cours 2, le 3 novembre 2009
Espaces de Hilbert
1. Formes hermitiennes et produits scalaires
On va travailler avec des espaces vectoriels sur le corps K=Rou K=C.
efinition. Soit E un espace vectoriel sur K; une forme hermitienne sur E est une
application ϕde E ×E dans Kqui poss`ede les propri´et´es aet bsuivantes :
a. Pour tout yE, l’application xEϕ(x, y) est K-lin´eaire sur E.
b. Pour tous x, y E, on a la sym´etrie hermitienne
ϕ(y, x) = ϕ(x, y).
Cons´equences. Si ϕest hermitienne, on a
ϕ(x, x) est r´eel,
yϕ(x, y) est additive et ϕ(x, λy) = λϕ(x, y),
ce qui se traduit en disant que yϕ(x, y) est antilin´eaire. De plus,
(1) ϕ(x+y, x +y) =ϕ(x, x) + ϕ(x, y) + ϕ(y, x) + ϕ(y, y)
=ϕ(x, x) + 2 Re ϕ(x, y) + ϕ(y, y).
In´egalit´e de Cauchy-Schwarz
Dans le cas d’une forme hermitienne 0 sur E (ce qui signifie que ϕ(x, x)0 pour tout
vecteur xE), on a l’in´egalit´e de Cauchy-Schwarz
x, y E,|ϕ(x, y)| ≤ ϕ(x, x)1/2ϕ(y, y)1/2.
Preuve. — Consid´erons le trinˆome de variable r´eelle t
T(t) = ϕ(tx +y, tx +y) = t2ϕ(x, x) + 2tRe ϕ(x, y) + ϕ(y, y).
Par hypoth`ese, on a T(t)0 pour tout r´eel t, ce qui implique que le discriminant du
trinˆome T est 0 ; par cons´equent,
Re ϕ(x, y)2ϕ(x, x)ϕ(y, y).
Cela suffit dans le cas o`u K=R, mais dans le cas complexe, il faut faire un pas de plus.
Posons
ϕ(x, y) = reiθ
avec r0 et θr´eel. Puisque K=C, on peut consid´erer le vecteur x1= eiθxde E, et
lui appliquer l’in´egalit´e pr´ec´edente ; mais
Re ϕ(x1, y) = Reeiθϕ(x, y)=r=|ϕ(x, y)|,
et
ϕ(x1, x1) = eiθeiθϕ(x, x) = ϕ(x, x),
donc
|ϕ(x, y)|2=Re ϕ(x1, y)2ϕ(x1, x1)ϕ(y, y) = ϕ(x, x)ϕ(y, y).
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Semi-norme d´eduite d’une forme hermitienne 0
Si on pose kxk=ϕ(x, x)1/2, on voit que la fonction xE→ kxkest une semi-norme
sur E ; en effet :
kλxk=ϕ(λx, λx)1/2=λλϕ(x, x)1/2=|λ|kxk
pour tout scalaire λK, et par Cauchy-Schwarz
kx+yk2=kxk2+ 2 Re ϕ(x, y) + kyk2≤ kxk2+ 2kxkkyk+kyk2=kxk+kyk2,
ce qui donne l’in´egalit´e triangulaire kx+yk ≤ kxk+kyk.
Une forme hermitienne ϕ0 sur E telle que
ϕ(x, x) = 0x= 0E
est appel´e produit scalaire sur E, souvent not´e
hx, yi=ϕ(x, y).
La semi-norme associ´ee `a un produit scalaire sur E est une norme sur E :
kxk= 0x= 0E.
Rappel : sur un espace norm´e, la fonction norme x→ kxkest lipschitzienne, donc
continue, par l’in´egalit´e triangulaire :
kxk − kyk
≤ kxyk.
En utilisant le produit scalaire et la norme kxk=hx, xi1/2, on traduit l’´equation (1)
en
kx+yk2=kxk2+ 2 Rehx, yi+kyk2.
On en d´eduit la relation de la m´ediane
kx+yk2+kxyk2= 2kxk2+ 2kyk2.
On traduit Cauchy-Schwarz avec le produit scalaire et la norme :
|hx, yi| ≤ kxkkyk.
Le produit scalaire avec un vecteur fix´e yde E,
`y:xE→ hx, yi ∈ K,
est une fonction lipschitzienne de constante kyk, donc continue sur l’espace norm´e E,
|`y(x1)`y(x2)|=|hx1, yi − hx2, yi| =|hx1x2, yi| ≤ kykkx1x2k.
L’application `yest donc une forme lin´eaire continue sur E. On verra plus loin que sur
un espace de Hilbert H, toute forme lin´eaire continue `est de cette forme.
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Exemples de produit scalaire.
Sur Cn, le produit scalaire usuel est d´efini pour deux vecteurs quelconques
u= (u1,...,un), v = (v1,...,vn)Cnpar hu, vi=
n
X
j=1
ujvj.
Sur L2(Ω,A, µ), on d´efinit le produit scalaire
hf, gi=Z
f(ω)g(ω) dµ(ω).
La norme associ´ee est la norme Lpavec p= 2. L’espace L2est complet pour cette norme
d´eduite du produit scalaire.
Sur E = C([0,1]), on peut d´efinir le produit scalaire
hf, gi=Z1
0
f(x)g(x) dx.
