38 Revue ABB 3/2000
Transmission and Distribution
e secteur du transport et de la distribu-
tion d’électricité est actuellement dans
une phase de transition avec des conséquences
très importantes à la fois pour les fournisseurs et
pour les consommateurs. Avec l’arrivée à un
rythme accéléré de nouveaux dispositifs à semi-
conducteurs de puissance, le marché profite,
pour une large part, des importants investisse-
ments et des très nombreux programmes de
développement à la fois dans les technologies de
l’information et dans le domaine de la micro-
électronique.
Ces nouvelles générations de semi-conduc-
teurs de puissance offrent des performances
supérieures, une fiabilité accrue et une excel-
lente aptitude à la commande. Par ailleurs, d’im-
portants travaux de recherche sur de nouveaux
matériaux, comme le carbure de silicium, don-
nent des résultats encourageants avec des poten-
tialités qui vont bien au-delà des limites du ma-
tériau phare de ces dernières années, le silicium.
Technologies de l’information et
microélectronique: nouvelles
forces motrices du génie électrique
Avec un taux de croissance qui reste exception-
L’électronique à pleine
L’électronique de puissance remplace de plus en plus les systèmes électromagnétiques traditionnels
dans les réseaux de transport et de distribution (T&D). En effet, les exploitants de réseau sont de
plus en plus conscients de la nécessité d’améliorer le rendement et d’accroître le niveau de fonction-
nalités des infrastructures existantes. Dans ce contexte, elle simplifie le couplage des petits moyens
de production décentralisée et des sources d’énergies renouvelables aux consommateurs et au
réseau électrique. Par ailleurs, les nouvelles technologies à base d’électronique de puissance per-
mettent de réduire de manière considérable la taille des infrastructures d’énergie électrique, avec
des avantages réels en termes, d’une part, d’impact visuel et environnemental et, d’autre part,
d’utilisation de l’espace et des ressources disponibles.
L
PUISSANCE
Les semi-conducteurs de puissance pour les
applications de transport et de distribution d’énergie
électrique
Christer Ovrén, Heinz Lendenmann, Stefan Linder, Bo Bijlenga
0.25 µm
Insulator
Gate-controlled
electron current
Silicon wafer
‘-’Terminal ‘+’Terminal
Gate
1Gauche: Transistor MOS – «cheville ouvrière» de la microélectronique. Droite: Vue en
coupe d’une tranche de silicium, montrant les éléments de base du dispositif MOS
Revue ABB 3/2000 39
nel, l’industrie des technologies de l’information
est un des secteurs dominants de l’économie
mondiale actuelle. Un des facteurs caractéris-
tiques du secteur, et un de ceux qui expliquent
sa croissance phénoménale, est le niveau
extrêmement élevé des investissements en R&D.
Les développements spectaculaires que ces
derniers ont permis dans le génie logiciel et la
microélectronique expliquent également l’essor
des applications «connexes», comme par exemple
le génie électrique.
Le transistor MOS (Metal Oxide Semicon-
ductor) est une des pierres angulaires de la
microélectronique actuelle. Ce dispositif permet
de commander, avec une précision élevée, le
courant dans le semi-conducteur en appliquant
une tension sur une électrode de gâchette
isolée. Qui plus est, l’énergie requise pour cette
opération est extrêmement faible. Les coûts de
fabrication du transistor MOS sont très compéti-
tifs, tous les éléments de base de la fonction
transistor étant fabriqués selon le procédé pla-
nar en utilisant des techniques de photolitho-
graphie comparables à celles utilisées dans
l’industrie de l’imprimerie. Des investissements
massifs en R&D aux cours des dernières décen-
nies ont permis de réduire en permanence la
taille des composants des circuits électroniques
(conformément à la loi de Moore , qui sti-
pule que le nombre de transistors qui peut être
intégré sur une pastille de semi-conducteur
double tous les 18 mois). Aujourd’hui, plus de
100 millions de transistors, chacun d’une sur-
face inférieure à 10
–6
mm
2
, peuvent être intégrés
sur une pastille de 1–2 cm
2
. Complétés par des
fonctions logicielles avancées, des produits bon
marché et innovants, aux nombreuses fonction-
nalités et au rendement extrêmement élevé sont
aujourd’hui courants dans ce domaine.
