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Chapitre III : M
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MEESSUURREE DDEE CCH
La stabilité des barbotines céramiques dépend des charges électriques développées sur
les surfaces des particules argileuses Il existe deux types de charges de surface : les charges
de bords et les charges de faces.
La caractérisation des charges de bords est réalisée par la méthode de titration
potentiomètrique acide–base. Cette technique permet d’évaluer la quantité de protons ou de
groupements hydroxyles adsorbés par la surface.
La détermination de la charge globale est effectuée par la mesure du potentiel zêta. Ce
dernier est calculé à partir de la vitesse de la particule Ve dans un champ électrique.
L’inconvénient de cette technique est que la mesure de la vitesse électrophorétique devient
difficile lorsque la concentration en matières sèches augmente et dépasse une concentration
de 1% massiques [1].
Des travaux récents ont cherché à utiliser la corrélation entre un signal acoustique
généré par la mobilité des grains soumis à un champ électrique alternatif [2]. Cette technique
(ESA : electrokinetic sonic amplitude) utilise une modélisation [3], permettent de relier le
signal ESA au potentiel zêta (ζ), valable surtout lorsque la concentration n’excède pas 10%
volumique.
Il est à noter que les représentations du potentiel zêta sont significatives dans le cas de
grains sphériques ayant des propriétés de surface uniformes. Ce n’est pas le cas des minéraux
argileux et les valeurs de zêta obtenus ne sont qu’une représentation moyenne des effets de la
surface et de la forme. Dans la suite, nous nous contenterons uniquement de la mesure de la
mobilité dynamique des grains en suspension.
Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
I. Techniques expérimentales
I.1. Préparation des suspensions
Les mesures sont effectuées essentiellement sur les argiles C3 et C4 que nous avons
caractérisé précédemment (Cf. Part. A. Chap. II). Les suspensions sont préparées en mettant
4g d’argile dans 100 cm3 d’eau bidistillée. La dispersion de la suspension est assurée par une
agitation ultrasonore (Vibra-cell ultrasonic desingrator, VC600, Sonic & Materials) pendant
20 minutes. La suspension est ensuite soumise à une agitation continue pendant 24 heures.
I.2. Charges de surface
I.2.1. Rappel théorique
Les particules argileuses (kaolinite, illite,…) en suspension développent deux types de
charges de surface : des charges de faces négatives, qui sont dues aux substitutions
isomorphiques dans la structure cristalline de l’argile, et des charges de bords, qui dépendent
du caractère amphotère des particules hydratées (SOH) et donc du pH du milieu.
Les charges de faces sont indépendantes du pH. Elles sont caractérisées par une
densité notée σo. Par contre, les charges de surfaces des bords (QH) dépendent du pH (en
milieu acide, elles sont positives alors qu’en milieu basique, elles sont négatives). Ces
charges peuvent être mesurées expérimentalement par titration potentiomètrique acide/base.
Cette méthode est basée sur l’évaluation de la quantité de protons (H+) ou de groupements
hydroxyles (OH-) adsorbés par la surface. Cette quantité est proportionnelle à la densité de
charge nette du proton (σH) [4].
I.2.2. Evaluation de la densité nette de charge du proton σH
Les argiles sont constituées d’un ensemble d’oxydes ( SiO2, Al2O3,…) qui en solution,
s’hydratent et forment des hydroxydes amphotères de type SOH. Les réactions de protonation
(p) et de déprotonation (d) peuvent être écrites sous la forme suivante [5,6] :
S - OH + H +
→ SOH +2
(1)
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Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
→ SO -
S - OH
+
H+
(2)
Les constantes d’équilibre des réactions (1) et (2) sont définies comme suit :
[SOH +2 ]
exp (FΨ0 / RT)
Kp =
[SOH] [H + ]
(3)
[SO- ] [H + ]
exp (-FΨ0 / RT)
[SOH]
(4)
Kd =
Où F, Ψ0, R et T sont respectivement la constante de faraday (96500 C.mol-1), le
potentiel de surface, la constante des gaz (R = 8,314 J.mol-1.K-1 ) et la température.
