respondant à la dose la plus forte utilisée au cours des études de
cancérogenèse chez le rat, divisé par un facteur de 100. Elle a
été confirmée après réévaluation par le SCF en 2002. Il est auto-
risé dans l'UE par la directive 94/35/CE.
Le débat autour d'un éventuel effet cancérigène de l'aspartame
a été relancé en juillet 2005. Il a pour origine une étude réalisée
par une équipe italienne de la Fondation Ramazzini publiée
dans un premier temps dans l'European Journal of Oncology
(revue propre à la fondation Ramazzini). La même étude avec
des éléments complémentaires a été ensuite publiée dans l'En-
vironnemental Health Perspectives revue reconnue par la com-
munauté scientifique des toxicologues. Selon les travaux décrits
dans ses publications, l’aspartame induirait de façon dose
dépendante et à de faibles doses proches de la DJA une aug-
mentation de l’incidence d’hémopathies malignes (lym-
phomes/leucémies), une augmentation de l’incidence de lésions
prénéoplasiques et néoplasiques de la vessie et voies urinaires,
une augmentation de l’incidence de schwannomes malins.
Quel crédit accorder à cette étude ? C'est la question que tous
les toxicologues se sont posée au vu de ces publications. Les
agences internationales (EFSA, FDA) ou nationales (Afssa)
d'évaluation du risque ont souhaité examiner les protocoles et
les résultats de cette étude avant d'envisager la moindre mesure
concernant l'aspartame. Pourquoi ces agences, très soucieuses
de la sécurité du consommateur, ont-elles pris leur temps pour
statuer et ont-elles exigé les études complètes ?
La raison principale est due au fait que l'étude menée par la fon-
dation Ramazzini ne répond pas aux normes extrêmement
strictes selon lesquelles les études toxicologiques chez l'animal
doivent être menées pour être utilisables dans l'évaluation du
risque pour le consommateur avant de délivrer une autorisation
de mise sur le marché. Ces règles, utilisées et reconnues sur le
plan international permettent d'éviter l'interférence de para-
mètres extérieurs dans l'apparition d'effets toxiques qui peuvent
alors, s'ils apparaissent, être attribués à la molécule testée. Si
l'étude menée par la fondation Ramazzini avait été présentée
par un industriel pour une autorisation de mise sur le marché,
elle aurait été refusée en raison des nombreux biais méthodolo-
giques qu'elle présente. Le principal de ces biais est du au fait
que l'expérience est menée jusqu'à la mort des animaux. Ce
choix est propre à la fondation Ramazzini, mais n'est pas en
accord avec les lignes directrices de l'OCDE sur les études de
cancérogenèse qui recommandent d'arrêter les expériences à
104 semaines, de façon à éviter l'apparition de résultats diffici-
lement interprétables en raison des signes de vieillesse des ani-
maux (modification du métabolisme hépatique, de l'excré-
tion…).
Une augmentation de l'incidence des hémopathies malignes est
observée chez les femelles. Cette augmentation est statistique-
ment significative pour les doses allant de 20 mg/kg de poids
corporel/j à 5 000 mg/kg de poids corporel/j. Cette observation
n'est pas faite chez les mâles. Cependant, il faut noter que l'aug-
mentation de l'incidence est mesurée par comparaison au
groupe témoin. Le groupe témoin femelle présente une valeur
très basse si on la compare aux mâles 8,7 % versus 20,7 %. Si
l'on considère l'ensemble des animaux on constate que cette
augmentation de l'incidence n'apparaît pas. Les valeurs histo-
riques indiquées par les auteurs concernant l'incidence des leu-
cémies chez les témoins sont très différentes de celles observées
dans cette étude pour le groupe femelle, 13,4 % versus 8,7 %
alors quelles sont très proches pour les groupes témoins mâles
21,8 % versus 20,7 %. On peut donc s'interroger sur le groupe
témoin femelle de cette étude. Les auteurs annoncent un effet
dose-dépendant (augmentation du nombre de leucémies et lym-
phomes en fonction de la dose) qui n'apparaît pas évident au vu
des résultats présentés.
Un autre fait troublant est dû au fait que la survie des animaux
est identique quels que soient les groupes, témoins ou soumis à
l'aspartame quelles que soient les doses. Il est connu des toxi-
cologues que le rat ne meurt pas de leucémie, cependant, les
auteurs n'ayant, comme cela est demandé dans les protocoles
habituels, sacrifié en cours d'étude des animaux, il est impos-
sible de savoir à quel moment au cours de l'étude qui dure 3 ans,
les leucémies sont apparues.
Les conclusions et extrapolations paraissent également abu-
sives. En effet, attribuer l'augmentation de l'incidence des
pathologies hématologiques cancéreuses au méthanol ou au for-
maldéhyde, produits issus du métabolisme de l'aspartame est
très hasardeux voire faux. En effet, la quantité de méthanol
issue du métabolisme de l'aspartame représente au maximum
10 % de la quantité ingérée. Selon l'étude issue du même centre
de recherche, c'est à des doses beaucoup plus fortes que les
hémopathies malignes (pathologies hématologiques cancé-
reuses) apparaîtraient. Le formaldéhyde a, certes, été classé en
groupe 1 par IARC (Centre International de Recherche contre le
Cancer) c'est-à-dire cancérigène pour l'homme mais c'est en rai-
son de sa génotoxicité, c'est-à-dire les interactions qu'il est
capable d'avoir avec l'ADN induisant en conséquence des muta-
tions. Cet effet n'est pas dose dépendant. Or, il est reconnu que
l'aspartame, même en présence de système de métabolisation
n'est pas génotoxique. De plus, les auteurs indiquent que l'effet
observé est dose dépendant. Il y a donc là incohérence.
L'Afssa a montré en 2002, dans le rapport publié sur l'aspartame
que la consommation d'aspartame en France est très inférieure
à la Dose Journalière Admissible puisque la consommation
moyenne chez l'adulte se situe entre 0,05 et 0,4 mg/kg pc/j et les
valeurs maximales entre 1 et 2,75 mg/kg pc/j, et chez l'enfant
entre 0,13 et 2,8 mg/kg pc/j aux valeurs maximales. Chez les
enfants diabétiques, elles se situent, sur la base d'une étude fran-
çaise de 2001 à 1,9 mg/kg pc/j en moyenne et 15,6 mg/kg pc/j
en consommation maximale.
Il est important de noter également une étude récente a été
menée par le National Toxicology Program (2003) sur des sou-
ris transgéniques, particulièrement sensibles aux effets cancéri-
gènes. Trois souches de souris transgéniques différentes (Défi-
cient en p53, Déficient en Cdkn2a, TgAC hemizygous) ont été
soumises pendant 9 mois à des doses quotidiennes d'aspartame
de 500 à 9 500 mg/kg pc/j. Aucune augmentation de l’incidence
de tumeur n'a été retrouvée dans cette étude.
LET.SC.IFN. N° 117, FEVRIER 2007 3