Quelle politique pour la croissance

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Quelle politique pour la
croissance ?
Les sources de la croissance économique
dans les pays de l’OCDE
1
ORGANISATION DE COOPÉRATION
ET DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUES
En vertu de l’article 1er de la Convention signée le 14 décembre 1960, à Paris, et entrée
en vigueur le 30 septembre 1961, l’Organisation de Coopération et de Développement
Économiques (OCDE) a pour objectif de promouvoir des politiques visant :
− à réaliser la plus forte expansion de l’économie et de l’emploi et une
progression du niveau de vie dans les pays Membres, tout en maintenant la
stabilité financière, et à contribuer ainsi au développement de l’économie
mondiale ;
− à contribuer à une saine expansion économique dans les pays Membres, ainsi
que les pays non membres, en voie de développement économique ;
− à contribuer à l’expansion du commerce mondial sur une base multilatérale et
non discriminatoire conformément aux obligations internationales.
Les pays Membres originaires de l’OCDE sont : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique,
le Canada, le Danemark, l’Espagne, les États-Unis, la France, la Grèce, l’Irlande,
l’Islande, l’Italie, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, le
Royaume-Uni, la Suède, la Suisse et la Turquie. Les pays suivants sont ultérieurement
devenus Membres par adhésion aux dates indiquées ci-après : le Japon (28 avril 1964),
la Finlande (28 janvier 1969), l’Australie (7 juin 1971), la Nouvelle-Zélande (29 mai
1973), le Mexique (18 mai 1994), la République tchèque (21 décembre 1995), la
Hongrie (7 mai 1996), la Pologne (22 novembre 1996), la Corée (12 décembre 1996) et
la République slovaque (14 décembre 2000). La Commission des Communautés
européennes participe aux travaux de l’OCDE (article 13 de la Convention de l’OCDE).
Published in English as :
The Policy Agenda for Growth
An Overview of the Sources of Economic Growth in OECD Countries
© OCDE 2003
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2
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Quelle politique pour la croissance ?
Les sources de la croissance économique dans les pays de l’OCDE
© OECD 2003
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Quelle politique pour la croissance ?
3
Les sentiers de croissance divergent au sein de la zone de l’OCDE …
On assiste actuellement à une modification du schéma de la croissance
au sein de la zone de l’OCDE. Durant la majeure partie de la période de
l’après-guerre, on pouvait observer une tendance générale des pays
affichant un faible PIB par habitant à rattraper les pays de la tête du
peloton. Ce schéma de convergence s’est un peu inversé dans les années
90 : en effet, les États-Unis, qui enregistraient déjà l’un des PIB par
habitant les plus élevés, ont repris une forte avance (Graphique 1). Les
sources de ce décalage des rythmes de croissance ont fait l’objet de larges
débats : était-il induit par des facteurs temporaires comme une soudaine
expansion débridée aux États-Unis, ou par des caractéristiques plus
durables de cette économie ? Le ralentissement économique a contribué
pour une bonne part à régler ce débat ; en effet, les gains de productivité
aux États-Unis sont restés importants, alors même que l’activité
économique était plus faible (Graphique 2). Plus généralement, il apparaît
qu’à l’instar des États-Unis, l’Australie, le Canada et l’Irlande ont
également affiché ces dernières années une croissance nettement plus forte
4
Graphique 1. Le PIB par habitant aux États-Unis
creuse l'écart dans les années 90
PIB réel par habitant aux États-Unis par rapport aux autres grandes économies
sur la base des PPA de 1995 et des prix de 1995
Allemagne, France et Italie
Allemagne France et Italie, tendance (1)
Japon
Japon, tendance (1)
= 100
150
PIB par hab. hors Etats-Unis
145
140
135
130
125
120
115
110
1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976
1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000
5
Graphique 2. La croissance de la productivité aux Etats-Unis reste forte
Index 1999=100
111
Productivité du travail
(1)
109
PIB réel
107
105
103
101
99
3
4
20
02
:T
1
2
20
02
:T
20
02
:T
3
2
1
4
4
20
02
:T
20
01
:T
20
01
:T
20
01
:T
20
01
:T
2
1
4
3
2
3
20
00
:T
20
00
:T
20
00
:T
20
00
:T
19
99
:T
19
99
:T
19
99
:T
19
99
:T
1
97
1. 1. La productivité du travail est mesurée par la production horaire des entreprises non agricoles.
