En effet, à 48h post injection de 6 mg/kg de LPS, les anomalies histologiques (œdème, lésions infiltratives alvéolaires) étaient moins marquées chez ces souris mutées que chez des souris saines. De plus, des cellules mutées pour surexprimer une protéine anti apoptotique (protéine « Bcl-2 Bcl-x ») étaient moins sensibles à l’action délétère du LPS que des cellules témoin (Wang et al., 2007). L’étude de Kawasaki et al. (2000) s’est penchée sur les effets in vivo d’un inhibiteur large spectre des caspases, le benzyloxycarbonil-Val-Ala-Asp fluoromethylketone (ZVAD.fmk). Le nombre de cellules épithéliales et endothéliales présentant des images d’apoptose était significativement moins important chez les souris traitées avec cet inhibiteur. En outre, celles-ci vivaient en moyenne plus longtemps et 27% d’entre elles étaient toujours vivantes à To+ 7 jours. À l’autopsie, leur architecture pulmonaire conservée. À contrario, 30 heures après induction, 100% des souris témoin étaient décédées (figure 18). Le gold standard pour valider un essai thérapeutique et l’appliquer sur le terrain clinique est une réduction du taux de mortalité associé. Dans ce cas, la réalisation de travaux à plus grande échelle pourrait permettre de confirmer les effets positifs d’inhibiteurs tels que celui décrit ci-dessus et de les envisager comme traitement d’avenir du SDRA. 72 Survie (%) Figure 18 : Pourcentage de survie en fonction du temps de deux lots de souris : le premier ayant reçu une injection seule de LPS, l’autre ayant reçu également un inhibiteur des caspases (Z-VAD.fmk) (d’après Kawasaki et al., 2000). Temps (h) Les modifications hémodynamiques surviennent 3 à 4 heures après administration de LPS. Elles se manifestent en premier lieu par une hypoxémie et une chute du gradient alvéolo-artériel en oxygène. Les autres altérations hémodynamiques liées au choc septique incluent une baisse importante du débit cardiaque, de la pression artérielle systémique et l’apparition anomalies rénales et hépatiques. L’action pathogène du LPS réside également dans sa résistance aux systèmes de défense de l’hôte (ex : résistance aux propriétés bactéricides du complément) (Matute-Bello et al., 2008). La réponse vasculaire aux endotoxines bactériennes implique la NO-synthase inductible et la voie des cyclo-oxygénases dont l’activation module la balance entre molécules vasodilatatrices et vasoconstrictrices. Les mécanismes de vasoconstriction hypoxique normalement activés en cas d’inadéquation du ratio V/Q sont altérés. L’étude de Hutchison et al. (1985), a mis en évidence une diminution des résistances vasculaires périphériques quatre heures après l’inoculation d’endotoxines d’Escherichia Coli chez des moutons de laboratoire. Les cascades du complément et de la coagulation sont initiées consécutivement. L’activation de la cascade de la coagulation est secondaire à la mise en jeu du TF (Tissular Factor) qui, par le biais de facteurs de la voie commune aboutit à la transformation du fibrinogène en fibrine. Au cours du choc septique, l’activité procoagulante est stimulée aux dépens de l’activité anticoagulante médiée en partie par l’antithrombine III et la protéine C pulmonaire. Les effets procoagulants et anti-fibrinolytiques prédominent et accroissent les risques de formation de thrombus pulmonaires à l’origine d’un défaut d’oxygénation (Welty-Wolf et al., 2002). 73 ii. Mise en œuvre pratique La genèse des lésions pulmonaires diffère selon la voie d’administration. Celle ci peut se réaliser par voie intraveineuse, intratrachéale ou intrapéritonéale. Par dissémination bronchique directe, l’épithélium alvéolaire est initialement lésé. Par voie hématogène, la réponse est majoritairement endothéliale. D’autres modèles se rapprochent de celui endotoxinique et consistent à injecter une dose standardisée de bactéries, de produits bactériens ou de cytokines pro-inflammatoires. Chacun à leur manière tente de reproduire une partie ou l’ensemble des processus impliqués dans l’agression pulmonaire d’origine septique. L’inoculation intranasale, intratrachéale ou endobronchique de bactéries vivantes est la méthode la plus fiable pour modéliser une pneumonie bactérienne primaire au SDRA. iii. Avantages et désavantages L’utilisation de LPS est une méthode particulièrement intéressante pour comprendre les réponses physiologiques de l’hôte en cas d’infection bactérienne systémique. Ce modèle caractérise particulièrement bien la phase inflammatoire du SDRA et les modifications cardiocirculatoires qui en découlent. À l’avenir ce modèle pourrait être une base de réflexion à l’utilisation thérapeutique de modulateurs de la vasomotricité et de la coagulation dans la prise en charge du SDRA. La facilité d’exécution et la bonne reproductibilité des expérimentations en font un modèle avantageux. La susceptibilité des espèces au LPS constitue cependant une limite au modèle. Du fait de divergences phylogénétiques entre l’Homme et d’autres espèces, ces dernières se sont adaptées différemment aux pathogènes de leurs niches environnementales respectives. La reconnaissance entre les cellules de l’immunité et les molécules de signalisation bactériennes se fait - comme précisé précédemment - via des Toll Like Receptor ou TLR. Les travaux de Hajjar et al. (2002) ont démontré que la chaîne extracellulaire des TLR4, composée d’acides aminés, était extrêmement variable d’une espèce à l’autre et que ces TLR4 reconnaissaient ainsi des LPS très différents. Au cours de l’évolution, des changements sont apparus concernant la structure et la spécificité au ligand des TLR modifiant par la même le schéma de réponse immunitaire. Les particularités interspécifiques doivent donc être prises en compte dans la sélection des animaux destinés à modéliser le SDRA. Le dernier écueil concerne les préparations contenant les endotoxines destinées à être injectées. Il a été démontré que leur pureté pouvait différer d’une solution à une autre, d’autres produits protéiques bactériens pouvant être présents. Cette contamination occasionne des interactions indésirables entre le LPS et d’autres TLR, modifiant ainsi ses effets biologiques intracellulaires (Tapping et al., 2000). iv. Glucocorticoïdes et antioxydants L’inflammation médiée par les PNN et les molécules pro-inflammatoires étant une dominante du SDRA, le recours à des anti-inflammatoires semble légitime. Ces substances peuvent intervenir à différents points de la chaîne inflammatoire : au niveau de la régulation de l’expression des cytokines impliquées, du blocage des mécanismes de migration neutrophilique, ou de l’inhibition de la synthèse des composés oxydatifs toxiques. Les effets d’un traitement à l’aide de déxamethasone et de NAC (N-acétylcystéine) ont été évalués dans un modèle d’instillation intratrachéale de LPS. La déxamethasone est un glucocorticoïde de 74 synthèse. Des études ont montré que son action limitait l’expression de cytokines inflammatoires via le blocage de l’activation et de la translocation nucléaire du NF-kappa B, un de leurs facteurs de transcription (Auphan et al., 1995). Elle agit également sur les molécules stimulant l’adhésion des neutrophiles aux membranes basales (ICAM-1 par exemple). La N-acétylcystéine promeut la synthèse intracellulaire de glucathione molécule aux propriétés antioxydantes. La figure 19 expose la concentration en PNN dans le LBA de souris traitées à l’aide de ces deux molécules. Le choix des posologies se basait sur les conclusions de travaux complémentaires. Ceux-ci montraient notamment que l’effet antioxydant du NAC n’était visible qu’à sa dose maximale (500 mg/kg). L’utilisation d’une injection de déxamethasone à 10 mg/kg s’accompagnait d’une réduction significative du recrutement local de neutrophiles, tout comme la production de radicaux libres. La combinaison déxamethasone + NAC ne montrait pas plus d’efficacité que l’administration seule de glucocorticoïde. Les effets anti inflammatoires d’une seule dose de NAC, bien qu’élevée, semblaient faibles comparés à son action antioxydante (Rocksén et al., 2000). Les autres études qui se sont penchées sur l’utilité des corticoïdes dans le traitement du SDRA n’ont pas montré d’impact sur le taux de mortalité. Seuls les travaux de Meduri et al. en 1998 ont rapporté une différence significative de mortalité en structure hospitalière entre des patients ayant reçu 2 mg/kg/jr de methylprednisolone pendant 32 jours et ceux placebo (12.5% contre 62.5%, p<0.05). Cependant le protocole incluait uniquement des patients n’ayant pas présenté d’amélioration de leur LIS (Lung Injury Score) après 7 jours de ventilation mécanique. Les corticostéroides intervenaient ainsi en phase tardive non résolutive du syndrome. En 2007, Meduri et ses collègues ont réitéré l’étude en phase précoce du SDRA, soit 72h après diagnostic. La methylprednisolone était injectée à 1mg/kg/jour, 28 jours durant. Une diminution des taux circulants de cytokines et de marqueurs inflammatoires telle la protéine C réactive était notée. Les patients restaient significativement moins de temps sous ventilation mécanique. Cependant, aucun effet bénéfique sur la mortalité à l’hôpital n’a pu être démontré (Meduri et al., 2007). Les résultats de l’ARDS Network (étude menée sur 180 patients en SDRA depuis minimum 7 jours) ont confirmé qu’entre un groupe témoin et un groupe ayant reçu de la methylprednisolone, ce dernier était in fine resté moins longtemps sous ventilation, avait présenté une amélioration plus rapide de sa compliance pulmonaire et n’avait pas été sujet à plus de complications infectieuses. La mortalité à 60 et 180 jours post prise en charge n’était significativement pas différente entre ces deux groupes. Etonnamment l’étude soulignait également que l’initiation d’un traitement à base de corticostéroïdes chez des patients pris en charge tardivement (plus de 14 jours après le début du SDRA) pouvait aggraver le risque de mortalité (« Efficacy and Safety of Corticosteroids for Persistent Acute Respiratory Distress Syndrome », 2006). L’emploi de corticostéroïdes à dose faible au long court semble ainsi envisageable mais la démonstration de leur utilité réelle dans le SDRA nécessite encore la publication de données supplémentaires. D’autant que leur utilisation n’est pas sans conséquence : sensibilité aux infections concomitantes, ulcères, retard à la cicatrisation, hyperglycémie sont autant d’effets secondaires qu’il convient de prendre en compte chez des patients débilités. 75 Concentration en granulocytes neutrophiles dans le LBA (×10-5) Figure 19: Concentration en granulocytes neutrophiles dans le LBA de souris traitées à la déxamethasone (Dex 10mg/kg) et/ou à la N-acétylcystéine (NAC 500mg/kg) soit 1 heure avant (a) ou 1 heure après (b) l’instillation de LPS (0.1 mg/ml). Le comptage cellulaire a été fait par technique de cytométrie de flux (d’après Rocksén et al., 2000). c. Autre modèle septique de SDRA : ligature et ponction du caecum Chez l’Homme, les infections abdominales/péritonéales sont souvent à l’origine du développement d’un sepsis généralisé, cette affection étant connue comme un facteur de risque de SDRA. Dans ce modèle une péritonite est induite expérimentalement, suivie d’un sepsis. La physiopathologie de l’atteinte pulmonaire secondaire partage de nombreux aspects avec celle induite par l’administration d’endotoxines, mais s’avère tout de même plus complexe. i. Mode d’agression pulmonaire L’apparition de remaniements au niveau de l’arbre respiratoire est moins immédiate qu’après inoculation de LPS. Dans les travaux de Goya et al. (1992), les signes d’œdème interstitiel et d’infiltrats neutrophiliques étaient observables à l’histologie 24h après l’intervention, au moment où l’endotoxémie était maximale. Dans ce modèle, l’agression est majoritairement médiée par les macrophages alvéolaires et implique peu les granulocytes neutrophiles. Leur activation semble stimulée par l’arrivée des endotoxines par voie hématogène bien que l’implication de cytokines pro-inflammatoires intervienne également. Sur le plan hémodynamique, ce modèle est marqué par une hypertension artérielle pulmonaire et une diminution de la réponse vasculaire à l’hypoxie médiée par les toxines bactériennes 24 à 30h après l’opération. L’hypoxémie est variable en fonction des protocoles expérimentaux choisis. 76 ii. Mise en œuvre pratique Une opération chirurgicale doit être réalisée afin d’accéder au caecum. Une ligature est posée en amont de la valvule iléo-caecale de manière à individualiser cet appendice. Le caecum est ensuite ponctionné à l’aide d’une aiguille en différents endroits, trois à cinq fois. Le contenu caecal, riche en bactéries se vide ainsi dans la cavité péritonéale qui assure la multiplication bactérienne. La sévérité de l’atteinte est fonction du nombre de ponctions réalisées et du diamètre de l’aiguille choisi. Ainsi une ponction simple induit un sepsis modéré tandis qu’une ponction multiple est responsable d’un sepsis sévère avec péritonite, bactériémie et réaction inflammatoire systémique (Walley et al., 1996). iii. Avantages et désavantages Sa mise en œuvre est contraignante dans la mesure où une chirurgie sous anesthésie générale est nécessaire. Etant donné que la ponction du caecum est à l’origine de l’infection, l’inoculum bactérien n’est pas connu. Des examens bactériologiques sanguins peuvent être conduits. Cependant, la flore caecale étant variable d’une espèce à l’autre, la réponse systémique et pulmonaire pourra l’être également. d. Instillation intra trachéale d’acide chlorhydrique (HCl) Ce modèle vise à reproduire l’agression pulmonaire observée chez l’Homme après inhalation de liquide gastrique. Bien que ce modèle ait été peu utilisé (3% des articles décrits dans la littérature), la fausse déglutition est connue comme l’un des facteurs de risque majeurs d’apparition d’un SDRA. L’une des caractéristiques physico-chimiques du suc gastrique est son pH acide d’où l’utilisation en recherche d’acide chlorhydrique (HCl). Le contenu gastrique contient également des particules alimentaires, des produits de dégradation de bactéries commensales ainsi que des cytokines de type IL-1β. Cela est à prendre en compte pour comprendre la pathogénie du SDRA consécutif à l’inhalation de suc gastrique (MatuteBello et al., 2008). i. Mode d’agression pulmonaire La réponse à ce modèle se révèle être bi-phasique (Raghavendran et al., 2011). Dans un premier temps, l’atteinte primaire due à l’acide chlorhydrique siège au niveau de l’épithélium alvéolaire et particulièrement au niveau des pneumocytes de type I. Les lésions épithéliales sont directement provoquées par l’action caustique de l’acide et se traduisent par une altération de la perméabilité alvéolo-capillaire. Ainsi, l’instillation intra trachéale d’HCl chez une cohorte de chiens anesthésiés était suivie d’une augmentation de plus de 50% du volume liquidien pulmonaire (Grimbert et al., 1981). Quatre à six heures après, la deuxième phase débute par l’intervention majeure des polynucléaires neutrophiles. Le relargage de cytokines pro inflammatoires telle que l’IL-8 serait à l’origine de leur arrivée massive sur le site lésionnel. Leur adhésion puis leur