Immunothérapie en onco-dermatologie Dr ARCHIER Elodie Hôpital Saint Joseph, Marseille AMOC 2016, Nice Liens d’intérêt • Membre comité de réflexion scientifique et stratégique laboratoire Novartis • Orateur laboratoire BMS Mélanome métastatique • Pronostic redoutable : extrême chimiorésistance • Jusqu’en 2011, les seuls médicaments autorisés sur le marché en France : – la dacarbazine – la fotémustine • Efficacité médiocre (10% de répondeurs) • Pas de réel bénéfice en termes de prolongation de la survie globale (OS stades IV = 8 mois…) Mélanome métastatique • Depuis 2012, deux nouvelles stratégies thérapeutiques innovantes ont révolutionné la prise en charge des mélanomes au stade métastatique : - Thérapies ciblées inhibitrices de BRAF/MEK (en association +++) - Immunothérapie Mélanome et système immunitaire Les pistes initiales • Vitiligo associé au mélanome (1 à 20% cas) : meilleur pronostic. • Mélanomes « régressifs » : explique les cas de mélanome métastatique de primitif non retrouvé • Incidence augmentée en cas d’immunosuppression Mélanome et système immunitaire Les pistes initiales • Vitiligo associé au mélanome (1 à 20% cas) : meilleur pronostic. • Mélanomes « régressifs » : explique les cas de mélanome métastatique de primitif non retrouvé • Incidence augmentée en cas d’immunosuppression Relation étroite entre système immunitaire et mélanome Mélanome et système immunitaire La recherche • Vaccinations (réponse immune spécifique) : échec • IL2 et IFNα (réponse immune non spécifique) : quelques rares cas de réponse tumorale et de survie à long terme mais au prix d’une toxicité importante (IL2 : AMM USA) • TIL (transfert passif de lymphocytes activés) : résultats intéressants mais pratique lourde+++ Mélanome et système immunitaire La recherche • Les réelles avancées dans le domaine de l’immunologie ont débuté avec le développement d’anticorps, « checkpoint blockers » • Bloquage de freins physiologiques de la réponse immunitaire, induisant une réponse anti-tumorale indirecte. Révolution de l’immunothérapie dans le mélanome avancé • Développement de molécules appelées « Immune Checkpoint Blockers »: - anti CTLA4 - anti PD1/PDL1 Révolution de l’immunothérapie dans le mélanome avancé • Développement de molécules appelées «AntiCTLA4 Immune Checkpoint Blockers »: IPILIMUMAB = YERVOY (BMS) - anti CTLA4 - anti PD1/PDL1 Révolution de l’immunothérapie dans le mélanome avancé • Développement de molécules appelées Anti PD1 «AntiCTLA4 Immune Checkpoint Blockers »: = OPDIVO (BMS) NIVOLUMAB IPILIMUMAB = YERVOY (BMS) - anti CTLA4 - anti PD1/PDL1 PEMBROLIZUMAB = KEYTRUDA (MSD) Révolution de l’immunothérapie dans le mélanome avancé • Développement de molécules appelées «AntiCTLA4 Immune Checkpoint Blockers »: IPILIMUMAB = YERVOY (BMS) - anti CTLA4 - anti PD1/PDL1 Anti CTLA4 IPILIMUMAB (YERVOY®) Physiopathologie • AC monoclonal humain de type IgG1, dirigé contre le récepteur CTLA-4 lymphocytaire • Fonction normale = inactiver les lymphocytes • L’inhibition de ce récepteur conduit donc à une activation non-spécifique du système immunitaire par blocage d’un frein physiologique. 2010 Phase III, 674 patients, 2ème ligne ou plus – ipi 3 mg/kg + GP100 – ipi + placebo – GP100 OS (médiane en mois) IPI IPI+GP100 GP100 10 10,1 6,4 p<0,001 Premier essai à démontrer un bénéfice en termes de survie globale Obtention de l ’AMM de l’ipi en aout 2011 à la dose de 3mg/kg, 4 perfusions à 3 semaines d’intervalle, 1ère ligne de traitement, patients BRAF non mutés 2011 • 502 patients naïfs de traitement - ipi 10 mg/kg - DTIC • • • • Confirme l’efficacité de l’ipi : OS = 11,2 vs 9,1 mois Taux de réponse : 15,2 vs 10,3% Durée de réponse : 19,3 vs 8,1 mois Taux de survie à 5 ans : 18,2 vs 8,1% Avant Ipilimumab 22/04//11 Après