Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 60 (2012) 69–76 Article original De l’usage rationnel à l’usage optimal des médicaments psychotropes auprès des enfants From rational use to optimal use of psychotropic drugs among children D. Lafortune ∗ , M.-P. Gagné , É. Blais École de criminologie, université de Montréal, CP 6128, succursale Centre Ville, Montréal, H3C 3J7 Canada Résumé La consommation croissante de médicaments psychotropes soulève diverses questions relatives aux taux de prévalence et aux caractéristiques des jeunes à qui l’on en prescrit. Les tendances récentes indiquent que des prescriptions et polyprescriptions sont faites pour des enfants de plus en plus jeunes et qu’elles sont souvent motivées par les symptômes, plus que par le diagnostic. Le prescripteur, comme tout praticien, est appelé à prendre des décisions dans un contexte d’incertitude et de rationalité limitée. Voilà pourquoi il faudrait s’intéresser aux pratiques de prescription à partir d’un modèle heuristique et systémique. Les premiers facteurs associés au recours à la médication peuvent être posés en termes de connaissances tirées des revues savantes, des rapports de recherche produits par l’industrie pharmaceutique et des recensions systématiques. Des éléments relevant de l’identité professionnelle peuvent intervenir également dans la décision de prescrire : les lignes directrices émanant d’associations médicales, les champs et les actes réservés, ainsi que la notion de « responsabilité ». Finalement, une intervention peut répondre aux contingences plus locales du milieu de pratique ou de la relation thérapeutique. Voilà pourquoi, depuis quelques années, lorsque vient le temps de s’intéresser à des milieux de pratique complexes, le paradigme de l’usage optimal semble plus pertinent que celui de l’usage rationnel. © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Médicaments psychotropes ; Enfants ; Pratiques de prescription ; Connaissances scientifiques lignes directrices ; Déterminants sociaux Abstract The increasing use of psychotropic drugs raises various issues related to prevalence and characteristics of youth for whom medication is prescribed. Recent trends indicate that psychotropic medication and polypharmacy users are younger and that prescribing practices are often motivated by symptoms rather than diagnosis. The prescriber, as any practitioner, is called upon to make decisions in a context of uncertainty and limited rationality. That is why prescribing practices should be studied from a heuristic and systemic standpoint. First factors associated with the use of medication can be discussed in terms of knowledge gained from scholarly journals, research reports produced by the pharmaceutical industry and systematic reviews. The guidelines from medical associations, fields and reserved acts that define the medical identity and the notion of “responsibility” are elements which may also intervene in the decision to prescribe. Finally, an intervention can meet the contingencies of more local practice environments or the therapeutic relationship. That is why, in recent years, when it comes time to pay attention to prescribing practices in complex practice environments, the paradigm of optimal use may be relevant. © 2011 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Psychotropic drugs; Children; Prescribing practices; Professional guidelines; Social determinants Depuis 40 ans, l’essor de la génétique, l’émergence des neurosciences et la parution des DSM III et IV ont profondément modifié les pratiques en santé mentale [1]. Tel que le men- ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (D. Lafortune). 0222-9617/$ – see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.neurenf.2011.05.002 tionne le Blueprint for Change du National Institute of Mental Health [2] : « le DSM a délimité le domaine de la classification psychiatrique et, par conséquent, contrôlé le discours sur la maladie mentale, structuré les axes de recherche et établi les paramètres de connaissance » (p. 19). Moncrieff et Crawford [3], qui voient dans ces transformations un changement de paradigme, rappellent que : « en Angleterre et en Amérique du 70 D. Lafortune et al. / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 60 (2012) 69–76 Nord, au cours des dernières décennies, les modèles sociaux et psychanalytiques de la maladie mentale, prédominants au milieu du siècle, ont été remplacés par une orientation de plus en plus biologique » (p. 349). En cette ère neuroscientifique, la consommation croissante de médicaments psychotropes et l’élargissement du registre de leur utilisation soulèvent nombre de questions par rapport aux taux de prévalence, aux caractéristiques des jeunes à qui l’on prescrit, aux nouvelles