migration à travers l’épithélium et l’endothélium sont responsables des lésions pulmonaires. Cette étape nécessite la présence de facteurs chimiotactiques (monocyte chemoattractant proteine, dont MCP-2) et de molécules d’adhésion (ICAM-1) variables selon l’espèce concernée. L’IL-8 joue un rôle fondamental comme « recruteur » de PNN comme l’a montrée l’étude de Folkesson et al., (1995). Dans celle-ci, l’utilisation d’anticorps anti IL-8 aboutissait à une diminution de plus de 50% de la 77 concentration de neutrophiles visibles dans le LBA de lapins de laboratoire et ceci était directement corrélé à une nette amélioration de leur statut respiratoire. En outre, les PNN activés synthétisent des agents oxydants et des protéases qui contribuent aux dommages tissulaires (Knight et al., 1992). L’histologie révèle une atteinte inflammatoire aigüe avec des zones d’infiltration neutrophilique importante, des hémorragies alvéolaires et de l’œdème alvéolo-interstitiel. L’étude de Marumo et al., (2009) a confirmé que la distribution des lésions n’était pas uniforme et que les zones dépendantes du poumon, les plus compliantes, étaient les plus touchées. Les modifications hémodynamiques incluent une augmentation rapide de la pression dans les voies aériennes ainsi qu’une baisse de la compliance pulmonaire associée à une augmentation de l’espace mort. ii. Mise en œuvre pratique L’instillation d’HCl se fait directement dans la trachée voire dans les bronches sur un animal sous ventilation assistée. La sévérité de l’atteinte est fonction de la concentration en HCl administrée. Le pH gastrique dépend du taux de production des ions H+, variable à jeun ou en période post prandiale, de l'action tampon ou non des aliments (protéines) et des facteurs de dilution avec les autres composants du suc gastrique. Chez l’Homme le pH est compris entre 1 et 3 à jeun et peut devenir plus basique sous l’action tampon du contenu alimentaire (pH = [4-5]). Chez les carnivores, sa valeur est beaucoup plus fixe et basse, la nourriture ayant peu de propriétés tampon (pH = [1,5-2]). Dans la plupart des études, la solution expérimentale se compose d’un mélange de NaCl titré à 0,3% d’HCl, dont le pH final est compris entre 1,2 et 1,5. Celle-ci a ainsi des propriétés chimiques (pH et osmolarité) qui s’approchent de celles du suc gastrique de la majorité des patients (Matute-Bello et al., 2008). iii. Avantages et désavantages Ce modèle à l’instillation d’acide chlorhydrique se révèle particulièrement utile à la compréhension des mécanismes de recrutement neutrophilique. Il permet aussi l’étude des conséquences hémodynamiques et physiologiques du SDRA. La principale limite réside dans le fait qu’en situation réelle un patient ne déglutit pas une solution purement acide mais un contenu gastrique constitué de particules alimentaires, de produits de dégradation bactériens et de cytokines, dont le pH est généralement supérieur à 1,5. D’autres études doivent être menées afin de voir s’il existe une différence pathophysiologique entre ce modèle et ce qui survient chez des patients hospitalisés. L’ajout de particules gastriques non acides isolées chez l’animal sain semble aggraver le processus inflammatoire siégeant au niveau de l’arbre respiratoire. À titre de justification, les travaux de Raghavendran et al. (2005) se sont basés sur trois groupes d’étude : des souris ayant reçu une solution intratrachéale d’HCl (pH =1,25) (groupe ACID), une solution contenant des particules gastriques non acides (groupe SNAP) et enfin une combinaison des deux solutions précédentes (CASP). L’instillation d’une solution saline de NaCl (NS) constituait le groupe témoin. Les résultats ont révélé que 48h après le début de l’expérimentation, les concentrations au sein du LBA de certains médiateurs inflammatoires (TNF-α, IL-1β et IL-6 dans ce cas) étaient nettement supérieures pour le groupe ayant reçu à la fois des particules gastriques non acides et de l’HCl (figure 20). Cette composition reproduirait plus fidèlement le contenu du chyme gastrique. Affiner ce modèle d’injection intratrachéale d’HCl permettrait d’extrapoler plus précisément les résultats à l’Homme. 78 Figure 20: Concentrations en médiateurs pro-inflammatoires (TNF-α, IL-1β et IL-6 respectivement de gauche à droite et de bas en haut) après lavage broncho-alvéolaire et analyse ELISA à 6h, 24h et 48h chez différents groupes d’étude : ACID, SNAP, CASP, NS (voir dans le texte ci-dessus) (d’après Raghavendran et al., 2005). Temps d’expérimentation (h) 79 e. Modèle d’ischémie/reperfusion Les lésions pulmonaires d’ischémie/reperfusion peuvent être directes (atteinte pulmonaire primaire) ou indirectes et toucher initialement d’autres organes. Dans ce cas l’atteinte pulmonaire se développe à partir d’un foyer secondaire. L’ischémie résulte d’une inadéquation entre la perfusion d’un territoire et la demande métabolique en oxygène et substrats énergétiques associés. En médecine humaine les mécanismes d’ischémie/reperfusion surviennent à la suite, soit d’une interruption totale du flux sanguin (arrêt cardiaque, infarctus myocardique, ischémie mésentérique, transplantation pulmonaire…) soit d’une diminution de la perfusion tissulaire. Celle-ci est couramment consécutive à des insuffisances circulatoires aigües (choc septique, anévrisme avec thrombus etc…). Consécutivement, un SDRA est susceptible de se déclarer. Reperfuser les organes ischémiés est indispensable à leur survie. Cependant, il est actuellement prouvé que le rétablissement de la perfusion et d’une oxygénation adéquate pouvait aggraver les lésions tissulaires existantes. i. Mécanisme physiopathologique général En situation d’ischémie les voies métaboliques classiques productrices d’ATP sont inactivées faute d’oxygène. La glycolyse anaérobie est initiée au niveau de la mitochondrie et une cascade de mécanismes intracellulaires de compensation se met en place. Ces anomalies aboutissent à l’inactivation des pompes dépendantes d’énergie et à l’accumulation de produits terminaux des voies métaboliques (lactates, protons, acides gras…). S’ensuit une perte de l’homéostasie cellulaire associée à des lésions irréversibles. En cas de reperfusion, l’oxygène est réintroduit brutalement aux cellules sans pouvoir être utilisé efficacement par les voies classiques, endommagées. L’oxygène est métabolisé au sein de la mitochondrie en dérivés radicalaires de l’O2 dont les effets sont hautement délétères pour la cellule (Cour et Argaud, 2010). ii. Mode d’agression pulmonaire L’ischémie/reperfusion de territoires pulmonaires entraine à la fois une atteinte de l’épithélium alvéolaire et de l’endothélium vasculaire. Dans les travaux de Sakuma et al. (1999), les images visibles en microscopie électronique étaient compatibles avec celles d’apoptose et de nécrose cellulaires. Les pneumocytes de type I étaient séparés de leur membrane basale, les cellules endothéliales vacuolisées et la barrière alvéolo-capillaire altérée. Il est intéressant de noter que l’induction de l’ischémie d’un territoire pulmonaire entraine des dommages inflammatoires également sur les zones controlatérales, dont l’atteinte se révèle cependant plus modérée. Différents paramètres influent sur le degré d’agression pulmonaire : l’étendue du territoire ischémié, la durée pendant laquelle l’ischémie perdure, l’état d’inflation du poumon, le modèle in vivo/in vitro sélectionné et l’espèce sur laquelle les essais sont réalisés. Concernant la phase initiale d’ischémie, celle-ci peut être induite sur poumon ventilé ou en anoxie totale. Dans ce cas, à la fois la ventilation