raisons: les hommes " au discours ferme et militant ", les
rapports différents qu'elle a créés entre médecins et malades,
notamment parce que tous deux sont souvent du même âge, le
caractère " socialement marqué " de la pathologie qui a
rassemblé les personnes, créé des espaces de parole, mis en
commun la souffrance et les problèmes ressentis et par là-même
organisé des groupes " plus revendicatifs " que l'auraient été des
malades isolés, mais aussi parce qu'il y a peu de pathologies où
le cheminement entre le patient et son médecin soit aussi long, "
où tous deux soient en situation de progresser ensemble ".
Depuis 1982-83, les patients qui ont survécu ont, en effet,
rarement changé de médecin instaurant, du même coup, entre
eux " un dialogue où le non-dit est réduit ".
Spécifiques à cette pathologie, ces nouvelles relations
médecins-patients ont ainsi, selon Pierre Lascoumes, " beaucoup
éclairé la discussion avec le gouvernement pour argumenter et
montrer que ce n'était pas que théorique, abstrait ", et que
proposer l'accès au dossier médical n'était pas forcément
synonyme de revendications conflictuelles.
" Il faut faire progresser l'accès au dossier, martèle donc Didier
Sicard, mais la question c'est aussi qu'on ne peut pas faire du
VIH le paradigme de l'ensemble des maladies dont souffre
l'humanité. Et je me garderais bien de parler en termes de
progrès, de dire si c'est un bien ou un mal. "
" C'est une demande légitime, reprend-il, une évidence, mais il
ne faut pas que cette évidence se retourne contre le malade ",
autrement dit, que l'accès au dossier se fasse n'importe comment
et que le médecin dise: " vous l'avez demandé, je vous le donne,
débrouillez-vous avec ", comme on le ferait avec un quelconque
dossier administratif.
Pour le président du CCNE, il serait ainsi " affreux de dire que
c'est une victoire des malades sur les médecins. Simplement, le
médecin ne sera plus seul à détenir des informations relatives au
patient ". Mais il se devra alors d'accompagner, d'expliquer… Et
dans la pratique, il faudra, selon lui, séparer le " rétroactif " du "
prospectif ". " Le rétroactif, précise-t-il, ce sont les dossiers qui
n'étaient pas faits pour être mis à disposition du malade et qui
pouvaient contenir des annotations désinvoltes comme "malade
manipulateur" ou "je ne lui ai pas dit pour ne pas l'affoler". "
Tous ces éléments qui n'étaient pas sensés être communiqués. "
En prospective, poursuit-il, quand un médecin rédigera un
dossier, il devra penser qu'il pourra être lu par son malade et
garder à l'esprit l'éventualité du dialogue. "
Reste la psychiatrie et ses mots -maux- comme "paranoïaque",
"délirant"... " et là, insiste Didier Sicard, il ne faut pas faire
n'importe quoi. Les mots de la médecine peuvent paraître
http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/85_1210.htm (4 sur 7) [11/04/2003 15:15:07]