Source : OCDE, Bureau of Labor Statistics (Etats-Unis).
que l’Europe continentale ou le Japon. Parmi les pays d’Europe, des
disparités notables des rythmes de croissance se sont également
manifestées au cours de la précédente décennie. Alors que la croissance de
la production manufacturière a été relativement uniforme dans tout le
continent, la croissance dans les autres secteurs a pris du retard dans
certains pays de l’UE.
… ce qui soulève des questions sur l’ampleur et le rythme des
réformes économiques …
Avec le recul, ces divergences de résultats en matière de croissance
semblent assez enracinées. Elles continuent de prévaloir aujourd’hui, alors
même que l’Europe et les États-Unis se trouvent dans la même phase de
faiblesse conjoncturelle. Au-delà des évolutions cycliques, plusieurs
6
facteurs peuvent expliquer pourquoi les économies de l’OCDE se trouvent
sans doute sur des sentiers de croissance divergents. Ces différences
proviennent en partie de facteurs démographiques, certains pays
connaissant une relativement forte augmentation de leur population active.
Cela étant, l’action des pouvoirs publics importe également, car certaines
économies de l’OCDE ont considérablement amélioré le fonctionnement
de leurs marchés du travail et des produits, avec des conséquences très
positives pour l’innovation, le progrès technique et la création d’emplois.
… et a amené l’OCDE à entreprendre un vaste programme de
travail sur la croissance
De toute évidence, il faudra recourir à des politiques macroéconomiques judicieuses pour ramener l’économie mondiale sur la voie
d’un redressement durable. Toutefois, pour que l’entreprise soit pleinement
couronnée de succès, il conviendra également d’accélérer le rythme des
réformes économiques. Savoir quelles sont les mesures qui marchent et
diffuser les pratiques exemplaires est au cœur de la mission de l’OCDE.
C’est la raison pour laquelle, ces dernières années, l’Organisation a
effectué tout un ensemble d’études empiriques dont l’essentiel est résumé
dans l’ouvrage Les sources de la croissance économique dans les pays de
l’OCDE qui vient d’être publié. Cette étude nous permet de mieux
comprendre ce qui doit être entrepris et quelle croissance supplémentaire
nous pouvons attendre de mesures judicieuses et de réformes économiques
audacieuses. À examiner les estimations quantitatives figurant dans cet
ouvrage, il semble que les profits retirés de réformes réussies sont
effectivement considérables.
Qu’est-ce qui a déterminé la divergence d’évolution ? Les rôles
respectifs de l’emploi et de la productivité
Il y a fondamentalement deux raisons expliquant pourquoi le PIB par
habitant de certains pays peut être à la traîne. Premièrement, l’utilisation de
la main-d’œuvre y est sans doute trop faible, par exemple parce que de trop
nombreuses personnes sont laissées à l’écart du marché du travail. C’est
une faible participation aux marchés du travail de ce type qui explique
pourquoi le PIB par habitant dans l’Union européenne est inférieur de
25 pour cent à celui des États-Unis (Graphique 3). Deuxièmement, la
productivité peut aussi constituer un autre point faible de ces économies.
C’est ainsi qu’au Japon, la moindre productivité est à l’origine du retard du
PIB par habitant du pays par rapport aux États-Unis. Au Japon en effet,
l’ampleur des investissements ne s’est pas traduite par des améliorations à
7
due concurrence de la productivité, très vraisemblablement faute de bon
fonctionnement des marchés des produits et des marchés financiers. La
faiblesse de la concurrence sur les marchés des produits et des services
peut de même expliquer en partie pourquoi la croissance de la productivité
et la diffusion des technologies de l’information et des communications
(TIC) sont restées décevantes dans un certain nombre de pays européens.
