GOUVERNER LA ZONE EURO APRÈS LA CRISE :L’EXIGENCE D’INTÉGRATION
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réduira qu’à long terme : 200 % du PIB en 2016, 175 % en 2020 et
122 % en 2030. Et rien ne dit que ce scénario se réalisera, tant les
variables et les facteurs qui l’influent sont nombreux. En ce sens, le FMI a
contesté le caractère viable de la dette grecque lors des négociations du
troisième plan d’aide et, depuis, appelle à ce que l’assistance financière et
les réformes structurelles s’accompagnent d’une renégociation de la dette
publique. Le 11 octobre 2015, le président de la BCE, Mario Draghi,
jette un pavé dans la mare lorsqu’il admet l’intérêt d’un reprofilage de la
dette grecque : « We have expressed concerns about current debt sustainabi-
lity. In our view, there will have to be an element of debt relief. »5
«If these things were so large, how come everyone missed them? », demande la
reine Elizabeth II à propos de la crise des subprimes à un professeur
d’économie, lors de sa visite à la London School of Economics en
novembre 2008. Six mois plus tard, les économistes font amende hono-
rable et reconnaissent « un échec de l’imagination collective de nombreuses
personnes brillantes, ici dans ce pays [Royaume-Uni] et à l’étranger, pour
comprendre les risques du système [financier] dans son intégralité »6.Laques-
tion vaut assurément pour la zone euro et la crise des dettes publiques.
Comment est-il possible que ni les institutions de l’Union chargées de la
surveillance des politiques économiques, ni les autorités nationales, ni les
investisseurs privés n’aient rien vu ? Au regard de l’importance de la crise
et de ses conséquences économiques et sociales, la question possède une
légitimité indiscutable.
L’on pourrait discuter à l’envi des imperfections passées, voire présentes
et futures de la gouvernance économique européenne, ou bien encore de
la manipulation ou du contournement des règles statistiques et budgé-
taires par les États membres. Le vrai sujet serait toutefois éludé : l’(in)
existence d’une volonté politique réelle, large des États membres en
faveur d’une véritable Union économique et monétaire. Le statu quo n’est
cependant ni possible ni admissible. Dans un monde en continuel chan-
gement, « s’arrêter signifie reculer, prévient Angela Merkel en mars 2007.
5. Mario Draghi, entretien donné au quotidien grec I Kathimerini, 11 octobre 2015, Europa.eu,
http://www.ecb.europa.eu/press/inter/date/2015/html/sp151011.en.html, page consultée le
15 janvier 2016.
6. « […] A failure of the collective imagination of many bright people, both in this country and interna-
tionally, to understand the risks to the system as a whole », cité dans « British Economists send Apolo-
gy to Queen », HuffingtonPost.com, 26 août 2009, http://www.huffingtonpost.com/2009/07/26/
british-economists-send-a_n_244998.html, page consultée le 15 janvier 2016.
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