La grossesse et l`AMP sont-elles raisonnables après un cancer du

Revue
La grossesse et l’AMP sont-elles
raisonnables après un cancer du sein ?
Are pregnancy and ART reasonable after breast cancer?
Roman Rouzier
1,2
Catherine Uzan
3
Benedicte Lesieur
1,2
Marie Vercambre
1,2
Nathalie Chabbert-Buffet
1,2
1
Département de gynécologie–obstétrique
et médecine de la reproduction,
hôpital Tenon, AP-HP,
4, rue de la Chine,
75571 Paris cedex 20, France
2
UPRES 4053, université Pierre-et-Marie-
Curie (Paris-VI),
75020 Paris, France
3
Département de chirurgie,
institut Gustave-Roussy,
39, rue Camille-Desmoulins,
94800 Villejuif, France
Résumé.Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme. Le diagnostic est de
plus en plus précoce et les traitements sont de plus en plus efficaces. Néanmoins, la
problématique de la toxicité des traitements antitumoraux, qui incluent l’insuffisance ova-
rienne prématurée et l’infertilité, est de plus en plus posée par les survivantes. L’incidence de
l’aménorrhée induite par la chimiothérapie est liée essentiellement à l’âge de la patiente puis
aux types d’agents qui sont administrés et à la durée du traitement. Les femmes âgées de plus
de 35 ans ont un risque de défaillance ovarienne et d’infertilité permanente plus importante
que les femmes plus jeunes, car la fonction ovarienne décline avec l’âge. La possibilité et la
nécessité de préserver la fonction ovarienne sont des questions importantes au moment de la
prise en charge initiale. Autoriser une grossesse après un cancer du sein pose de facto la
notion d’augmentation potentielle du risque de récidive, mais les études rétrospectives sont
plutôt rassurantes. Les moyens mis en œuvre pour parvenir à une grossesse vont nécessiter
une réflexion pluridisciplinaire et des explications éclairées à la patiente.
Mots clés : cancer du sein, préservation, fertilité
Abstract.Breast cancer is the most common cancer in women. Diagnosis is more and more
early. Treatments are increasingly efficient. Nevertheless, the problem of their toxicity inclu-
ding premature ovarian failure and infertility is now raised by survivors. The incidence of
amenorrhea induced by chemotherapy is linked first to patient’s age, then to administered
drugs and duration of treatment. The risks of ovarian failure and permanent infertility are
higher after 35 years because of the decline in ovarian function with age. Possibility and needs
of preserving ovarian function are important issues to be discussed as soon as the initial
assessment. Allowing a pregnancy after breast cancer raises the question of a possible increase
in the risk of cancer relapse, but retrospective studies are quite reassuring. The methods used
to achieve a pregnancy require a multidisciplinary approach and detailed explanations to the
patient.
Key words: breast cancer, preservation, fertility
Les cancers du sein représentent
environ 30 % de toutes les tu-
meurs malignes chez les femmes en
âge de procréer. Les détections préco-
ces des cancers invasifs et des cancers
in situ, en outre, et l’efficacité de plus
en plus importante des traitements ont
conduit à une amélioration du pronos-
tic et une augmentation du nombre
des survivantes à long terme. La pro-
blématique de la toxicité des traite-
ments antitumoraux, incluant l’insuffi-
sance ovarienne prématurée et
l’infertilité, est de plus en plus posée
par les survivantes à long terme d’un
cancer du sein [1]. L’incidence de
l’aménorrhée induite par la chimio-
thérapie est liée à l’âge de la patiente,
aux types d’agents qui sont adminis-
trés et à la durée du traitement [2]. Les
femmes âgées de plus de 35 ans ont
un risque de défaillance ovarienne et
d’infertilité permanente plus impor-
tante que les femmes plus jeunes, car
la fonction ovarienne décline avec
l’âge. La possibilité et la nécessité de
préserver la fonction ovarienne sont
des questions importantes au moment
de la prise en charge initiale. Comme
se pose la question du risque de réci-
dive lorsqu’on autorise une grossesse
et éventuellement une aide à la pro-
création, une réflexion multidiscipli-
naire est indispensable.
mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie 2008 ; 10 (4) : 272-6
médecine thérapeutique
Médecine
de la Reproduction
Gynécologie
Endocrinologie
Tirés à part : R. Rouzier
doi: 10.1684/mte.2008.0167
mt Médecine de la Reproduction, Gynécologie Endocrinologie, vol. 10, n° 4, juillet-août 2008
272
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Fonction ovarienne
après chimiothérapie
Les agents cytotoxiques et les protocoles de chimiothé-
rapies dans le cadre du traitement d’un cancer du sein ont
beaucoup évolué ces dernières années. Le protocole CMF
(cyclophosphamide, méthotrexate, 5-fluorouracile) a été
remplacé par les régimes basés sur l’administration d’une
anthracycline et d’un taxane. Peu de données rapportant
directement la fonction ovarienne ont été rapportées.
C’est l’aménorrhée définitive postchimiothérapie qui est
utilisée dans toutes les études comme témoin de l’insuffi-
sance ovarienne. Avec le CMF, l’incidence de la dysfonc-
tion ovarienne après chimiothérapie dépendait de façon
quasi linéaire de la dose des agents alkylants et de l’âge de
la patiente. Il a été calculé que la dose totale de cyclo-
phosphamide nécessaire pour induire une aménorrhée
chez une femme de 40 ans est quatre fois inférieure à celle
nécessaire chez une femme de 20 ans [3]. Minton et
Munster ont rapporté que les deux tiers des femmes pré-
ménopausées développaient une aménorrhée au décours
d’une chimiothérapie utilisant du cyclophosphamide, du
méthotrexate et du 5-flurouracile [4]. L’incidence de
l’aménorrhée varie entre 21 à 71 % chez les femmes âgées
de moins de 40 ans lors du traitement et de 40 à 100 %
chez les femmes les plus âgées [5]. Les régimes les plus
couramment utilisés comprennent aujourd’hui une an-
thracycline. La plupart des essais ont montré qu’une chi-
miothérapie comportant une anthracycline (FEC ou FAC)
induisait moins souvent une aménorrhée qu’un régime
CMF, probablement car la dose de cyclophosphamide
administrée dans le régime FAC/FEC est inférieure à celle
du CMF. Les chiffres varient néanmoins entre 34 et 55 % ;
là aussi, ils sont fonction de l’âge, et par exemple Horto-
bagyi et al. ont montré que dans leur cohorte de patientes
traitées au M.D. Anderson Cancer Center, aucune des
femmes de moins de 30 ans ne restait aménorrhéique,
tandis que 96 % des femmes âgées entre 40 et 49 ans ne
recouvraient pas de cycles menstruels [6]. Actuellement,
les régimes de chimiothérapie comportent aussi un taxane
chez les femmes ayant un envahissement ganglionnaire,
et les indications des taxanes ne cessent de s’étendre. Peu
de données sont disponibles chez les patientes traitées par
un régime de chimiothérapie comprenant des taxanes.
L’étude de Fornier et al. a montré que les femmes de moins
de 40 ans, recevant de façon séquentielle un régime à
base d’anthracycline et des taxanes, développaient une
aménorrhée dans 15 % des cas [7]. L’étude de Tham et al.
retrouvait néanmoins un taux d’aménorrhée qui était su-
périeur chez les patientes qui recevaient des taxanes en
plus des anthracyclines par rapport à celles qui recevaient
des anthracyclines seules (64 contre 55 %) [8]. Néan-
moins, l’aménorrhée était rapportée essentiellement chez
les femmes de plus de 40 ans. Une synthèse des différentes
études est rapportée dans la figure 1 [5].
La réserve ovarienne peut se mesurer grâce au dosage
de la FSH, de l’inhibine B, de l’estradiolémie et de l’hor-
mone antimüllérienne ainsi que par le compte des follicu-
les antraux [9]. Néanmoins, peu d’études ont été rappor-
tées [10], et il est à présent difficile de prédire le risque que
la fonction ovarienne soit endommagée pendant la chi-
miothérapie. Pourtant, il serait important de bénéficier
d’un tel prédicteur pour sélectionner les candidates à des
méthodes préventives de préservation de la fertilité qui
sont lourdes.