La tâche des pouvoirs publics est vaste
Ces performances contrastées montrent que la pleine mobilisation des
ressources en termes de travail et de capital va rester le défi permanent de
l’avenir. Comme ce document entend le montrer, l’action des pouvoirs
publics doit se déployer sur tous les fronts. Les mesures macroéconomiques vont être essentielles pour rétablir la stabilité qui permet au
travail et au capital de bien jouer leur rôle. Il va falloir améliorer
considérablement les politiques du marché du travail dans de nombreux
pays pour assurer le plein emploi dans son sens le plus général. Il faudra
aussi mettre en place une surveillance et une réglementation financières
convenables pour rétablir la confiance dans la capacité des marchés à
orienter l’épargne vers les affectations les plus utiles. Il sera enfin essentiel
de susciter et, dans de nombreux pays, de renforcer les incitations à la
concurrence et à l’innovation en vue de répartir plus largement les gains de
productivité au sein de la zone de l’OCDE et de tirer pleinement parti des
TIC.
Il est essentiel de prendre des mesures macro-économiques
judicieuses
Les mesures macro-économiques ne contribuent pas seulement à
façonner le cycle de l’activité, car elles influent également sur l’évolution
tendancielle de la croissance. Prenons l’exemple des mesures destinées à
assurer la stabilité des prix. Les travaux de l’OCDE indiquent que la
réduction du niveau de l’inflation dans les années 90 par rapport aux
années 80 a fait progresser le PIB par habitant de quelque 2 pour cent en
encourageant le développement de l’investissement (Tableau 1). De même,
la réduction de l’instabilité de l’inflation passe pour avoir induit une
augmentation d’environ 1 à 1½ pour cent du PIB par habitant en instaurant
un cadre sûr de répartition des ressources. Par ailleurs, la mondialisation
semble payer : on estime en effet que le développement des échanges
commerciaux internationaux a apporté quelque 4 pour cent de
8
Graphique 3. Différences de PIB par habitant : le rôle de l'utilisation et de la productivité du travail
Différences en points, sur la base des PPA, du PIB tendanciel par habitant par rapport aux Etats-Unis, 2000
Ecart en % par rapport au
PIB par hab. aux Etats-Unis
=
-75
15
+
Effet de l'utilisation du travail
Effet de la productivité du travail
3
Norvège
Canada
Suisse
Danemark
Islande
Irlande
Japon
Belgique
Autriche
Pays-Bas
Australie
Allemagne
Finlande
Suède
France
Italie
Union
européenne
RoyaumeUni
NouvelleZélande
Espagne
Corée
Portugal
Grèce
Rép.
tchèque
Hongrie
Mexique
-60
-45
-30
-15
0
en %
-75 -60 -45 -30 -15
0
en %
15
-75
-60
-45
-30
-15
0
15
en %
1. Les effets démographiques dus aux changements du ratio de la population en âge de travailler à la population totale n'apparaissent pas dans le graphiqu
Ces effets sont relativement limités, inférieurs à 5 % pour tous les pays.
2. Sur la base des taux d'emploi et de la durée moyenne du travail.
3. PIB par heure travaillée.
Source : OCDE.
9
plus au PIB par habitant d’une décennie sur l’autre. En revanche, des
éléments montrent que l’alourdissement de la fiscalité a prélevé 1 pour
cent sur le PIB par habitant dans les années 80 et 90.
1
Tableau 1. Éléments caractéristiques ressortant des régressions de la croissance macro-économique
Variable
Impact sur la production par personne
en âge de travailler (%)2
Effet via
Effet via
l'efficience
Effet global
l'investissement
économique
Rythme de l'inflation, baisse d'un point
0.4 to 0.5
Memorandum
Comparaison entre les
années 80 et 90...3
0.4 to 0.5
l'inflation a diminué
d'environ 4 points
2.0
l'écart-type de
l'inflation s'est réduit
d'environ 0.7 points
-0.6 to -0.7
la charge d'imposition a
diminué d'environ 1.5
point
Variabilité de l'inflation, baisse de 1% de
l'écart-type de l'inflation
2.0
Charge d'imposition, augmentation d'un
point4
-0.3
Intensité de la R-D- des entreprises,
augmentation de 0.1 point4
1.2
1.2
l'intensité de la R-D des
entreprises a augmenté
d'environ 0.1 point
Exposition aux échanges commerciaux,
augmentation de 10 points4
4.0
4.0
l'exposition aux
échanges commerciaux
a augmenté d'environ
-0.3 to -0.4
1. Les valeurs figurant dans ce tableau sont les estimations des effets à long terme sur la production par personne en âge de travailler
d'une politique donnée. La fourchette indiquée reflète les valeurs obtenues en fonction de différentes spécifications
de l'équation de la croissance.
