liens protestants JOURNAL DES PAROISSES DE L''ÉGLISE PROTESTANTE UNIE : N ° 261 - JANVIER 2017 MÉTROPOLE-NORD ~ BASSIN-MINIER ~ LITTORAL ~ ARTOIS ~ HAINAUT ~ AVESNOIS 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 12345678901234567890123456789012123456789012345678901234567890121234567890123456789012345678901212345 Le pape François réformateur de son Église ? 1 D O S S I E R LE PAPE FRANÇOIS RÉFORMATEUR DE SON ÉGLISE ? LE PAPE FRANÇOIS : UN REFORMATEUR ? En 2013, le pape François accède au siège de saint Pierre. Mais sa manière d'assumer, d'habiter le ministère pontifical tranche avec celle de ses prédécesseurs. Par des touches successives et hautement symboliques, il se construit l'image d'un homme simple, humble et recherchant la réconciliation. Il révolutionne la fonction pontificale mais pas forcément l'Église… Après sa première messe dominicale, le pape François s'adonne à un bain de foule, sans doute pas totalement improvisé mais inédit. Alors qu'elle scande son nom et crie Viva il papa !, François prend le temps de saluer et de discuter avec les fidèles. Tout cela, bien entendu, sous l'œil avisé des caméras. Car, comme le pense Franck Bergeron, pasteur de l'Église protestante unie, le pape est un communiquant, pas un réformateur. L'Église catholique a changé de stratégie pour atteindre les foules : à l'inverse du passé, le pape arrondit les angles, fait de la "com", tandis que les évêques font la loi. Quoi qu'il en soit, les chaînes de télévision et les radios propagent aussitôt l'image d'un pape brisant les barrières, les frontières qui le séparent de l'ensemble du peuple. Un pape accessible, simple, humain. Des gestes symboliques Le pape François a posé de multiples gestes confortant cette symbolique de l'accessibilité. D'abord, il renonce aux mules papales, de la couleur du pouvoir : rouges. Il préfère porter des chaussures noires, une couleur des plus traditionnelles, commune à la plupart des hommes de la planète. Ensuite, le véhicule auquel il recourt lors de ses déplacements est très souvent celui de la marque du pays. Ainsi, il s'affiche dans une Fiat 500L aux États-Unis (une marque italo-américaine) et dans une Ibuzu aux Philippines… La papamobile devient la voiture de monsieur tout le monde ! Enfin, le pape François n'habite pas le palais pontifical mais la maison Sainte-Marthe. Même si les appartements de cet hôtel n'ont rien de la rugosité d'une auberge de jeunesse, ils n'ont pas non plus le faste du palais pontifical ! Des paroles fortes… Mais ce pape n'en reste pas aux gestes symboliques ! Il sait prononcer des paroles fortes. Ainsi, en pleine crise migratoire, il dit aux catholiques : Chers frères et sœurs migrants et réfugiés ! À la racine de l'Évangile de la miséricorde, la rencontre et l'accueil de l'autre se relient à la rencontre et à l'accueil de Dieu : accueillir l'autre, c'est accueillir Dieu en personne ! Une parole forte, courageuse et fraternelle qui, malheureusement, n'a pas eu d'effet. François Clavairoly, président de la Fédération protestante de France, analyse cela ainsi : Un qui parle pour tous fait croire qu'un peut tout faire mais c'est un pieux 2 mensonge. L'appel à la responsabilité individuelle, telle que la conçoit le protestantisme, à l ' e n g a g e m e n t communautaire, cet appel s'en trouve conforté et renforcé. …et œcuméniques Ensuite, après sa publication d'Amoris Laetitia, (La joie de l'Amour), et l'établissement par les évêques argentins d'un certain nombre de critères pour l'accueil des divorcés-remariés à la table eucharistique, le pape a dit : Leur projet exprime pleinement le sens du chapitre 8 d'Amoris Laetitia. Et d'ajouter : Il n'y a pas d'autres interprétations ! Comme le souligne Jane Stranz, responsable du service des relations œcuméniques au sein de la Fédération protestante de France, le pape aurait pu passer sous silence ce projet argentin mais en le louant il valorise la démarche. Il montre la voie vers laquelle les autres conférences épiscopales doivent aller. Dans un autre domaine, celui de l'unité de l'Église, l'actuel pape prononce des paroles hautement significatives. Au patriarche Cyrille de Russie, par exemple, il dit : Nous voici enfin frères ! Et, lors de sa visite à Turin, il n'hésite pas à demander humblement pardon aux protestants vaudois. Comme le fait remarquer François Clavairoly, c'est sans doute ce qui change aujourd'hui : L'Église catholique romaine est aujourd'hui en dialogue avec tous les partenaires. Elle a conscience qu'elle ne peut pas être seule : elle est une parmi d'autres. Elle a probablement un rôle particulier à jouer mais avec d'autres. C'est la conséquence de la conscience de la mondialisation. Des écrits qui marquent et… Peu de commentateurs ont relevé, comme le souligne Jane Stranz, que dans la première