tendances en matière de pharmacoprescription et aux facteurs qui sont associés à cet acte. Pour traiter de ces questions, nous avons entrepris de faire une recension des écrits publiés au cours des dernières 30 années. Les bases de données bibliographiques informatisées suivantes ont été consultées : Medline, PsychInfo, EMBASE, ERIC et Current Content. La stratégie de recherche était fondée sur les mots-clés suivants : ((Mental* or psychiatric) and (ill* or disorder* or health)) AND (juvenile or children or adolescent) AND (medication or psychiatric medication or medical care or psychotropic) AND (Practices guidelines or patterns or parameters). Plus de 350 références pertinentes ont été identifiées et font actuellement l’objet d’une analyse approfondie (Lafortune et al. en préparation : Examen de l’étendue des connaissances sur l’usage optimal des médicaments psychotropes dans les milieux de réadaptation pour jeunes en difficultés). Les lignes qui suivent présentent un aperçu de cette recension. 1. La prévalence des pharmacoprescriptions Selon Bailly [4], chez les jeunes issus de la population générale, les taux de prescriptions pour l’ensemble des médicaments psychotropes varient de 0,5 à 4 % selon les pays étudiés. De manière plus spécifique, les psychostimulants sont prescrits à 2,9 % des jeunes américains, tandis qu’entre 0,4 et 1 % des jeunes européens en reçoivent (France, Grande-Bretagne, Allemagne, Hollande). Le taux de prescription d’antidépresseurs s’élève à 1,8 % chez les enfants américains âgés de moins de 13 ans, tandis qu’il est de 0,4 % dans les pays européens. Le taux de prescription des antipsychotiques atypiques est de 3,8 % aux États-Unis, comparativement à 0,2 % en Europe. Quelle que soit la classe de médicaments, les taux de prévalence nordaméricains dépassent ceux observés en Europe [5]. Auprès des enfants et des adolescents, les taux d’utilisation de ces molécules aux États-Unis ont pratiquement rejoint ceux évalués auprès des adultes [6]. Par ailleurs, les enquêtes épidémiologiques de Julia Zito ont révélé d’importantes variations régionales dans les pratiques américaines, ce qui constitue une donnée intéressante pour qui cherche à analyser les facteurs sociaux associés à la pharmacoprescription. Ainsi, aux États-Unis, les taux de prescription de médicaments psychotropes fluctuent beaucoup d’un État à l’autre, pouvant passer du simple au triple [7]. Au Québec, il en est de même pour les prescriptions de psychostimulants qui, en 1999, touchaient de 1,3 % à 3,4 % des jeunes selon les régions. De telles variations régionales dans les taux de prescription de méthylphénidate ont également été observées en Ontario et au Manitoba [8]. 2. Portrait des jeunes utilisateurs De manière générale, en Amérique du Nord, la première indication de psychopharmacothérapie chez les enfants et les adolescents est un diagnostic de comportement perturbateur (c.-à-d. trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité [TDAH], trouble oppositionnel ou trouble des conduites) [9]. Les jeunes médicamentés comptent plus de garçons (70 %) et sont en moyenne plus vieux que les enfants non médicamentés. Dans la population normale, les classes de médicaments psychotropes les plus prescrites sont : les psychostimulants et les antidépresseurs. La prévalence des prescriptions de médicaments psychotropes est en progression très marquée chez les jeunes pris en charge par l’État et placés dans les centres éducatifs ou « de réadaptation »1 [5]. En effet, les recherches épidémiologiques portant sur la pharmacothérapie en centres éducatifs rapportent des taux de prescription variant de 13 à 77 %. Les médicaments psychotropes les plus fréquemment prescrits pour ces jeunes sont les psychostimulants, les antipsychotiques atypiques et les antidépresseurs [10]. Il est à noter que l’accroissement des prescriptions de rispéridone est marqué dans les milieux institutionnels [11]. Par exemple, au Québec, 36,6 % des jeunes de six à 18 ans placés dans les centres de réadaptation de la banlieue montréalaise recevaient une médication psychotrope en 2001–2002 [12]. Les psychostimulants y étaient les médicaments les plus prescrits (37,8 % des ordonnances), suivis par la rispéridone (25,6 %) généralement donnée pour endiguer l’agressivité d’enfants non psychotiques. Par ailleurs, dans la plupart de ces échantillons, parmi les enfants faisant usage de médicaments psychotropes, près de la moitié reçoivent une polyprescription. Enfin, Zima et al. [13] suggèrent que le niveau de fonctionnement global des enfants faisant usage de médicaments est faible, tel qu’évalué au moment du diagnostic. Cela suggère des perturbations majeures ou persistantes dans le fonctionnement familial, social et scolaire de l’enfant. 