2. L'effet direct désigne l'impact sur la production par hab. en sus de toute influence potentielle sur l'accumulation de capital physique.
L'effet indirect désigne l'impact combiné de la variable sur le taux d'investissement et, par ce biais, sur la production par hab..
3. Variation moyenne entre la moyenne des années 80 et la moyenne des années 90 pour un échantillon de 21 pays de l'OCDE,
à l'exclusion des nouveaux Membres ainsi quede l'Islande, du Luxembourg et de la Turquie.
4. En pourcentage du PIB.
Source : OCDE.
La réforme du marché du travail reste prioritaire…
La moindre utilisation de la main-d’œuvre en Europe par rapport aux
États-Unis est en partie imputable à l’ampleur du chômage et à la durée du
travail plus courte. Elle est également due au relativement grand nombre
de personnes qui restent entièrement à l’écart du marché du travail : c’est
ainsi que, dans l’Union européenne, quelque 30 pour cent de la population
en âge de travailler n’est ni employée, ni à la recherche d’un emploi, contre
10
moins de 25 pour cent aux États-Unis. Dans une bonne partie de l’Europe,
on a vu se multiplier les départs anticipés à la retraite et, dans certains
pays, de nombreuses femmes n’ont toujours pas les incitations et les
opportunités suffisantes pour se lancer dans une vie professionnelle
prolongée. En outre, le chômage se concentre souvent fortement chez les
personnes sans qualifications et les jeunes. Dans de nombreux pays, en
particulier en Europe, il reste encore beaucoup à faire pour rétablir de
vigoureuses incitations à travailler et à embaucher. Les réformes de la
fiscalité et des prestations sociales, la baisse des coûts non salariaux du
travail, l’instauration d’une protection équilibrée de l’emploi et
l’amélioration du ciblage des programmes actifs du marché du travail y
sont souvent nécessaires.
… les mesures d’amélioration des compétences de la main-d’œuvre
sont un facteur de croissance …
La « qualité » de la main-d’œuvre, telle qu’elle ressort de sa formation et
de ses compétences, produit également des effets mesurables sur la
croissance. Actuellement, les populations en âge de travailler de la plupart
des pays de l’OCDE comptent de 10 à 14 ans de formation initiale par
habitant, contre 7 à 11 ans environ en 1970. Cette amélioration de la
formation initiale passe pour avoir accru le PIB par habitant dans des
proportions de 10 à 20 pour cent, les individus, mais aussi la société dans
son ensemble, en retirant des profits considérables.
… de même que les mesures de promotion du capital cognitif par
l’intermédiaire de la R-D
Les éléments dont on dispose mettent en évidence un lien étroit entre la
recherche-développement (R-D) et la croissance. La R-D des entreprises
exerce l’influence la plus directe sur la croissance, parce qu’il s’agit
souvent de recherches effectuées dans un objectif immédiat d’amélioration
de la productivité. Les travaux de l’OCDE montrent que l’augmentation de
la R-D des entreprises dans les années 90 par rapport à la précédente
décennie ont stimulé la production par habitant de plus de 1 pour cent
(Tableau 1). La recherche dans le secteur public entretient naturellement
une relation plus complexe avec la croissance dans la mesure où elle est
moins axée sur des applications commerciales, quoiqu’elle soit souvent à
l’origine de connaissances fondamentales importantes et qu’elle travaille
fréquemment en tandem avec des entreprises commerciales. De fait, une
bonne partie de la politique en matière de R-D vise actuellement à
améliorer le lien entre recherches du secteur public et du secteur privé.
