Bactéries responsables d’infections, résistances aux antibiotiques et bactéries multi-résistantes dans les établissements hébergeant des personnes âgées en France en 2010 N°310 Claudine 1 QUENTIN , Catherine 1 ANDRE , Corinne 1 ARPIN , Laure 1 COULANGE 2 et les membres du Réseau Epiville-France 1Laboratoire de Microbiologie, CNRS UMR 5234, Université de Bordeaux 2, 2F. Artur, Le Havre (76) ; F. Bonfils, Muret (31) ; D. Boraud & JP. Brochet, Bordeaux (33) ; P. Cart-Lamy, Meylan (38) ; G. Cous, Bayonne (64) ; A. Dubouix-Bourandy, Toulouse (31) ; S. Fourmaux, Blaye (33) ; F. Grobost, La Ferté Bernard (72) ; T. Gueudet & C. Rieder, Strasbourg (67) ; T. Guffond, Cysoing (59) ; J. Jullin & S. Sicard, Langon (33) ; I. Lagrange, Angoulême (16) ; N. Lecordier, Epinal (88) ; P. Noury, Villenave d’Ornon (33) ; P. Weber, Vayres sur Marnes (77). Répartition des souches par espèce et par prélèvement INTRODUCTION Urines Prélèvements superficiels1 Hémo cultures Autres2 Total Entérobactéries (E. coli + autres) 604 (429 + 175) 14 (5 + 9) 5 (2 + 3) 7 (6 + 1) 630 (74%) (442 + 188) Staphylocoques (S. aureus + SCN) 35 (27 + 8) 53 (53 + 0) 3 (1 + 2) 3 (3 + 0) 94 (11%) (84 + 10) Non fermentants (P. aeruginosa + autres3) 39 (34 + 5) 14 (13 + 1) - 1 (1 + 0) 54 (7%) (48 + 6) 47 12 737 (87%) 4 8 93 (11%) 1 9 (1%) 1 12 (1%) 52 (6%) 21 (2%) 851 (100%) Espèce bactérienne Dans les pays industrialisés, l’allongement de la durée de vie et l’évolution de la structure familiale font qu’un nombre croissant de personnes âgées est hébergé en institutions. En France, selon les enquêtes de la DREES, 657 000 personnes vivaient fin 2007 dans des établissements d’hébergement pour personnes âgées (EHPA) (1). Les EHPA sont un ensemble hétérogène d’établissements qui proposent des services variés adaptés à des populations diverses. Le taux d’infections dans ces établissements a été récemment évalué à 11%, sans mention des germes en cause (2). Des enquêtes menées en milieu hospitalier ont montré que les patients issus d’EHPA étaient plus souvent que les autres porteurs de bactéries multi-résistantes (BMR) (3). A l’occasion d’études régionales effectuées sur la résistance aux antibiotiques en milieu extrahospitalier (3-6), la présence de BMR dans les EHPA a été confirmée. Des épidémies à BMR ont même été décrites dans ces établissements (7). Cependant, aucune étude Française ne s’est focalisée sur les EHPA, pour établir la proportion des différents types d’infection d’origine bactérienne, la répartition des espèces en cause, la prévalence de leurs résistances aux antibiotiques et la fréquence des différents types de BMR. Entérocoques4 Autres5 Total 1 dont 19 escarres et 17 ulcères de jambe ; 2 9 prélèvements génitaux, 2 cathéters, 1 prélèvement respiratoire non protégé ; 3 4 A. baumannii, 1 P. fluorescens, 1 S. maltophilia ; 4 37 E. faecalis, 9. E. faecium, 2 E. gallinarum, 4 Enterococcus sp ; 512 Streptocoques (5 Streptocoques B, 5 Streptocoques C, 1 S. parasanguis, 1 S. thermophilus), 9 autres (5 Aerococcus sp., 2 Gemella sp., 1 Corynebacterium sp., 1 B. catarrhalis) ; Fréquences des résistances aux antibiotiques Non Fermentants Entérobactéries Le but de ce travail était de répondre à ces questions. Pendant une période de 3 mois en 2010, les Laboratoires de Biologie Médicale du Réseau Epiville-France ont adressé au Laboratoire référent les comptes-rendus (CR) d’analyses ayant justifié un antibiogramme pour les résidants d’EHPA et les souches correspondantes. Les CR ont été analysés, les identifications et les antibiogrammes ont été contrôlés, et les BMR ont été identifiées. 