et la circulation pulmonaires sont bloquées. Au cours de cette manœuvre, les chercheurs peuvent décider de conserver le poumon ouvert ou collabé. En effet, l’état d’inflation du poumon au moment de l’induction de 80 l’ischémie semble avoir une importance capitale et conditionne la sévérité des lésions tissulaires. Sakuma et al. (1999) ont réalisé leurs travaux sur des lapins anesthésiés, ventilés à une FiO2 de 100%, un volume courant de 15 ml/kg et une certaine PEP. Une fois la sternotomie réalisée, le hile du poumon gauche incluant l’artère, la veine et la bronche souche gauches était clampé. Deux stratégies étaient alors envisagées : soit de laisser le poumon collabé (groupe 1), soit de le maintenir ouvert (groupe 2). Dans ce cas, l’occlusion était réalisée au moment où la Pplat atteignait les 30 cmH2O à 100% d’O2. Les poumons étaient isolés après euthanasie des animaux. Le taux de mortalité du groupe 1 était de 100% après seulement une heure de reperfusion. L’œdème alvéolaire était majeur et la concentration protéique similaire à celle du plasma sanguin. À la fois le poumon gauche et droit étaient touchés, les lésions étant plus sévères à gauche. L’oxygénation artérielle était impactée et aucune amélioration n’était notable après reperfusion. À contrario, dans le groupe 2, l’inflation du poumon semblait constituer un facteur de protection contre les dommages liés à la reperfusion. L’atteinte pulmonaire était plus modérée et non létale. Les poumons étaient enflés à l’aide d’azote ou d’oxygène. La figure 21 montre les effets en termes d’oxygénation pulmonaire (PaO2) d’un poumon ouvert vs collabé dans ce modèle d’ischémie/reperfusion. Figure 21 : Modifications de la pression artérielle pulmonaire en oxygène (PaO2) au cours du temps (ischémie puis reperfusion durant 4h) sur des poumons ventilés (inflated) ou collabés (deflated ) au cours de la phase d’ischémie (d’après Sakuma et al., 1999). T0 Ischémie Phase de reperfusion (h) Les débats persistent concernant la durée des phases d’ischémie et de reperfusion susceptibles d’induire des dommages pulmonaires. Luh et Chiang (2007), suggèrent 81 notamment que l’atteinte est significative après 60 minutes d’ischémie en situation d’anoxie complète. Cette phase peut varier de 15 minutes à 48 heures dans la littérature. Il a cependant été démontré que, sous couvert d’une phase de reperfusion constante, plus l’ischémie est longue, plus les lésions s’avèrent sévères (Fard et al., 2014). Au cours de la phase de reperfusion, les poumons sont majoritairement endommagés. Deux phases, aigüe puis chronique se succèdent dans le temps et mettent en jeu les macrophages puis les PNN du système immunitaire. Les paramètres physiologiques tels que la pression artérielle pulmonaire, le ratio V/Q sont modifiés. Le rapport entre le poids du poumon avant et après traumatisme était significativement augmenté dans l’étude de Bishop et al. (1986), traduisant une altération de la perméabilité alvéolo-capillaire. Les taux sériques de ROS étaient également nettement accrus. Au même titre que la phase d’ischémie, plus la reperfusion dure longtemps, plus le poumon est remanié et les lésions irréversibles. iii. Mise en œuvre pratique Ce modèle peut être réalisé in vivo ou sur poumon isolé. Le protocole choisi n’a pas d’influence sur les résultats obtenus. In vivo, le poumon controlatéral peut également être évalué. La perfusion pulmonaire est assurée via deux systèmes séparés : la circulation pulmonaire par l’artère pulmonaire et la circulation bronchique qui nourrit les bronches et la plèvre par les artères bronchiques. Une ischémie peut être obtenue expérimentalement en occluant soit l’artère pulmonaire – la circulation bronchique est alors conservée – soit le hile du poumon droit et/ou gauche. Dans ce cas le poumon concerné n’est plus vascularisé. En pratique, dans les modèles d’ischémie/reperfusion directe, une thoracotomie est pratiquée entre le 4ème et le 5ème espace intercostal. Le poumon est approché le plus souvent par voie latérale gauche, le hile gauche étant plus facile à dégager avant d’être clampé. Dans les modèles indirects sur grands animaux, l’artère mésentérique (ou fémorale) est la plus souvent occlue. Dans les modèles murins, l’artère cœliaque est ligaturée. La pose d’un clamp, d’une ligature ou d’un occluder sont possibles. Tous ces protocoles nécessitent une anesthésie générale. iv. Modèle d’ischémie reperfusion non pulmonaires Le rein, le foie ou l’estomac sont les plus souvent impliqués. La sévérité de l’atteinte pulmonaire est majoritairement corrélée à l’étendue de la zone ischémiée et non pas à la durée du traumatisme. En règle générale, les lésions pulmonaires sont modérées et réversibles. Elles ne s’aggravent que si une agression directe s’y surajoute (ex : injection intratrachéale de LPS). Dans l’étude de Koike et al. (1992), la fuite protéique (dont l’albumine) à travers la barrière alvéolo-capillaire était objectivable après 6h de reperfusion et se résolvait à l’issue des 18h d’expérience. Une réponse systémique était amorcée après plusieurs minutes de reperfusion tissulaire et se caractérisait par une baisse du débit cardiaque, une acidose métabolique et l’activation d’un processus inflammatoire mettant essentiellement en jeu les PNN. 82 2. Modèles reproduisant la pathophysiologie du SDRA a. Modèle de déplétion en surfactant par lavage salin Ce modèle a été décrit pour la première fois en 1979 par Lachmann et al., dans la mesure où l’inactivation et la déplétion en surfactant alvéolaire sont représentatifs de la phase exsudative du SDRA et contribuent en grande partie à l’agression pulmonaire. i. Mode d’agression pulmonaire La répétition de lavages salés conduit à la diminution de la concentration des molécules phospholipidiques constituant le surfactant. De ce fait, les espaces alvéolaires ne sont plus tapissés de cet agent tensioactif primaire qui empêche leur collapsus physiologique. Deux mécanismes d’agression pulmonaire peuvent être explicités: tout d’abord la déplétion en surfactant entraine l’atélectasie de certains espaces alvéolaires, exclus des échanges respiratoire du fait d’une ventilation inadaptée. Le poumon devient également plus sensible aux phénomènes cycliques d’ouverture/fermeture alvéolaires qui entretiennent le processus inflammatoire local. Deuxièmement, le surfactant possède des propriétés anti infectieuses qui prémunissent le poumon contre toute affection locale ou systémique. En cas de déficience, les défenses naturelles pulmonaires sont impactées. Les lavages conduisent rapidement à une perturbation des échanges gazeux en faveur d’une dégradation du gradient alvéolo-artériel (Matute-Bello et al., 2008). Cependant, le poumon reste « recrutable » et l’hypoxémie résultante peut être rapidement corrigée par des manœuvres de ventilation. Cela laisse suspecter que l’atteinte est strictement « mécanique », liée au collapsus alvéolaire. Dans une étude prospective in vivo, 46 lapins ayant été préalablement soumis à des lavages répétés présentaient une amélioration de leurs paramètres d’oxygénation dès l’initiation d’une ventilation protectrice (Vt = 6 ml/kg PEP réglée 2 cmH2O au-delà du point d’inflexion inférieur) (Rotta et al., 2001). Les lavages salins en eux-mêmes ont peu de conséquences lésionnelles sur la barrière alvéolo-capillaire et n’entrainent pas d’infiltration inflammatoire parenchymateuse. C’est pourquoi ce modèle est souvent couplé à un protocole incluant une agression par volo/barotraumatisme (hauts volumes courants, absence de PEP). Dans ce cas, le pattern lésionnel est très similaire à celui retrouvé au cours du SDRA chez l’Homme. ii. Mise en œuvre pratique L’opération consiste à administrer une solution isotonique de NaCl 0.9% réchauffée (37°C) par voie intratrachéale jusqu’aux poumons puis à l’aspirer de nouveau. Cette opération est répétée jusqu’à ce qu’un certain degré d’hypoxémie fixé par le protocole expérimental soit atteint. iii. Avantages et désavantages La déplétion en surfactant est l’une des caractéristiques emblématiques du SDRA. Cependant, contrairement au nouveau né où l’absence de surfactant est primitive et causale, celle-ci est consécutive à l’agression locale chez l’adulte. Ainsi ce modèle fournit des éléments de compréhension concernant les conséquences d’un déficit en surfactant mais il ne peut être utilisé pour modéliser les mécanismes étiologiques à l’origine du SDRA. Il est idéal pour tester différentes stratégies ventilatoires. 