11
Le rôle d’une réglementation favorable à la concurrence sur le
marché des produits est essentiel pour la croissance
Une réglementation favorable à la concurrence sur le marché des
produits contribue à la croissance à bien des égards. De fait, les travaux de
l’OCDE montrent à quel point une réglementation restrictive du marché
des produits freine considérablement les entreprises dans leurs efforts pour
rattraper les leaders de leur domaine. En revanche, une réglementation
stimulant la concurrence sur le marché des produits favorise l’efficience
managériale et, en dernière analyse, l’innovation, l’adoption de nouvelles
technologies et la croissance. En particulier, l’une des raisons pour
lesquelles de nombreux pays européens ont pris du retard dans le
développement du secteur des TIC tient à la rigueur de leur
réglementation. Par exemple, on estime que si de nombreux pays d’Europe
continentale réformaient la conception de leur réglementation, leurs
secteurs retardataires pourraient réduire leur écart de productivité dans des
proportions pouvant atteindre 10 pour cent.
Au niveau de l’entreprise, l’existence de dispositifs réglementaires
permettant la « destruction créatrice » sont importants …
En arrière-plan des augmentations de la productivité moyenne d’un secteur
donné, il faut imaginer l’existence d’un monde turbulent dans lequel la
productivité progresse dans certaines firmes et diminue dans d’autres.
Parallèlement, de nouvelles entreprises apparaissent sur le marché, tandis
que les firmes existantes se développent, régressent ou disparaissent. Dans
le cadre de la première étude internationale de statistiques au niveau des
entreprises, ces statistiques ayant été rendues aussi cohérentes que possible
entre les pays, les travaux de l’OCDE ont permis de mieux comprendre
comment la productivité est générée. Cette étude a montré que dans la
plupart des secteurs, de la moitié aux trois quarts des gains de productivité
sont générés par des gains de productivité au sein même de différentes
entreprises en activité. Dans la majorité des cas, le reste de la croissance de
la productivité s’explique par la fermeture d’entreprises peu productives
(Graphique 4). Cela étant, l’entrée sur le marché de firmes à productivité
supérieure à la moyenne revêt une importance notable pour la productivité
dans certains secteurs, notamment ceux de la haute technologie. Les
entreprises nouvelles tendent en effet à contribuer plus fortement à
l’efficience générale en faisant pénétrer sur les marchés des technologies
plus modernes que celles des entreprises en place. De même, les nouvelles
entreprises peuvent plus facilement veiller à ce que leur main-d’œuvre,
leurs biens d’équipement et leurs techniques de production soient adaptés
12
aux conditions du marché sans subir les coûts d’ajustement et parfois se
heurter à l’inertie des comportements que connaissent les entreprises en
place.
1
Graphique 4. Le rôle de la destruction créative dans la croissance de la productivité
Décomposition de la croissance de la productivité du travail dans le secteur manufacturier
Part en % de la croissance annuelle totale de la productivité revenant à chaque composante
Contributions provenant de :
2
Croissance de la productivité au sein des entreprises
Redistribution de la production entre les entreprises existantes
Entrée de nouvelles entreprises sur le marché
Sorties d’entreprises du marché
1.6
175
3.0
155
135
115
5.0
5.2
2.3
2.1
3.9
2.3
4.3
4.1
5.3
4.7
3.1
2.5
95
75
55
35
15
-5
-25
-45
-65
87-92 89-94
Finlande
87-92
France
92-97
Allemagne
occ.
87-92 92-97
Italie
87-92 92-97
Pays-Bas
87-92 92-97
Portugal
87-92 92-97
Royaume-Uni
87-92 92-97
Etats-Unis
Les chiffres figurant au-dessus des barres sont les taux globaux de croissance de la productivité (variation annuelle en %)
1. Voir OCDE (2003), Les sources de la croissance économique dans les pays de l'OCDE , pour plus de précisions.
2. La somme des composantes peut ne pas être égale à sans en raison des arrondis.
Source : OCDE.
