Industrielles

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Le JARDIN des PLANTES INDUSTRIELLES et TINCTORIALES : l’INDIGOTIER
Noms communs : indigotier ou indigo des teinturiers ou indigo des Indes
Nom scientifique : Indigofera tinctoria L., 1753
Classification : famille des Fabacées
L’indigotier est un arbuste des régions chaudes dont les feuilles sont utilisées pour la préparation de la teinture d’indigo
(coloration bleu-pourpré). Les feuilles et les racines sont également utilisées dans la médecine traditionnelle de plusieurs
pays (Inde, Chine, Afrique du Sud). Le nom provient du latin Indicum désignant les Indes orientales et fero qui signifie
porter. Ce genre comprend plus de sept cents espèces de plantes annuelles, vivaces ou vivaces arbustées originaires des
zones tropicales du globe.
Description
Arbuste touffu de 60 à 120 cm de haut. Les feuilles sont composées de 9 à 13 folioles (imparipennées). Le pétiole
et le rachis sont recouverts de poils. Les fleurs sont groupées en inflorescence simple, c’est-à-dire un ensemble de
fleurs disposées sur un axe commun. Elles sont zygomorphes (leur axe de symétrie est vertical). Le fruit s’appelle
une gousse : de 20 à 35 mm de long, étroite et incurvée aux extrémités, elle renferme 7 à 12 graines.
Fleur d’indigotier
Indigotier (arbuste)
Source : http://commons.wikimedia.org/wiki/Indigofera_tinctoria?uselang=fr#mediaviewer/File:Indigofera_tinctoria1.jpg
Source : http://commons.wikimedia.org/wiki/Indigofera_tinctoria?uselang=fr#mediaviewer/File:Indigofera_tinctoria2.jpg
Où trouve-t-on cette plante ?
L’origine de l’indigotier est incertaine. Il est néanmoins présent en Asie du sud-est (Inde, Asie méridionale) et en
Afrique. Sa culture comme plante tinctoriale l’a répandu en Amérique, en Chine et aux Antilles françaises.
1 – Jardin Musée Balaguier /© Réseau Canopé 2015
Utilisation
Pour répondre à la demande croissante de la teinture indigo dans leur industrie textile en plein développement,
les Européens entreprirent la culture de l’indigo à grande échelle dans leurs colonies du Nouveau Monde et d’Asie
(Inde, Java). Cette culture se termina avec l’utilisation des teintures synthétiques. Actuellement l’indigo reste la
teinture végétale la plus importante en Afrique occidentale.
Les feuilles et les racines sont utilisées dans la médecine traditionnelle de plusieurs pays comme dépuratif.
En tant que Fabacée (légumineuse), elle est aussi cultivée pour l’amélioration des sols. Cette plante à la faculté de
s’associer avec des bactéries du sol (Rhizobium leguminosarum) pour transformer l’azote atmosphérique en une
forme assimilable pour la plante.
Lexique
Plante annuelle : plante qui meurt à la fin de l’été et qui laisse des graines.
Plante vivace : plante qui vit plusieurs années.
Folioles imparipennées : lorsque le limbe d’une feuille est très divisé, chaque partie de la feuille semble être une
petite feuille secondaire. Ces divisions sont appelées folioles. Sur l’indigotier, elles sont en nombre impair.
Limbe : partie la plus élargie de la feuille, le plus souvent aplatie.
Pétiole : partie étroite qui rattache la feuille à la branche.
Rachis : partie portant les folioles chez les plantes à feuilles composées.
Inflorescence : ensemble des fleurs voisines les unes des autres.
Dépuratif : qui débarasse l’organisme des toxines et des déchets.
2 – Jardin Musée Balaguier /© Réseau Canopé 2015
L’INDIGO
Un pigment bleu foncé
Son nom vient du mot grec Indikon qui signifie « colorant d’Inde », en portugais indigo (du latin indicum, indigo, de
Indicus, Indien).
Il existe plusieurs « plantes à indigo » :
Dans les textes anciens, le terme « indigo » désignait la matière colorante extraite des feuilles de l’indigotier. Il ne
s’appliquait pas aux teintures bleues extraites d’autres plantes tinctoriales.
