Retour Semaine 2 - Ecoulement de l’eau dans une rivière Bonjour à tous, Voici une synthèse des échanges survenus sur les fils de discussion de cette semaine. Merci de votre participation ! 2.1 Ecoulement uniforme Bilan des forces: Forces de pression Les pressions d'eau (en bleu) sont importantes mais, dans le cas de l'écoulement uniforme, elles se neutralisent entre elles. Quant à la pression atmosphérique qui s'exerce sur la surface de l'eau, elle a une influence insignifiante sur le niveau d'eau, ce qui ne serait pas le cas pour l'océan où la pression (surtout sous la forme de dépression associée aux cyclones tropicaux) peut faire varier le niveau moyen de plusieurs dizaines de centimètres. @Y. Zech Pente du talus p = distance horizontale/dénivellation = 1/tan(δ) (intéret: p = 0 lorsque la section est rectangulaire) Pente de fond S0 = sin(Φ) Calcul de la profondeur uniforme: application de la formule de Manning-Strickler Vous trouverez un document complémentaire qui détaille ce calcul pour l’exemple de la vidéo (cas d’une section trapézoïdale) à la page 2.1. 2.2 Ecoulement non uniforme Célérité de l’information Vous trouverez un document complémentaire très pédagogique sur cette notion à la page 2.2. Retrouvez également la réponse imagée de P. Belleudy dans le fil de discussion 2.2. Coefficient α Le coefficient α (ou coefficient de Coriolis) dépend de la distribution des vitesses dans la section considérée. Pour faire simple, on dit que la partie cinétique de l'énergie dépend du carré de la vitesse moyenne dans la section Vmoyen², alors que rigoureusement, c'est la moyenne des carrés des vitesses moyenne(V²) qu'il faudrait envisager. Le coefficient α, qui dans la pratique varie de 1 à 2 mais est souvent proche de 1, corrige cette approche simplifiée. Le plus souvent, on ne va pas s’embarrasser de ce coefficient et considérer α=1, d'autant que souvent les termes d'énergie cinétique V²/2g se simplifient entre eux (par exemple entre l'amont et l'aval d'un tronçon). @Y. Zech 2.3 et 2.4 Modélisation: introduction, applications et limites Régime permanent ou transitoire On dit d’un écoulement qu’il est permanent (respectivement: transitoire ou non-permanent) lorsque les variables ne varient pas (respectivement: varient) dans le temps. Fil de discussion 2.3, post de enzopepino Dans quels cas doit-on calculer en “régime transitoire”? (1) Ceux où les effets d'accélération, d'inertie sont importants (ex: calcul de l'onde de rupture d'un barrage, propagation d'ondes consécutives à la manoeuvre d'ouvrages) ; (2) Les problèmes ou cas d'études où il y a des effets de stockage (ex: remplissage d'un champ d'inondation) ou des effets de seuil (ex: débordement dans un bras secondaire où au-delà d'une digue à partir d'un certain moment pour le calcul d'une zone inondable). Quand peut-on se satisfaire d’un “régime permanent”? Tous les autres! (ex 1: je cherche à calculer le niveau maximum atteint par la crue, et ce niveau n'est pas conditionné par un débordement ; ex 2: les conditions hydrauliques (débit à la limite amont, niveau aval typiquement) et géométriques (ouvrages internes) ne changent pas ou peuvent être considérées comme constantes.) @P. Belleudy Utilisation de modèle 1D/2D/3D/hybride Comme mentionné dans la vidéo 2.2 (à partir de 04:47), les écoulements en rivière sont en réalité tridimensionnels. Cependant, sauf au voisinage de singularités (ex: écoulements complexes autour d’ouvrages), les équations qui régissent l’écoulement peuvent être simplifiées de façon pertinente. Cela présente un intérêt certain puisque plus un modèle va être complexe (2D, 3D), plus il va être lourd à mettre en œuvre: plus le temps de calcul va être long (fil de discussion 2.4, post de dems) et plus la quantité de données d’entrées nécessaire va être importante. Ainsi, essayer de simuler avec beaucoup de détails une zone pour laquelle on ne dispose que de données approximatives n’aurait aucun sens (fil de discussion 2.3, post de RoseAra). Toute la question est alors de