L’évaluation de la densité de charges de bords a été réalisée par titration
potentiomètrique acide/base par Stumm [7]. Il a ainsi montré qu’en l’absence d’ions
spécifiquement adsorbés, il est possible de calculer, à partir des courbes de titration, la
quantité de charge QH et d’en déduire ensuite la densité de charge nette du proton (σH).
La quantité de charge de surface QH (mol.g-1) peut être calculée en fonction du pH à
partir de la différence entre la quantité totale d’acide ou de base ajoutée et les concentrations
en ions H+ et OH- échangés par l’oxyde. L’expression de la quantité QH peut s’écrire :
QH =
C A - C B + [OH - ] - [H + ]
= {SOH +2 }- {SO - }
a
(5)
où les concentrations entre {} indiquent les concentrations des espèces en surface,
exprimées en mol.kg-1 (par exemple : [SO-]/a ={SO-}), ‘a’ étant la concentration massique (a
= 40 g.l-1), CA et CB sont les quantités d’acide (HCl) ou de base (NaOH) ajoutées durant la
titration (mol.l-1). [H+] et [OH-] sont les concentrations des ions H+ et OH- dans la suspension.
Elles sont déterminées par mesure du pH ([H+] = 10-pH).
La densité de charge nette du proton σH (C.m-2) peut être calculee à partir de la
quantité de charge QH :
σH =
Q H .F
S
(6)
Avec, S la surface spécifique de l’argile. Elle est égale à 32,55 m2.g-1 pour l’argile C3
et 24,33 m2.g-1 pour l’argile C4, F étant la constante de Faraday.
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Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
I.2.3. Détermination du point de charge nulle
Le point de charge nulle (PCN) est déterminé à partir de l’intersection de la courbe de
titration de la suspension d’une part et celle du surnageant correspondant (liquide issu de la
centrifugation de la suspension) d’autre part.
I.2.4. Appareillage et protocole de mesure
La densité de charge de surface est déterminée par la méthode de titration
potentiomètrique acide–base [8]. Elle consiste à ajouter à la suspension des quantités
croissantes d’acide HCl [0,1 mol.l-1] ou de base NaOH [0,1 mol.l-1], et de mesurer ensuite le
pH correspondant. L’ajout de ces entités se fait automatiquement à l’aide d’un Titroline
Alpha muni d’une électrode de verre de type Schott N52A, avec une vitesse d’ajout qui a été
ajustée à 13,20 µl par minute pour garantir l’équilibre des échanges. Les titrants HCl et
NaOH sont des solutions standard (Normadose, 1 mol.l-1 (± 0,5%), Prolabo). La solution de
NaCl utilisée pour fixer la force ionique de la suspension est fournie par Aldrich.
I.3. Mesures acoustophoromètriques
I.3.1. Principe
L'application d'un champ électrique alternatif à un colloïde produit un déplacement
des particules dans ce champ en fonction du potentiel Zêta. S'il existe une différence de
densité entre les particules et le liquide, ce mouvement oscillatoire des particules produit une
impulsion dans le liquide. Cette impulsion développe une amplitude acoustique appelée
‘Electrokinetic Sonic Amplitude’ (ESA) [9]. C’est l'amplitude de pression générée par le
colloïde, par unité de force du champ électrique. Elle s’exprime en pascal, par volt par mètre
(Pa.V-1.m-1).
La mesure acoustophoromètrique présente un certain nombre d’avantages : elle est
utilisée pour une large gamme de concentrations (1-20% vol.), pour un large éventail de
tailles (jusqu’à 100µm) et pour des suspensions de propriétés optiques variées (suspensions
opaques ou non). De plus, la mesure peut se faire sur des échantillons en mouvement (sous
agitation), ce qui permet un gain de temps considérable.
