PRODUCTEUR PLUS
Les sols et l'agriculture, Gérard Millette Ph.D.
Chapitre 23
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Les mycorhizes forment des tubes de cellules connectées
bout à bout les unes aux autres. Ces tubes sont plus fins que
les racines les plus fines. Une plante comme la carotte peut
développer jusqu'à 125 mètres de ces tubules. Les tubes ai-
dent la plante à puiser de l'eau et des éléments nutritifs là où
les racines fines de la plante ne peuvent pénétrer. Par consé-
quent, les tubules diminuent jusqu'à 50 % les besoins en fer-
tilisation d'éléments nutritifs principaux dans les sols pauvres,
tout en augmentant les rendements entre 25 et 100 %. Les
mycorhizes améliorent la résistance de la plante à la séche-
resse, vu que les tubes pénètrent les interstices très fins de la
semelle de labour pour y puiser l'eau. Certaines mycorhizes
produisent même des substances antibiotiques qui protègent
contre certaines maladies. Elles améliorent beaucoup la re-
prise des plantes qui ont été transplantées. La croissance ac-
célérée des plantes étouffe parfois les mauvaises herbes.
Donc, la présence de mycorhizes diminue les mauvais effets
de la semelle de labour.
Pour vaincre les mauvais effets de la semelle de labour,
il faut, dans la séquence de cultures, des plantes dont les ra-
cines ont une grande puissance de pénétration, comme par
exemple les racines de pois, dont la puissance de pénétration
atteint de 5 à 10 kilos au centimètre carré. Elles parviennent à
percer des sols qui seraient trop tassés pour des racines de cé-
réales. Celles-ci ont une limite maximale de puissance de 0,4
kilo au centimètre carré. Lorsque la racine de pois a réussi à
percer la couche compacte, elle se ramifie rapidement sous
cette couche. En général, la puissance pénétrante des racines
de plantes cultivées semble être reliée à la grosseur de la se-
mence. Les racines, dans un sol sans couche compactée, peu-
vent descendre jusqu'à 150 cm de profondeur. Celles du foin
récolté peuvent atteindre 90 cm. Les racines de la luzerne ré-
coltée en foin descendent jusqu'à 450 cm. Celles de la vigne
vont jusqu'à 6 mètres. Pas étonnant que ces deux dernières
plantes préfèrent les sols bien drainés, profonds, et qu'elles
résistent à la sécheresse.
L'abondance de racines capillaires varie avec les plantes.
On a mesuré 0,13 kilomètre de capillaires sur un plant de soya,
comparé à 1,74 pour l'avoine et 3,66 kilomètres pour un plant
de seigle. On attribue faussement à la compaction du sol les
racines superficielles des pâturages broutés intensément.
C'est que les plantes utilisent beaucoup d'hydrocarbones
pour produire leurs racines. Si les animaux broutent intensé-
ment la portion aérienne, qui est chargée de synthétiser ces
hydrocarbones, il en reste peu pour développer des racines.
Des mesures faites dans les champs révèlent que la paissance
intensive limite le développement des racines à 30 cm de pro-
fondeur. Une paissance contrôlée donnait des racines jusqu'à
60 cm, et jusqu'à 120 cm si elle était occasionnelle. C'est pour-
quoi les producteurs ont découvert que nourrir les animaux
à l'étable était plus profitable que de les laisser paître en na-
ture. Le taux de croissance des racines pour les plantes an-
nuelles varie entre 2 et 5 cm par jour, le premier mois. C'est le
temps où la semelle de labour affecte au maximum la crois-
sance de la plante et son rendement futur. Le rythme de crois-
sance diminue de moitié le second mois. Dans le cas du maïs,
les racines représentent le quart du poids de la plante quand
l'épi commence à se former. Elles ne représentent plus que 10
% du poids total au moment de la récolte.
Les céréales produisent deux à trois fois plus de racines
que les plantes potagères en général. Les herbes des pâtu-
rages en produisent le plus, pendant une période de 3 ou 4
ans. C'est pourquoi il est conseillé de labourer et de réense-
mencer un pâturage à tous les trois ou quatre ans.
En résumé, on peut diminuer les effets indésirables
d'une semelle de labour à densité apparente plus élevée que
la normale de 1,3 à 1,4, grâce à des séquences de plantes bien
choisies. Celles-ci doivent avoir une masse variable de racines,
d'un diamètre assez fin pour pénétrer les petits interstices du
sol tassé. Il faut inclure dans la séquence une ou deux plantes
dont les racines ont une force pénétrante élevée. On peut en
plus inoculer les plantes et le sol avec des mycorhizes, qui
multiplient les capillaires. Celles-ci peuvent pénétrer les pores
très fins des sols, en plus de réduire les besoins en éléments
nutritifs jusqu'à 50 %, tout en augmentant les rendements
entre 25 et 100 % si le sol est pauvre en éléments nutritifs.
Chaque problème a une solution probable, mais aucune
solution unique ne les résoudra tous d'une façon satisfaisante.
Les sols varient tellement sur une ferme ou dans un champ
que la solution bonne pour un sol peut endommager le
suivant.
Les mycorhizes sont des champignons. Ils ont besoin des
plantes pour vivre. En retour, ils permettent à la plante mère
d'atteindre et d'absorber plus d'éléments nutritifs, d'augmen-
ter sa croissance et ses rendements sans application supplé-
mentaire d'engrais. Les mycorhizes augmentent le surface de
contact des racines par 100 fois.
Figure 23.3