Antibiothérapie du patient neutropénique en réanimation ENSEIGNEMENT DESC REANIMATION STRASBOURG MARS 2017 Dr Quentin Maestraggi Service de Réanimation Médicale et Oxygénothérapie Hyperbare Hôpital de Hautepierre – CHRU de Strasbourg Neutropénie Compte de PNN < 500/mm3 ou Compte prédit < 500/mm3 dans les 48h Neutropénie dite profonde si < 100/mm3 La neutropénie fébrile concerne : o plus de 80% des patients d’oncohématologie o 10 à 50% des patients après chimiothérapie pour tumeur solide Buchheidt D et al. Ann Hematol 2003 PARTICULARITES DU PATIENT NEUTROPENIQUE • Absence de réaction inflammatoire, faible rentabilité de la CRP • Hypothermie possible • Absence de fièvre (corticothérapie) mais signes d’infection • Fièvre d’origine multiple (transfusion, cytotoxique, mucite étendue, hémopathie ellemême…) • Sites d’infection limités : oropharynx, périnée, poumon, bas œsophage, caecum, peau… • Rapidité d’évolution des infections+++ Seulement 10 à 40% des épisodes fébriles seront documentés Lafaurie M 2007 Buchheidt D et al. Ann Hematol 2003 NOTION DE « RISQUE » Distinction entre patients neutropéniques à risque « faible » et à risque « élevé » Bas risque • Durée anticipée de neutropénie 7j • Absence de comorbidité Haut risque • Durée anticipée de neutropénie 7j • Neutropénie « profonde » • Comorbidités significatives • Signes de gravité : septis sévère, état de choc, pneumopathie, douleurs abdominales, confusion IDSA Guidelines 2010 Etude multicentrique : 17 centres D. Mokart et al. Crit Care Med 2012 Une antibiothérapie initiale tardive ou inappropriée augmente la mortalité !!! Elting et al. Clin Infect Dis 1997 Ariffin et al. Int J Infect Dis 1999 Tumbarello et al. Antimicrob Agents Chemother 2006 Ortega et al. J Antimicrob Chemother 2009 Trecarichiet al. J Infect 2009 Martinez et al. Antimicrob Agents Chemother 2010 Trecharichi et al. Haematologica 2011 Intensive Care Med 2014 D. Mokart Grrr-oh Marseille 2016 Annals of Intensive Care 2011 Crit Care Med 2012 BG- 47,7% Pyo 9,6% 1) Beta lactamine efficace sur Pseudomonas aeruginosa = la base de l’antibiothérapie du patient neutropénique Bithérapie pas supérieure à la monothérapie en absence de complication Toutes les Beta lactamines sont-elles équivalentes dans le cadre du traitement probabiliste ? The Cochrane collaboration 2010 Lancet Inf Dis 2007 Mortalité plus forte associée à l’utilisation du Céfépime Equivalence de l’utilisation des carbapenem mais plus forte incidence des colites à clostridium 2) Oui aux Aminosides chez les malades les plus graves ! Quel est le rationnel de la bithérapie ATB ou de la combinaison d’ ATB ? 1- Elargir le spectre 2- Bénéficier des effets synergiques 3- Limiter la génération de résistance A quel prix ? 1- Au prix du marché ! 2- Au prix d’une toxicité plus importante : otologique et rénale Pour l’hématologue… The Cochrane collaboration 2013 Lancet Inf Dis 2002 Aucune étude ou essai clinique randomisé n’a montré de supériorité de l’association BL + AG chez le patient neutropénique ECIL 2005 • Chez les patients neutropéniques en état de choc et/ou en insuffisance respiratoire aigue et/ou suspect d’infection à germes résistants, il parait légitime de proposer d’emblée une association avec un aminoside • Bien qu’aucune étude de qualité ne puisse valider cette attitude • 2 études donnent néanmoins un signal en faveur de cette attitude : Legrand et al. Crit Care Med 2012 Leibovici et al. Antimicrobial Agent and Chemotherapy 1997 3) Dois je prescrire une antibiothérapie anti Cocci gram + ? Sur la base de 2 méta analyses, la littérature n’apportent pas clairement d’élément en faveur de l’intérêt d’ajouter d’emblée un glycopeptide. Cependant la littérature analysée n’est pas spécifique des malades de réanimation. The Cochrane Collaboration 2010 Lancet Inf Dis 2005 Se discutera, essentiellement sur la base de recommandations (ECIL, EORTC, IDSA...), de proposer d’emblée un glycopeptide aux patients neutropéniques admis en réanimation sur critères suivants : o Présence d’un dispositif intravasculaire : CIP, VVC, PiccLine… o Porte d’entrée cutanée/Cellulite/Mucite o Notion de colonisation à SAMR o Etat de choc ? Clinical Infectious Disease 2006 Etude ayant inclus des patients hypotendus, mais proportion inconnue. Vancomycine = Linezolide ? 4) Peut on effectuer une « désescalade » de l’antibiothérapie chez le patient neutropénique de réanimation ? Etude observationnelle prospective ayant inclus 101 patients neutropéniques. SAPS II moyen 49 (42-66) Désescalade chez 44% des patients Sur la base de recommandations, il est possible d’envisager une désescalade de l’antibiothérapie chez les patients neutropéniques (si le patient s’améliore…!) : o En cas de documentation bactériologique o En absence de documentation en faveur d’une infection à SAMR, il est légitime d’arrêter les glycopeptides o En l’absence de documentation (prélèvements négatifs) ??? - Faut-il poursuivre la « bombe atomique » ? - Faut-il désescalader pour une antibiothérapie anti pyo seule ? Quand interrompre la traitement antibiotique ? o Pas avant la sortie d’aplasie o Après la durée habituellement admise pour le foyer infectieux en question, si le patient est sortie d’aplasie o Après la sortie d’aplasie si celle-ci survient après la durée habituellement admise pour le foyer infectieux en question o Place des biomarqueurs ? • Examen clinique minutieux : bouche, sinus, peau, organes génitaux, anus… • Dispositifs intraveineux+++ : CIP, KTC, Picc-Line… • Prélèvements « de tout ce qui est prélevable » : Hemocs, ECBC, LBA, selles, pue, LCR, bile, ascite… • Radiographie du thorax de face • Scanner TAP+++ Conclusion : quelle attitude pratique pour la garde ? 1- Beta lactamine anti pyo : Tazocilline Si déjà sous Tazo ou suspicion de BMR : Carbapenème 2- Aminoside anti pyo : Si crainte pour la fonction rénale : envisager quinolone 3- Si état de choc/catheter/atteinte cutanéo-muqueuse : Vancomycine Si insuffisance rénale : envisager linezolide 4- Si atteinte digestive : envisager métronidazole 5- Ne pas oublier les antifungiques…