savoir quand ces simplifications vont-elles être pertinentes? La plupart du temps, la hauteur d’eau est très petite devant la longueur ou la largeur de la rivière et il est possible de négliger les composantes verticales des vitesses devant les composantes horizontales, passant ainsi de modèle 3D à 2D (équations en eau peu profonde dites de SaintVenant). Lorsqu’il y a une direction privilégiée, le modèle 1D est suffisant. Dans la pratique, la question n’est pas aussi simple et il peut-être nécessaire d’avoir recours à des modèles hybrides qui mélangent les différentes approches (1D par endroits, 2D quand c’est nécessaire) (fil de discussion 2.3, post de CFChampetier ; fil de discussion 2.4, post de ndeville). Entrées de modèle: que fait-on pour les sites non-jaugés? Fil de discussion relatif à 2.4, post de Bouba-Ensup, cf. réponse complète de O. Navratil Pour construire un modèle hydraulique, le caler puis le valider, la question des données d’entrées hydrologiques est primordiale. Il peut s’agir d’un débit caractéristique, d’une crue de projet (i.e. crue pour laquelle on dimensionne un ouvrage) ou d’une longue chronique de débit (hydrogramme, etc). Pour choisir ces données, l’idéal est de disposer d’une station hydrométrique à proximité du site d’étude avec une courbe de tarage fiable dans la gamme de débits étudiés. Dans le cas contraire, mais, si l’on dispose d’une station hydrométrique à l’amont, il est tout de même possible de raccorder le modèle hydraulique à cette station à l’aide d’un modèle hydraulique 1D simplifié en s’assurant qu’il n’y a pas d’affluent important entre cette station hydrométrique et le site d’étude. Sinon, il faudra installer une station hydrométrique et réaliser un nombre important de jaugeages pour construire une courbe de tarage. Cette solution est lourde à mettre en œuvre, et inadapté aux études ponctuelles. Il est alors préférable de construire un modèle hydrologique (empirique, distribué….) ou d’utiliser des formules empiriques pour estimer la crue de projet (formules de Myers, Crupedix….). Vous trouverez des détails pratiques sur ces méthodes dans la note suivante proposée par G. Piton. Quelle crue modéliser? Fil de discussion 2.3, post de enzopepino, cf. réponse complète de P. Belleudy Cela dépend des objectifs de l’étude hydraulique et de la phase de travail. Si je veux comprendre ce qui s'est passé pendant un événement j'utilise une crue réelle. C'est typiquement ce que l'on fait en phase de validation du modèle. La crue réelle est introduite à la limite amont (et bien entendu, je n'oublie pas une hypothèse ou une mesure en aval), et je compare mes résultats de calcul avec les mesures disponibles (laisses de crues, hydrogrammes mesurés, témoignages...) et mon expertise. On règle alors les paramètres de la schématisation: les coefficients de rugosité, de perte de charge, et puis tout ce qui a été représenté dans le modèle et ses équations de manière très grossière par rapport à la réalité. Dans la phase d'exploitation du modèle, j'utilise donc le modèle réglé, validé, et dont je connais les limites, pour tester une hypothèse, valider un scénario d'aménagement, pour faire une carte des zones inondables, etc. J'utilise dans ce cas une “crue de projet”. Cela peut être une crue réelle (je veux par exemple vérifier que le scénario d'aménagement projeté traite bien le problème de débordement). Cela peut être une crue reconstituée (que se passerait-il si...). Un cas un peu particulier est celui de la crue “réglementaire”: il faut produire une carte qui reproduit l'effet de la crue centennale (reconstituée) ou historique et qui fait référence dans la région (la crue de 1930). Calage du modèle Les stations qui permettent de définir les valeurs limites peuvent-elles être utilisées pour calibrer le modèle? Fil de discussion 2.5, post de ORoufosse, cf. réponse de O. Navratil Non, il faudra vous assurer d'avoir un jeu de données pour le calage du modèle et un autre jeu pour valider votre modèle. Pourquoi n'avez-vous pas