83 iv. Surfactant exogène Au cours du SDRA, le surfactant est inactivé par les molécules inflammatoires (fibrinogène, albumine, protéines sériques) ayant exsudé du plasma vers la lumière alvéolaire. L’ajout de surfactant exogène constitue un atout thérapeutique dans la prise en charge du SDRA, si tant est que la réaction inflammatoire locale n’aboutisse pas à sa dégradation. La mise en œuvre de ce traitement constitue donc un réel défi. Sa réussite peut passer par l’augmentation des doses apportées de telle manière à outrepasser l’action délétère siégeant au sein des alvéoles. Cependant le prix élevé s’avère un facteur limitant, que ce soit en médecine vétérinaire ou même en médecine humaine. L’autre stratégie consiste à trouver une solution visant à limiter la fuite des molécules pro-inflammatoires à travers la barrière alvéolocapillaire. C’est pourquoi de nombreuses études se sont intéressées à la combinaison « surfactant exogène et ventilation artificielle ». Citons à titre d’exemple celle de Hartog et al. (2000), portant sur 22 rats ayant été traités à l’aide d’une solution saline à 37°C (32 ml/kg). Deux groupes - groupe témoin exclu - ont par la suite été crées selon le type de ventilation reçue (ventilation protectrice permettant le recrutement alvéolaire à haute PEP (18 cmH2O) vs ventilation conventionnelle à basse PEP (8 cmH2O). Après 4 heures de ventilation, du surfactant exogène de cochon à la posologie de 120 mg/kg leur a été administré par voie intratrachéale. Les résultats montraient une meilleure compliance pulmonaire visible sur la courbe pression/volume dans le groupe à PEP élevée. Ainsi cette pression assure l’ouverture des espaces alvéolaires, recouverts à nouveau d’un filtre tensioactif apporté par voie exogène. Le choix d’une stratégie de ventilation avec une PEP élevée optimise donc un traitement ultérieur avec du surfactant. Différents types de surfactants exogènes existent. L’étude de Häfner et al., (1995) s’est attardée sur plusieurs d’entre eux dans un modèle de déplétion chez des rats. Cinq formulations ont été testées à doses croissantes (25, 50 puis 100 mg/kg): deux surfactants naturels d’origine bovine (« Survanta »/« Alveofact »), deux surfactants synthétiques (« Exosurf »/« protein free phospholipid based surfactant ») et un dernier recombiné. La figure 22 rapporte les bénéfices en termes d’oxygénation (PaO2) pour les différents groupes, après lavage puis lors de la ventilation mécanique. Les effets d’une PEP dégressive ont parallèlement été évalués ([8-0] cmH2O). La chute immédiate de PaO2 consécutive aux multiples lavages salins est clairement mise en évidence à la lecture du graphique. Cependant, la mise en œuvre d’une ventilation assistée corrige rapidement cette hypoxémie comme l’atteste l’augmentation de la PaO2 cinq minutes après son initiation. L’observation d’une dégradation à l’issue de deux heures de prise en charge traduit l’inactivation du surfactant par le contenu alvéolaire inflammatoire. De plus, il ressort de ce graphique que l’application combinée d’une PEP élevée agit de manière synergique avec l’ajout de surfactant. En effet à 8 cmH2O, les valeurs de PaO2 sont nettement supérieures à celles une fois la PEP diminuée à 2 ou 0 cmH2O. Les deux surfactants d’origine bovine ainsi que le recombiné semblent présenter les meilleurs résultats concernant l’amélioration hémodynamique respiratoire. Le surfactant recombiné était en effet constitué d’une des protéines constitutives du surfactant naturel, la protéine C, contrairement aux surfactants synthétiques. Cette protéine C semble jouer un rôle fonctionnel fondamental. 84 Figure 22 : Evaluation de la pression artérielle en oxygène (P aO2) dans un modèle de déplétion en surfactant au cours du temps et des manœuvres ventilatoires engagées (PEP dégressive de 8 à 0 cmH2O). Les barres représentent les différents types de surfactants exogènes administrés (d’après Häfner et al., 1995). PaO2 (mmHg) Légendes Barre noire : Alveofact. Barre grise : Survanta Barre croisillons : Surfactant recombiné Barre blanche : Exosurf Barre rayée : « Protein free phospholipid based » surfactant Avant lavage To To+5min T0+120min PEP(8) de ventilation de ventilation b. Modèle bléomycine de fibrose pulmonaire : PEP(6) PEP(0) administration de La bléomycine appartient à la catégorie des antibiotiques cytostatiques, produite par la bactérie Streptomyces Verticillus. L'action de la bléomycine repose sur une intercalation avec l'ADN simple et double brin. Cela donne lieu à des ruptures qui entraînent une inhibition de la division cellulaire, de la croissance et de la synthèse d’ADN. Cette molécule a été largement utilisée comme agent anticancéreux en thérapeutique humaine en particulier sur des tumeurs cutanées. Cependant dans de nombreux cas, l’apparition secondaire d’une fibrose pulmonaire majeure a limité son utilisation en pratique. Par la suite, cette molécule a été introduite dans les travaux expérimentaux sur le SDRA afin de mimer l’évolution fibrosante parfois observée. Son action dose dépendante dirigée contre le poumon a été démontrée chez de nombreux animaux d’expérimentation (rats, souris, cochons, lapins, chiens, etc…). i. Mode d’agression pulmonaire Différentes phases se succèdent au cours du temps et ce jusqu’à quinze jours post initiation. L’endothélium pulmonaire est le premier touché après administration par voie intraveineuse. En microscopie électronique les cellules endothéliales apparaissent œdèmatiées et séparées de leur membrane basale. Ces lésions sembleraient permettre à la bléomycine de 85 diffuser dans l’espace interstitiel pour s’attaquer par la suite à l’épithélium alvéolaire. Cependant dans de nombreux cas, l’agression ne progresse pas jusqu’aux pneumocytes de type I. Si tel est le cas, du matériel fibrineux, des protéines plasmatiques et autres agents peuvent alors rejoindre l’espace alvéolaire jusqu’à le combler. Ainsi, en microscopie électronique, un œdème diffus localisé à l’interstitium est visible associé à une infiltration lymphocytaire et macrophagique. La phase de réparation passe par la prolifération et la différenciation des pneumocytes de type II. Cette étape est sous la dépendance de cytokines et de médiateurs inflammatoires comme les monocytes, les fibroblastes ainsi qu’une cytokine pro-fibrosante majeure, TGF-β1 (Dhainaut et al., 2003). L’accumulation de collagène est notable à l’histologie au sein des septa et de l’interstitium alvéolaire. Une fibrose extensive est ainsi observée en moyenne après 14 jours d’évolution. Le mécanisme de toxicité induit par la bléomycine n’est pas encore complètement élucidé. Certaines études rapportent une perte de fonctionnalité voire une