Mai 2017 Se pourrait-il que nous souffrions d`une vision biaisée des

Réservé aux investisseurs professionnels
Mai 2017
Se pourrait-il que nous souffrions d’une vision biaisée des marchés émergents, mais aussi de
nos marchés domestiques ? La question semble légitime lorsque l’on écoute les propos de
l’économiste Sony Kapoor, qui a notamment conseillé des gouvernements, des banques
centrales ou encore des fonds souverains. Son portait en miroir des pays émergents et de ceux
de l’OCDE révèle un monde déroutant pour les investisseurs. Les habitudes et les réflexes
hérités du passé ne sont plus en mesure d’apporter du rendement, ou du moins un rendement
stable sur le long terme. Or c’est bel et bien cette stabilité que recherchent aujourd’hui les
investisseurs.
Face à ces évolutions profondes et durables, la diversification s’impose, tant dans une logique
de performance que dans une perspective de maîtrise des risques, démontrent Don Amstad,
Director, Business Development Asia, Christian Howells, Head of Investment Specialists,
Aberdeen Solutions et Gert-Jan Kapiteyn, Fund Manager, European Property, réunis à
l’occasion du roadshow Income d’Aberdeen le lundi 24 avril 2017.
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Une nouvelle réalité économique
« L’OCDE devra désormais se contenter d’une croissance annuelle de 1,5 % », annonce d’emblée
Sony Kapoor. Outre la crise, cela résulte de changements majeurs dans la structure de nos
sociétés et de nos économies. La longue période de croissance dont l’Occident a profité ces
dernières décennies était avant tout portée par la croissance démographique et les gains de
productivité. Mais nous avons déjà tiré l’essentiel en matière de productivité. Quant à la
démographie, elle est en recul dans plusieurs pays de l’OCDE et coûte entre 0,5 % et 1,5 % à
leur croissance.
Une raréfaction des actifs performants
Dans ce contexte de faible croissance, les capitaux sont en compétition, dans une course aux
actifs attrayants. Côté taux, les perspectives ne sont guère réjouissantes : « La BCE pourrait
certes remonter ses taux, mais les taux d’intérêt plafonneraient entre 1 % et 2 % dans la plupart
des pays européens, prévient Sony Kapoor. Symbole de cet environnement difficile, le fonds
souverain norvégien est investi à 25 % sur des obligations offrant un rendement négatif. »
Faut-il alors se tourner vers les actions ? « En Occident, elles affichent des niveaux records, leur
potentiel de hausse, en dehors de certaines niches, est donc limité », tempère l’économiste.
Ce n’est cependant pas un monde exempt de croissance que décrit Sony Kapoor.
« Démographie dynamique, population en âge de travailler en hausse, gains de productivité
grâce au rattrapage technologique : autant de forces à l’œuvre dans les pays émergents. » L’Inde,
à elle seule, comptera bientôt 20 % de la population mondiale en âge de travailler et affiche
un taux de natalité de 2,5 enfants par femme.
Repenser le risque
Du point de vue de l’investisseur, ce glissement géographique peut sembler lourd de
conséquences ; l’investissement émergent est traditionnellement considéré comme plus risqué.
Une vision obsolète, de l’avis des intervenants de ce débat.
« Il est temps de repenser le risque. Le risque relatif est plus élevé dans l’OCDE que dans les pays
émergents », assène Sony Kapoor. La politique et l’économie en Occident figurent au premier
rang des inquiétudes des marchés financiers : élections, Brexit, décisions des Banques
centrales… Quant aux monnaies, euro, dollar et franc suisse ont tous fait preuve de volatilité,
tandis que celles de certains émergents affichent une stabilité remarquable.
La capacité de l’OCDE à encaisser de nouveaux chocs économiques est également pointée du
doigt par les intervenants. Les pays ne disposent que d’une faible marge de manœuvre pour
jouer sur leur monnaie, le seuil des taux ou encore les niveaux d’imposition. « La politique
économique des émergents est orthodoxe, ce que n’est plus celle de l’Ouest, souligne Don
Amstad. L’Occident évolue dans un univers de taux très bas, et supporte un risque de bulle sur les
actifs les plus sécurisés, tels que les OAT long terme. »
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Contrairement à nous, les émergents n’ont pas réagi aux difficultés en coupant drastiquement
leurs taux. Ils sortent donc de la crise avec des fondamentaux économiques assainis,
notamment les producteurs de matières premières.
La clé d’un rendement stable
Il sera désormais nécessaire de sortir, en partie du moins, de ses marchés naturels et
domestiques, pour trouver du rendement, mais aussi une certaine sécurité.
Il faudra également apprendre à diversifier ses actifs, ajoute Christian Howells, qui vise pour les
investisseurs un revenu stable, quels que soient les aléas économiques mondiaux.
« Oubliez les positions qui considèrent que la diversification consiste à faire évoluer la part
d’obligataire et d’actions dans son portefeuille. Pas question non plus d’opérer comme les hedge
funds, qui se concentrent sur les produits dérivés et obéissent à une stratégie de rendement
absolu. Nous visons une véritable diversification, face à un univers d’investissement traditionnel
qui s’est considérablement réduit. »
Une diversification géographique donc. « On trouve sur le marché obligataire des émergents des
rendements compris entre 5 % et 7 % », explique Don Amstad. Mais aussi une diversification
sectorielle et des classes d’actifs. « Au travers de nos stratégies « income », nous recherchons
des actifs alternatifs, moins sensibles aux marchés traditionnels. Cela nous a, par exemple,
conduits à réduire notre exposition à l’investment grade et aux obligations souveraines, dont la
capacité de protection au sein d’un portefeuille s’est érodée », complète Christian Howells.
Désormais, la quête d’un revenu stable et attrayant passe par exemple par les infrastructures
liées aux énergies renouvelables, le leasing d’avions, les titres assurantiels ou les CAT bonds
Diversification et convictions
Autre produit clé de la diversification, l’immobilier « dont on oublie trop souvent qu’il constitue
la classe d’actifs la plus importante au monde et, surtout, qu’il permet d’engranger du rendement
même dans un environnement de croissance modérée », annonce Gert-Jan Kapiteyn.
Ainsi, l’immobilier européen recèle de nombreuses opportunités, dès lors que l’on prend la
peine d’examiner le marché à une échelle locale, ville par ville, sur le terrain. « Actuellement,
nous nous intéressons à certaines villes néerlandaises et scandinaves », précise le gérant, qui
ajoute privilégier aussi des tendances. Il a récemment investi dans l’immobilier logistique, et
dans des supermarchés au Portugal.
Si la gestion des biens est la source principale de rendement, une attention particulière est
également portée au gain en capital.
Les opportunités de diversification sont donc nombreuses, ce qui ne signifie pas pour autant
précipitation et brusques changements de positions. « Nous faisons évoluer notre allocation
progressivement, explique Christian Howells. Nous testons d’abord des scenarii de crise très
divers. Car il faut garder en mémoire que les crises futures ne ressembleront pas à ce que nous
avons connu jusqu’ici. Notre objectif est d’apporter un rendement stable, sur le long terme, et
implique une bonne identification et gestion du risque. »
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