exhortation papale, Evangelii Gaudium, (La joie de l'Évangile), le mot réforme et le verbe réformer reviennent sans cesse. C'est le signe que François veut changer, pousser l'Église vers quelque chose de nouveau. C'est le symbole de sa volonté de faire redécouvrir à l'Église catholique romaine sa mission initiale, évangélique. De même, sous l'impulsion du pape François, l'Église catholique se dote d'un écrit sur la sauvegarde de la création, Laudate si, (Sois loué) [Seigneur], remarqué et encensé dans l'Église et endehors de celle-ci. Enfin, dans Misericordiae vultus, (Le visage de la miséricorde), le pape François semble porter un autre regard sur les indulgences. Xavier Gué, dans un article récent, souligne qu'il n'est plus question de " gagner " ou "d'obtenir " des indulgences, que la distinction entre plénières et partielles a été abandonnée, que le " trésor des mérites " n'est plus évoqué et que le pape n'emploie plus le pluriel mais le singulier. Dans son esprit, il s'agit d'être au bénéfice de la Miséricorde du Père. L'indulgence de Dieu libère l'homme et le fait entrer dans une dynamique de changement. Si cette " réforme " langagière du pape reste pour le moins ambivalente, elle rappelle certaines intuitions de Luther, fondatrices de la Réforme. … des écrits qui manquent ! Mais au-delà des gestes symboliques, des paroles fortes, des écrits exhortatifs, quelles réformes de l'Église le pape a-t-il initiées ? Les synodes sur la famille ? Ils ont accouché d'une souris. Comme le souligne Michel Barlow, théologien de l'Église protestante unie de France, les grands dossiers sont au point mort. Comme par le passé, on a l'impression que l'Église catholique est soucieuse de ne pas bouger. Comme dit un personnage du roman "Le guépard" : on doit donner l'impression que tout bouge pour que rien ne bouge ! L'accueil des divorcés-remariés, par exemple, est sur une voie de garage, tout comme la place des femmes dans l'Église, sans parler du ministère féminin et du célibat des prêtres. Comme beaucoup de protestants, François Clavairoly, attend des textes et non des paroles ou des images. Ou plus exactement : l'Église catholique est en droit d'attendre des textes et pas seulement du son ou de l'image. Jean Paul II avait tenté d'ouvrir une brèche sur la compréhension du ministère de communion et cela n'a pas été suivi d'effet. Il en va de même pour l'accord de 1999 sur la justification. Le champ des accords œcuméniques est en jachère depuis quinze ans. La véritable réforme, comme le pense Michel Barlow, serait de revenir à Vatican II et d'appliquer les mesures du Concile. Autrement dit : la réforme de l'Église catholique n'est incarnée qu'en apparence par le pape François. Elle aurait pu déjà advenir mais reste pleinement à venir… Christophe Jacon, pasteur Journal "Ensemble" Jorge Mario Bergoglio en visite dans le bidonville Buenos Aires QUELQUES REPÈRES 1936 : Naissance le 17 décembre de Jorge Mario à Buenos Aires. 1936 : Jorge Mario est baptisé le 25 décembre dans une basilique du quartier d'Almagro à Buenos Aires. 1953 : Il fait l'expérience de " la miséricorde divine " et se sent appelé par Dieu à entrer dans les ordres. 1957 : Il décide de devenir prêtre. 1958 : Il entre au séminaire puis au noviciat de la Compagnie de Jésus. 1958-62 : Il poursuit sa formation au Chili. 1963 : Il revient en Argentine pour des études de philosophie. 1967-69 : Après diverses expériences, dont une dans l'enseignement, il étudie la théologie. 1969 : Il est ordonné prêtre. Il poursuit ses études en théologie et philosophie. 1972 : Il est nommé maître des novices du Colegio Máximo San José, institution jésuite. 1973 : Le 31 juillet, âgé d'à peine trente-six ans, il est nommé Provincial des jésuites du pays. 1980 : À la fin de sa charge de Provincial, il est nommé recteur de la faculté de théologie et de philosophie de San Miguel (l'ancien Colegio Maximo). 1986 : Après un séjour en Allemagne pour terminer sa thèse, il est nommé prêtre dans un quartier pauvre de l'Argentine. 1992 : Jean-Paul II le nomme évêque auxiliaire de Buenos Aires. Il quitte ainsi "l'exil" de Cordoba. 1997 : Il est nommé coadjuteur du même archidiocèse. 1998 : À la mort du cardinal, il devient archevêque de Buenos Aires. 2001 : Il est nommé cardinal. 2005 : Il est l'un des concurrents de Joseph Ratzinger lors du conclave. 2013 : Il est élu pape. Christophe Jacon, pasteur Journal "Ensemble" 3 DES PAROLES FORTES Le discours du pape François, lors de la présentation des vœux de Noël à la Curie romaine, lundi 22 décembre 2014 au Vatican, a suscité un écho considérable. Cela tient à la liste des quinze " maladies " pouvant affecter les collaborateurs du SaintSiège dont le pape François a fait une liste détaillée et argumentée, qu'il égrène très simplement et courageusement. Ces quinze maladies et tentations qui affaiblissent le service de l'Évangile n'étant pas la spécificité de la Curie romaine, la méditation de cette dénonciation peut nourrir la réflexion de toute l'Église. 