3. Nouvelles tendances Trois nouvelles tendances peuvent être repérées en matière de pharmacoprescription : le rajeunissement des enfants à qui l’on prescrit, une centration sur les symptômes plus que sur les diagnostics et l’utilisation de plus en plus courante de plusieurs molécules en même temps. 3.1. Des enfants plus en plus jeunes Au fil des ans, l’âge moyen des jeunes consommateurs tend à diminuer. Ainsi, Zito et al. [14] ont été parmi les premiers à évoquer une augmentation « dramatique » (p. 1069) des ordonnances faites aux enfants d’âge préscolaire aux États-Unis. 1 Au Québec, un « centre de réadaptation » est un centre éducatif destiné aux jeunes de six à 18 ans qui sont placés en vertu d’une loi pour mineurs (protection de la jeunesse ou système de justice pénale pour les adolescents). D. Lafortune et al. / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 60 (2012) 69–76 3.2. Des prescriptions plus en plus motivées par les symptômes Il y a plus de dix ans, les pharmacoépidémiologistes ont observé une relative autonomie entre la formulation d’un diagnostic principal (sur l’axe I ou II) et la consommation de médicaments psychotropes. Selon Connor [15] deux raisonnements se sont mis en place quant au recours à la médication : à l’approche traditionnelle fondée sur le diagnostic principal (primary illness approach), s’est ajoutée une approche par symptômes cibles (target symptom). Cette deuxième stratégie cible des symptômes spécifiques, peu importe le diagnostic principal, de telle sorte que la notion de prescription hors indication principale (off label) devient quasi obsolète. En effet, le prescripteur passe alors de raisonnements syndromiques à des raisonnements symptomatologiques et dimensionnels (incluant des seuils ou cut off points). D’après Jensen et al. [16], ce paradigme rend compte de 80 % des prescriptions faites aux enfants et adolescents et inclut par exemple, le traitement de l’agression et des problèmes de sommeil. Ce dernier constat n’est pas étranger au développement de la neurobiologie qui ne prend pas comme modèle le DSM-IV. Elle propose plutôt différentes hypothèses dimensionnelles pour rendre compte du fonctionnement normal et anormal. Il n’y a qu’à penser au modèle tridimensionnel du tempérament du Cloninger [17], au modèle dopaminergique du déficit de l’attention ou de la schizophrénie [18], au modèle sérotoninergique de la violence [19] ou de la dépression majeure [20], de même qu’au modèle gabaergique de la peur et de l’anxiété [21]. Dans le paradigme neurobiologique, le médicament agit en faisant varier de façon spécifique les neurotransmetteurs disponibles et par le fait même l’expression des symptômes. 3.3. De la prescription à la polyprescription Aux dires de Wilens et al. [22], la polyprescription ou combinaison de différents médicaments psychotropes (ex. : antidépresseurs et psychostimulants) est en pleine émergence. Dans les revues savantes et les guides de pratique, cette stratégie est souvent motivée par la notion de comorbidité. « Le besoin d’utiliser les combinaisons de médicaments provient d’une réponse souvent moins que satisfaisante aux agents simples, d’une meilleure prise de conscience des hauts taux de comordibité psychiatrique » écrit Wilens (p. 110). Le patient sous polymédication est alors vu comme polysyndromique. Or la polyprescription ne fait pas l’unanimité dans les milieux médicaux, si l’on se fie au nombre de commentaires et de lettres aux éditeurs publiés à ce sujet [23]. En somme, diverses tendances sont apparues et il importe d’examiner les facteurs scientifiques, professionnels et sociaux qui les alimentent. Pour ce faire, l’heuristique et l’étude des milieux de pratique complexes sont d’un grand apport. 4. Heuristique et décision de prescrire Tout praticien est appelé à prendre des décisions dans un contexte d’incertitude et de rationalité relative [24]. 71 L’heuristique s’est constituée en tant que champ d’étude des processus cognitifs du clinicien : ses raisonnements, son jugement, sa mémoire et ses préférences quant au choix des traitements [25]. Par exemple, des études réalisées dans la collectivité ont montré que les médecins généralistes de première ligne ont des pratiques de prescription différentes de leurs collèguespsychiatres. Comparativement à eux, devant un tableau clinique similaire, ils ont tendance à prescrire davantage d’anxiolytiques et d’antidépresseurs et moins d’antipsychotiques [26]. On peut penser qu’il y a là une préférence dictée par la prudence. Dans le champ de la pharmacoprescription, chaque classe de molécules a ses indications principales et secondaires. Ainsi, les signes et symptômes d’agressivité, de dépression ou d’anxiété posent au clinicien la question du « potentiel de réponse pharmacologique » [27]. Cela dit, l’acte de prescrire est souvent posé dans un milieu de pratique complexe. Ainsi, dans les écoles, les centres éducatifs ou les prisons pour jeunes, la prescription et la dispensation des médicaments psychotropes ne sont que des éléments dans un système de prise en charge multidisciplinaire plus large, allant du dépistage des troubles mentaux par le personnel non médical, à la discussion de cas en équipes multidisciplinaires et au suivi de l’observance des prescriptions. Cela engage à regarder la diffusion des connaissances scientifiques dans la communauté biomédicale l’identité professionnelle et la complexité des milieux de pratique (Fig. 1). 