À partir de la fin du XIXe siècle, les chimistes montrèrent que la couleur bleue des teintures extraites des plantes
comme le pastel des teinturiers, Isatis tinctoria (nommé « guède » dans le Nord), la renouée des teinturiers, Polygonum tinctorium en Asie Orientale, l’indigo d’Assam en Asie (Strobilanthes cusia) ou encore la liane à indigo, Philenoptera
cyanescens, est due à une seule et même molécule, nommée « indigotine » ou « indigo ».
Ces plantes tinctoriales ne contiennent pas de pigments colorants directement transposables mais seulement un
précurseur de ceux-ci : l’indican (indoxyle ß-D-glucoside).
On suppose que c’est en Inde que les artisans commencèrent à extraire l’indigotine pour la conserver et lui donner
une forme soluble à l’eau qui permettrait ensuite la teinture.
La teinture à l’indigo est pratiquée depuis l’antiquité dans toutes les régions où poussent des plantes contenant de
l’indican : en Inde, en Indonésie, en Afrique occidentale… avec des secrets et variantes de fabrication.
En général, pour extraire le pigment de la plante, on utilisait seulement les feuilles. On les faisait tremper dans de
l’eau chaude jusqu’à fermentation. Le liquide jaune-verdâtre obtenu était ensuite versé dans une deuxième cuve
généralement additionnée de chaux ou de lessive de cendres. Ensuite on brassait le bain afin d’introduire le maximum
d’oxygène qui permettait la précipitation au fond de la cuve de l’indoxyle en flocons d’indigo bleu, ou indigotine. Ce
dépôt pâteux était recueilli, filtré, rincé, égoutté et pressé dans des moules sous forme de petits pains mis à sécher.
Ces pains d’indigo, légers, très concentrés, solides, inodores et se conservant indéfiniment peuvent voyager sans
dommage.
L’indigotine est insoluble dans l’eau, l’alcool, l’huile, les acides et les alcalins. Sous l’influence d’un réducteur (métaux
alcalins, sulfure ou acide gallique) elle sera transformée en indigo blanc soluble, qui en se réoxydant au contact de
l’air retrouve sa couleur. Les anciens devaient utiliser des agents naturels (sucre, chaux, urine) et des procédés qui
se distinguaient par une odeur repoussante et valaient aux teinturiers une certaine impopularité.
Dès l’Antiquité, les Romains ont importé la fécule d’indigo d’orient, compactée sous forme de pains.
Un peu d’histoire
Le pigment d’indigo peut être utilisé en teinture ou en peinture. Il faut l’ajouter à un liant pour fabriquer de la
peinture ou des encres d’enluminures. Ce liant peut être de l’eau, de l’œuf pour la tempera, de l’huile ou de l’acrylique. Les peintres et les teinturiers ont utilisé des pigments naturels jusqu’au milieu du XVIIIe siècle.
En Europe, au Moyen Âge, l’indigo provenait de la guède ou « pastel ».
L’exploitation du pastel a été pendant des siècles une grande source de richesse, en particulier dans le midi de la
France. À tel point que le Lauragais était appelé « pays de cocagne » : dans l’une des étapes de la fabrication, les
feuilles étaient broyées et formaient une pâte, d’où « pastel », qui était ensuite pressée en boules de 15 cm de
diamètre qu’on appelait « cocaignes » ou « cocagne ».
À partir du XVIe siècle, l’importation de l’indigo asiatique (provenant de l’indigotier), beaucoup moins cher que le
pastel européen et avec des propriétés tinctoriales vingt fois plus puissantes, finira par faire disparaître la culture
du pastel dans le sud de la France. L’arrivée dans les ports de l’indigo des Indes va bouleverser l’économie de la
région.
C’est l’explorateur portugais Vasco de Gamma (premier navigateur européen à arriver aux Indes au XVIe siècle) qui
rapporta cet indigo en Europe.
3 – Jardin Musée Balaguier /© Réseau Canopé 2015
Dès 1577, des décrets et des édits royaux ou locaux sont promulgués contre l’emploi de la « teinture du diable »,
en 1609 Henri IV en interdit même l’importation sous peine de mort.