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Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
I.3.2. Conversion signal ESA / mobilité dynamique
La détermination du potentiel zêta, par les mesures acoustophoromètriques, s’appuie
essentiellement sur la théorie développée par O’Brien [10]. Cette théorie tient compte de la
forme sphérique des particules en suspension. Dans notre cas (plaquettes d’argiles), cette
condition n’est pas remplie. Nous nous limiterons donc à la détermination de la mobilité
dynamique (µo) à partir de la conversion de l’amplitude du signal ESA (7) [11].
µ0 =
ESA
φ ∆ρ c
(7)
Où, µ0 étant la mobilité dynamique [m2.V.s-1], φ est la fraction volumique de la
poudre ; ∆ρ la différence de densité [Kg.m-3] (suspension/liquide) et c, la vitesse du son
(c=1490 m.s-1).
I.3.3. Appareillage
Les mesures acoustophoromètriques sont réalisées sur un appareil de type Matec ESA
8000 (Matec Applied Sciences). Il permet de mesurer le signal ESA dans une gamme de
fréquences aux alentours de 1MHz. L’appareil est équipée d’un détecteur sensible aux
variations de phase (SP80 ESA) et utilise la méthode des pulsations ultrasoniques pour la
mesure de l’amplitude et de l’angle de la phase du signal ESA.
La sonde à détecteur électroacoustique (SP80 ESA) est incorporée dans une cellule de
mesure SSP1 (de capacité 220ml) qui contient également une électrode de verre pour la
mesure du pH, une cellule de mesure de la conductivité, une sonde pour la mesure de la
température et un agitateur mécanique à vitesse variable (0-2500 rpm). L’appareil est lié à un
titromètre à double piston qui permet de contrôler le débit d’un acide et/ou d’une base ajouté
lors de la mesure de la mobilité dynamique en fonction du pH (fig. III.1).
Le Matec ESA 8000 est piloté par un PC (IBM AT) muni d’un logiciel de pilotage et
de saisie. Les données sont récupérées sur un fichier au format ASCII et ensuite traitées avec
Excel. La conversion signal ESA/mobilité dynamique se fait automatiquement par le logiciel
selon l’équation (7).
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Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
* Sonde SP-80 :
La sonde SP-80 ESA est composée de deux parties : le corps de la sonde et sa capsule
démontable. Le corps de la sonde consiste en une ligne à retard au contact d’un élément
piezo–électrique à l’une des extrémités et une électrode plane en Or à l’autre extrémité. La
barre transversale de la sonde forme la seconde électrode qui est positionnée d’une façon
plane et parallèle à l’électrode principale. L’espace entre les deux électrodes est un multiple
de 1/2 de la longueur d’onde (λ) du signal acoustique dans le colloïde (fig. III.2).
* Calibration de la sonde SP-80 :
La sonde SP-80 ESA est calibrée en utilisant une solution de Ludox TM (Du Pont
Wilmington, DE, USA) dont on connaît précisément la granulométrie, la forme des particules
et leur charges de surface. La valeur du signal ESA correspondant à 10% volumique de la
solution Ludox est de –5,32 mPa.m.V-1 à 25°C. Les mesures sont effectuées à température
constante (25 ± 0,5°C).
II. Résultats expérimentaux
II.1. Titration potentiomètrique acide/base
II.1.1. Détermination du PCN
Nous avons suivi l’évolution du pH en fonction de la quantité d’acide (HCl) et de base
(NaOH) ajoutée pour les suspensions d’argiles C3 et C4 et pour les surnageants
correspondants. Les courbes obtenues sont représentées sur les figures III.3 et III.4.
Les résultats montrent que le point de charge nulle pour les deux suspensions d’argiles
C3 et C4 est de 9,2 et 8,8 respectivement. On remarque également que :
-
du côté basique : les deux courbes ont pratiquement la même allure,
-
du côté acide : la courbe de la suspension d’argile C4 est plus acide que celle de
l’argile C3. Nous avons noté également que le pH de la suspension C3 reste
pratiquement invariable avec l’ajout de l’acide (H+). Ceci est dû à l’adsorption des
protons introduits d’une part par la surface de l’argile, elle même dépendante de la
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Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
morphologie des particules et d’autre part par la silice présente en fort pourcentage
(32% massique) [12].
