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Comment ne pas évoquer cette dégradante cérémonie de la clairière de
Rethondes dans l’Oise, où Hitler parada devant de grands drapeaux ornés de
sinistres croix gammées, avant de recevoir, dans le célèbre wagon, le général
français chargé de signer l’acte d’armistice ?
François Mauriac écrira : « La France se retrouve au bord d’un abîme
d’humiliations ».
La France est effondrée. La France est asservie. Mais la France n’a pas dit son
dernier mot. Malgré leur faible écho immédiat, les paroles prophétiques,
comme le dira André Malraux, mais aussi pleines d’espérance prononcées par
ce général, inconnu de l’immense majorité des Français, sont les premiers pas
de notre pays vers la reconquête de sa dignité et de sa liberté.
Dans l’appel qu’il lance d’un petit studio de la BBC, de Gaulle fait montre
d’une lucidité historique qui tranche avec l’aveuglement du régime de Vichy. Il
prend la mesure de la guerre. Il pèse le rôle des puissances dans ce conflit qui
va devenir un conflit mondial. Tandis que le régime qui se prétend la « vraie »
France n’en finit pas de se soumettre à l’envahisseur, de Gaulle se tourne vers
l’Angleterre et son Empire, vers l’immense industrie des Etats Unis
d’Amérique, nos futurs alliés. Des alliés qui traitèrent longtemps avec
méfiance, voire parfois avec mépris, cet homme, éphémère Sous-secrétaire
d’Etat à la guerre dans le gouvernement de Paul Reynaud, et qui prétendait
parler au nom de la France.
Bien peu de Français entendent ce jour là le futur chef de la France libre
exhorter ses compatriotes à refuser la défaite et à poursuivre le combat contre
l’Allemagne nazie et conquérante : « Quoi qu’il arrive, la flamme de la
résistance française ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas. », proclame-t-il.
Quel courage, quel défi et quel message d’espoir de la part d’un simple général
de brigade, isolé, qui a rallié Londres sans hommes ni moyens ! Vichy va
bientôt le dégrader et le condamner à mort.
Les Français seront bien plus nombreux à prendre connaissance par la
suite de son fameux message écrit. Cet appel sera suivi d’autres, toujours à la
radio de Londres et tout au long de ce mois de juin 1940, où le Général de
Gaulle s’adressera tour à tour à l’armée française, au peuple de France et même
au Maréchal Pétain, dénonçant l’armistice comme un « asservissement ». Ils
seront tous imprégnés de la même conviction, de la même foi en l’avenir, de la
même certitude de la victoire.