Cet indigo dit véritable remplacera le colorant médiéval du pastel tout au long des XVIIe-XVIIIe siècles.
L’indigo (comme la garance) permettait d’obtenir des bleus très résistants aux lavages et à l’action de la lumière
lorsqu’il était appliqué sur des fibres animales : laine, soie. Il perdait ces qualités lorsqu’on l’utilisait pour teindre
des fibres végétales comme le lin et le coton.
Lorsqu’on examine d’anciennes tapisseries, d’anciens costumes, ce sont surtout les coloris bleus et rouges qui dominent grâce à l’indigo et à la Garance car ils ont mieux résisté au temps que les autres colorants naturels.
Le bleu, longtemps ignoré ou même détesté dans la Rome antique, ne devient une couleur noble qu’à partir du
XIIe siècle.
Il est une couleur royale ou princière ainsi que celle de la Vierge traditionnellement représentée vêtue d’un manteau
bleu azur (composé de « lazurite », seul digne de la Vierge, car rare et très onéreux).
Dans la peinture occidentale, le ciel divin ne devient bleu que vers l’an 1000. Auparavant il était doré ou argenté.
Au XVIIIe siècle, le bleu devient la couleur préférée des occidentaux.
La demande toujours croissante incite alors les Européens à cultiver l’indigotier dans les colonies d’Amérique du
Nord et du Sud.
À Caracas, au Guatemala, en Jamaïque mais aussi en Guadeloupe, se créent de grandes indigoteries où le colorant
était extrait et préparé.
L’indigo est alors importé massivement des Antilles et d’Amérique centrale ; Toulouse et Amiens, pôles du commerce
du pastel, sont ruinés tandis que Nantes et Bordeaux s’enrichissent grâce au trafic portuaire généré par le commerce de l’indigo.
À l’occasion de son épopée, Napoléon 1er créa une école expérimentale à Albi et les recherches aboutirent à la réduction du temps d’extraction de la couleur. Tous les soldats de l’Empire seront habillés en bleu.
Cette importation à bas coût enrichit la palette des peintres de bleus foncés.
Le mouvement romantique vouera un véritable culte au bleu.
Indigoterie :
Jean-Baptiste du Tertre,
Histoire générale des Antilles,
tome 2, Paris, 1667
Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Indigotier#mediaviewer/File:Indigoterie-1667.jpg
L’indigo synthétique fut inventé en 1878 par Adolf Von Baeyer qui réalisa la première synthèse chimique d’indican.
Avec la méthode de production adoptée dès 1897, ce colorant supplanta l’indigo naturel en quelques années.
4 – Jardin Musée Balaguier /© Réseau Canopé 2015
Néanmoins la teinture à l’indigo naturel se pratique encore aujourd’hui en particulier en Afrique de l’Ouest. Les
Touaregs connaissent également ce produit depuis fort longtemps et l’utilisent à une telle concentration que les
tissus sont complètement recouverts du produit solide, donnant ces reflets cuivrés caractéristiques.
Actuellement, la production d’indigo est essentiellement synthétique.
Les blue-jeans en consomment 99 % : en 1850 le tailleur Levi-Strauss invente à San Francisco le premier bleu de
travail en grosse toile teintée à l’indigo ; c’est la naissance du jean…
Aujourd’hui valorisé et consensuel, le bleu est devenu la couleur des grandes institutions nationales ou internationales (drapeaux du Conseil de l’Europe, de l’ONU ; « casques bleus »), de certains corps de métiers ou milieux socio-professionnels (le bleu de la gendarmerie ou de la police), la couleur « distinction, mérite » (carton bleu, cordon
bleu, ruban bleu).
Lexique
Pigment : un pigment est une substance colorée en poudre broyée finement, naturelle ou artificielle, d’origine minérale ou organique.
Tempera : mot italien. Peinture à l’eau dont le liant est une émulsion à base d’œuf.
Colorant : espèce soluble dans le milieu qu’elle colore. Les colorants sont employés dans de très nombreux domaines notamment dans l’alimentation, la coiffure et le textile.