mort cellulaire liées à des aberrations chromosomiques ou l’inhibition des mécanismes de division cellulaire. Le marquage à l’aide d’un isotope radioactif de la bléomycine montre sa fixation au niveau du noyau cellulaire deux heures après son administration (Adamson, 1976). La bléomycine est également à l’origine du relargage de molécules oxydatives. Comment expliquer la plus grande sensibilité du poumon à la bléomycine ? Celle ci peut être métabolisée par une enzyme spécifique appelée bléomycine hydrolase. Il a été prouvé que l’activité de cette enzyme était moins importante dans les poumons que dans d’autres organes comme la rate, le foie ou les reins et ce, uniquement chez certaines espèces. C’est notamment le cas des souris chez lesquelles l’expression in vivo de la bléomycine hydrolase est nettement diminuée (Lazo et Humphreys, 1983). De plus il a été noté que différentes lignées de souris ne répondaient pas de manière similaire à une agression à la bléomycine. Des souris C57BL/6 y sont ainsi plus sensibles que des souris BALB/c, lesquelles ne développent pas de fibroprolifération pulmonaire (Schrier et al., 1983). Des travaux devront ainsi être menés pour élucider le rôle de la génétique dans les mécanismes intraspécifiques de fibrose pulmonaire. ii. Mise en œuvre pratique L’administration de bléomycine peut se faire par voie intrapéritonéale, intraveineuse, sous cutanée ou intratrachéale. La voie intraveineuse a pour intêret de mimer fidèlement une situation en médecine humaine. Cependant, ce protocole requiert de réaliser deux injections par semaine à la dose de 20mg/kg et ce, pendant quatre à huit semaines. A contrario, une seule dose est nécessaire par voie intratrachéale. Sa simplicité d’exécution et sa bonne reproductibilité en font une voie préférentiellement utilisée en recherche. iii. Avantages et désavantages Par voie intratrachéale ce modèle est standardisé, facile à exécuter puis à réitérer. Il reproduit de manière adéquate les séquences temporelles du SDRA à savoir l’état inflammatoire primaire évoluant vers une phase chronique de fibroprolifération. Pour autant, la pertinence de sa réalisation par voie intratrachéale a souvent été remise en cause. Il semble en effet y avoir peu d’équivalent clinique chez l’Homme. Par voie intraveineuse, deux inconvénients sont à rapporter. Tout d’abord la fibrose pulmonaire ne survient pas chez tous les animaux. Et si tel est le cas, cette phase est longue à se mettre en place, quatre semaines 86 étant a minima nécessaires (Matute-Bello et al., 2008). Cependant, la bléomycine reste à ce jour la molécule la plus utilisée dans les modèles murins de fibrose pulmonaire. 3. Modèles centrés sur la thérapeutique du SDRA a. Modèle d’hyperoxie L’exposition à des fractions élevées en oxygène supérieures à 60% se traduit chez la majorité des mammifères par une détresse respiratoire aigüe. La mortalité animale est élevée mais dépend de la durée d’exposition, de la FiO2 et de l’espèce animale. La sensibilité à l’oxygène est en effet variable d’une espèce à une autre. Ainsi chez l’Homme, bien que la ventilation à 100% d’O2 induise des modifications au sein de l’arbre respiratoire, celles-ci semblent réversibles et aucun effet nocif n’a été rapporté même après plusieurs jours d’oxygénothérapie (Davis et al., 1983). L’action délétère de l’oxygène à haute dose se manifesterait chez des patients critiques présentant une pathologie respiratoire sous jacente. i. Mode d’agression pulmonaire Les dérivés réactifs de l’oxygène (ROS pour Reactive Oxygen Species) sont les principaux médiateurs de l’hyperoxie. Les radicaux libres, les ions oxygénés ou les peroxydes en font partie. L’anion superoxide O2- contient par exemple un électron célibataire sur sa couche externe, de valence non appariée constituant de ce fait un radical libre. Ils agissent soit comme des oxydants (receveurs d’électrons) soit comme des réducteurs (donneurs d’électrons). Physiologiquement, les cellules possèdent des enzymes capables de contrer les dommages causés par ces composés. Citons par exemple la superoxide dismutase, la catalase ou encore la lactoperoxydase (Fridovich, 1978). En situation d’hyperoxie, anions superoxide et autres radicaux libres sont produits en grande quantité jusqu’à excéder les capacités des enzymes antioxydantes associées. Leur toxicité s’exprime donc une fois les possibilités de défense cellulaire dépassées. De plus, les anions superoxide sont susceptibles de réagir avec le monoxyde d’azote (NO) endogène pour former des peroxynitrites cytotoxiques. Tous ces agents ont pour cible l’ADN, les protéines ainsi que les membranes lipidiques qu’ils altèrent par stress oxydatif. Les cellules endothéliales et épithéliales sont exposées in fine à deux mécanismes de mort cellulaire : l’apoptose et la nécrose. L’étude de Barazzone et al., (1998) rapporte les conséquences d’une exposition prolongée à une FiO2 de 100% d’O2 chez différentes lignées de souris. Les poumons étaient isolés après euthanasie. L’examen en microscopie électronique révélait à la fois des foyers d’apoptose et de nécrose cellulaires. La perte d’intégrité de la membrane plasmique de certaines cellules épithéliales était révélatrice de processus de nécrose. Leur mort s’ensuivait après destruction nucléaire. Les premières manifestations morphologiques d’apoptose étaient celles d’une compaction et d’une marginalisation nucléaire. Après 48h d’exposition à l’oxygène, un nombre accru de cellules (16%) étaient marquées positivement par méthode TUNEL 1 et montraient une fragmentation de leur ADN nucléaire in situ (p <0.001 par rapport au groupe témoin). Enfin l’augmentation de l’expression de certains gènes impliqués dans les 1 Le principe de la technique de TUNEL est de révéler la présence de cassures dans l’ADN (présentes dans les cellules en apoptose) par une réaction colorimétrique sur des coupes tissulaires. 87 mécanismes d’apoptose était notable après analyse Western Blot. L’implication des caspases dans l’activation des voies métaboliques aboutissant à la mort cellulaire n’a pas été démontrée dans ces travaux. Ainsi, la compréhension des mécanismes impliqués dans la toxicité pulmonaire de l’oxygène ne sont encore que partiellement connus. Les modifications pulmonaires évoquent celles du SDRA. Une phase exsudative se met en place après trois jours d’insufflation de fractions élevées en O2. Celle ci se caractérise par la mort des pneumocytes de type I, la présence de lésions endothéliales et le comblement des alvéoles par un exsudat protéique et inflammatoire. Toutefois, et à la différence du SDRA aigu, les cellules retrouvées dans le liquide de LBA après exposition à l’hyperoxie sont principalement d’origine macrophagique. Le macrophage alvéolaire semble d’ailleurs jouer un rôle central dans la médiation de la toxicité pulmonaire de l’oxygène, dans la mesure où la déplétion macrophagique améliore la survie des animaux (Berg et al., 1995). Dans les modèles murins, la mort de souris survient après 40 à 50 heures d’exposition à 100% d’O2. Le taux de mortalité devient quasiment nul si la fraction inspirée est diminuée à 85% (Crapo et al., 1980). La sensibilité à l’oxygène diffère selon l’espèce et le statut physiologique des animaux. Etonnamment, des souris nouvellement nées et d’autres très âgées semblent présenter une meilleure tolérance. Ceci est à mettre en relation avec l’efficacité de leur système enzymatique antioxydant (Frank et al., 1978). ii. Mise en œuvre pratique Les modèles d’hyperoxie sont principalement adaptés à l’étude des petits animaux de laboratoire. Pour ce