Traitement des fortes puissances
– l’approche traditionnelle
Traditionnellement, la conversion électronique
de l’énergie électrique de forte puissance faisait
appel à des convertisseurs à commutation
naturelle, des thyristors étant utilisés pour
commander la circulation du courant. Le thyris-
tor s’apparente à une «vanne de courant binaire»
avec deux états discrets, un état de conduction
et un état de blocage du courant. L’amorçage
se fait par injection d’un courant de gâchette,
l’extinction se faisant lors du passage par zéro
de la tension d’alimentation à 50/60 Hz.
Cependant, le fait que le thyristor ne soit pas
désamorçable par la gâchette limite les domaines
d’application de ce composant. Utilisés depuis
plus de 40 ans pour traiter les fortes puissances,
les thyristors sont aujourd’hui proposés pour
une large gamme de puissance et cons-
tituent souvent une solution économique et
3
2
1
109
106
103
Transistors/chip
1970 1980 1990 2000
2La loi de Moore – plus puissant, plus petit. Les nouvelles technologies et des
techniques de fabrication plus performantes sont les deux forces motrices du
développement des pastilles de semi-conducteurs à base de MOS, constituant
élémentaire des technologies de l’information modernes.
3Ce thyristor haute puissance au silicium, conçu
pour les applications de transport CCHT, peut
supporter 8000 V et 2000 A. Il occupe une tranche
de silicium de 5 pouces.
40 Revue ABB 3/2000
Transmission and Distribution
performante pour les niveaux de puissance
supérieurs.
Une commande par gâchette
perfectionnée pour améliorer les
performances des thyristors
Le désamorçage par gâchette apparut à la fin des
années 1970 avec l’avènement du thyristor GTO
(Gate Turn-Off thyristor). En permettant la fabri-
cation de convertisseurs performants pour la
commande de la fréquence de sortie, le thyristor
GTO ouvrit la porte à la commande à vitesse
variable des moteurs à courant alternatif (c.a.) et
autres applications de même type. Cependant,
les pertes étant plus élevées avec les GTO
qu’avec les thyristors classiques, il devint néces-
saire de concevoir des circuits complexes pour
l’alimentation en forts courants de gâchette, de
même que des circuits d’amortissement pour la
protection (’snubbers’). Un saut important dans
les performances du thyristor GTO fut réalisé en
1997 par ABB avec l’introduction d’un nouveau
type de composant, le thyristor IGCT (Integrated
Gate Commutated Thyristor) [1]. Cette nouvelle
technologie proposait, pour la première fois,
l’injection et l’extraction homogènes et com-
mandées haute précision de courants de
gâchette dans les thyristors par le biais d’un cir-
cuit de commande de gâchette intégré . En
utilisant ce concept, la diode de roue libre, qui
doit être connectée en antiparallèle avec les
GTO dans de nombreux types de convertisseurs,
peut désormais être intégrée sur la même
tranche de semi-conducteur, simplifiant la con-
ception mécanique du convertisseur. La commu-
tation homogène sur toute la surface du com-
posant IGCT réduit de manière significative les
pertes par rapport au GTO [2]. Enfin, la réduc-
tion du nombre de composants du convertisseur
(ex., condensateurs et filtres) permet de dimi-
nuer la taille du convertisseur.
Ayant fait la preuve de son haut niveau de
fiabilité, l’IGCT constitue la solution optimale et
économique pour de nombreuses applications
de forte puissance nécessitant des composants à
désamorçage forcé. Actuellement, les domaines
d’applications types sont les gros systèmes
d’entraînement et les systèmes d’alimentation
de la traction [3].