5. Dimensions scientifiques : la diffusion des connaissances Les premiers facteurs associés au recours à la médication psychotrope peuvent être posés en termes de connaissances des nosographies, des indications, de l’efficacité et de la sécurité du médicament psychotrope. Sur ce plan, chaque clinicien fonctionne selon certains modèles d’évaluation et d’intervention qu’il a édifiés à partir d’une orientation théorique préférentielle, prise parfois dès sa formation universitaire (ex. : lecture de manuels de base tels Essentials of clinical psychopharmacology [28]), parfois plus tard au cours de sa carrière et à la suite d’activités de formation continue. Selon Noah [29], il n’est pas facile d’identifier quels sont les principaux vecteurs de transfert des connaissances dans la communauté biomédicale. Au terme d’une analyse de plus de 90 pages, l’auteur conclut à un processus horizontal de transfert des connaissances, où chaque professionnel de la santé acquerrait et assimilerait des informations passablement incomplètes et conflictuelles, lui parvenant quasi quotidiennement par divers canaux. 5.1. Revues savantes Dans les revues scientifiques, sont publiés des études de cas, des opinions, des essais, des études cliniques avec ou sans procédure de double insu, des protocoles multisites et des projets d’algorithme, tels que le Texas Children’s Medication Algorithm Project [30]. Il existe par ailleurs des publications électroniques ayant un objectif de formation continue, sous forme de feuillets mensuels recensant les plus récentes recherches et distribués gratuitement aux psychiatres. Il s’agit par exemple de Medscape 72 D. Lafortune et al. / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 60 (2012) 69–76 Revues savantes Lignes directrices Evidence based Medicine Patient (sexe, âge, symptômes, diagnostic, fonctionnement global) Documents de l'industrie Prescripteur (sexe, âge, formation, spécialité) Relation thérapeutique Identité professionnelle Éthique et déontologie Contextes de pratique Fig. 1. Un modèle systémique d’usage optimal des médicaments psychotropes. (http://www.medscape.com) ou de Journal Watch Psychiatry (Massachusetts Medical Society). 5.2. Rapports de recherche produits par l’industrie pharmaceutique Les médecins peuvent aussi tirer leurs connaissances de documents émanant directement de l’industrie pharmaceutique, information dont l’objectivité est souvent questionnée. En effet, une série de méta-analyses récentes montrent que parmi les recherches mettant à l’épreuve un médicament, celles financées par l’industrie pharmaceutique sont plus susceptibles d’aboutir à des résultats positifs que celles réalisées par des équipes indépendantes. Ainsi, Als-Nielsen et ses collaborateurs [31] reprennent les résultats de 25 méta-analyses déjà repérées par les Cochrane Collaboration Reviews afin de les inclure dans une régression logistique permettant de contrôler l’effet possible de variables telles que la qualité méthodologique des études, la taille de l’échantillon ou l’année de publication. Ces 25 méta-analyses regroupent 370 essais cliniques (il est impossible de connaître l’âge des sujets inclus dans ces essais). Treize avaient pour but de mesurer l’efficacité d’un médicament psychotrope, les autres mettant plutôt à l’épreuve des médicaments prescrits pour traiter des troubles somatiques. Les auteurs constatent que le médicament mis à l’épreuve est recommandé dans 16 % des études réalisées de manière indépendante, alors qu’il l’est dans 51 % des études financées (p < 0,001). Le risque relatif résultant de la régression logistique indique qu’une étude financée a 5,3 fois plus de chance de conclure à l’efficacité du médicament qu’une étude indépendante. Bekelman et al. [32] synthétisent les conclusions de huit articles ayant comparé les résultats d’études cliniques avec un promoteur industriel à ceux d’études cliniques sans promoteur industriel. Pour être considérés, ces articles doivent avoir pour objectif principal ou secondaire d’évaluer l’étendue, l’impact ou la gestion des liens financiers entre l’industrie, l’équipe de chercheurs