Calcul de la quantité QH et de la densité de charge nette de surface σH
La quantité QH et la densité de charge nette de surface (σH) ont été étudiées en
fonction du pH pour les deux suspensions d’argiles C3 et C4 (fig. III.5). Les calculs ont été
effectués en se rapportant aux équations définies précédemment (5) et (6).
Les résultats (fig. III.5) obtenus montrent que les charges développées sur la surface
des particules argileuses dépendent du pH. En effet, ces charges de surface sont positives,
pour des pH inférieures aux points de charge nulle (PCN) respectifs des deux argiles C3 et
C4. Pour des pH supérieures à ces PCN, les charges de surfaces sont négatives.
On remarque également qu’en deçà de pH=7 et au delà de pH=9,5, les charges
évoluent fortement, ce qui signifie un échange important entre la surface et le liquide. Dans ce
cas, on peut supposer un phénomène de lixiviation des surfaces, qui entraîne un contrôle
difficile des suspensions concentrées aux valeurs faibles et élevées du pH. Ce phénomène est
plus sensible pour l’argile C3 aux pH<7.
II.1.2. Effet des ions indifférents (NaCl)
Pour évaluer l’effet de la présence et de la teneur en ions indifférents (NaCl), nous
avons préparé des suspensions d’argile (C3 et C4) dans des solutions de NaCl à différentes
concentrations (0,001 M, 0,01 M et 0,1 M). Les figures III.6 et III.7 représentent les courbes
de titration de ces suspensions.
Les résultats obtenus montrent que la présence d’un faible taux en NaCl (0,001 M)
modifie sensiblement les courbes de titration des deux suspensions. On note une diminution
du pH du côté acide et une augmentation du côté basique : les protons H+ et les hydroxyles
OH- ajoutés sont quantitativement moins adsorbés. Nous pouvons en déduire que
l’introduction des ions Na+ et Cl- dans la suspension entraîne une diminution de la charge de
surface par adsorption de ces ions sur les sites actifs de type SOH, SOH2+ et SO-. Notons
également que le PCN ne change pas avec la teneur en NaCl (tableau III.1), ce qui montre
que l’adsorption de ces ions est de nature purement électrostatique [13,14]. On remarque
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Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
également que l’augmentation de la concentration en NaCl dans les deux suspensions a peu
d’effet sur le pH de la suspension et donc sur la densité de charge.
Concentration en NaCl (mol.l-1)
0
0,001
0,01
0,1
Argile C3
9,2
9,4
9,5
9,4
Argile C4
8,8
9,1
9,1
9,1
Tableau III.1 : Valeurs des PCN des deux argiles C3 et C4 à différentes concentration en
NaCl.
II.1.3. Effet des ions spécifiquement adsorbés (TppNa)
Pour étudier l’effet des ions spécifiquement adsorbés sur les courbes de titration
acide/base, nous avons préparé des suspensions d’argiles C3 et C4 à différents taux de
TppNa.
Les figures III.8 et III.9 représentent l’évolution du pH en fonction de l’ajout en
acide et en base pour différents taux de TppNa (0,00 ; 0,35 ;0,75 et 1,00 %) pour les deux
suspensions d’argiles C3 et C4.
On remarque, comme le cas précédent, une augmentation du pH du côté basique et
une diminution du pH du côté acide avec l’introduction du TppNa.
Du côté basique :
- le pH de l’argile C4 augmente avec l’introduction du TppNa et tend vers une valeur
limite (pH~11,9). On remarque également que quelque soit la concentration en TppNa
introduite, les courbes ont la même tendance. Nous pouvons en déduire que les charges
positives de bords sont neutralisées dès les premiers ajouts de TppNa. Ceci est confirmé par
la mesure des ions phosphates adsorbés sur les particules argileuses (Cf. Part. B. fig. I.19).