Associer semi-conducteurs de
puissance traditionnels et
microélectronique de pointe
De nombreuses tentatives ont été faites pour
associer les technologies de la microélectronique
(utilisées pour la commande haute précision des
signaux basse tension dans les circuits intégrés)
avec les besoins de traitement de l’énergie des
composants semi-conducteurs de puissance.
A ce jour, la meilleure solution est le transistor
IGBT (Insulated Gate Bipolar Transistor) [4], qui
conjugue une gâchette caractérisée par une
haute impédance et un faible niveau d’énergie
avec la capacité de traitement d’énergie des
thyristors et transistors bipolaires standards.
L’IGBT est commandé par un masque de
4
Insulator
High current
Semiconductor
wafer
Cathode Critical
dimension
Gate
Anode
Gate-controlled
electron current
4La technologie IGCT d’ABB a placé la barre très haut en
termes de performances et de coût des thyristors.
5La combinaison de transistors MOS haute impédance à la surface
pour une commande rapide et à faible énergie, avec un transistor vertical
pour des tenues en courant et tension élevés, confère à l’IGBT une
excellente aptitude à la commande et un gain d’énergie très important.
Revue ABB 3/2000 41
transistors MOS répartis à la surface du dispositif
. Ces transistors MOS permettent une com-
mande haute impédance du courant qui parcourt
le composant, de sorte que seul un courant de
niveau extrêmement faible doit être fourni à la
gâchette de commande. La bonne tenue aux
tensions et courants élevés est assurée par le
composant vertical du dispositif, à savoir un
transistor bipolaire. L’épaisseur de ce transistor
vertical est suffisante pour résister aux tensions
élevées. L’effet transistor vertical est également
fondamental car il améliore la conductivité du
matériau semi-conducteur et, par conséquent,
réduit la chute de tension dans le dispositif en
phase de conduction.
Les performances de l’IGBT sont directement
liées aux caractéristiques des cellules transistors
MOS en surface, et le succès rencontré par ces
dispositifs est principalement le fait du
développement continu de nouvelles structures
de cellules qui, souvent, mettent en oeuvre des
technologies développées à l’origine pour les cir-
cuits microélectroniques destinés à des marchés
beaucoup plus vastes . La maîtrise parfaite du
procédé de fabrication est cruciale pour garantir
l’uniformité et la reproductibilité des caractéris-
tiques, et donc les performances élevées
et le haut niveau de fiabilité de ces dispositifs.
Même si les années 1980 ont vu des progrès
substantiels dans le développement et la produc-
tion des IGBT pour les faibles tensions (600 à
1200 V), il a fallu attendre le début des années
1990 pour comprendre que le même concept
pouvait également être utilisé pour des tensions
plus élevées [5].
Depuis, ABB a élargi son offre qui inclut des
modules de puissance IGBT pour des tensions
comprises entre 1200 V et 4500 V. Une collabo-
ration étroite avec les clients a permis d’opti-
miser ces produits pour d’importantes applica-
tions .
Avec sa nouvelle gamme d’IGBT 1200 V
basée sur la technologie exclusive SPT (Soft
Punch Through) [6], ABB a encore amélioré les
performances des IGBT . Les transistors MOS
sur la surface des tranches, tout comme l’épais-
seur des tranches de silicium, sont optimisés
pour des performances élevées lorsque l’IGBT
est à l’état passant et pour des pertes très faibles
lors de la commutation du dispositif pour blo-
quer le courant.
