rière pour croiser le rectum et cravater la
jonction recto-anale en formant une boucle
derrière la partie haute du canal anal ; les
fibres s’intriquent ensuite avec la couche
musculaire lisse externe de la paroi rectale,
surtout en avant et sur les côtés pour consti-
tuer l’arcade de Laime ; la partie la plus
inférieure du muscle est ainsi contiguë avec
la partie profonde du sphincter interne. Il
assure l’angulation recto-anale à la manière
d’une puissante fronde et constitue de ce
fait un élément fondamental de la conti-
nence. Les trois contingents sont innervés
par leur face pelvienne à partir de S3 et de
S4. Les deux releveurs circonscrivent entre
eux, sur la ligne médiane, en avant du rec-
tum, une large ouverture appelée fente uro-
génitale.
C
LINIQUE
L’interrogatoire et l’examen clinique proc-
tologique suffisent en général à poser le dia-
gnostic de syndrome du releveur (2-5).
Rares sont les situations nécessitant le
recours à des examens complémentaires à
la recherche d’une pathologie organique
spécifique (abcès intramural, néoplasie pel-
vienne péri-rectale, prolapsus interne du
rectum, endométriose périnéale, prostatite,
etc.).
Le syndrome du releveur toucherait 6 à 7 %
de la population générale, mais seulement
un tiers des patients consultent un praticien
(4). Il atteint surtout la femme (75 % des
cas), d’âge moyen (40-60 ans). La douleur
apparaît, en général, progressivement dans
le temps : d’abord discrète, fugace, elle se
fait de plus en plus présente au fil des mois
ou parfois des années.
Il s’agit d’une douleur d’intensité souvent
modérée, de siège anal et/ou rectal, volon-
tiers localisée à gauche. Le type en est
imprécis : pesanteur profonde, brûlure rec-
tale, ténesme donnant l’impression d’un
corps étranger intra-rectal ou de boule intra-
rectale, sensation d’être assis sur une balle.
Les irradiations sont assez fréquentes et
variables, intéressant, selon les cas, le pli
interfessier, le pelvis, les fesses, la face pos-
térieure des cuisses ou les organes génitaux.
La douleur n’est jamais nocturne.
La position assise prolongée ou le passage
de la position assise à la station debout exa-
cerbent la douleur, et le malade est souvent
contraint de s’asseoir sur l’une ou l’autre
fesse, parfois seulement de côté sur le bord
d’une chaise ; la douleur est aggravée après
la défécation (pouvant être soulagée au
moment de l’évacuation de gaz ou de
selles). La station debout, la marche ou le
décubitus soulagent le plus souvent ce syn-
drome douloureux, qui apparaît alors
comme un véritable syndrome postural.
L’examen proctologique est normal, mais
retrouve un signe essentiel : une contracture
douloureuse des muscles releveurs de l’anus
(spasme du releveur de l’anus, particulière-
ment du pubo-rectal), perceptible sous la
forme d’un cordon, le plus souvent unilaté-
ral et à gauche, tendu de la ligne médiane
postérieure à la symphyse pubienne, la pres-
sion avec le doigt sur le muscle déclenchant
la douleur. Une douleur moins intense peut
être également ressentie à la mobilisation
du coccyx rendant les limites avec les coc-
cygodynies parfois difficiles à cerner. Tou-
tefois, ici, la contracture douloureuse d’un
ou des deux releveurs de l’anus prédomine
sur la douleur, quand elle existe, engendrée
par la palpation du coccyx.
Le rôle de la manométrie dans le diagnos-
tic de ce syndrome n’a pas été établi. La
possible observation d’un anisme et/ou
d’une hypertonie à la partie haute du canal
anal a pu être rapportée en manométrie ano-
rectale lors de ce syndrome (6).
Il existe souvent un contexte psychologique
particulier, dominé par une instabilité psy-
chique pouvant aller jusqu’à la névrose ;
une relation entre les symptômes et les
périodes de stress ou de dépression est habi-
tuelle. Il faut garder présent à l’esprit que la
répétition des investigations, la mise en
œuvre de certaines thérapeutiques trauma-
tisantes réitérées et souvent inefficaces ris-
quent d’aggraver les symptômes, ou tout au
moins de fixer plus intensément l’esprit du
malade sur la pathologie. Le caractère très
stéréotypé de la douleur est tout à fait dif-
férent de la variabilité d’une douleur psy-
chogène et l’état névrotique apparaît dans
le cas précis plus comme conséquence que
comme cause du syndrome du releveur.
Au total, un comité international a proposé
des critères diagnostiques précis (3)
(tableau) mais le diagnostic reste “pro-
bable” même si les critères de l’examen cli-
nique ne sont pas retrouvés.
M
ÉCANISME
Le mécanisme pathogénique en cause n’est
pas clairement élucidé. Il donne lieu à
diverses hypothèses, puisqu’on invoque
principalement la responsabilité d’un
spasme musculaire du releveur, singulière-
ment du pubo-rectal, mais aussi celle, pos-
sible, de micro-traumatismes répétés avec
contusion ostéo-ligamentaire, ou encore
d’une hyperlordose à l’origine d’une élé-
vation douloureuse du releveur par hori-
zontalisation du sacrum et fuite du coccyx
en haut et en arrière (7). Une mauvaise posi-
tion assise pourrait entraîner une bascule
antérieure du coccyx qui déclencherait le
spasme du releveur.
L’anamnèse peut retrouver la notion de
facteurs favorisants : travail ou loisir
nécessitant une position assise prolongée,
de surcroît en position vicieuse, c’est-à-
dire en position écrasée (secrétaire, joueur
de bridge, “accros” de la télé), micro-trau-
Dossier thématique
Le Courrier de colo-proctologie (IV) - n° 3 - juill - août - sept 2003
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– Douleurs ou brûlures rectales chroniques ou récurrentes
et
– Épisodes douloureux durant plus de 20 minutes
et
– Évoluant depuis plus de 3 mois non consécutifs dans les 12 derniers mois
et
– Absence de cause évidente (fissure, hémorroïdes, abcès, etc...)
et
– Contracture des releveurs au toucher rectal et douleur à la traction du muscle
Tableau. Critères diagnostiques du syndrome releveur (3).