entré différents facteurs de rugosité en fonction des tronçons ou des zones inondables? Fil de discussion 2.5, post de dems En principe, la rugosité est locale et variable. Cependant, dans la pratique, on tente de conserver soit une seule rugosité, soit un nombre limité de rugosités définies par grandes zones (par exemple une rugosité modérée dans la rivière elle-même, et une rugosité plus importante dans les champs d'inondation, car ces derniers sont couverts de végétation). Plus on a de paramètres à calibrer, plus la calibration devient hasardeuse, car l'influence de chaque paramètre devient difficile à cerner. @Y. Zech Modèle numérique ou physique Les modèles physiques sont introduits et illustrés par P. Belleudy dans le fil de discussion 2.3. La mise en place d'un modèle physique (une maquette) requiert l'utilisation de lois de similitude adaptées, pour mettre "convenablement" le modèle à l'échelle. Cela n'est pas si simple qu'il n'y paraît... Il existe des lois physiques qui régissent ces similitudes, et grâce à elles, on se rend compte qu'il est souvent impossible de respecter toutes les échelles sur le même modèle: distances, effets de viscosité, pressions, tailles des grains s'il y des sédiments. Par ailleurs, la mise en place d'un modèle physique est très coûteuse. Dès lors, quand c'est possible, on a plutôt recours à la modélisation numérique qui permet plus facilement d'ajuster les paramètres et de tester différentes solutions. Mais pour cela, il faut disposer d'un modèle numérique fiable, dans lequel on peut avoir confiance, et qui, idéalement, a été au préalable calibré et validé sur base de mesures en laboratoire ou sur le terrain. @S. Soares Frazão 2.5 Exemple: prévention d’inondation à Hô-Chi-Minh-Ville Choix du maillage: Eléments finis Fil de discussion 2.5, post de ORoufosse La méthode des éléments finis est une méthode de résolution des équations de l'écoulement (équations de Saint-Venant) qui se base sur le principe suivant: on divise le domaine à modéliser en une série d'éléments de taille "finie", qui peuvent avoir une forme triangulaire ou quadrangulaire. Sur chacun de ces éléments, on peut alors résoudre une version approximée et simplifiée des équations (on dit qu'on a discrétisé les équations). En combinant les solutions obtenues sur chaque élément, on obtient la solution globale du problème. Il existe également d'autres méthodes de résolution des équations de l'écoulement, souvent utilisées en hydraulique: la méthode des différences finies et la méthode des volumes finis. Mais on entre ici dans le monde des méthodes de simulation numérique qui dépasse largement le cadre de ce cours. @S. Soares Frazão Choix du maillage: structuré ou non-structuré Fil de discussion 2.5, post de ORoufosse On appelle "maillage structuré" un maillage (donc un découpage du domaine de calcul) constitué de carrés ou de rectangles (éventuellement déformés) qui divisent l'espace de manière régulière, comme un quadrillage régulier, avec m lignes et n colonnes. Ces maillages réguliers ont l'avantage de permettre une résolution très rapide des équations sur chaque maille, puisqu'on peut parcourir de manière systématique les m lignes, les n colonnes, et connaître facilement les mailles "voisines" de la maille de calcul. Le désavantage est qu'on ne peut représenter de manière précise une berge ou une côte inclinées par rapport à la direction principale des mailles: on aura une représentation "en marches d'escalier" qui peut rendre le calcul imprécis. Par opposition, un "maillage non-structuré" est composé de mailles de calcul tout à fait quelconques (triangles, quadrangles ou autres formes quelconques), dont la taille peut varier d'une maille à l'autre et peuvent s'adapter facilement à la topographie et suivre exactement les lignes de niveau ou les berges. Le désavantage par contre est le temps de calcul plus important, car il est plus difficile de "retrouver" les mailles voisines. @S. Soares Frazão Viscosité turbulente Le terme de viscosité caractérise