… tout en étant différents selon les pays
Les « jeunes pousses » aux États-Unis tendent à être plus petites et, en
moyenne, moins productives que dans l’Union européenne, mais celles qui
survivent tendent à se développer beaucoup plus vite. Ce qui semble se
produire, c’est que la faiblesse des coûts administratifs de création d’une
entreprise aux États-Unis ainsi que la réglementation relativement légère
du marché du travail encouragent les entrepreneurs à se lancer dans leur
activité sur une petite échelle. En revanche, les coûts supérieurs d’entrée et
d’ajustement de la main-d’œuvre en Europe tendent à favoriser une
évaluation des plans d’entreprise préalablement à l’entrée – de sorte qu’ils
sont moins soumis à l’épreuve du marché – et une expansion
manifestement plus lente de l’entreprise. Même si l’approche plus prudente
présente des mérites incontestables, la démarche plus fluide et plus risquée
semble mieux convenir au développement des TIC. Bien que le
ralentissement actuel montre qu’une partie de l’activité entrepreneuriale
débridée de la fin des années 90 a sans doute été excessive, elle a, pour une
13
bonne partie, suscité des percées en matière d’innovation et une diffusion
rapide de la technologie vers les entreprises et les ménages. Si l’on veut
favoriser le progrès technologique selon ce mode entrepreneurial, il
apparaît donc particulièrement utile d’assouplir la réglementation de façon
à stimuler l’arrivée de nouvelles entreprises sur le marché.
Graphique 5. Les nouvelles entreprises aux États-Unis débutent à plus petite échelle,
mais celles qui survivent se développent plus rapidement qu’en Europe
Taille moyenne des nouvelles entreprises manufacturières, 1989-94
Taille relative en fonction du nombre de salariés par entreprise
80
60
40
20
0
Canada
Etats-Unis
Allemagne
occ.
Roy. Uni
Portugal
Pays-Bas
France
Italie
Danemark
Finlande
Progression nette de l'emploi dans les entreprises manufacturières ayant survécu au bout de 2 ans,
années 1990
Progression nette par rapport à l'emploi initial
1.6
1.2
0.8
0.4
0
Finlande
Roy. Uni (1)
France
Allemagne occ.
Portugal
Italie
Etats-Unis
1. Les données sur l'emploi net au Royaume-Unu font référence aux cohortes d'entreprises entrées sur le marché durant la période 1985-90.
Source : OCDE.
Grâce à des dispositifs judicieux, certains secteurs, notamment les
TIC, produisent un large impact sur la croissance
Les technologies de l’information et des communications (TIC), sous
forme de matériel et de logiciels informatiques ainsi que de produits et
services de télécommunications, exercent un impact économique sensible
et en évolution constante. Même si une partie des discours les plus
enflammés affirmant que les TIC avaient créé une nouvelle économie se
sont révélés sans fondement, on dispose de plus en plus d’éléments
montrant qu’il y a bien eu une accélération de la productivité.
Premièrement, un certain nombre de pays de l’OCDE, notamment la
14
Finlande, l’Irlande et les États-Unis, ont connu une augmentation de leur
productivité parce que les entreprises qui produisent les équipements des
TIC et qui assurent les services correspondants sont devenues des
composantes importantes de leurs économies. De nombreuses branches de
ce secteur ont enregistré une croissance massive de leur productivité
assortie d’une baisse des prix d’unités d’équipement comparables,
contribuant à une expansion permanente du marché auprès des nouveaux
utilisateurs et à une demande vigoureuse de la part des utilisateurs existants
en vue du remplacement de leurs anciens équipements et logiciels. Dans
plusieurs pays de l’OCDE, les branches des TIC représentent actuellement
plus de 10 pour cent de la production du secteur des entreprises.
Deuxièmement, les très vastes possibilités d’application des TIC sur le lieu
de travail ont stimulé la productivité de nombreux autres secteurs,
notamment parce que des tâches traditionnelles, comme la comptabilité et
l’administration, peuvent désormais être effectuées plus efficacement.