La volonté de maintenir la fonction ovarienne est à
mettre en balance avec le fait que l’aménorrhée a poten-
tiellement un effet bénéfique sur la survie, en particulier
chez les patientes ayant une tumeur hormonosensible
(récepteur aux estrogènes positif).
Les estrogènes d’origine ovarienne jouent un rôle impor-
tant dans l’oncogenèse du cancer du sein. Il a été montré en
prévention, en situation adjuvante et en situation palliative,
que la suppression de la production d’hormones ovariennes a
une efficacité certaine. Il ne fait aucun doute que, tout parti-
culièrement chez les très jeunes patientes, la chimiothérapie
agit au moins partiellement par l’aménorrhée induite [7, 11]
.
La survie à 15 ans de femmes de moins de 50 ans, ayant eu
une ablation des ovaires, est améliorée de manière signi-
ficative par rapport aux témoins (survie sans récidive : 45
versus 39%; p= 0,0007 ; survie globale : 52,4 versus
46,1 % ; p= 0,0001) [12]. Un bénéfice pronostique chez
les patientes avec aménorrhée chimio-induite a été mon-
tré dans l’étude IBCSG [13]. Des résultats similaires ont été
montrés dans le ABCSG-05 : amélioration de la survie
sans récidive (HR = 0,656 ; IC 95 % = [0,477–0,901] ;
p= 0,0093) et de la survie globale (HR = 0,569 ; IC
95 % = [0,387–0,837] ; p= 0,0042) chez les patientes
avec une aménorrhée chimio-induite (CMF) [14]. Une
méta-analyse sur l’influence de l’aménorrhée chimio-
induite sur le pronostic a montré un avantage significatif
de survie pour les patientes ayant une aménorrhée chimio-
induite dans 15 des 23 études traitant ce sujet [15]. Dans le
8
8
CMF AC 4 P 4 T TAC
FEC/
FAC
4 4 AC 4 AC 66-8
100%
80%
60%
Pourcentage
d’aménorrhéé
Nombre
d’études
>40 ans
<40 ans
40%
20%
531 11
Figure 1. Aménorrhée postchimiothérapie en fonction du régime.
C : cyclophosphamide ; M : méthotrexate ; F : 5-flurouracile ; E :
épirubicine;A:adriamycine ; P : paclitaxel ; T : docétaxel.
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même esprit, la méta-analyse des études randomisées,
testant l’intérêt d’un traitement par analogue de la GnRH
après chimiothérapie, a analysé les données de 3 307
patientes et a rapporté une amélioration du taux de survie
globale chez les femmes qui recevaient des agonistes
(15 % de réduction ; p= 0,04) [16]. Néanmoins, la ques-
tion de savoir si l’aménorrhée chimio-induite représente
un facteur de pronostic indépendant reste sans réponse
dans toutes les études. Vanhuyse et al. ont rapporté le
bénéfice de l’aménorrhée chimio-induite chez 130 pa-
tientes mais n’ont pas pu confirmer qu’il s’agit d’un facteur
pronostique indépendant [17]. De plus, les études souf-
frent d’une définition peu précise de l’aménorrhée. L’amé-
norrhée temporaire, telle que définie dans l’étude de
l’IBCSG [19], est probablement moins probante que
l’aménorrhée durable. En outre, reste la question de savoir
si l’aménorrhée peut être utilisée de façon satisfaisante à la
place de critères hormonaux plus stricts. Braverman et al.
[18] ont par exemple retrouvé des taux sériques d’hormo-
nes correspondant à un état préménopausique chez 12
(75 %) des 16 patientes qui étaient en aménorrhée de
3 mois après la fin de la chimiothérapie. De plus, les effets
de la combinaison suppression de la fonction ovarienne et
tamoxifène après chimiothérapie sont difficiles à discer-
ner. Le tamoxifène peut induire en lui-même une aménor-
rhée, ce qui interfère avec le diagnostic de défaillance
ovarienne. Par ailleurs, si l’on souhaite se baser sur les
dosages hormonaux, les gonadotrophines peuvent rester
basses sous tamoxifène lors du passage en ménopause
[19]. Cependant, les experts s’accordent pour penser que
la chimiothérapie, dans les tumeurs sensibles aux hormo-
nes, est efficace en grande partie par son effet sur la
fonction ovarienne. Tenter de préserver la fonction ova-
rienne pourrait exposer à un risque théorique de contrôle
tumoral insuffisant chez les patientes [20]. Cela constitue
un frein éthique potentiel à la mise en route d’études ayant
pour but de préserver la fonction ovarienne chez les
femmes ayant un cancer du sein.
