Facteurs de risques d'infection chez les patients VIH+ et neutropéniques Revue critique de l'actualité scientifique internationale sur le VIH et les virus des hépatites n°57 - juillet-août 97 BACTERIES Facteurs de risques d'infection chez les patients VIH+ et neutropéniques Dominique Batisse service d'immunologie - hôpital Broussais Frequency and risk factors of infectious complications in neutropenic patients infected with HIV Meynard J.L., Guiguet M., Arsac S., Frottier J., Meyohas M.C. AIDS, 1997, 11, 995-998 Une étude multicentrique et prospective permet de préciser les facteurs de risque d'infection associée chez les patients séropositifs pour le VIH et neutropéniques. L'objectif de cet article est de déterminer les causes, l'incidence et les facteurs de risques des infections chez les patients VIH neutropéniques. http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/57_815.htm (1 sur 5) [30/06/2003 10:04:13] Facteurs de risques d'infection chez les patients VIH+ et neutropéniques Les auteurs ont pour cela réalisé une étude prospective, multicentrique entre le 1er décembre 1994 et le 30 avril 1995. Les patients étaient inclus dans l'étude si ils avaient, sur au moins deux prélèvements, un chiffre de polynucléaires neutrophiles inférieurs à 1000/mm3. Soixante-deux patients ont été inclus dans l'étude. A l'inclusion, les variables suivantes ont été colligées : le sexe, le chiffre de polynucléaires dans les 3 mois précédant et à l'entrée de l'étude, la présence ou non d'un cathéter central, le nombre de lymphocytes CD4, l'existence ou non d'une infection, l'étiologie de la neutropénie (médicaments, affection hématologique évolutive, chimiothérapie...). La toxicité médicamenteuse était retenue si la neutropénie disparaissait à l'arrêt du médicament. La définition d'une infection était la présence d'une température supérieure ou égale à 38° associée à l'isolement d'un germe, soit dans les hémocultures en périphérie ou sur cathéter central, les urines ou les selles. La présence d'un fièvre supérieure ou égale à 38° avec prélèvements bactériologiques négatifs mais d'évolution favorable sous antibiothérapie étaient considérée comme une infection non documentée. Parmi les 62 patients, la cause de la neutropénie était dans plus de la majorité des cas liée à une toxicité médicamenteuse. La zidovudine, le trimétoprimesulfaméthoxazole et le ganciclovir étaient les médicaments le plus souvent incriminés. Les autres causes de neutropénie étaient secondaires soit à une chimiothérapie (7 cas) soit à l'infection par le VIH (1 cas). Quinze des 62 patients ont eu au moins une complication infectieuse (24%). Ils étaient tous très immunodéprimés avec une médiane des lymphocytes CD4 à 13/mm3 (2 à 58/mm3) au moment de l'infection. Dans plus de la moitié des cas, cette infection apparaissait dans les 24 premières heures suivant la neutropénie, pour cinq patients l'infection apparaissait au 20e ou au 62e jour. La durée moyenne de la neutropénie était plus longue chez les patients ayant une infection : 53,4 jours versus 31,2 jours http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/57_815.htm (2 sur 5) [30/06/2003 10:04:13] Facteurs de risques d'infection chez les patients VIH+ et neutropéniques mais sans que la différence ne soit significative. La médiane des polynucléaires neutrophiles au moment de l'infection était de 528/mm3 (0 à 900/mm3). Parmi les 15 patients neutropéniques développant une infection, la neutropénie était liée dans 6 cas à une chimiothérapie ou à un lymphome. Dans 5 cas, la porte d'entrée de l'infection était un catéther central, dans 3 cas pulmonaire, dans 2 cas colique (campylobacter jejuni), dans 1 cas cutanée (streptocoque C), et dans les autres cas le germe n'a pas été retrouvé. dans tous les cas, l'évolution a été favorable sous antibiothérapie. En comparant les patients neutropéniques infectés et non infectés, il n'a pas été mis en évidence de différence significative sur le nombre de lymphocytes CD4, le sexe, le chiffre de polynucléaires neutrophiles à l'inclusion (700/mm3). En revanche, les patients