Troisièmement, ces technologies permettent de nouveaux modes
d’organisation de la production, de la consommation et des marchés, ce qui
donne lieu à des gains de productivité résultats d’effets de « retombées »
ou de « réseau ». L’OCDE continue pour sa part son suivi de l’impact
économique du secteur des TIC.∗
Disposer de marchés de capitaux suffisamment développés et
judicieusement réglementés est également essentiel
Les marchés de capitaux ne se contentent pas d’orienter l’épargne vers
les investissements, car ils permettent aussi la réalisation efficiente des
investissements et la diversification des risques. De fait, les travaux de
l’OCDE confirment que, de façon générale, la profondeur des marchés va
de pair avec des niveaux élevés de l’investissement. Même si les pays de
l’OCDE sont tous dotés de marchés de capitaux convenablement
développés et souvent interconnectés, on peut néanmoins observer
certaines disparités importantes qui suscitent des questions touchant à
l’action des pouvoirs publics. Ainsi, les résultats médiocres en matière de
croissance enregistrés ces dernières années par le Japon en dépit de
niveaux élevés d’investissement peuvent être en partie imputés au mauvais
fonctionnement des marchés de capitaux. Le rôle considérable que le
capital-risque a joué dans certains pays dans le développement des
industries de haute technologie amène à se demander si les autres pays
∗
La dernière évaluation du secteur des TIC effectuée par l’OCDE, Mettre à profit les
TIC – Une comparaison internationale des incidences des TIC sur les performances
économiques vient d’être publiée.
15
n’imposent pas des contraintes excessives aux investissements à haut
risque. De nouveaux problèmes sont récemment apparus avec l’éclatement
de la bulle du marché des actions et nécessitent une refonte du dispositif de
réglementation. La gravité des scandales concernant diverses entreprises a
soulevé des questions sur les mécanismes comptables, les conflits
d’intérêts en matière de comptabilité ainsi que des problèmes de
gouvernement d’entreprise. Pour rétablir l’intégrité et l’efficacité des
marchés de capitaux, il faudra trouver un juste équilibre entre la nécessité
de renforcer la surveillance et la réglementation et le souci de ne pas porter
préjudice aux capacités d’autocorrection propres aux marchés.
Quels doivent être les axes de l’action des pouvoirs publics dans les
différentes régions de l’OCDE ?
Compte tenu de toutes les mesures susceptibles d’influencer la
croissance, il est essentiel de définir des priorités. Il convient d’abord
d’établir certaines distinctions selon les pays quant aux premières mesures
auxquelles les autorités devraient peut-être penser pour stimuler la
croissance. Pour une bonne partie de l’Europe, la priorité n°1 dans ce
domaine reste la question de remettre les chômeurs au travail et d’endiguer
le flot des retraites anticipées. Accélérer l’unification de marchés très
concurrentiels des produits et des services revêt également une importance
cruciale si l’on veut améliorer la diffusion des TIC et les perspectives en
matière d’emploi. Au Japon, l’utilisation médiocre du capital se reflète
dans une série de problèmes structurels, dans les secteurs financier et
bancaire ainsi qu’en matière de gouvernance des entreprises et du secteur
public. Même si les États-Unis, plus que tout autre pays, ont démontré les
avantages d’une gestion macro-économique judicieuse dans les années 90
et au-delà, il est essentiel qu’ils poursuivent dans cette voie afin d’éviter
des déséquilibres déstabilisateurs de leurs finances publics et de leurs
paiements extérieurs. Parallèlement, un certain nombre de mesures doivent
être à l’ordre du jour de presque tous les pays de l’OCDE. C’est ainsi que
le rôle considérable de l’éducation comme instrument de développement
des compétences de la main-d’œuvre et de création de connaissances pour
l’innovation tend à montrer qu’elle doit en permanence figurer dans les
plans d’action pour la croissance. De même, on peut faire beaucoup pour
améliorer la politique en matière de R-D, de façon à accroître l’efficacité
de l’intervention des pouvoirs publics dans le processus générant
l’innovation. Il est également manifeste que les améliorations apportées à
la réglementation du marché des produits génèrent des dividendes sous
forme de croissance, en particulier, dans la période actuelle, les
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améliorations qui contribuent à élargir la diffusion des nouvelles
technologies.
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