ANNEXE I CONCLUSIONS SCIENTIFIQUES ET MOTIFS DE LA SUSPENSION DE L’AUTORISATION DE MISE SUR LE MARCHÉ PRÉSENTÉS PAR L’EMEA CONCLUSIONS SCIENTIFIQUES ET MOTIFS DE LA SUSPENSION DE RAPTIVA PRÉSENTÉS PAR L’EMEA L’efalizumab (RAPTIVA) est un anticorps monoclonal humanisé recombinant qui se lie spécifiquement à la sous-unité CD11 de l’antigène 1 associé à la fonction lymphocytaire (LFA-1), une protéine de surface des leucocytes. Raptiva a été autorisé dans l’UE le 20 septembre 2004. Il est indiqué dans le «traitement des patients adultes atteints de psoriasis en plaques chronique, modéré à sévère, en cas d’échec, de contreindication ou d’intolérance à d’autres traitements systémiques tels que la ciclosporine, le méthotrexate ou la puvathérapie.» Récemment, 4 cas (3 confirmés et 1 suspecté) de leucoencéphalopathie multifocale progressive (LEMP) ont été identifiés chez des patients atteints de psoriasis, sous traitement longue durée par efalizumab, motivant la réévaluation du rapport bénéfice-risque. Deux des cas confirmés ainsi que le cas suspecté se sont avérés fatals. L’efalizumab a été le premier agent biologique à être approuvé pour le traitement du psoriasis modéré à sévère en 2004 chez les patients dits «en fort besoin», c’est-à-dire ceux qui n’ont pas répondu ou présentent une contre-indication ou une intolérance à d’autres traitements systémiques. L’indication a été accordée pour une utilisation du traitement en dernière intention, en raison de son efficacité limitée et de l’absence de données relatives à la sécurité du produit sur le long terme. Suite à l’obtention de l’AMM initiale, des problèmes liés à la sécurité du produit sont apparus et ont entraîné l’ajout d’un certain nombre de mises en garde dans le Résumé des Caractéristiques du Produit (RCP) concernant les risques de méningite aseptique, d’anémie hémolytique auto-immune, de développement d’anticorps suite à des vaccinations, de pneumonie interstitielle, d’arthrite, d’érythème polymorphe, de polyradiculoneuropathie inflammatoire, de syndrome de Miller-Fisher, de paralysie faciale et de paralysie de Bell, d’infections sévères, de développement de malignités en cas de traitement sur le long terme, y compris d’affections graves (fatales) telles que des infections opportunistes et le syndrome de Guillain-Barré (SGB). Récemment, le titulaire de l’AMM a fait part à l’EMEA de trois cas confirmés de LEMP et d’un cas suggérant une LEMP chez des patients utilisant de l’efalizumab depuis plus de 3 ans, ainsi que de 3 cas d’encéphalopathie et de 5 cas d’encéphalites. Lors de la réunion de décembre 2008 du CHMP, le Comité a décidé de convoquer le Groupe Scientifique Consultatif sur les neurosciences cliniques (SAG-CNS), ainsi que d’autres experts dans le traitement du psoriasis, afin de discuter des bénéfices et des risques de l’efalizumab et de sa place dans le traitement de cette affection. La réunion du groupe scientifique s’est tenue en janvier 2009 et le groupe a étudié toutes les données disponibles relatives aux bénéfices et aux risques liés à Raptiva. Les experts se sont montrés inquiets quant à la marge des bénéfices sur les risques, qui n’a cessé de se réduire depuis l’autorisation du médicament. Ils se sont toutefois accordés sur le fait que, malgré une efficacité limitée et un risque accru rapporté jusqu’à présent, l’efalizumab représente toujours une option thérapeutique utile, bien qu’il joue un rôle restreint dans le traitement du psoriasis modéré et sévère et qu’il existe peu de preuves pour étayer le taux de réponse effective chez les personnes n’ayant pas répondu à de précédents traitements systémiques. Compte tenu des éléments cités ci-dessus, la Commission européenne a entamé une procédure dans le cadre de l’article 20 du règlement (CE) n° 726/2004. La Commission européenne a demandé au Comité le 16 janvier 2009 d’évaluer les problèmes mentionnés ci-dessus ainsi que leur