- pour l’argile C3, l’augmentation progressive du pH avec la concentration en TppNa,
montre que la neutralisation des charges positives commence à partir d’une teneur en TppNa
égale à 0,75% massique. Ceci confirme l’adsorption tardive des ions phosphates sur cette
argile.
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Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
Du côté acide :
- pour l’argile C3, le pH a tendance à se stabiliser avec l’introduction des protons H+.
Nous pouvons dire que ces protons s’adsorbent infiniment sur les sites SO- de l’argile et de la
silice. Ceci laisse présager que la majorité des surfaces de bords de cette argile est chargé
négativement (fig. III.10).
- pour l’argile C4, on remarque que le pH diminue avec l’ajout des ions H+, quelque
soit la concentration en TppNa. Nous pouvons en déduire que ces protons ne s’adsorbent pas
sur les sites SO-. Ces sites ont été déjà neutralisés par les cations Na+ présents dans la
suspension (fig. III.11.).
On remarque également que le PCN des deux argiles augmente avec le taux de TppNa
introduit (tableau III.2.). Ce résultat est prévisible étant donné que les ions phosphates sont
adsorbés spécifiquement sur les sites non chargés et sur les sites chargés positivement, ce qui
a pour effet une augmentation de la charge globale de la particule et donc une augmentation
du PCN (Cf. Part. A. Chap. I. §. III.3.).
% TppNa
0
0,35
0,75
1,00
Argile C3
9,2
9,3
9,4
9,5
Argile C4
8,8
9,0
9,1
9,2
Tableau III.2. :Valeurs des PCN des deux argiles C3 et C4 à différents pourcentages en
TppNa.
II.2. Mesures acoustophoromètriques
II.2.1. Mesure de la mobilité dynamique des grains des suspensions C3 et C4
La mobilité dynamique moyenne (µ0) des particules argileuses C3 et C4 a été
déterminée par des mesures acoustophoromètriques. Nous avons ainsi suivi l’évolution du
signal acoustique ESA en fonction du pH du milieu. Ce signal est convertit en mobilité
dynamique suivant l’équation (5). La figure III.12. représente les résultats obtenus pour les
deux suspensions d’argile C3 et C4.
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Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
Les résultats montrent que les valeurs de la mobilité dynamique moyenne µ0 des
particules argileuses, en valeur absolue, augmentent avec le pH de la suspension. Nous avons
également remarqué que la charge de surface reste négative dans le domaine de pH étudié
(pH = 2-11). On peut dire que les charges de faces (négatives et indépendantes du pH)
l’emportent devant les charges de bords [15,16]. Néanmoins, on observe un palier aux valeurs
intermédiaires de pH qui correspond à la partie centrale des courbes de titration (fig. III.6 et
III.7), c’est à dire au voisinage du point de charge nulle global de C3 et C4. En utilisant un
formalisme équivalent à celui proposé pour la montmorillonite [15], on peut évaluer la
mobilité correspondante au comportement des bords des feuillets :
µ bord = 1/3 (µSiO 2 + 2 µ Al2O3 )
(10)
avec µSiO 2 et µ Al2O3 les mobilités de particules de SiO2 et de Al2O3. On trouve une
valeur de pH voisine de 7, correspondante au début du palier de la courbe de l’argile C3.
Cette argile est riche en phase mica, ce qui justifie ce type d’interprétation.
Dans le cas de C4, la teneur élevée en kaolinite oblige à changer le mode d’évaluation:
µ bord = 1/2 (µSiO 2 + µ Al2O3 )
(11)
La valeur du PCN est alors évaluée à environ pH=5,5, ce qui correspond au début du
palier observé sur la courbe de l’argile C4. Dans les deux cas, la fin du palier correspond aux
valeurs de PCN déterminées sur les courbes de titration (fig. III.12). Il semble donc que cette
partie intermédiaire des courbes correspond aux valeurs de pH pour lesquelles il y’ a
compensation entre les phénomènes liés aux faces et à ceux liés aux bord des feuillets.