1. La maladie de celui qui se sent immortel, immunisé ou tout à fait indispensable et néglige les contrôles nécessaires et habituels. Une Curie qui ne fait pas son autocritique, ne s'ajuste pas en permanence, ne cherche pas à s'améliorer, est un corps malade, infirme. […] C'est la maladie de l'homme riche et insensé de l'Évangile, qui pensait vivre éternellement (cf. Lc 12,13-21), et de tous ceux qui se transforment en maîtres et se sentent supérieurs à tous, et non au service de tous. [… ] L'antidote à cette épidémie est la grâce de se sentir pécheurs et de savoir dire de tout cœur : nous sommes de simples serviteurs : nous n'avons fait que notre devoir (Lc 17, 10). 2. Autre maladie : le marthalisme (qui vient de Marthe) qui concerne ceux qui se noient dans le travail et négligent inévitablement la meilleure part : s'asseoir aux pieds de Jésus (cf. Lc 10,38-42). C'est pourquoi Jésus a demandé à ses disciples de se reposer un peu (cf. Mc 6,31), car négliger le repos nécessaire conduit au stress et à l'agitation. […] Il faut retenir ce qu'enseigne Qohéleth : Il y a un moment pour tout (Qo 3,1-15). 3. Il y a aussi la maladie de la pétrification mentale et spirituelle. Ceux qui en sont atteints possèdent un cœur de pierre et une nuque raide (Ac 7,51-60). Ce sont ceux qui, chemin faisant, perdent leur sérénité intérieure, la vivacité et l'audace, et se cachent derrière leurs dossiers, devenant les rois du formulaire et non des hommes de Dieu (cf. He, 3,12). Il est dangereux de perdre cette sensibilité humaine qui permet de pleurer avec ceux qui pleurent et de se réjouir avec ceux qui 4 se réjouissent ! […] Être chrétien, en fait, signifie avoir les dispositions qui sont dans le Christ Jésus (cf. Ph 2, 5), dispositions à l'humilité et au don, au détachement et à la générosité. 4. La maladie de la planification excessive et du fonctionnarisme est celle de l'apôtre qui planifie tout minutieusement et croit que planifier à la perfection fait réellement avancer les choses. Il se transforme pratiquement en expert-comptable ou en fiscaliste. Tout bien préparer est nécessaire mais il ne faut jamais succomber à la tentation de vouloir enfermer ou piloter la liberté de l'Esprit Saint, qui demeure toujours plus grande, plus généreuse que toute planification humaine (cf. Jn 3,8). […] Domestiquer l'Esprit Saint ! Il est fraîcheur, imagination, nouveauté. 5. La maladie de la mauvaise coordination, advient quand il n'existe plus de communion entre les membres et que le corps est privé de son fonctionnement harmonieux et de sa tempérance en devenant un orchestre qui produit seulement du chahut, parce que ses membres ne collaborent pas et ne vivent pas l'esprit de communion et d'équipe. Lorsque le pied dit au bras : je n'ai pas besoin de toi ou la main à la tête : c'est moi qui commande, provoquant ainsi malaise et scandale. 6. Il y a aussi la maladie d' "Alzheimer spirituelle", c'est-à-dire l'oubli de l'histoire du salut, de l'histoire personnelle avec le Seigneur, du premier amour (Ap 2,4). Il s'agit d'un déclin progressif des facultés spirituelles qui, à plus ou moins long terme, provoque de graves handicaps chez la personne, la rendant incapable d'exercer une activité autonome. Celle-ci vit dans un état de dépendance absolue vis-à-vis de ses vues souvent imaginaires. Nous détectons cette maladie chez ceux qui ont perdu la mémoire de leur rencontre avec le Seigneur ; […] 7. La maladie de la rivalité et de la vanité apparaît quand l'apparence, les couleurs des vêtements, les signes honorifiques deviennent le premier objectif de la vie, et que l'on oublie les paroles de saint Paul : Ne soyez jamais intrigants ni vaniteux, mais ayez assez d'humilité pour estimer les autres supérieurs à vous-mêmes. Que chacun de vous ne soit pas préoccupé de ses propres intérêts ; pensez aussi à ceux des autres (Ph 2,3-4). […] (Ph 3, 18-19). 8. La maladie de la schizophrénie existentielle est la maladie de ceux qui ont une double vie, fruit de l'hypocrisie typique du médiocre et du vide spirituel progressif que les diplômes et les titres académiques ne peuvent combler. Une maladie qui frappe souvent ceux qui, abandonnant le service pastoral, se limitent aux tâches bureaucratiques et perdent ainsi le contact avec la réalité, avec les personnes concrètes. Ils créent ainsi un monde parallèle, à eux, où ils mettent de côté tout ce qu'ils enseignent sévèrement aux autres et où ils commencent à vivre une vie cachée et souvent dissolue. La conversion est assez urgente et indispensable pour lutter contre cette maladie extrêmement grave (cf. Lc 15,11-32).