ÉVÈNEMENT
Santé-MAG
N°29 - Avril 2014 1717
l’absence de finalité précise, donne une
impression de désorganisation.
Quatre autres paramètres sont néces-
saires, pour retenir le diagnostic:
le début des symptômes se situe, tou-
jours, avant 7 ans;
la durée des symptômes doit être su-
périeure à6 mois;
les troubles s’expriment dans, au
moins, deux circonstances, ou lieux dif-
férents (école, domicile, jeux);
il doit exister des preuves, nettes, de
manifestations cliniques, dans la vie
sociale.
Outre l’ensemble des critères sus-dé-
crits, des questionnaires, à remplir par
l’enseignant et les parents, ont été pro-
posés par les Anglo-Saxons, dans le but
de connaître le comportement del’en-
fant, à l’école et en famille. Les plus clas-
siques sont l’échelle comportementale
de C.K.Conners et l’échelle de Yale. Ce
type de quantification est critiqué par
certains, du fait de soncaractère réduc-
tionniste; mais, il a l’intérêt de pouvoir
faire un suivi longitudinal.
L’hyperactivité peut être masquée, au
début de la consultation, par une stabi-
lité paradoxale.
Plusieurs arguments para-cliniques sont
en faveur d’une base neurobiologique
cohérente, rendant compte de la phy-
siopathologie de ce syndrome.
DIAGNOSTICS DIFFERENTIELS
Il y a lieu d’inscrire le tableau clinique
comportemental dans le contexte de
l’enfant; c’est-à dire, dans son environ-
nement familial et dans son histoire. Il
est nécessaire, aussi, d’investiguer ses
compétences et aptitudes, afin d’exclure
d’autres diagnostics.
1. L’enfant normal, mais turbulent
Certains sujets normaux sont très dyna-
miques, toujours d’accord pour faire
du roller, de la bicyclette,etc., préférant
les jeux d’extérieur aux jeux de société,
mais quand vient le temps d’étudier,
oude se mettre à table, ils se com-
portent comme les autres enfants; il
n’y a pas de conflit particulier.Demême,
l’intégration sociale et scolaire ne pose
pas de problème.
2. L’enfant rêveur
Il est créatif, imaginatif, souvent dans la
lune. Il peut paraître absent, inattentif;
mais, lorsqu’on évalue ses capacités,
elles sont normales.
3. L’enfant déficient mental
Il ne saisit pas bien le sens des consignes,
est dépassé par les tâches qu’on lui im-
pose, ne peuts’adapter, par manque de
compréhension et peut devenir dicile
et agressif.
4. L’enfant opposant
Il refuse toute demande. Il veut gérer sa
journée à sa guise et décider de tout à
la maison. Souvent, cecomportement
ne se retrouve pas en dehors du cadre
familial.Il est délibéré et témoigne d’une
diculté relationnelle. L’enfant oppo-
sant refuse les règles et les limites qu’on
veut lui imposer.
5. L’enfant-roi, l’enfant tyran
Il a, souvent, été très attendu. Chacun de
ses désirs a été satisfait et même, antici-
pé. Il n’a jamais vécuaucune frustration.
La relation parent/enfant est inversée:
l’enfant est tout puissant.Les parents
ontrenoncé à leur rôle éducatif; ils n’ont
aucune autorité et sont dans une rela-
tion de négociation permanente.
6. L’enfant déprimé
S’il se présente, souvent, comme apa-
thique, aboulique.Il peut, aussi, être irri-
table, colérique et agité.Dans ce cas, il y
a rupture avec le fonctionnement anté-
rieur; contrairement au trouble THADA,
qui estprécoce et permanent.
7. L’enfant anxieux
L’anxiété peut être envahissante, géné-
ralisée. Elle peut induire des mouve-
ments désordonnés et rendre l’enfant
non disponible pour apprendre. L’an-
xiété peut se manifester, surtout au mo-
ment des séparations, lorsque le sujet
est confronté à des situationsnouvelles.
Cette anxiété peut être réactionnelle à
des événements familiaux insécurisant.
Les symptômes doivent être analysés
en fonction de leur déroulement chro-
nologique, du contexte familial et social.
DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE
L’approche diagnostique de l’instabilité
doit être rigoureuse et multimodale, afin
d’éviter les excès constatés en Amérique
du Nord, qui dénaturent ce syndrome et
diabolisent les thérapeutiques médica-
menteuses.
La consultation doit débuter par une
reconstitutionde l’anamnèse, à la re-
cherche d’antécédents médico-psy-
chologiques, de carences aectives ou
d’aections parentales somatiques ou
psychiques, tandis qu’elle précise l’his-
toire dutrouble.
L’examen clinique recherche des anoma-
lies cliniques évocatrices d’une aection
neurologique, ou génétique (dysmor-
phies faciales, micro-ou macrocéphalie,
syndrome cérébelleux…).Il peut mettre
en évidence des signes neurologiques
mineurs, tels que syncinésies et di-
cultés à maintenir un équilibre unipodal,
qui évoquent un retard de maturation,
fréquent chez ces enfants.
L’entretienpsychologique, en présence
des parents, puis seul avec l’enfant,
évalue le retentissement de l’instabilité
sur la qualité de vie familiale. Il permet,
en outre, d’appréhender la perception,
par le jeune patient, de ses dicultés
et l’existence, éventuelle, de troubles de
l’humeur, ou de la personnalité.
Le recueilde la symptomatologie,in vivo,
au cabinet du praticien est, souvent,
peu informatif, car les enfants porteurs
de déficit d’attention sont capables
d’inhiber leur hyperactivité, en situation
nouvelle et duelle, quand l’attrait de la
nouveauté et la réduction des distrac-
teurs favorisent la vigilance; seulement
20% des enfants sourant de THADA
présenteraient une hyperactivité, lors
d’unepremière consultation.
Les observations directes,en milieu sco-
laire, ou àl’hôpital, seraient idéales, mais
ellessont rarement possibles.
Les questionnaires de comporte-
ment, remplis par lepère, la mère et
les enseignants deviennent,alors, indis-
pensables. On utilise,le plus souvent,
l’échelle de Conners, résumés dans une
versionabrégée à 10 items (tableau I).
Spécifiquede l’enfant hyperactif, l’échel-
lede Conners est considérée commea-
normale, lorsque le score est supérieur à
15.Elle permet, en outre, de suivrel’évo-
lution du trouble, en fonction dessitua-
tions, ou lorsqu’un traitement aété mis
en place.
D’autres outils sontdisponibles, comme
le questionnaire d’Achenbach (Child
Behavior Check-List), précieux pour
le diagnostic diérentiel.Plus complet,
construit autourde 113 questions, il éva-
lue le comportementglobal de l’enfant
et repèrel’existence de symptômes
anxieux etdépressifs, de troubles de la
pensée etde l’intégration sociale, ou en-
core, deplaintes somatiques et d’agres-
sivité.
Les décisions thérapeutiques sont large-
mentfacilitées par ce type d’instruments,
qui objectivent la symptomatologie,en
dehors de tout prérequis théorique.
Le THADA est envisagédevant la per-
manence des troubles, quelles que
soient les situations. À l’inverse, des
disparités entre les sources(père contre
mère, famille contreécole…) amènent à
réévaluer le diagnosticd’hyperactivité
«constitutionnelle», et orientent vers un
troublesecondaire qui peut être objec-
tivé pardes outils spécifiques (échelles
dedépression, tests de personnalité).