impact sur le rapport bénéfice-risque de Raptiva et de donner son avis sur les mesures nécessaires à prendre pour garantir une utilisation sûre et efficace de Raptiva, ainsi que sur le maintien, la variation, la suspension ou le retrait de son AMM. Lors de la réunion du CHMP de janvier 2009, le Comité a considéré qu’il existait des doutes sur le rapport bénéfice-risque de Raptiva et le CHMP a demandé au titulaire de l’AMM de soumettre d’autres données concernant les problèmes sécuritaires précédemment cités. L’évaluation globale de ces données a confirmé les précédentes inquiétudes relatives à la sécurité de Raptiva, sans qu’il soit possible d’identifier des sous-groupes de patients pour lesquels le rapport bénéfice-risque serait éventuellement plus favorable. Le CHMP a revu toutes les données disponibles soumises par le titulaire de l’AMM afin de traiter les problèmes toujours plus importants liées à la sécurité du produit et à leur impact sur le rapport bénéfice-risque, et est parvenu aux conclusions suivantes. Efficacité Compte tenu des résultats des 5 essais cliniques de Phase III fournis au moment de la demande d’AMM et des données supplémentaires fournies depuis cette date, le Comité considère que l’efficacité de l’efalizumab dans le traitement du psoriasis est limitée. En outre, comme le reconnaît le titulaire de l’AMM, il n’est pas possible de définir une population de patients souffrant de psoriasis qui profiterait exclusivement d’un traitement par efalizumab et non d’autres traitements du psoriasis. Bien que le psoriasis sévère soit une maladie grave ayant un impact potentiellement négatif sur la vie sociale du patient, il ne met pas la vie du patient en danger. Sécurité Comme cela a déjà été indiqué, les récents cas de LEMP sont inquiétants. Le titulaire de l’AMM a récemment rapporté 4 cas; sur ces 4 cas, 3 ont été confirmés et 2 d’entre eux ont débouché sur le décès des patients. Afin de résoudre ces problèmes de sécurité, le titulaire de l’AMM a proposé de nouvelles activités de minimisation du risque comprenant la restriction de l’utilisation continue à 2 ans, l’exclusion des personnes ne répondant pas au traitement au bout de 3 mois, une utilisation prudente chez les personnes âgées, une surveillance intensive, une contre-indication relative à l’utilisation simultanée d’immunosuppresseurs et des programmes d’information destinés aux médecins et aux patients. Ces minimisations du risque sont discutables. Plusieurs problèmes sont déjà couverts dans le RCP actuel : Raptiva n’est pas recommandé pour une utilisation concomitante avec d’autres produits immunosuppresseurs contre le psoriasis et doit être prescrit par un dermatologue. Une surveillance fréquente de l’apparition éventuelle d’infections est déjà recommandée. En ce qui concerne la LEMP, il est légitime de se demander si la surveillance fréquente destinée à détecter une LEMP à un stade précoce sera efficace et il est en outre rare que l’évolution de la LEMP s’inverse une fois la maladie diagnostiquée. Tous ces éléments limitent la valeur de la surveillance fréquente mise en place pour la détection de la LEMP. L’exclusion des patients ne répondant pas au traitement au bout de 3 mois est en fait une pratique courante : si aucun effet n’est observé, le traitement est interrompu. La restriction de l’utilisation, limitée à une durée de traitement de 2 ans, est basée sur les 4 cas individuels de LEMP observés. Ces cas ne peuvent cependant pas être considérés comme des preuves justifiant la limitation du traitement à 2 ans. En outre, il est peu probable que le traitement soit interrompu après 2 ans s’il est toujours efficace et si des alternatives ne sont pas disponibles mais surtout, une telle interruption ne permet pas d’agir sur les autres risques. Les nouvelles mesures de minimisation du risque proposées par le titulaire de l’AMM ne sont donc pas considérées comme étant appropriées