faire, rats, souris ou lapins sont placés dans une cage à oxygène close de telle manière à ce que soient obtenus les taux d’O2 et de CO2 fixés par le protocole. Les cages sont conçues de telle manière à ce que de l’eau et des aliments puissent être ajoutés sans modifier leur composition interne. iii. Avantages et désavantages Ce modèle est actuellement controversé dans la mesure où chez l’Homme l’exposition à de hautes fractions en oxygène ne se conclue pas par un ALI. De plus, l’analyse de l’activité antioxydante d’exsudats de patients atteints de SDRA indiquait la présence en quantité importante de deux protéines plasmatiques antioxydantes appelées transferrine et céruloplasmine (Lykens et al., 1992). Celles ci conféreraient un certain effet protecteur contre l’hyperoxie. Cependant ce modèle reste couramment utilisé et a permis d’adapter la thérapeutique ventilatoire en médecine humaine et vétérinaire. Pour autant, sa mise en œuvre demande un équipement à la fois spécialisé et onéreux. b. Modèle d’hyperventilation par volo/barotraumatisme Ce modèle a été construit afin d’évaluer le rôle délétère de la ventilation mécanique (VM) sur des patients nécessitant une prise en charge respiratoire. Des réglages inadaptés sont en effet à l’origine du développement de lésions pulmonaires similaires à un ALI. Dans le cadre du SDRA, la VM aggrave substantiellement l’atteinte pulmonaire pré existante et assombrit le pronostic du patient. De nombreuses études expérimentales ont donc été réalisées sur des animaux d’expérimentation afin de proposer une stratégie de ventilation dite 88 protectrice. Ces études ont reçu une validation clinique par la démonstration d’une réduction de mortalité chez des patients ventilés pour un SDRA, notamment par une baisse du volume courant (Network ARDS, 2000). Les lésions induites par la VM sont regroupées sous les termes de volo et de barotraumatisme. Nous ne les développerons pas une nouvelle fois dans cette partie étant donné que le sujet a préalablement été traité dans la partie « VILI ou Ventilatory Induced Lung Injury » (se reporter au paragraphe II.A.3.b). i. Avantages et désavantages du modèle L’avantage majeur de ce modèle est sa pertinence clinique, attestée par les changements survenus en pratique hospitalière secondaires aux conclusions tirées lors des expérimentations. C’est ainsi le seul modèle qui a abouti à une modification des pratiques hospitalières, visant à améliorer le statut des patients. Cependant ce modèle se révèle complexe, difficile à mettre en œuvre du fait des multiples paramètres interdépendants en ventilation assistée. De nombreux protocoles ont ainsi été nécessaires et ont du être ajustés jusqu’à l’obtention de résultats significatifs. Le manque de reproductibilité entre les différentes espèces constitue un autre point négatif. Enfin, l’agression expérimentale est souvent réalisée sur quelques heures alors qu’en milieu hospitalier la gravité de l’état de certains patients impose une assistance respiratoire sur plusieurs jours, voire semaines. C. Comparaison des modèles de SDRA Aucun des modèles décrits ci-dessus ne reproduit entièrement les caractéristiques du SDRA, qu’il soit primaire ou secondaire. Les modèles qui exposent les conséquences pulmonaires d’un choc septique sont particulièrement utiles pour l’étude des traitements anti inflammatoires et anti infectieux à envisager dans un futur proche. Une meilleure compréhension des altérations vasculaires et de la coagulation peut également résulter de leur exploitation. Le modèle d’agression pulmonaire par acide oléique est très proche du SDRA sur le plan histologique. Les lésions endothéliales qui en découlent semblent corrélées aux modifications de l’hémodynamique respiratoire, ce qui en fait un modèle adapté pour reproduire les anomalies survenant précocement chez l’Homme. L’agression pulmonaire par acide chlorhydrique induit des lésions épithéliales alvéolaires et inflammatoires superposables au SDRA, mais sans atteinte endothéliale et vasculaire. Enfin, l’agression par la bléomycine pourrait être plus indiquée pour l’étude des SDRA tardifs. L’obtention d’une déplétion en surfactant est le corollaire de ce qui survient au cours de la phase exsudative du SDRA. Le poumon restant recrutable, ce modèle est souvent couplé à celui de volo/barotraumatisme et permet ainsi d’étudier l’agression pulmonaire induite par la ventilation mécanique. Les modèles d’hyperoxie et d’hyperventilation sont les seuls à avoir prouvé leur réelle relevance en termes d’extrapolation à l’Homme. C’est en effet à la suite des conclusions tirées sur les dommages causés par de hauts volumes et pression que les pratiques ont pu évoluer en milieu hospitalier et aboutir à une ventilation protectrice améliorant nettement le pronostic des patients atteints de SDRA. Parce que la physiopathologie du SDRA humain n’est pas univoque, de plus en plus de modèles expérimentaux combinés ont été développés. Ces modèles associent le plus souvent une agression physicochimique et une agression septique inflammatoire (ex : acide oléique et endotoxine, acide chlorhydrique et ligature ponction cæcale etc…). Celles ci agissent le plus souvent de façon synergique sur l’aggravation des lésions pulmonaires. 89 L’annexe 6 apporte une synthèse et une comparaison des différents modèles expérimentaux de SDRA. D. Limites à l’utilisation de ces modèles Même si certains modèles combinés ont des caractéristiques très similaires à celles du SDRA, plusieurs éléments peuvent toutefois limiter leur extrapolation en médecine humaine. Pour des raisons pratiques de conditionnement, les animaux de laboratoire sont souvent de jeune âge, ce qui limite la transposition des résultats à l’adulte, lequel présente souvent d’autres pathologies concomitantes (diabète, insuffisance rénale…). De plus, afin d’obtenir des résultats les plus adéquats possibles, les essais, qui impliquent parfois l’euthanasie des animaux, doivent être fréquemment répétés. Cela explique pourquoi de jeunes générations de souris sont utilisées. En outre, les études sont parfois réalisées en ventilation spontanée, soit parce que la compréhension des dommages causés par la ventilation mécanique ne constitue pas l’objectif initial soit par souci de simplification du protocole expérimental. Or, la ventilation mécanique peut être une composante fondamentale d’agression pulmonaire. De plus, les réglages du ventilateur sont souvent très éloignés de ceux appliqués en pratique clinique. Pour des raisons évidentes de coût et de reproductibilité, les travaux sont souvent de courte durée (quelques heures en moyenne), ce qui n’équivaut en rien à la durée d’évolution du SDRA (plusieurs semaines). Enfin, la prise en charge annexe des animaux est souvent bien éloignée du support thérapeutique fourni aux patients de réanimation (alimentation, dialyse, fluidothérapie de soutien, gestion analgésique…). La création d’unités de réanimation expérimentales est encore au stade de projet mais pourrait permettre de recréer au mieux les conditions de prise en charge réelles en service de réanimation chez l’Homme. Leur coût d’activité est assurément un frein à leur fondation. Les animaux de laboratoire sont maintenus dans des conditions environnementales extrêmement contrôlées, à l’écart de certains pathogènes environnementaux. Cette protection iatrogène pourrait affecter les réponses physiologiques à certaines pathologies. L’élevage permet d’obtenir des lignées animales génétiquement identiques ce qui a l’avantage de rendre les expérimentations hautement reproductibles. Cependant, cela aboutit à la création de certains génotypes et phénotypes qui ne sont pas nécessairement pertinents pour l’extrapolation chez l’Homme. 