Ipilimumab 05/08/11 Anti CTLA4 IPILIMUMAB (YERVOY®) Efficacité • Efficacité dans un faible nombre de cas (15%) • Efficacité prolongée • Efficacité retardée (activation lente du système immunitaire dans les organes lymphoïdes) Pseudo progressions initiales Nouveaux critères d’évaluation radiologiques spécifiques S0 S12 S16 S252 Hoos A, et al. J Natl Cancer Inst 2010 Anti CTLA4 IPILIMUMAB (YERVOY®) Effets secondaires • Effets secondaires immunologiques, inhabituels : • Cibles : – – – – Peau Tube digestif Foie Axe H/H Anti CTLA4 IPILIMUMAB (YERVOY®) Effets secondaires Anti CTLA4 IPILIMUMAB (YERVOY®) Effets secondaires cutanés • Manifestations les plus fréquentes • Le plus souvent de grade modéré, ne nécessitant pas l’interruption du traitement. • Prurit chez 20 à 26,5 % des patients • Eruptions maculo-papuleuses diffuses (17 à 68% cas) – apparaissant au cours des premières semaines du traitement – d’évolution favorable sous traitement antihistaminique per os et dermocorticoïdes • Vitiligos localisés ou étendus Anti CTLA4 IPILIMUMAB (YERVOY®) Effets secondaires digestifs • Diarrhée et colites auto immunes : – 25 à 50 % patients – 5 à 20 % de diarrhées grade 3 à 4 – Perforations coliques dans moins d’1 % des cas, avec quelques rares cas de décès liés traitement. GRADE TRAITEMENT ARRET? 1 2 selles /j Symptomatique : lopéramide et rééquilibration hydroélectrolytique NON 2 5 selles/j Eliminer une infection (C. difficile) Prednisone per os 1 mg/kg NON 3 ou 4 >5 selles/j Fortes doses de corticoïdes IV Infiliximab si colite sévère et corticorésistante OUI • Aucun biomarqueur prédictif de cette toxicité digestive Anti CTLA4 IPILIMUMAB (YERVOY®) Effets secondaires cutanés • Hépatites auto immunes : 3 à 9 % des cas. – Eliminer une atteinte hépatique métastatique, virale ou médicamenteuse – Selon le grade de la cytolyse : • corticothérapie systémique • voire pour les cas résistants mycophenolate mofetil (Cellcept®) – Arrêt si ASAT/ALAT>8N ou bili Totale >5N Anti CTLA4 IPILIMUMAB (YERVOY®) Effets secondaires endocriniens • Hypophysites auto immunes : 1 à 8 % cas – Diagnostic difficile : vérifier l’axe corticotrope/TSH devant une asthénie – Dosages hormonaux (T3, T4, TSH, cortisolémie, ACTH, prolactinémie, testostéronémie chez l’homme, FSH chez la femme), avant d’instaurer le traitement et sur point d’appel. – Diagnostic : déficits hormonaux +/- élargissement de l’hypophyse à l’IRM. – Traitement : substitution hormonale, le plus souvent définitive. – Atteinte le plus souvent irréversible (à l’inverse des autres toxicités). Ipilimumab : impact de la corticothérapie sur l’efficacité du traitement La prise de corticoïdes, nécessaire à la prise en charge de la plupart des toxicités sévères sous ipilimumab, semble ne pas avoir de retentissement sur la réponse tumorale y compris à long terme. Harmankaya K et al. Med Oncol 2011 Ipilimumab : perspectives • Doses optimales? Modalités de traitement d’entretien? • Pas de biomarqueurs prédictifs d’efficacité • Réponses intéressantes car prolongées, mais rares (15 à 20% des patients) • Semble être efficace en adjuvant (Eggermont A et al. ASCO Annual Meeting 2014) mais profil de toxicité rendant son utilisation difficile. • Recherche de paramètres biologiques permettant une sélection préalable serait utile compte tenu des effets secondaires et du cout du traitement (70 000 euros les 4 cures pour un patient de 75 kg…) Ipilimumab : perspectives • ASSOCIATION AUX ANTI PD1++++++++++++++ APC – T-cell Interaction Tumor Microenvironment Activation (cytokine secretion, lysis, proliferation, migration to tumor) MHC Dendritic B7 cell B7 TCR CD28 MHC TCR +++ +++ T cell T cell Tumor cell +++ CTLA-4 --- PD-1 --- PD-L1 anti-PD-1 anti-CTLA-4 --- PD-1 PD-L2 anti-PD-1 CTLA-4 Blockade (Ipilimumab) PD-1 Blockade (Nivolumab) Révolution de l’immunothérapie dans le mélanome avancé • Développement de molécules appelées Anti PD1/PDL1 « Immune Checkpoint Blockers »: = OPDIVO (BMS) NIVOLUMAB - anti CTLA4 - anti PD1/PDL1 PEMBROLIZUMAB = KEYTRUDA (MSD) Anti PD1 Physiopathologie • Autre immunothérapie non spécifique, reposant sur le blocage de PD-1 (Programmed cell death-1) • Les deux anticorps anti PD-1 disponibles : – le nivolumab (BMS) – le pembrolizumab (MSD) • En inhibant le PD-1 on induit une réactivation des lymphocytes présents dans les tumeurs et une lyse tumorale 2015 • 418 patients , 1ère ligne – nivolumab 3mg/kg/2 semaines +placébo – DTIC + placébo • Taux de survie à 1 an : 72,9% vs 42,1% (p<0,001) : interruption précoce • Taux de réponse objective = 40% vs 13,9% (p<0,001). • Le bénéfice est observé quel que soit le statut PD-L1 du patient. • Profil de tolérance en faveur du nivo. Le nivolumab (Opdivo®) a obtenu l’AMM en France en 2015 en première ligne à la posologie de 3 mg/kg tous les 15 jours, jusqu’à progression. 2015 • Phase II : 540 patients Pembro 2 mg/kg/3 semaines Pembro 10 mg/kg/3 semaines Chimiothérapie au choix de l’investigateur • Taux de réponse en faveur du pembro : 21 vs 25 vs 4 %. • PFS à 6 mois : 34 vs 38 vs 16% (p <0,0001) 2015 • Phase III, 834 patients : – pembro 10 mg/kg/2 semaines – pembro 10 mg/kg/3 semaines – ipi 3 mg/kg/3 semaines. • Taux de réponse : 33,7 vs 32,9 vs 11,9 % • PFS à 6 mois : 47,3 vs 46,4 vs 26,5% • Taux de survie à 1 an : 74,1 vs 68,4 vs 58,2 %. • Pas de différence d’efficacité selon les 2 schémas d’administration Le pembrolizumab (Keytruda®) a obtenu l’AMM en France en septembre 2015 à la posologie de 2 mg/kg toutes les 3 semaines, jusqu’à progression. Supériorité des anti PD-1? • Blocage CTLA-4 : activation non-spécifique et diffuse du système immunitaire, action prédominante dans les organes lymphoïdes. • Blocage PD-1, réactivation des lymphocytes «endormis » qui sont déjà dans les zones tumorales. Explique probablement les réponses plus rapides, fréquentes et spécifiques des anticorps anti-PD-1 par rapport au blocage de CTLA 4. Anti PD1 : effets secondaires • Généralement bas grade • 7 à 12% haut grade (grade 3/4) – – – – – – – – – Asthénie (16 a 34%) Anorexie (5-19%) Rash (10-15%) Colite/diarrhée (17%) nausées (10-15%) endocrinopathies (9%) Pneumopathies intersitielles (2-3%) Hépatites autoimmunes (3-8%) Néphropathies intersititielles (3%) Anti PD1 : effets secondaires Chronologie Weber J et al., ASCO 2015, abstract 9018 Anti PD1 : effets secondaires Prise en charge • Similaire à la gestion des AE de l’ipi. – Grade 1 : traitement symptomatique – Grade 2 : corticothérapie orale – Grade 3-4 : corticothérapie IV, arrêt du traitement • Traitement et gestion spécifiques pour chaque toxicité • Avis spécialisés+++ 2015 • Phase III, 945 patients ipi 3 mg/kg/3 semaines nivo 3 mg/kg/2 semaines ipi+nivo • Association > ipi seul PFS = 11,5 vs 2,9 mois • Association > nivo seul dans le groupe PDL1 – PFS = 11,5 vs 5,3 mois • Toxicité association > tox ipi AE grade 3-4= 55 % vs 27,3 % Association disponible en ATU aux États-Unis Actuellement pas disponible en France. Conclusion, perspectives • Immunothérapie = réel espoir thérapeutique • Nécessité de sélectionner les patients les plus susceptibles d’obtenir un bénéfice de ces traitements : – meilleure connaissance des mécanismes d’immunotolérance mis en place par la tumeur – identification de marqueurs de la réponse thérapeutique • Coût des traitements : l'association ipilimumab + nivolumab devrait coûter près de 300 000 dollars par patient et par année de traitement. • Effets secondaires non négligeables, très spécifiques, de gestion parfois difficile : prise en charge pluridisciplinaire+++