pour garantir une utilisation sûre de Raptiva et ne modifient donc pas le rapport bénéfice-risque actuel de façon substantielle. Parmi les autres options suggérées, figure la restriction de l’indication aux seuls patients pour lesquels ce traitement serait l’ultime recours, c’est-à-dire aux patients ne répondant pas aux anti-TNF alpha ainsi qu’aux patients pour lesquels les anti-TNF alpha sont contre-indiqués. Les données appuyant cette approche sont pour l’instant inexistantes. Les taux de réponse chez les patients ne répondant pas aux anti-TNF alpha sont identiques, voire plus faibles, que ceux observés dans la population normale souffrant de psoriasis. En l’absence de données justificatives, il est impossible d’identifier clairement une population de patients souffrant de psoriasis qui répondrait à l’efalizumab. De plus, il n’existe aucun élément prouvant que le risque est différent chez ces patients réfractaires aux autres traitements. En revanche, l'absence de réaction aux anti-TNF alpha suggère que le système immunitaire de ces patients est différent, ce qui pose la question suivante : ces patients sont-ils plus susceptibles de développer des réactions indésirables «immunologiques» ? En outre, ces patients auront probablement déjà reçu d’autres traitements immunosuppresseurs auparavant, traitements qui auront peut-être altéré leur système immunitaire. L’élément important ici est le fait que le système immunitaire de ces patients résistants aux anti-TNF alpha est différent de celui de la population générale. Le fait de restreindre l’indication à cette population n’est donc pas une option envisageable, étant donné que le bénéfice est, au mieux, le même que celui observé chez la population générale, mais avec toutefois un risque potentiellement plus élevé. Il est également noté que Raptiva n’est pas sans risque sur le plan cardiovasculaire et sur celui de la tuberculose. Passer à un traitement par efalizumab en raison de contre-indications par rapport à d’autres agents biologiques entraînerait la sélection d’une population à risque avec l’efalizumab. Rapport bénéfice-risque L’efficacité de Raptiva dans le traitement du psoriasis est limitée. Les nouveaux problèmes liés à la sécurité du produit qui sont apparus (notamment le développement de la LEMP), ajoutés au risque connu d’infections opportunistes, compromettent réellement le rapport bénéfice-risque. Depuis l’obtention de l’AMM, des problèmes de sécurité sont apparus, entraînant l’ajout d’un certain nombre de mises en garde dans le RCP, concernant les risques de méningite aseptique, d’anémie hémolytique auto-immune, de développement d’anticorps suite à des vaccinations, de pneumonie interstitielle, d’arthrite, d’érythème polymorphe, de polyradiculoneuropathie inflammatoire, de syndrome de Miller-Fisher, de paralysie faciale et de paralysie de Bell, d’infections sévères, de développement de malignités en cas de traitement sur le long terme, y compris d’affections graves (fatales) telles que des infections opportunistes et le syndrome de Guillain-Barré (SGB). En outre, le titulaire de l’AMM a récemment fait part à l’EMEA de 3 cas d’encéphalopathie et de 5 cas d’encéphalites. De plus, au vu des résultats d’une évaluation comparative des réactions indésirables graves, il apparaît que Raptiva présente un profil sécuritaire défavorable par rapport à celui d’autres agents biologiques en termes de nombre de rapports de décès, d’infections fatales, de néoplasmes et de troubles neurologiques. Le CHMP se demande s’il est possible d’identifier une population de patients souffrant de psoriasis qui bénéficierait exclusivement de l’efalizumab. Comme l’ont indiqué les experts, un petit groupe de patients pourrait bénéficier des avantages de Raptiva. Toutefois, le CHMP a considéré qu’aucune nouvelle mesure de minimisation du risque ne serait efficace pour ce groupe. Il se pourrait cependant que ce