Sachant que les pertes des composants de
puissance sont, selon une première approxima-
tion, proportionnelles au carré de l’épaisseur du
dispositif, toute démarche d’optimisation doit
de toute évidence s’attacher à réduire cette
épaisseur. Avec la technologie SPT, ABB a fait
un véritable bond en avant, ramenant l’épais-
seur des IGBT 1200 V à moins de 70% de celle
des dispositifs précédents. De plus, la structure
planaire des cellules, qui contribue à la repro-
ductibilité et aux faibles coûts de fabrication,
confère au nouvel IGBT 1200 V de faibles
pertes à l’état passant, comparables à celles des
IGBT «à tranchées» plus complexes, mais opti-
misés à cet égard. En termes de désamorçage,
8
7
65
100
10
1
0.1
Critical dimension[µm]
20051995198519751965
Thyristor
DRAM
IGBT
64K
1K
1M
4K
4M
16K
16M
256K
256M
64M
6Grâce à l’utilisation de technologies de fabrication développées
pour les circuits intégrés et les mémoires, les niveaux de perfor-
mances des nouveaux semi-conducteurs de puissance évoluent
selon une tendance similaire.
7Les techniques avancées d’intégration des semi-conduc-
teurs sont la clé de la position de leader d’ABB en électronique
de puissance.
42 Revue ABB 3/2000
Transmission and Distribution
le nouveau concept est comparable aux IGBT
de technologie NPT (Non-Punch-Through),
optimisés pour ce paramètre. Par ailleurs, la
technologie SPT permet de fabriquer des dis-
positifs avec un comportement très ’doux’ lors
des commutations, réduisant les problèmes de
bruit électrique dans les convertisseurs. La fabri-
cation de tranches de silicium extrêmement
minces est un facteur clé de ces performances,
car on minimise la quantité de silicium sur le
parcours du courant et, donc, les pertes du dis-
positif .
Les fondements technologiques qui ont servi
à l’élaboration de la gamme des produits SPT
sont aujourd’hui utilisés pour améliorer les per-
formances des IGBT conçus pour des tensions
supérieures. De ce fait, l’expérience accumulée
par ABB sur les thyristors très haute tension au
cours des nombreuses années est désormais
exploitée pour la conception des IGBT haute
tension.
Un facteur important à prendre en compte
lors de l’optimisation des performances des dis-
positifs haute tension est l’impact des rayons
cosmiques. Trouvant leur source au plus profond
de l’espace, ces particules pourraient provoquer
des défaillances spontanées des dispositifs. Des
recherches très poussées ont été entreprises par
ABB pour comprendre leurs effets et concevoir
des dispositifs peu sensibles à ces particules.
Autre facteur important pour la conception
des dispositifs haute tension: la densité d’énergie
pendant les commutations. Pour une technologie
donnée, le courant commandable maximum est
essentiellement inversement proportionnel à la
tension que le dispositif doit supporter. Ainsi, le
courant nominal pour une taille de pastille don-
née décroît rapidement lorsque la tension aug-
mente. En cas de court-circuit, la densité d’éner-
gie à l’intérieur des IGBT atteint facilement
plusieurs MW/cm
2
avec, pour conséquence, un
échauffement extrêmement rapide de l’IGBT et
la destruction possible du dispositif.
D’importants travaux de recherche sont ainsi
menés par ABB pour élever le seuil de destruc-
tion, à la fois pour ce qui concerne la densité
d’énergie et l’absorption d’énergie maximale en
cas de court-circuit extrême. Sur ces deux points,
les nouvelles technologies IGBT d’ABB sont net-
tement plus performantes. En utilisant des tech-
niques d’auto-alignement à 100%, on garantit
que la définition géométrique de toutes les
caractéristiques critiques pour la fabrication est
indépendante de la qualité de l’alignement
photolithographique. On obtient ainsi une très
grande uniformité avec suppression des points
faibles susceptibles de limiter les performances
des dispositifs. Une couche de dopage spéciale
9
Forward voltage drop [V]
15
10
5
0
Turn-off loss[mWs]
1.5 2.0 2.5 3.0 3.5
Losses during conduction
Losses during switching
State of
the art
products
New SPT
technology
from ABB
8Comparaison des performances de l’IGBT 1200 V. Données à 600 V, 75 A, 125°C.
9Tranche de silicium produite selon la technologie IGBT la plus récente d’ABB.
Cette tranche de 5 pouces a une épaisseur de 125 µm et comporte plus de
10 millions de transistors.
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