Grossesse chez les patientes ayant eu
un cancer du sein
L’âge de plus en plus tardif de la première grossesse et
l’amélioration de la survie des patientes ayant un cancer
du sein font du désir de grossesse, après cancer du sein,
une situation clinique de plus en plus fréquente. Les
estrogènes jouent un rôle bien identifié dans la carcinoge-
nèse mammaire. Cela a conduit les sénologues à une
méfiance concernant la possibilité d’une grossesse chez
les survivantes d’un cancer du sein, en raison d’un impact
potentiellement négatif du taux d’estrogène circulant bien
plus important chez la femme enceinte.
Néanmoins, l’analyse de la littérature (tableau 1) est
rassurante en sachant qu’il a même été retrouvé une survie
plus longue chez les patientes ayant eu une grossesse
après un cancer du sein. L’étude de Cooper et Butterfield a
retrouvé par exemple une survie de 75 % à 5 ans chez les
patientes ayant une grossesse après cancer du sein contre
50 % dans le groupe témoin [21]. Une étude française à
peu près similaire n’a par contre trouvé aucune différence
significative. L’étude de Ariel et Kempner a rapporté une
survie de 77 et 56 % chez les patientes ayant eu une
grossesse après cancer du sein, respectivement chez les
patientes sans et avec envahissement ganglionnaire, le
chiffre était de 70 et 53 % chez les patientes témoins [22].
Dans l’étude de Sankila et al., il y a aussi une différence
significative des survies en faveur du groupe des patientes
ayant eu une grossesse après cancer du sein. Les survies, il
y a 15 ans, étaient respectivement dans ces deux groupes
de 79 et 55 % avec un risque relatif de décès de 4,8 chez
les femmes qui n’avaient pas eu de grossesse après cancer
du sein [23]. Des chiffres similaires ont été rapportés par
les groupes suédois et danois, avec des risques relatifs de
survie, de métastases ou de décès de 0,42 à 0,55 chez les
patientes ayant mené grossesse après cancer du sein [24,
25]. Gelber et al. ont rapporté les résultats des patientes
incluses dans les essais de l’IBCSG : les taux de survies à
10 ans étaient de 86 et 74 % chez les patientes ayant eu
une grossesse après cancer du sein et les témoins, respec-
tivement. Il est à noter que dans la plupart de ces études,
les témoins étaient appariés sur le statut ganglionnaire et
l’âge [26]. Néanmoins, dans l’étude de M.D. Anderson, il
a été constaté que les patientes, qui étaient enceintes après
cancer du sein, étaient diagnostiquées à des stades plus
précoces que les autres, avec moins d’envahissement
ganglionnaire et plus de tumeurs ER négatives [27]. Se
pose le problème d’un biais de confusion évident : les
patientes qui sont enceintes après un cancer du sein
pourraient être sélectionnées avec des critères pronosti-
ques plus favorables que les témoins ; cet effet est appelé
healthy mother effect [28]. L’analyse des chiffres est donc
rassurante en sachant qu’il n’y a évidemment aucun
moyen de faire un essai prospectif pour répondre de façon
définitive à la question de l’impact de la grossesse après
cancer du sein. Ces études rétrospectives, sans permettre
de conseiller une grossesse après cancer du sein, ne la
contre-indiquent pas.