groupe de patients présente naturellement un risque plus élevé. Ainsi, compte tenu des éléments mentionnés précédemment, le CHMP a conclu que le rapport bénéfice-risque de Raptiva était négatif. Conclusion générale Le titulaire de l’AMM a proposé de nouvelles mesures de minimisation du risque, comprenant la restriction de l’utilisation par une limitation de la durée du traitement, la promotion d’un traitement alterné et une surveillance fréquente. Le fait que la limitation de la durée du traitement empêche l’apparition de la LEMP chez les patients est discutable. Depuis l’obtention de l’AMM, plusieurs nouvelles mises en garde et réactions indésirables graves ont été ajoutées à la notice du médicament et il n’est pas considéré comme approprié d’ajouter de nouvelles précautions d’utilisation. De ce fait, compte tenu du fait que le psoriasis modéré à sévère ne met pas la vie du patient en danger, que l’efficacité de l’efalizumab est limitée, que le profil sécuritaire est inquiétant et rapporte des cas fatals de LEMP, d’encéphalopathie et d’encéphalite, et qu’il existe des traitements alternatifs, le CHMP recommande une suspension de l’AMM de Raptiva (efalizumab) pour le traitement des patients adultes souffrant de psoriasis en plaques chronique, modéré à sévère. MOTIFS DE LA SUSPENSION PRÉSENTÉS PAR L’EMEA Le Comité a revu toutes les informations disponibles concernant les bénéfices et les risques liés à l’utilisation de Raptiva, y compris les résultats de toutes les études terminées et toutes les données collectées suite à la commercialisation du produit. Le Comité a considéré que l’efficacité de Raptiva dans le traitement du psoriasis était limitée. Le Comité a considéré que, bien que le mécanisme d’action de l’efalizumab se distingue de celui d’autres agents biologiques, cette propriété seule ne suffit pas à justifier l’utilisation du Raptiva. Le Comité est d’avis que le profil sécuritaire de Raptiva est inquiétant, compte tenu des cas récents de LEMP. En outre, depuis l’obtention de l’AMM, plusieurs nouvelles mises en garde et réactions indésirables graves ont été ajoutées à la notice du médicament et la mise en place de nouvelles mesures de minimisation du risque n’est pas considérée comme efficace. Le Comité a conclu que, compte tenu des données disponibles, les risques associés à l’utilisation du Raptiva comme traitement des patients adultes atteints de psoriasis en plaques chronique, modéré à sévère, en cas d’échec, de contre-indication ou d’intolérance à d’autres traitements systémiques tels que la ciclosporine, le méthotrexate ou la puvathérapie sont supérieurs aux bénéfices. De plus, le Comité a considéré que les activités actuelles de minimisation du risque et celles qui ont été proposées ne permettaient pas de réduire les risques à un niveau acceptable ou de définir les patients à risque. Le Comité a considéré que dans l’indication plus limitée proposée par le titulaire de l’AMM, les données relatives à l’efficacité et à la sécurité étaient inexistantes; aucune conclusion ne peut donc être établie quant au rapport bénéfice-risque pour cette population de patients. En conséquence, le Comité a conclu que le rapport bénéfice-risque de Raptiva n’était pas positif dans les conditions d’utilisations approuvées. Le CHMP a donc recommandé la suspension de l’AMM de Raptiva jusqu’à ce que le titulaire de l’AMM soit en mesure d’identifier une population de patients pour lesquels les bénéfices seraient supérieurs aux risques. ANNEXE II CONDITIONS DE LA LEVÉE DE LA SUSPENSION Pour que la suspension soit levée, le titulaire de l’AMM doit fournir au Comité : • Les données relatives à l’efficacité et à la sécurité du produit chez les patients qui n’ont pas répondu, présentent une contre-indication ou une intolérance, sont résistants et/ou réfractaires à l’ensemble des traitements suivants : ciclosporine, méthotrexate, puvathérapie et anti-TNF alpha.