et les organismes de recherche universitaires. Ces huit articles regroupent eux-mêmes les résultats de plus de 1140 essais cliniques originaux. Une régression logistique montre que les résultats des essais cliniques sont 3,6 fois plus susceptibles de conclure à l’efficacité du médicament lorsqu’il y a contribution financière de l’industrie (IC à 95 % : 2,63–4,91). Quant à Lexchin et al. [33], ils soumettent à une nouvelle analyse les résultats de 30 études publiées dans la période 1980–2002, qui ont été repérées à l’aide des mots clé : clinical trials, conflict of interest, drug industry, financial support, publication bias, research design et research support. Ils concluent cette fois à un risque relatif de 4,05 associant le financement à des conclusions favorables. Bref, cette série de trois méta-analyses établit que les recherches financées sont de trois à cinq fois plus susceptibles de conclure en recommandant la molécule qui a été évaluée. 5.3. Recensions systématiques et evidence based medicine Faisant écho à la question qu’avaient posée Anderson et Graham en 1980, Is there an information overload ? [34], on peut rappeler qu’il y a dans le monde plus de 25 000 revues biomédicales qui publient plus de deux millions d’articles chaque année. Des initiatives de construction, de structuration et de diffusion de l’information ont vu le jour depuis cinq ans, dont celle de la Collaboration Cochrane. Elles utilisent une approche de la pratique fondée sur les données probantes et emploient largement les méthodes de la recension systématique et de la méta-analyse [35]. La médecine fondée sur des données probantes tente d’améliorer la prise de décisions par les médecins. Par exemple, Gibson et al. [36] rappellent qu’en milieu hospitalier, il arrive qu’il faille calmer un patient psychotique et violent à l’aide d’une injection d’antipsychotique. Les auteurs ont donc mené une recension systématique afin d’apprécier l’efficacité de l’acétate de zuclopenthixol. Ils concluent que face à de telles situations de crise, il faudrait que le médecin considère avec prudence les recommandations qui font du Clopixol® un médicament de choix, comparativement aux traitements pharmacologiques « standard ». En effet, la plupart des essais cliniques comportent d’importantes lacunes méthodologiques et les résultats sont, D. Lafortune et al. / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 60 (2012) 69–76 jusqu’ici, assez minces. Les auteurs rappellent qu’une recension Cochrane parue en 2004 n’a pu corroborer que le Clopixol® est plus efficace que l’halopéridol intramusculaire dans le contrôle des symptômes agressifs de la psychose aiguë, ni qu’il a une action plus rapide. 6. Facteurs professionnels : guides de pratiques, identité et responsabilités professionnelles Pour Freidson [37], la relation thérapeutique entre un médecin et son patient est modulée par un contexte professionnel. C’est dire qu’outre les connaissances scientifiques, d’autres éléments interviennent sur le raisonnement et la prise de décision : les lignes directrices émanant d’associations médicales, les champs et les actes réservés qui définissent l’identité professionnelle, ainsi que la notion éthique/déontologique de « responsabilité ». 6.1. Guides de pratique Les associations médicales font des efforts pour soutenir la prise de décision et établir le périmètre à l’intérieur duquel devrait s’exercer le jugement clinique. Cette démarche s’est accélérée après qu’Eddy [38] se soit inquiété, dans la revue JAMA, de la grande variation des pratiques d’une région à l’autre d’un pays. Elle se concrétise par la publication de lignes directrices ou paramètres de pratique. En Amérique du Nord, ces lignes directrices sont habituellement publiées dans le Journal of the American Academy of Child and Adolescent Psychiatry, American Journal of Psychiatry ou Journal of Clinical Psychiatry. Il s’agit d’une méthode de consensus formel. Un comité d’experts reconnus prépare une recension critique des écrits voulant faire autorité. Il y calibre prudemment la qualité des données colligées, y intègre ses propres opinions, puis soumet une première version du texte à certains individus ou organisations. Il s’ensuit un processus de révision et de délibérations de quelques mois, où chacun peut réagir à la première version du guide. A priori, il n’existe dans ce processus aucune règle absolue pour trancher sur les débats et les controverses qui apparaissent, si ce n’est par une décision éditoriale. Les documents qui en résultent ont bien sûr pour objectif d’orienter ensuite les décisions et les pratiques. Selon Noah [29], c’est sur cette cookbook medicine que reposent les activités de formation continue de la plupart des cliniciens. Par exemple, deux articles récemment