développant une infection étaient à un stade plus évolué de l'infection par le VIH (93% versus 29% étaient au stade clinique C [p=0,02]), ils avaient plus volontiers des antécédents de neutropénie dans les 3 mois précédents (80% versus 40% [p=0,016]), et 40% des neutropénies étaient liées à une chimiothérapie ou un lymphome contre 11% chez les non infectés (p=0,02) et les polynucléaires neutrophiles étaient significativement plus bas (100/mm3 versus 700/mm3 [p<0,001]) et ils avaient plus souvent un cathéter central (p<0,001). Cette étude a permis d'identifier 3 facteurs de risques d'infection chez des patients neutropéniques infectés par le VIH : l'existence d'une neutropénie dans les 3 mois précédant l'infection, la présence d'un catéther central et un taux très bas de polynucléaires neutrophiles. De plus, ce travail montre qu'une neutropénie induite par une chimiothérapie ou un lymphome se complique plus facilement d'une infection. La fréquence des neutropénies au cours de l'infection par le VIH est de 20 à 25% selon les études. L'étiologie de ces neutropénies est souvent multifactorielle : toxicité médicamenteuse, infection systémique (infection à mycobactéries atypiques), infection par le VIH... Dans l’étude de J.L. Meynard, les neutropénies étaient le plus souvent secondaires à une toxicité médicamenteuse, mais les patients http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/57_815.htm (3 sur 5) [30/06/2003 10:04:13] Facteurs de risques d'infection chez les patients VIH+ et neutropéniques développant une infection avaient toujours une neutropénie secondaire à une chimiothérapie ou un lymphome. La fréquence des infections bactériennes au cours des neutropénies chez les patients VIH est rare. Dans l'étude de Moore publiée en 1995 (1), l'incidence des infections bactériennes est de 3,5 à 4,5 pour 100 personnes-mois chez des patients ayant moins de 500 PNN et de 2,3 à 3,8 pour 100 personnes-mois chez des patients ayant des PNN <1000. Cette incidence est moindre par rapport à des patients VIH négatifs. Moore a montré que l'existence d'une neutropénie était un facteur de risque indépendant d'infections bactériennes chez les patients VIH à un stade avancé de la maladie. Ce risque augmentant en fonction de la gravité de la neutropénie : risque relatif de 2,33 si PNN <1000 et de 7,92 si PNN <500. L'étude présente confirme ces données. Il a déjà été démontré que le Bactrim® prescrit en prophylaxie primaire diminue le risque d'infection bactérienne sévère chez les patient infectés par le VIH (1, 2). Ceci est retrouvé dans cette étude. En effet, parmi les 28 patients dont la neutropénie a été reliée au Bactrim, un seul a fait une infection. Parmi les infections chez les patients neutropéniques, les bactériémies sont les plus fréquentes et les plus graves mais ne semblent pas significativement plus fréquentes chez les patients neutropéniques (1). En revanche, les infections au niveau d'un site habituellement stérile et les infections coliques sont plus fréquentes au cours des neutropénies (1). La présence d'un cathéter central est un facteur de risque indépendant comme cela a été montré dans les études de Moore et de Meynard. Connaître les facteurs de risques infectieux chez les patients neutropéniques infectés par le VIH pourrait permettre d'établir des recommandations dans la prise en charge de ces neutropénies. – Dominique Batisse 1 - Moore RD, Keruly JC, Chaisson RE "Neutropenia and bacterial infection in acquired http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/57_815.htm (4 sur 5) [30/06/2003 10:04:13] Facteurs de risques d'infection chez les patients VIH+ et neutropéniques immunodeficiency syndrome" Arch Intern Med, 1995, 155, 1965-1970 2 - Hardy WD, Feinberg J, Finkelstein DM et al. "A controlled trial of trimethoprim-sulfamethoxazole or aerosolized pentamidine for secondary prophylaxis of pneumocystis carinii pneumonia in patients with the acquired immunodeficiency syndrome" N Engl J Med, 1992, 327, 1842-1848 http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/57_815.htm (5 sur 5) [30/06/2003 10:04:13]