Eprex®, Epogen®, Genotonorm®,
Humulin®, Intron-A®, Neore-
cormon®, Neupogen®, Nutro-
pin®, Roferon®… Ces noms
sont synonymes de blockbusters de
l’industrie pharmaceutique. Ils sont
aussi synonymes des premres pertes
de brevet pour les médicaments issus
des biotechnologies, entrouvrant ainsi la
porte à l’arrie de ces « copies pas tout à
fait riques » présentées sous le nom
de biosimilaires en Europe et de follow-
on biologics aux Etats-Unis. Plusieurs
études récentes se sont penchées sur les
perspectives de ce marc en devenir
éval, selon les sources, entre 15 et 20
milliards de dollars (1). Eurostaf met
en avant un premier élément moteur :
la progression du marché des biomédi-
caments. Alors que ceux-ci représentent
aujourd’hui quelque 10 % en valeur du
marc pharmaceutique mondial, leur
croissance s’établit à un rythme beau-
coup plus soutenu que l’ensemble de la
pharma, avec une progression des ventes
de 20 % en 2006 quand les ventes de
spécialités de marque, hors riques,
n’ont progressé que de 7 %. Seul le mar-
ché des génériques a enregist ce même
niveau de développement de 20 %.
Relais de croissance
Situés au confluent de ces deux mar-
chés, les biosimilaires semblent donc,
selon toute logique, présenter un
potentiel de développement a priori
considérable et d’autant plus attrac-
tif qu’Eurostaf rappelle qu’« à partir
de 2010-2011, la croissance en va-
leur du marché des génériques dits
« classiques » devrait se tarir, sous
l’effet d’une érosion forte des prix et
un essoufflement des expirations de
brevets ». Autre motivation non né-
gligeable dans un environnement où,
seule l’Union européenne a mis en
place une réglementation spécifique
pour encadrer les AMM de ces copies
d’un genre nouveau, le nombre de
classes susceptibles de faire l’objet de
demandes d’AMM pour des versions
biosimilaires s’élargit (voir tableau 1).
Le catalogue accessible compte désor-
mais dans ses rangs quelques uns des
produits figurant parmi les meilleures
Biosimilaires
Un marché
aléatoire ?
Sur un marché biopharmaceutique en croissance
de 20 %, les biosimilaires constituent un relais de
croissance potentiel dans un univers du générique où
la réduction des marges et la concurrence sont la règle.
52
PHARMACEUTIQUES - AVRIL 2008
6
39,5
18,5
23 27,5
33
18,9
7
10
13
16
4,8 5,2
34
2002 2003 2004 2005 2006
Etats-Unis Europe Japon
Évolution des ventes de biomédicaments par grandes
zones géographiques
SOURCE : LES PERSPECTIVES DU MARCHÉ MONDIAL
DES BIOSIMILAIRES – EUROSTAF (2007)
©CNRS
53
AVRIL 2008 - PHARMACEUTIQUES
Distribution Industrie
SOURCES : ETUDE MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES ET BIOSIMILAIRES À L’HORIZON 2012 – PRECEPTA DÉCEMBRE 2007, EMEA, LABORATOIRES.
Classe Biomédicaments commercialisés en
France Brevet UE Biosimilaires autorisés dans l’UE
(laboratoire et date)
Biosimilaires ayant un avis favorable
dans l’UE (laboratoire et date)
Erythropoïétines ®
®
® (epoetine ) J&J
2005
® (epoetine )
(Sandoz - 28-08-2007)
®
(epoetine 
28-08-2007)
® (epoetine )
(Medice - 28-08-2007)
® (epoetine zeta) (Stada -
18-12-2007)
® (epoetine zeta)

 ® (somatropine)
Eli Lilly
®
® Pfizer
2003

(Sandoz – 12 avril 2006)

(BioPartners – 24 avril 2006)
 

2006 —








 ®

®
®
®
®
2010 —
 ®®®

®®
Elli Lilly
®
®
2001 —
 ®


2003
— —
®

®

2012
®- 2b)

® 2002 ème trimestre 2008.

moléculaire ème ou 4ème trimes-
tre 2008. La consultation sera bouclée au 30 avril 2008.
Les biosimilaires dans l’UE