publiés dans Journal of the American Academy of Child and Adolescent Psychiatry et signés par d’imposantes équipes où figurent des chercheurs indépendants (Treatment Recommendations for the Use of Antipsychotics for Agressive Youth, ou TRAAY [11,39]) reprennent et ré-analysent les conclusions de plusieurs essais cliniques évaluant l’efficacité de la rispéridone et de la quétiapine. Dans ces textes, il est frappant de constater que les effets secondaires sont tout à coup décrits comme étant passablement plus lourds que ce qui est rapporté d’habitude dans les rapports de recherche produits par l’industrie. Outre le gain de poids jugé préoccupant, Schur et al. soulignent que l’incidence d’effets extrapyramidaux n’est pas à négliger, que l’usage de la rispéridone peut être asso- 73 cié à une augmentation du niveau de prolactine et qu’il peut mener au priapisme. Par conséquent, les recommandations cliniques du TRAAY sont beaucoup moins enthousiastes, reléguant l’usage des neuroleptiques au second rang dans le traitement de l’agression et privilégiant un traitement psychosocial. Si la médication est nécessaire pour diminuer les comportements agressifs, elle devrait être complémentaire à des interventions psychosociales, telles que l’organisation d’un milieu thérapeutique [40], des programmes d’économie de jetons [41] ou un entraînement aux habiletés sociales [42]. 6.2. Identité et activités professionnelles Si le clinicien se représente les psychopathologies et leurs traitements à partir de connaissances acquises, il le fait aussi à partir d’une plus ou moins grande adhésion aux valeurs et idéaux de sa profession [43]. Les travaux classiques de Freidson [37] sur la profession médicale ont bien décrit les processus de socialisation des résidents et médecins. Dans la plupart des pays du monde, le système professionnel a conféré au médecin une expertise unique en ce qui concerne le diagnostic et le traitement. Il en a fait le seul professionnel habilité à diagnostiquer les troubles mentaux, à déterminer le plan de traitement et à prescrire les médicaments. Sont ici introduites les notions de champ de compétences, d’actes réservés et de responsabilités. La grande circulation de molécules psychotropes n’en a pas moins d’importantes implications pour le travail des non-médecins, tel que l’ont bien montré Bentley et Walsh [44]. De la même façon, Biadi-Imhof [45] a étudié les attentes spécifiques formulées par différentes catégories d’intervenants (psychiatres, psychologues, infirmières, etc.) en matière de médication psychotrope. Elle conclut que les différentes professions ne représentent pas le médicament de la même façon et que ces différences sont liées aux spécificités du rôle de chacun dans la relation thérapeutique. 6.3. Responsabilités et dilemmes éthiques La dimension éthique est l’une des composantes de l’heuristique de tout clinicien. Elle peut être considérée comme une dimension professionnelle puisqu’elle se traduit souvent par des considérations déontologiques relatives à la gestion des risques, aux responsabilités et aux possibilités de préjudices. Sous cet angle, depuis dix ans, plusieurs auteurs dénoncent l’écart important entre la pratique et l’état des connaissances nécessaires à une prescription avertie [46,47]. Chez l’enfant, plusieurs médicaments utilisés proviennent de la pharmacopée adulte, souvent à la suite d’une extrapolation hâtive et mal justifiée. Gadow [48] écrit : « le changement qui est probablement le plus prévisible dans l’utilisation des médicaments au fil des ans est la célébrité instantanée de nouveaux produits, souvent adoptés avec enthousiasme en l’absence complète d’études contrôlées montrant leur sécurité ou leur efficacité auprès des enfants » (p. 230). Voilà pourquoi le médecin peut avoir le sentiment d’engager sa responsabilité lorsqu’il prescrit. Les difficultés entourant le consentement éclairé des enfants, ainsi que 74 D. Lafortune et al. / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 60 (2012) 69–76 les risques de contraintes ouvertes ou subtiles qui pèsent sur eux posent un autre dilemme [49]. 