Teinture : procédé qui consiste à modifier la couleur par imprégnation ou trempage. Tandis que la peinture modifie
la couleur « en surface », avec une épaisseur même modeste, la teinture affecte en profondeur et ne modifie que
la couleur, laissant intacts les autres aspects de la matérialité du support comme la texture.
Enluminure : c’est l’art de décorer les manuscrits à l’époque où l’imprimerie n’existe pas encore, principalement
au Moyen Âge.
Indican : élément chromatique fondamental de l’indigo, un glucoside typique, extrait de fécule. Il fut isolé en 1826.
Cette découverte aurait permis la synthèse de la mauvéine. Le premier indican synthétique fut réalisé en 1880 par
Adolph Von Baeyer pour la société Baadische Anilin und Soda Fabrick (BASF).
Indoxyle : composé chimique (de formule brute C8H7NO) qui est un dérivé de l’indole, précurseur naturel ou synthétique de l’indigotine ou indigo.
Voici une petite liste non exhaustive des plantes tinctoriales les plus utilisées :
• Rouges et ses nuances
Garance des teinturiers, carthame (Carthamus tinctorius), sorgho (Sorghum bicolor), rocou (Bixa orellana), noyer
(Juglans regia), henné (Lawsonia inermis).
• Jaune et ses nuances
Curcuma (Curcuma longa), vergerette du Canada (Conyza canadensis), safran (Crocus sativus), camomille des
teinturiers (Anthemis tinctoria), souci (Calendula arvensis), œillet d’Inde (Tagetes patula).
• Bleu et ses nuances/violet
Indigotier (Indigofera tinctoria), pastel des teinturiers (Isatis tinctoria), renouée des teinturiers (Persicaria
tinctoria), sureau (Sambucus).
• Vert et ses nuances
Nerprun (Rhamnus frangula), fougères, coques d’amandes (Prunus dulcis).
Ouvertures culturelles
Jardin
et musée de
Baudouvin
à la
Valette
du
Var
http://www.lavalette83.fr/du-coeur-et-du-caractere/la-valette-bonheur-nature/le-renouveau-de-baudouvin/
un-jardin-remarquable-368.html
Domaine ancien qui fut la résidence officielle du préfet maritime.
Réhabilité, il appartient aujourd’hui à la ville et il est ouvert au public.
5 – Jardin Musée Balaguier /© Réseau Canopé 2015
Les jardins de Baudouvin allient tradition, modernité et respect environnemental. Ils juxtaposent plusieurs jardins
dont un jardin plus expérimental voué à l’accueil d’expositions ou d’expérimentations (par exemple sur les plantes
tinctoriales).
Bibliographie
– Flore complète portative de la France, de la Suisse et de la Belgique, Gaston Bonnier et Georges de Layens, Éditions
Belin, 1986
– Indigotier, Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Indigotier, 12/09/1.
– Jardin ! L’Encyclopédie, http://nature.jardin.free.fr/index.html, 15/02/2000.
– Podcast : France culture, émission Hors champs : Laure Adler reçoit Michel Pastoureau, historien. « Des goûts et des
couleurs : le bleu (1/5) ».
http://www.franceculture.fr/emission-hors-champs-des-gouts-et-des-couleurs-avec-michel-pastoureau-lebleu-15-2013-12-23
– Bleu. Histoire d’une couleur, Michel Pastoureau, Le Seuil, 2002.
– JFL Mérimée a publié en 1830 De la peinture à l’huile ou des procédés matériels employés dans ce genre de peinture depuis Hubert et Jean Van-Eyck jusqu’à nos jours, traité sur les couleurs de l’artiste qui fait encore autorité
aujourd’hui. On y trouve notamment un tableau des principales matières colorantes antiques et modernes d’avant
la synthèse chimique.
– Article sur les teintureries à l’indigo de Zabid de Paul Bonnenfant in Arabian Humanities
http://cy.revues.org/35#tocto3n2
PAistes pédagogiques :
– Pistes pour le collège http://www.la-seyne.fr/Jardins-Balaguier/10_industrielles_coll%C3%A8ge.pdf
– Pistes pour l’école primaire http://www.la-seyne.fr/Jardins-Balaguier/10_industrielles_%C3%A9cole_primaire.pdf
6 – Jardin Musée Balaguier /© Réseau Canopé 2015
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