la résistance à l’écoulement propre d’un fluide (l’eau s’écoule plus facilement que le miel). Plus la viscosité du fluide est importante, plus la résistance sera importante. Cette résistance est induite par les frottements entre les différents filets de particules fluides lors de l’écoulement. Ces écoulements sont qualifiés de laminaires et assez simple à modéliser (un seul modèle est accepté par tous). Les écoulements turbulents, possibles pour des fluides peu visqueux comme l’eau, sont beaucoup plus complexes (cf. explication imagée de Y. Zech sur le fil de discussion 2.5, post de enzopepino). En hydraulique fluviale, l’écoulement est turbulent et la notion de rugosité va permettre de tenir compte de la manière dont le fond de la rivière va freiner l’écoulement (propagation des frottements entre les couches fluides depuis le fond jusqu’à la surface). Par ailleurs, lorsque les filets fluides n’ont pas la même vitesse (ex: entre l'écoulement plus lent sur les plaines d'inondation et celui plus rapide dans la rivière elle-même), leurs interactions vont générer des échanges turbulents qu’il faudra modéliser pour ne pas surestimer la vitesse de l’écoulement. Pour cela, la plupart des modèles passent par l'usage d'une "viscosité turbulente" qui considère que l'échange entre filets fluides se fait comme dans un écoulement visqueux, mais, avec une intensité très supérieure qui ne dépend pas du fluide mais de l’écoulement. Dynamique de rupture de barrage La question des ruptures de barrage est très vaste... Pour des barrages en béton, on considère généralement une rupture instantanée car, à l'échelle de temps du problème, la rupture est effectivement très rapide. C'est par exemple le cas de la rupture du barrage de Malpasset, cas emblématique utilisé comme exemple dans de nombreuses études pour la validation de modèles numériques. Par contre, pour des barrages en terre, c'est beaucoup plus compliqué. En fonction du matériau qui constitue la digue, en fonction de la présence ou non d'un noyau imperméable, la rupture se produira plus ou moins rapidement. A l'heure actuelle, il encore impossible de prédire avec précision la vitesse de formation d'une brèche et de nombreuses études sont en cours. A titre d'exemple, un projet européen récent "FLOODsite" a été consacré au sujet. On peut trouver sur le site du projet notamment un rapport détaillant les modes de rupture des digues en terre et une idée du temps de rupture à partir de relations très empiriques. @S. Soares Frazão Vous trouverez des informations relatives aux barrages sur le site du CFbr. Pour aller plus loin, Final Report on Coordination and Cooperation with the European Union on Embankment Failure Analysis ou encore International Levee Handbook. Logiciels de modélisation Hydraulique Voici quelques exemples de modèles hydrauliques. TELEMAC : Site Forum Tutoriel HEC-RAS : Site Tutoriel vidéo (anglais) Mike11 : Site Présentation (en anglais) 2.6 Activité de fin de semaine: Avez-vous dans votre expérience professionnelle, ou lors de votre formation, été amené(e) à construire ou utiliser un modèle hydraulique ? Il n’y a malheureusement pas eu d’échanges autour de l’activitée forum proposée cette semaine, peut-être en raison du dysfonctionnement de la plateforme FUN. Vous pouvez encore poster vos contributions en créant une discussion avec comme intitulé “utilisation d’un modèle hydraulique”. Pour aller plus loin, quelques thèses sur le sujet: Une thèse sur le calage des modèles. Vidal (2005) Assistance au calage de modèles numériques en hydraulique fluviale - Apports de l'intelligence artificielle, Irstea Lyon Une thèse sur la modélisation 1D d’écoulement débordant. Navratil (2005) Débit de pleins bords et géométrie hydraulique : une description synthétique de la morphologie des cours d'eau pour relier le bassin versant et les habitats aquatiques, Irstea Lyon Coraline Bel, Sandra Soares Frazão, Yves Zech, Oldrich Navratil, Philippe Belleudy et toute l’équipe du MOOC “des rivières et des hommes”