100% 100% 90% 90% 80% 80% 70% 70% 60% 60% 50% 50% S S 40% R I R 30% 30% 20% 20% 10% 10% MATERIEL ET METHODES Durée de l’étude : 3 mois, période mars-juin 2010 15 plateaux techniques privés du réseau Epiville-France Contrôle des identifications (galeries API, Pastorex, milieu au tellurite) et des antibiogrammes (méthode des disques) Détection des -lactamases à spectre élargi (BLSE), céphalosporinases et carbapénémases (antibiogrammes cloxacilline à 250 mg/l, disques et E-tests combinés) Détection des mécanismes de résistance par PCR (céphalosporinases plasmidiques, mecA, van) I 40% 0% 0% Entérocoques Staphylocoques 100% 100% 90% 90% 80% 80% 70% 70% 60% 60% 50% 50% S S I 40% R 40% I R RESULTATS Au total, 851 souches non redondantes ont été examinées. Elles provenaient de 660 patients (517 femmes, 143 hommes ; 90% de 75 ans, 61% de 85 ans ). Ces patients résidaient dans 135 EHPA : 124 maisons de retraite et/ou EHPA pour personnes dépendantes (MR/EHPAD), 7 Unités de Soins de Longue durée (USLD), 4 résidences-foyers. Ces souches étaient essentiellement issues d’urines (87%) et de prélèvements superficiels (11%, dont 20% d’escarres et 18% d’ulcères) Les principales espèces bactériennes en cause étaient des entérobactéries (74%, dont 70% d’Escherichia coli) et des staphylocoques (11%, dont 89% de Staphylococcus aureus) La fréquence des résistances acquises des entérobactéries et des staphylocoques était particulièrement élevée vis-à-vis des -lactamines et des quinolones. En matière de BMR, parmi les bacilles à Gram négatif : - 12% des entérobactéries étaient productrices de BLSE ainsi qu’1 souche de Pseudomonas aeruginosa, - 1 souche de Proteus mirabilis était productrice d’AmpC plasmidique. Parmi les cocci à Gram positif : - 65% des S. aureus étaient résistants à la méthicilline (SARM), - 2 E. gallinarum présentaient une sensibilité diminuée à la vancomycine. Plusieurs entérobactéries productrices de BLSE possédant le même antibiotype étaient présentes dans divers établissements, faisant suspecter des infections croisées. 30% 30% 20% 20% 10% 10% 0% 0% CONCLUSION Les caractéristiques des patients et des EHPA inclus dans cette étude sont similaires à celles retrouvées dans les enquêtes du Ministère de la Santé. Les infections d’origine bactérienne en EHPA sont essentiellement des infections urinaires et cutanées, dues à des entérobactéries et S. aureus. Les taux de résistances aux antibiotiques de ces bactéries sont notablement plus élevés que dans la communauté. La fréquence très importante des entérobactéries BLSE+ et des SARM confirme le rôle de réservoir potentiel de BMR de ces établissements. Cependant, aucun bacille à Gram négatif producteur de carbapénémase acquise et aucun entérocoque résistant à la vancomycine n’a été détecté. Des expériences supplémentaires sont nécessaires pour caractériser les BLSE et étudier l’hypothèse d’épidémies dans certains centres. REFERENCES 1 - Prévot J., 2009, Études et résultats, DREES (Direction de la Recherche des Etudes de l’Evaluation et des Statistiques) n°699, août. 2 – Chami K et al., J Hosp Infect, 2011, 79(3):254-9. 3 – Lescure FX et al., Infect Control Hosp Epidemiol, 2006 27(11):1213-8. 4 - Thibaut S et al., Clin Microbiol Infect, 2010,16(7):915-20. 5 – Arpin C et al., Antimicrob Agents Chemother, 2007, 51(9):3440-4. 6 - Dubois V et al., J Antimicrob Chemother, 2008, 62(2):316-23. 7 - Dubois V et al., J Clin Microbiol, 2005, 43(8):4129-38. Répartition des entérobactéries par espèce et par souches BLSE+ Espèce E. coli P. mirabilis K. pneumoniae K. oxytoca C. koseri C. freundii E. cloacae E. aerogenes H. alvei M. morganii P. stuartii P. vulgaris S. marcescens Total Nb souches 442 80 39 9 7 5 18 3 1 13 10 2 1 630 Nb souches BLSE + 60 1 (+ 1 AmpC plasmidique) 8 - (2 hyperOXY) 2 1 1 73 (12%)