PREFACE
Par Jean François Roubaud
A chaque instant de son engagement, le chef d’entreprise doit anticiper, décider, agir,
transformer, créer, innover, produire, résister, durer...autant d’actions susceptibles de le placer
face à un choix « éthique ».
Pour autant, peut-on légitimement invoquer l’éthique quand il s’agit de l’entreprise qui
participe à une logique de marché provoquant la lutte d’intérêts ?
La réponse est positive et ce pour deux raisons : d’une part parce qu’il est ici question de
l’entreprise patrimoniale et donc du patronat réel, incarnation personnifiée de l’entreprise qui
le distingue du patronat de gestion ; et que d’autre part, précisément l’éthique concerne
l’individu dans sa relation à lui-même et à son environnement (économique, sociétal, humain,
citoyen,...).
Pris entre l’action et la règle, le chef d’entreprise patrimoniale doit ainsi faire preuve de
discernement pour trouver la voie de l’action individuelle par rapport à lui-même et au monde
environnant.
Et peut-on dire, c’est en présence d’un excès d’impératifs antagonistes et, presque
paradoxalement en l’absence de règles, que le véritable choix éthique se pose à lui.
L’action juste consiste alors à entreprendre volontairement avec la conscience certaine de
décider et d’agir dans le respect de cette apparente dualité, en toute connaissance de cause, en
homme responsable.
La mobilisation de sa conscience individuelle dans le respect de la solidarité collective est un
exercice qui exige préalablement d’être son propre juge et par conséquent, de s’interroger, de
rechercher son intention profonde. Or, exercer son propre regard sur soi, en soi, nécessite de
se libérer soi-même, de ses comportements, peurs, instincts, stress, émotions, regard
d’autrui,...
L’éthique procède ainsi du rassemblement de la connaissance et de l’auto-examen, dans un
monde d’incertitude et de risques où le « comment prévoir ? » est récurrent. Cette démarche
est aussi celle qui facilite le repérage de la chose nouvelle, l’analyse de celle-ci, la réponse à
lui apporter et pourquoi pas « l’ouverture vers de nouveaux horizons ».
« Interroger sa conscience individuelle dans le souci de la solidarité collective » ; « Replacer
sa décision et son action dans une démarche personnelle mais universelle » : voici résumée
en deux formules lapidaires, la réalité de l’éthique du chef d’entreprise patrimoniale, gage de
sa performance, de son utilité et de sa pérennité.