54
PHARMACEUTIQUES - AVRIL 2008
ventes mondiales : à savoir les érythro-
poïétines, avec un marché de près de
12 milliards de dollars, et le G-CSF
(Growth-Colony stimulating factor)
avec quelque 4,3 milliards de dollars
(voir Tableau 2).
Au total, huit classes de biomédica-
ments sont aujourd’hui ouvertes à la
concurrence par versions biosimilaires
en Europe. Ce sont ainsi deux hormo-
nes de croissance et quatre érythropoië-
tines biosimilaires qui disposent d’une
AMM, les premiers lancements effectifs
ayant été le fait de Sandoz avec Omni-
trope®, commercialisée en Allemagne et
en France depuis le 1er semestre 2007
et Binocrit®/Epoetin alfa Hexal® lancée
en Allemagne en novembre dernier. La
liste des AMM va également s’élargir
très vite après les avis favorables délivrés
par l’EMEA à quatre versions biosimi-
laires du G-CSF (filgrastim) et la publi-
cation prochaine de lignes directrices
pour l’interféron ß biosimilaires et les
héparines de bas poids moléculaires.
Des barrières conséquentes
Alors que la pparation des lignes di-
rectrices à l’EMEA est le signe que des
industriels ont formu des demandes
d’avis scientiques et travaillent donc au
dépôt de demandes d’AMM, le marché
des biosimilaires n’en recèle pas moins
une série de barrières à l’entrée non -
gligeables2. Mises en avant tant dans les
travaux d’Eurostaf, de Precepta-Xeret
de Robert Shapiro, celles-ci se position-
nent sur l’ensemble de la chaîne depuis le
développement
jusqu’à la phar-
macovigilance.
Le biosimilaire
ne pouvant s’as-
similer à un -
nérique classi-
que, l’ensemble
de ces activités
va impliquer à
la fois des sa-
voir-faire spé-
cifiques et des
investissements
élevés. Au-delà
des cinq à huit
ans nécessaires à
l’enregistrement
d’un produit,
les coûts en-
gendrés par son
développement
sont estimés de
30 à 80 millions d’euros contre cinq en
moyenne pour un rique classique.
Au niveau de la production, la seule
construction d’une unité de bioproduc-
tion aux normes GMP requiert de 200 à
400 millions de dollars, tandis que la pro-
duction par elle-même implique des ma-
tériaux de base 20 à 100 fois plus chers,
relève l’étude de Robert Shapiro.
Pas de substitution
Au-delà des coûts de veloppement et
des méthodes de fabrication comple-
xes, les règles du jeu promotionnelles et
commerciales sont, elles aussi, en net -
calage avec celles du générique classique,
l’interlocuteur privilégié est le phar-
macien et se rapprochent du modèle
de promotion et de commercialisation
de la spécialité de référence. Alors que,
lors de la transposition de la règlemen-
tation européenne en droit national, la
France a choisi d’interdire la substitu-
tion à l’officine, le taux de tration
du marc par les biosimilaires est ainsi
directement déterminé par les prescrip-
tions des médecins, et en particulier des
praticiens hospitaliers. Gagner leurs suf-
frages suppose aussi que « l’information
sur ces produits passe aussi par des -
seaux de chargés de relations avec les lea-
ders d’opinion, les instances régionales
(ARH, Cpam en France par exemple) »,
analyse Precepta. Maîtrise de circuits de
prescription spécifiques et spécialisés,
mais aussi suivi de pharmacovigilance
identique à celui des biomédicaments
de référence, coût élevé néralement
synonyme de suivi budgétaire strict par
les autorités de santé, tels sont les para-
mètres qui devraient alourdir sensible-
ment la facture de la commercialisation
des biosimilaires.
Des marchés théoriques
Les biosimilaires, souligne Eurostaf,
constituent encore un « marché théo-
rique » dans la mesure la valorisa-
tion de leur potentiel commercial res-
te aléatoire et soumise à un très large
éventail de conditions. Les spécialités
accessibles à la génération de biosimi-
laires sont en effet des biomédicaments
de première génération, déjà soumis à
une rude concurrence par l’arrivée ré-
gulière de versions améliorées avec une
efficacité supérieure et une demi-vie
plus longue. Si l’UE, du fait d’un cadre
réglementaire spécifique, est à même
de générer, à court et moyen terme, un
véritable potentiel de développement,
c’est toutefois un paysage hétérogène
qui risque de s’y dessiner. La question
de la substitution est en effet laissée au
libre arbitre des Etats-membres, choix
dont le résultat va ensuite condition-
ner les stratégies de commercialisation
à mettre en œuvre. On peut aussi s’in-
terroger sur l’accueil que médecins et
patients vont leur réserver. Dans le cas
d’Omnitrope®, seul produit de ce type
actuellement commercialisé en Euro-
pe, les résultats de Sandoz pour 2007
montrent qu’au 4ème trimestre 2007,
10 % des nouveaux patients traités par
une hormone de croissance en France
se sont vus prescrire le biosimilaire
lancé en mai dernier. Cependant, les
évolutions futures du marché restent,
encore une fois, sous la dépendance
des Etats-Unis, où le blocage essentiel
réside dans… l’absence de cadre régle-
mentaire. Bien qu’un projet de loi ait
été déposé l’été dernier, il est peu pro-
bable qu’une telle réglementation in-
tervienne avant 2009, voire 2010. n
Anne-Lise Berthier
(1) Ces trois études sont : « Les perspec-
tives du marché mondial des biosimilai-
res » - Eurostaf (2007) ; « Médicaments
génériques et biosimilaires à l’horizon
2012 » - Precepta Xerfi (2007) ; « The
potential american market for generic
biological treatments and the associated
cost savings » - Robert Shapiro (2008)
(2) Cf. « La France, un modèle pour
l’Europe » – Pharmaceutiques n°149 –
septembre 2007
Médicament
-
diales 2006
en milliards de
dollars
Croissance
Part des Etats-Unis
dans les ventes
mondiales
Prévisions
de ventes de
biosimilaires en
2010 (en millions
de dollars)
Erythropoïétines    701
   n/a 138
   55 131
   63 605
   35 188

humaines   33 442
  - - 2 205
Estimations des opportunités commerciales des
biosimilaires. D’après « Les perspectives du marché
mondial des biosimilaires » - Eurostaf (2007)
SOURCE : IMS ; DATAMONITOR, LE MERIE BUSINESS INTELLIGENCE, RAPPORTS ANNUELS DES ENTREPRISES
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