7. Facteurs sociaux : milieux de pratique complexes et relation thérapeutique Les conclusions des articles scientifiques et les lignes directrices émises par les associations médicales balisent les raisonnements et décisions cliniques tout en demeurant relativement larges. Elles recommandent, suggèrent des stratégies, mais ne contraignent pas formellement à s’y restreindre. Les prescripteurs peuvent même s’en écarter complètement. Nombreuses sont les études qui démontrent que les prescripteurs n’appliquent pas forcément les données probantes, ni les guides de pratiques à leur clinique quotidienne. Ainsi, par rapport au TDAH, les paramètres de l’AACAP [50] recommandent que l’évaluation initiale comporte : un entretien avec l’enfant et les parents, des échelles d’observation, une évaluation intellectuelle ou neuropsychologique et un examen physique. Or, dans les faits, seulement 19 % des psychiatres américains suivent effectivement toutes ces recommandations avant de prescrire [51]. Comment cela se fait-il ? C’est qu’une intervention jugée peu adéquate en regard d’un consensus d’experts peut être soutenue par une autre rationalité, qui répond aux contingences plus locales du milieu de pratique ou de la relation thérapeutique. Sous ce troisième angle, le recours aux psychotropes s’explique plutôt à partir de la complexité des pratiques dites « réelles ». 7.1. Les milieux de pratique complexes Une première série de tels facteurs sociaux relève de l’organisation des services. En effet, d’importantes différences peuvent se creuser entre les conditions rigoureuses d’étude d’un médicament psychotrope/d’une psychothérapie et les conditions « ordinaires » dans lesquelles ce traitement sera quotidiennement utilisé (c.-à-d. efficacité potentielle ou effectiveness versus efficacité réelle ou efficacy) [52]. En d’autres termes, efficace ne veut pas toujours dire approprié, ni réaliste. Selon le NIMH [2], « le modèle biomédical traditionnel ne mène pas toujours à des interventions qui sont adaptables, applicables ou appropriées aux pratiques cliniques réelles » (p. 85). Les problèmes soulevés sont ceux de la validité externe des recherches et de la généralisation des résultats vers des contextes naturels et complexes [53]. Ainsi, aucune clinique psychiatrique ne peut refuser de traiter la majorité de ses patients parce qu’ils ne répondent pas aux critères d’inclusion et d’exclusion, ni se payer le luxe de rappeler régulièrement aux patients la date de leur prochain rendez-vous [54]. Il s’ensuit qu’une prescription jugée inadéquate en regard des critères scientifiques peut être soutenue par une autre rationalité. L’efficience est la capacité d’obtenir les résultats désirés avec un minimum de ressources. En pratique, la notion d’efficience est relative puisqu’on comparera toujours les coûts de deux (ou plusieurs) interventions entre eux [55]. Les tiers payeurs des soins et des médicaments (ministères ou compagnies d’assurance) surveillent depuis longtemps le déroulement des systèmes de soins. Au cours des années, leur influence s’est accrue. De nombreux gouvernements ont créé des conseils d’évaluation des technologies de la santé qui incluent dans leur évaluation une analyse des coûts économiques. Parallèlement, les compagnies d’assurance, en particulier aux États-Unis, ont opté pour le managed care qui tend à restreindre l’accès à divers services, y compris la psychothérapie qui n’est plus consentie que pour des périodes limitées. Sous l’angle de l’efficience, le recours à la médication psychotrope est séduisant [56]. Les agents payeurs sont de plus en plus au courant de la pratique fondée sur les données probantes et leurs experts examinent de près les méta-analyses publiées. Il est possible que ces agents payeurs, autant publics que privés, deviennent plus intrusifs et refusent de rembourser certains traitements qu’ils jugeraient trop peu efficaces ou efficients. 7.2. Relation thérapeutique, pressions ressenties et valeur symbolique du médicament Finalement, les représentations que se font les médecins et leurs patients de l’acte de prescrire et du médicament luimême, sont des éléments de compréhension indispensables. Les écrits en sociologie de la santé et en anthropologie médicale témoignent amplement de la centralité du médicament et de son rôle symbolique dans le cadre de la relation entre patients et médecins. Peu d’expériences humaines ont une puissance symbolique aussi manifeste que les actes de prescrire et d’ingérer des médicaments [57]. Les significations attachées à ces actes dépassent de beaucoup les propriétés pharmaceutiques attribuées aux substances. L’acte de prescrire peut signifier la sollicitude du médecin envers son patient. Il peut représenter le transfert du pouvoir de guérir, des mains du médecin à celles du malade. En donnant au clinicien le sentiment d’agir sur la situation, la prescription est également susceptible d’atténuer le sentiment d’incertitude ou d’impuissance qu’il éprouve face à des problèmes complexes. Dans le champ des médicaments psychotropes, ces préoccupations se traduisent notamment par l’effet placebo [58]. Selon Schwartz et al. [59], la pression des demandes exprimées par les patients constitue le motif premier de la prescription pour 46 % des médecins interrogés lors d’une vaste enquête américaine. Selon d’autres chercheurs, le malaise à refuser, la crainte de perdre une partie de la clientèle, la gestion du temps, la