90 CONCLUSION Le SDRA est un état de défaillance respiratoire avancée, conséquence commune de maladies sévères qu’elles soient d’origine pulmonaire ou systémique. Une prise en charge globale et une adaptation individuelle des réglages du ventilateur constituent les piliers de la prise en charge. Le suivi doit être pluriquotidien en fonction de l’évolution clinique, des paramètres hémodynamiques, des lésions tomographiques et de la mécanique ventilatoire de chaque patient. Du fait cette dernière décennie de l’incidence croissante du SDRA en médecine humaine et de son pronostic sombre, plusieurs modèles animaux ont été développés. Ceux-ci ont eu pour but d’élucider les principaux mécanismes pathogéniques du SDRA pour, par la suite, proposer des solutions thérapeutiques adaptées. Le gold standard attestant de la validité d’un essai clinique dérivé de travaux expérimentaux est une amélioration du taux de mortalité en système hospitalier. Ainsi, seules les conclusions tirées du modèle animal d’hyperventilation par baro/volotraumatisme ont eu une application directe chez l’Homme, grâce à l’émergence de nouvelles stratégies ventilatoires. À ce jour, la ventilation protectrice basée sur l’utilisation d’un faible volume courant, d’une PEP et de MRA adaptées, constitue le traitement de référence du SDRA. En médecine vétérinaire, le SDRA est de plus en plus reconnu par les cliniciens. Cependant la faible disponibilité des machines ventilatoires et l’importance des coûts nécessaires au traitement, en font encore un syndrome sous-traité. Toutefois, quand il peut être pris en charge à temps, les pratiques découlent de ce qui est admis en médecine humaine. Des études prospectives sont encore nécessaires pour faire émerger des stratégies claires, spécifiques aux différentes espèces animales domestiques. Des thérapeutiques d’avenir existent et devront répondre à trois enjeux majeurs: réduction du taux de mortalité, diminution de la durée à l’extubation et prévention d’autres dysfonctionnements organiques (Bastarache et Blackwell, 2009). Dans le domaine de la recherche, des améliorations sont encore possibles. Les modèles animaux doivent s’attacher à reproduire au plus près les éléments clés de la pathophysiologie du SDRA. Pour ce faire l’utilisation concomitante de différents modèles (LPS et ventilation mécanique à titre d’exemple) doit être réalisée. Des pistes restent à explorer notamment sur les mécanismes de coagulation et de fibrinolyse de la phase exsudative du SDRA. 91 92 BIBLIOGRAPHIE ABERLE DR, WIENER-KRONISH JP, WEBB WR, MATTHAY MA. (1988). Hydrostatic versus increased permeability pulmonary edema: diagnosis based on radiographic criteria in critically ill patients. Radiology., 168, 73‑79. ABOAB J, JONSON B, KOUATCHET A, TAILLE S, NIKLASON L, BROCHARD L. (2006). Effect of inspired oxygen fraction on alveolar derecruitment in acute respiratory distress syndrome. Intensive Care Med., 32, 1979‑1986. ADAMSON IY. (1976). Pulmonary toxicity of bleomycin. Environ. Health Perspect., 16, 119 ‑126. AKELLA A, SHARMA P, PANDEY R, DESHPANDE SB. (2014). 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Circulation pulmonaire Mécanique respiratoire Echanges gazeux Vasoconstriction hypoxique Compliance Inégalité V/Q Shunt intrapulmonaire CRF Hypoxémie Des RVP Travail des muscles inspiratoires et expiratoires Hyperventilation Alcalose respiratoire HTAP Anaérobiose Acidose métabolique Fatigue, Détresse respiratoire 111 Annexe 4 : Mécanismes à l’origine des lésions pulmonaires induites par la ventilation (VILI) (d’après Ralfs, 2010). 112 Annexe 5 : Stratégie ventilatoire actuellement admise pour la prise en charge respiratoire de patients atteints du SDRA (d’après Jaber et al., 2007). 113 Annexe 6 : Comparaison des différents modèles expérimentaux de SDRA (d’après Richard et Guérin, 2006). Légendes : Bléo = bléomycine ; IP = intrapéritonéal ; IV = intraveineux ; IT = intratrachéal ; NA = non applicable, PNN = polynucléaires neutrophiles ; ND = non disponible ; Mɸ = macrophages ; HTAP = hypertension artérielle pulmonaire ; ƛ = lymphocytes. 114 115 116 LA PRISE EN CHARGE DU SYNDROME DE DÉTRESSE RESPIRATOIRE AIGÜE : MODЀLES EXPÉRIMENTAUX ET APPLICATIONS POUR LA MÉDECINE HUMAINE ET VÉTÉRINAIRE NOM et Prénom : VIOLÉ Amandine RESUME Le syndrome de détresse respiratoire aigüe (SDRA) est un état de défaillance respiratoire d’apparition aigüe consécutif à de multiples maladies, pulmonaires ou systémiques. C’est une entité clinique à part entière en médecine humaine, qui tend à le devenir en médecine vétérinaire. Actuellement, ce syndrome est encore entaché d’un taux élevé de mortalité. Le but de cette thèse est de présenter l’importance vétérinaire de ce syndrome au travers de ses applications cliniques mais également d’aborder la place de la recherche animale dans la compréhension du SDRA. Nous présentons dans notre exposé l’ensemble de la physiopathologie du SDRA à la lumière des différents modèles expérimentaux conduits sur les animaux de laboratoire ces dernières années. Ces travaux ont permis de mieux appréhender les mécanismes impliqués dans la genèse du SDRA et les implications qui en découlent, notamment en termes de prise en charge. Les recommandations thérapeutiques actuelles en médecine humaine et vétérinaire prônent l’utilisation d’une ventilation mécanique assistée dite protectrice associée à une pression expiratoire positive et des manœuvres de recrutement alvéolaires. C’est à ce jour le seul traitement qui a montré son efficacité sur le taux de survie en milieu hospitalier. Il convient donc d’en maîtriser la mise en œuvre et d’en connaître ses limites. Les perspectives d’avenir concernant des méthodes thérapeutiques alternatives sont cependant multiples. MOTS CLÉS : DETRESSE RESPIRATOIRE / PHYSIOPATHOLOGIE / TRAITEMENT / VENTILATION RESPIRATOIRE / MODELE ANIMAL / MEDECINE HUMAINE / MEDECINE VETERINAIRE JURY Président : Pr. LELLOUCHE Directeur : Pr. TISSIER Assesseur : Dr. ZILBERSTEIN 117 MANAGEMENT OF ACUTE RESPIRATORY DISTRESS SYNDROME : ANIMAL MODELS AND APPROACHES FOR HUMAN MEDICINE AND VETERINARY MEDICINE SURNAME : VIOLÉ Given name : Amandine SUMMARY Acute respiratory distress syndrome (ARDS) is a state of acute respiratory failure provoked by numerous pulmonary or systemic diseases. In human medicine, ARDS is recognized as a distinct entity. In veterinary medicine, ARDS is sub-diagnosed but more and more described in veterinary literature. At present time, this syndrome still has a strong mortality rate and prognosis remains uncertain. In this presentation, we decipher the physiopathology of this syndrome that has been understood through numerous animal experimental models. Mechanisms involved in the genesis of ARDS have been discovered thanks to these trials, as well as its management. A lung protective ventilation strategy is now recommended and should be instituted with positive end expiratory pressure and alveolar recruitment maneuvers. This therapeutic strategy is the only one that has been shown to improve survival rate in hospital. Indeed clinicians should be aware of the main guidelines and the potential clinical risks. Unproven and newer investigational therapies may prove their benefits in the future. KEY WORDS: RESPIRATORY DISTRESS / PHYSIOPATHOLOGY/ TREATMENT/ MECHANICAL VENTILATION/ ANIMAL MODEL/ HUMAN MEDICINE/ VETERINARY MEDICINE JURY Président : Pr. LELLOUCHE Director : Pr. TISSIER Assessor : Dr. ZILBERSTEIN 118