Sachant que la plupart des récidives métastatiques se
développent dans les2à3ansaprès le diagnostic initial, il
est conseillé aux patientes ayant un cancer du sein de
patienter pendant 3 ans avant de mener une grossesse
Tableau 1.Synthèse des études rapportant la survie
des patientes menant une grossesse après cancer du sein
par rapport à un groupe témoin
Meilleure survie – différence significative : 4 études
Meilleure survie – tendance, mais différence non significative : 4 études
Survie identique : 3 études
Survie inférieure si grossesse < 2 ans après le traitement initial : 1 étude
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[28]. Chez les patientes ayant un envahissement ganglion-
naire, le délai recommandé est même de 5 ans. Le pro-
blème se complique d’autant plus que les patientes ayant
une tumeur avec des récepteurs aux estrogènes reçoivent
un traitement par tamoxifène pendant 5 ans. Le tamoxi-
fène est tératogène, et les patientes doivent être encoura-
gées à continuer leur traitement pendant 5 ans et repous-
ser la grossesse après la période de traitement. Arrêter le
tamoxifène au bout de 2-3 ans en diminue l’efficacité de
moitié (la diminution de risque passe de 30 à 15 % envi-
ron) [29]. Son arrêt est donc une décision de la patiente
qui doit être informée. Il peut être arrêté si la patiente
désire absolument une grossesse, après une évaluation des
risques oncologiques. Avant d’entreprendre une gros-
sesse, il est recommandé de réaliser un bilan sénologique
complet.
Environ 8 % des femmes fertiles après traitement d’un
cancer du sein vont en réalité concevoir. Les données
concernant les enfants sont très limitées, il semble néan-
moins qu’il n’y ait pas d’augmentation majeure de l’inci-
dence de la prématurité, des morts subites et des malfor-
mations congénitales. Certains auteurs ont rapporté un
peu plus de fausses couches avec des chiffres allant
jusqu’à 24 % [30].
Fécondation in vitro et cancer du sein
Conserver des possibilités de grossesse
ultérieures en intervenant avant la mise en
route de la chimiothérapie
La fécondation in vitro (FIV) avec préservation de
l’embryon est la technique la plus couramment utilisée
pour préserver la fertilité, cela nécessite néanmoins deux
semaines de stimulation ovarienne en sachant qu’il y a
environ6à8semaines d’intervalle entre la chirurgie et le
début de la chimiothérapie, ce délai étant suffisant pour
entreprendre une stimulation ovarienne. Néanmoins,
l’utilisation de citrate de clomifène et de gonadotrophines
est discutable chez les patientes qui ont une tumeur avec
des récepteurs aux estrogènes, étant donné les risques liés
à l’hyperoestrogénie. Des protocoles alternatifs avec le
tamoxifène ou des inhibiteurs de l’aromatase ont été éva-
lués bien que ces techniques de simulation soient moins
efficaces sans l’ajout de gonadotrophines. Dans l’étude
conduite par Oktay et al., le tamoxifène à des doses de 40
ou 60 mg était débuté2à3jours après le cycle et était
administré quotidiennement pendant5à12semaines
[31]. Cette équipe a aussi conduit des études avec le
létrozole avec une dose de 5 mg par jour et de la FSH 150
à 300 unités [32]. Les résultats étaient satisfaisants avec
des pics d’estrogènes qui étaient plus bas que chez les
patientes témoins ayant une stimulation par d’autres mé-
thodes et un nombre d’embryons similaire ou supérieur
[33]. Néanmoins, il convient de noter que ni le tamoxifène
ni les anti-aromatases ne disposent d’une autorisation de
mise sur le marché dans cette indication, et que les indus-
triels commercialisant ces molécules ont même fait circu-
ler une note afin de prévenir les médecins, en s’appuyant
sur le fait que nous ne disposons pas de données à long
terme pour affirmer l’innocuité d’une stimulation par ces
molécules.
La cryopréservation de cortex ovarien ou d’ovocytes
sont des alternatives actuellement à l’étude, qui ne sont
proposées que dans le cadre d’essais et dont l’efficacité
reste limitée. Le don d’ovocyte, enfin, constitue aussi une
alternative dans cette situation particulière.
Procréation médicale assistée après
le traitement initial d’un cancer du sein
Il existe une controverse concernant le risque inhérent
et une stimulation chez les patientes ayant eu un cancer
du sein à distance du traitement initial. Les seules données
disponibles actuellement concernent le risque de cancer
du sein chez les femmes stimulées [34]. Celui-ci est dé-
battu, mais le principe de précaution implique que,
concernant une patiente ayant eu un cancer du sein, la
décision d’une éventuelle aide à la procréation soit parta-
gée avec l’équipe des oncologues en informant la patiente
des bénéfices et des risques.
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Revue
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