pression de la liste d’attente et l’incertitude face au diagnostic sont autant d’éléments pouvant influencer les modalités de prescription [60]. Et tout cela est sans compter l’impact de la publicité directe auprès des patients, avec laquelle il faudra bientôt compter. Dans le cadre de la relation thérapeutique, le médicament assume une fonction métaphorique dans la mesure où, par sa matérialité, il est un objet concret de soulagement ou encore la preuve tangible d’un état de maladie. Mais il joue également une fonction métonymique lorsqu’il est perçu comme incorporant en lui-même l’expertise du médecin et sa capacité de soigner. De ce fait, le « médicament comme objet » peut être dissocié de l’expertise du prescripteur, résumer celle-ci, et exister de façon autonome [61]. Cette dissociation D. Lafortune et al. / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 60 (2012) 69–76 pourrait éventuellement conduire à une attrition du rôle du médecin, dès lors considéré uniquement comme un « intermédiaire obligé » ou un intermédiaire à contourner par l’achat direct via l’internet. L’importance accordée au médicament dans la rencontre entre médecin et patient est largement appuyée par les résultats d’enquêtes auprès des cliniciens. À leurs yeux, le médicament serait l’objet premier des attentes des patients lors de la consultation [62]. 8. Conclusions Deux grands paradigmes balisent les études sur l’usage du médicament. Le premier est le plus répandu et il tend vers un usage rationnel des médicaments. Ainsi, selon l’Organisation mondiale de la santé [63], les patients devraient recevoir des produits adaptés à leurs besoins cliniques, à des doses correspondant à leurs besoins individuels. L’accent est ici mis sur la prescription (ses indications, posologies, durées et effets indésirables) et sur la dispensation des médicaments qui devraient correspondre à l’état des connaissances scientifiques. Depuis quelques années, un autre paradigme s’impose. Pour le Conseil des médicaments du Québec [64], l’usage optimal des médicaments doit être apprécié à la lumière des diverses interventions possibles (ex. : dépistage, interventions en situation de crise, coordination des interventions intra- et extramuros), des coûts et ressources disponibles (ex. : accès aux services de santé, effectifs, budgets, formations et mises à jour des membres du personnel) et des valeurs et comportements des patients (ex. : observance, usage illicite de substances « autres » obtenues sans ordonnance, trafic/extorsion de médicaments). Selon la Politique du médicament [65], l’usage optimal des médicaments doit être encouragé et soutenu largement par « les associations et les ordres professionnels, les fabricants de médicaments, les assureurs, les organismes publics, le réseau de la santé et des services sociaux ». Bref, le paradigme de l’usage optimal appréhende la prescription de médicaments psychotropes comme une décision inspirée par de multiples facteurs, certains étant scientifiques et d’autres non. Voilà pourquoi il nous semble d’une grande importance d’étudier les pratiques de prescriptions dans une perspective heuristique et systémique. Trop peu d’études ont consisté à interroger de manière approfondie les médecins généralistes et spécialistes qui pratiquent auprès des enfants et à leur demander : comment ont évolué les références nosographiques au fil des ans ? Comment se sont élargies les indications de prescription ? Comment s’est installé le discours actuel sur la comorbidité et sur la polyprescription ? Comment la durée/chronicité des prescriptions est-elle aujourd’hui discutée dans les milieux de pratique ? Comment s’est mise en place la logique de prescription par symptômes cibles, plutôt que par diagnostic principal ? Et quels ont été les débats ? Sous un angle heuristique, quels sont les raisonnements et les préférences des médecins ? Enfin, trop peu de chercheurs se sont rendus dans les milieux de pratiques complexes pour observer directement le travail des pharmacoprescripteurs intervenant auprès des enfants. 75 Déclaration d’intérêts Les auteurs n’ont pas transmis de déclaration de conflits d’intérêts. Références [1] Ehrenberg A, Lovell AM. La maladie mentale en mutation. Psychiatrie et société. Paris: Éditions Odile Jacob; 2001. [2] NIMH Workgroup on Child and Adolescent Mental Health Intervention Development and Deployment. Blueprint for change: research on child and adolescent mental health. Washington DC; 2001. [3] Moncrieff J, Crawford MJ. British psychiatry in the 20th century observations from a psychiatric journal. Social Science et Medicine 2001;53:349–56. [4] Bailly D. Aperçu historique des prescriptions médicamenteuses en psychiatrie de l’enfant. 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