La norme associ´ee est la norme induite sur C([0,1]) par la norme de L2([0,1]). Muni de
cette norme, l’espace E n’est pas complet (exercice facile).
Orthogonalit´e
On suppose que E est un espace vectoriel muni d’un produit scalaire. Deux vecteurs xet
yde E sont orthogonaux si hx, yi= 0 (on a aussi hy, xi= 0), et on note xy. Si A est
une partie de E, on dit que xest orthogonal `a A si xest orthogonal `a tous les ´el´ements
de A ; dans ce cas, on note xA.
Exemple : les fonctions ek(x) = eikx,kZ, sont deux `a deux orthogonales (et de
norme 1) dans l’espace L2([0,2π],dx/(2π)),
hek, e`i=Z2π
0
ek(x)e`(x)dx
2π=Z2π
0
ei(k`)xdx
2π=δk`,0=δk,`.
Pythagore
Si xyon a
kx+yk2=kxk2+kyk2.
La relation se g´en´eralise par r´ecurrence au cas d’un nombre fini de vecteurs : si les
vecteurs v1,...,vnsont deux `a deux orthogonaux, on a
kv1+···+vnk2=
n
X
k=1
kvkk2.
efinition. Un espace de Hilbert est un espace vectoriel H r´eel ou complexe, muni d’un
produit scalaire, et qui est complet pour la norme d´eduite de ce produit scalaire.
Exemple : L2(Ω,A, µ), muni du produit scalaire d´efini plus haut, est un espace de
Hilbert. L’espace `2des suites num´eriques de carr´e sommable en est un cas particulier
(mesure de comptage sur N).
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2. S´eries, familles sommables
2.1. S´eries de vecteurs dans un espace vectoriel norm´e
Soient E un espace vectoriel norm´e et u0,...,un,...des vecteurs de E ; posons pour tout
entier n0
Un=u0+···+un,
vecteur de E appel´e somme partielle de la s´erie Pun.
efinition. On dit que la s´erie de vecteurs Pukconverge dans E si la suite (Un) des
sommes partielles converge vers un vecteur vE,
lim
nkUnvkE= 0 ;
on dit alors que vest la somme de la s´erie et on note
+
X
k=0
uk=v.
Exercice. Montrer qu’un espace norm´e E est complet si et seulement si la propri´et´e
suivante est v´erifi´ee : pour toute s´erie Pukde vecteurs de E, la condition
Xkukk<+
implique la convergence dans E de la s´erie Puk.
S´eries de vecteurs orthogonaux dans un Hilbert
Proposition 1. On suppose que les vecteurs (uk)k>0d’un espace de Hilbert Hsont
deux `a deux orthogonaux. La s´erie de vecteurs Pukconverge dans Hsi et seulement si
Xkukk2<+.
Lorsque la s´erie de vecteurs converge, on a
+
X
k=0
uk
2=
+
X
k=0
kukk2.
Preuve. — Posons pour tout entier n0
Vn=ku0k2+···+kunk2.
Si m < n, on a
UnUm=um+1 +···+un,
donc par orthogonalit´e
kUnUmk2=kum+1k2+···+kunk2= VnVm.
On voit ainsi que la suite (Un) est de Cauchy dans H si et seulement si la suite (Vn) des
sommes partielles de la s´erie num´erique Pkukk2est de Cauchy. Comme H et Rsont
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complets, la s´erie de vecteurs converge dans H si et seulement si la s´erie des carr´es des
normes converge dans R.
Comme la norme est une fonction continue sur H, on a par continuit´e et par
Pythagore, lorsque la s´erie converge,
+
X
k=0
uk
2= lim
n
n
X
k=0
uk
2= lim
n
n
X
k=0
kukk2=
+
X
k=0
kukk2.
R´eciproquement, supposons que la s´erie de vecteurs converge : la suite (Un) des
sommes partielles converge vers un vecteur vH, donc kUnkconverge vers kvket
+>kvk2= lim
nkUnk2= lim
n
n
X
k=0
kukk2=
+
X
k=0
kukk2,
ce qui montre que la s´erie des carr´es des normes converge.
Suite orthonorm´ee
Dans le cas d’une suite orthonorm´ee (fn), on a pour toute suite de coefficients (λn) : la
s´erie Pλnfnconverge dans H si et seulement si P|λn|2<+, et
+
X
k=0
λkfk
2=
+
X
k=0
|λk|2.
Il suffit d’appliquer les r´esultats pr´ec´edents aux vecteurs uk=λkfk.
Un th´eor`eme de F. Riesz (1907 ; int´erˆet principalement historique) : soit (fn)une suite
orthonorm´ee dans l’espace de Hilbert H = L2(0,1) ; pour qu’il existe une fonction gde H
telle que
hg, fni=λn
pour tout n, il faut et il suffit que
X|λn|2<+.
Preuve. — Dans un sens, on applique l’in´egalit´e de Bessel (voir plus loin, corollaire 1).
Dans l’autre sens, si les coefficients sont de carr´e sommable on peut poser
g=
+
X
k=0
λkfkH.
Par continuit´e du produit scalaire, on obtient pour tout entier n0
hg, fni= lim
KDK
X
k=0
λkfk, fnE=λnhfn, fni=λn.
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