Les courbes de la figure III.13 montrent également que la mobilité dynamique µ0
pour l’argile C4 est plus élevée que celle de l’argile C3 en raison de la présence de la
kaolinite en grande quantité (26%pour C4 et 3% pour C3). En effet, des mesures du potentiel
zêta de suspensions d’argiles de type montmorillonite [15], illite et kaolinite [16,17] ont
montré que, plus l’argile est riche en kaolinite, plus elle est chargée négativement.
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Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
II.2.2. Effet des ions spécifiquement adsorbés (TppNa)
Nous avons suivi l’évolution de la mobilité dynamique (µ0) en fonction du TppNa
pour différents taux de TppNa pour les suspensions d’argiles C3 et C4 (fig. III.14).
Pour l’argile C3, on remarque que la charge négative globale des particules augmente
en valeur absolue avec l’introduction de TppNa. Ceci est dû à l’adsorption des ions
phosphates sur les surfaces de bords, ce qui se traduit par un inversement de la charge
positive de surface. L’augmentation de la charge est due également à l’élimination par
complexation ou précipitation, des cations floculants (Ca2+, Mg2+,..). Ces cations proviennent
essentiellement de la dissolution lente des argiles (Cf. Part. B. fig. I.20-a), ce qui entraîne
une libération des sites chargés négativement.
Pour l’argile C4, on remarque que la mobilité dynamique des grains en suspension
passe par un maximum (en valeur absolue) à 0,75 % en TppNa. Cette tendance a été
également observée sur la courbe de titration (côté acide) (fig. III.9). Ceci résulte
probablement d’un effet d’encombrement stérique au niveau des sites ≡ SOH +2 de la surface
de l’argile : à partir d’un certains taux en TppNa (0,75% massique), les ions phosphates
n’arrivent plus à neutraliser les charges positives.
III. Conclusion
La caractérisation des charges de surface de bord des deux argiles C3 et C4 a été
réalisée par la méthode de titration potentiométrique acide–base. Cette méthode nous a permis
de déterminer les PCN de ces deux argiles (9,2 pour C3 et 8,8 pour C4). L’étude de l’effet de
certains paramètres tels que les ions indifférents (NaCl) et les ions spécifiquement adsorbés
(TppNa) nous a conduit aux conclusions suivantes :
3 le PCN ne varie pratiquement pas avec la concentration en NaCl introduit, alors
qu’il a tendance à augmenter avec la concentration en TppNa,
3 les ions phosphates s’adsorbent progressivement sur les surfaces de bord de l’argile
C3, tandis que pour l’argile C4, l’adsorption se fait dès les premiers ajouts de TppNa. Ceci est
confirmé par le dosage des ions phosphates adsorbés par l’argile.
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Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
La caractérisation des charges de surface globales des deux argiles a été effectuée par
la mesure de la mobilité dynamique des grains en suspension. L’analyse des résultats obtenus
nous a permis de conclure que :
3 la charge de surface pour les deux argiles est négative dans le domaine de pH étudié
(2-12). Nous pouvons en conclure que les charges de faces (négatives et indépendantes du
pH) l’emportent sur les charges de bords. Ceci est dû à la présence de la silice dans les deux
argiles C3 et C4 (32% pour C3 et 18% pour C4). En plus, la présence de la kaolinite (absence
de PCN) en fort pourcentage dans l’argile C4 (26% massique) rend la charge plus négative
que dans l’argile C3 (3% massique).
3 l’ajout du TppNa à la suspension augmente en valeur absolue la charge de surface
pour l’argile C3 ; tandis que pour l’argile C4, la charge passe par un optimum vers 0,75% en
TppNa.
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Chapitre III : Mesure de charges de surfaces
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