et de la Communication) sont sérieuses. Selon Madame Grébonval, les « potentialités offertes par l'emploi de ces
nouvelles technologies dans le rapport de travail sont redoutables ». Et d'ajouter, de « manière infaillible et
systématique, elles enregistrent la moindre erreur commise, évaluent très précisément les prestations
individuelles, contrôlent les moindres faits et gestes des travailleurs. Du fait de leur mémoire d'ordinateur, elles
rendent possible le recoupement des données qui rend le salarié transparent ». Avant de citer J. Le Goff : « La
menace [pour la vie privée des salariés] ne réside [plus] tant de la mise en oeuvre de fichiers informatiques
classiques [comme il y a peu de temps], que dans la multitude des instruments de collecte et de traitement des
données qui permettent de saisir non plus seulement la force de travail mise à la disposition de l'entreprise
mais "la personne qui travaille dans sa globalité" » (J. Le Goff, Droit du travail et société. Les relations individuelles
de travail, Presses universitaires de Rennes 2001, p. 473).
Comme le souligne Jean-Emmanuel Ray (L'ouverture par l'employeur des dossiers personnels du salarié, in Dr. soc. 2005,
p. 789), il existe une différence entre les courriers, média d'une correspondance du salarié quelque soit son support, et qui
bénéficie d'une protection « rapprochée » (A), et les dossiers, crées de toutes pièces par le salarié sur son ordinateur de
bureau (B). Il semble d'emblée plus difficile d'invoquer la violation du secret des correspondances pour l'ouverture d'un
dossier informatique, a fortiori s'il reste sur le disque dur de l'appareil.
A. Les courriels
Modernité oblige, la correspondance personnelle des salariés s'effectue également par le biais des nouveaux média de
communication, Internet en tête. C'est l'ère du mailing. Les e-mails envoyés par le salarié de son lieu de travail doivent-ils
rejoindre le champ des correspondances personnelles bénéficiant de la protection liée à l'intimité et à la vie privée du
salarié ?
Depuis l'arrêt Nikon de 2001 (cass. soc. 2 octobre 2001 : CSBP 2001, n° 135 A. 40, obs. E. Jez), le secret des
correspondances a été élargi au courrier électronique. Véritable débat de société, le thème de cette décision a même eu un
écho dans la presse généraliste (Libération 3 octobre 2001 ; Le Monde 4 octobre 2001). La rapidité avec laquelle ces
quotidiens ont réagi prouve, si besoin était, l'enjeu majeur de cette question.
Pour la Cour d'appel de Paris, « l'employeur ne peut, sans violation de la liberté fondamentale du salarié au respect, même
au temps et au lieu de travail, de sa vie privée, qui implique en particulier le secret des correspondances, prendre
connaissance du contenu des messages personnels émis par le salarié et reçus par lui grâce à un outil informatique mis à
sa disposition pour son travail et ce, même au cas où l'employeur aurait interdit une utilisation non professionnelle de
l'ordinateur ayant servi à cet échange de correspondances » (C. app. Paris 16 mai 2003 : Juris-Data n° 2003-213495 ;
Comm. com. électr. 2003, comm. n° 100, note A. Lepage). Idem pour la Cour d'appel de Bordeaux, pour qui « le salarié a
droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de l'intimité de sa vie privée, qui implique en particulier le secret des
correspondances. L'employeur ne peut dès lors, sans violation de cette liberté fondamentale, prendre connaissance de
messages personnels émis par le salarié et reçus par lui grâce à un outil informatique mis à sa disposition pour son travail
et ceci même au cas où l'employeur aurait interdit l'utilisation personnelle de l'ordinateur » (C. app. Bordeaux 1er juillet
2003 : Société Cegetel Sud-Ouest : RJS 11/2003, n° 1254 ; JS Lamy n° 135, E 18/12/2003, p. 16 à 18, obs. J.-E.
Tourreil). Dans l’arrêt Nikon, un salarié avait été licencié pour faute grave parce qu'il exerçait une activité parallèle avec
les outils informatiques de l'entreprise, ce dont l'employeur s'était aperçu en consultant sur le poste du salarié des
documents pourtant étiquetés « personnel ». Il conteste son licenciement, dont la validité est admise par la cour d'appel
mais rejetée par la Cour de cassation. Dans cet arrêt du 2 octobre 2001, la Chambre sociale avait énoncé que « le salarié a
droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de l'intimité de sa vie privée ; que celle-ci implique en particulier le
secret des correspondances ; que l'employeur ne peut dès lors sans violation de cette liberté fondamentale prendre
connaissance des messages personnels émis par le salarié et reçus par lui grâce à un outil informatique mis à sa disposition
pour son travail et ceci même au cas où l'employeur aurait interdit une utilisation non professionnelle de l'ordinateur ».
L'arrêt Nikon a donné lieu à une abondante réaction doctrinale (D. 2001, jurispr. p. 3148, note P.-Y. Gautier ; jurispr. p.
3286, interview Ph. Langlois ; D. 2002, jurispr. p. 2296, obs. C. Caron ; Dr. soc. 2001, p. 915, chron. J.-E. Ray ; Comm.
com. électr. 2001, comm. 120, obs. A. Lepage ; JCP éd. Ent. 2001, p. 1918, note C. Puigelier ; TPS 2001, comm. 384, obs.
P.-Y. Verkindt ; Semaine sociale Lamy 10/2001, p. 8, note G. Lyon-Caen ; LPA 10 décembre 2001, p. 6, note G. Picca ;
LPA 22 novembre 2001, p. 20, note Piot et Heslaut ; LPA 19 mars 2002, p. 13 note F. Petit ; Dr. et patrimoine 2002, n°
101, p. 112, obs. G. Loiseau ; RJPF janvier 2002, p. 10, note B. Bossu ; RTD civ. 2002, p. 72, obs. J. Hauser ; Defrénois
2002, p. 1407, note A. Raynouard ; RJS 12/2001, n° 1394 - D. Forest, Une ambassade virtuelle en terre patronale :
Expertises 2001, p. 424 - P. Alix, Les cahiers du DRH : Lamy, 16 novembre 2001, p. 2 - F. Favennec-Héry, Vie privée
dans l'entreprise et à domicile : RJS 12/2001, chron. 940).