Thérapies comportementales et cognitives dans les troubles

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mise au point
Mise au point
Les phobies spécifiques
Modèles théoriques
Le traitement des phobies spécifiques (PS)
a eu un rôle important dans le développe-
ment de la thérapie comportementale. Plu-
sieurs modèles théoriques ont été propo-
sés pour les expliquer. Le plus connu est
celui des deux facteurs de Mowrer (1).
Selon cet auteur, la peur est due à deux
types d’apprentissage : c’est d’abord une
réponse interne, apprise par conditionne-
ment classique et maintenue, par la suite,
par conditionnement opérant.
Le conditionnement classique, ou pavlo-
vien, est l’apprentissage par contiguïté. Un
stimulus inconditionnel (nourriture) pro-
voque une réponse inconditionnelle (sali-
vation). Si on associe un stimulus neutre
(lumière) au stimulus inconditionnel
(nourriture) un certain nombre de fois, le
stimulus neutre (devenu stimulus condi-
tionnel) va, à lui tout seul, provoquer la
réponse (salivation).
Le conditionnement opérant ou instru-
mental décrit par Skinner est l’apprentis-
sage par les conséquences d’une action.
Une conséquence positive (récompense)
aura tendance à augmenter la fréquence de
la réponse. Une conséquence négative
(punition) aura la tendance inverse. Selon
la théorie des deux facteurs de Mowrer, au
cours d’une expérience traumatique, un
stimulus neutre (une situation, un objet,
un animal) est fortuitement associé à un
stimulus inconditionnel aversif (la dou-
leur) et, ainsi, provoque lui-même la peur.
Par la suite, le sujet évite l’objet phobo-
gène et renforce (négativement) sa peur,
c’est-à-dire la maintient. Même si cette
théorie est fondée sur des recherches en
laboratoire, menées sur des animaux, elle
a été objet de controverses. Une critique
fréquente porte sur le fait qu’il est souvent
difficile d’identifier un événement trau-
matisant qui soit à l’origine de la PS. Pour-
tant, une étude (2) montre que seulement
Les thérapies cognitives et comportementales ont connu un essor
considérable ces dernières années en France. Elles constituent une
technique de soin efficace sur les troubles anxieux. Il s’agit de thérapies
brèves qui ont pour spécificité d’appliquer une méthode scientifique à la
psychothérapie ; elles supposent une démarche active de la part du
patient. Elles ne se définissent pas par un seul modèle théorique mais par
un modèle méthodologique qui propose de se centrer sur l’état présent
du patient et de juger l’efficacité de la thérapie sur des critères précis.
Les techniques thérapeutiques utilisées ont été développées empirique-
ment. Le déroulement des thérapies comprend plusieurs étapes : tout
d’abord l’analyse fonctionnelle, qui cherche à décrire précisément les
symptômes ressentis avec leurs aspects comportementaux, cognitifs et
physiologiques, de déterminer les facteurs historiques ainsi que les
conditions de déclenchement et de maintien du trouble. Par la suite,
le thérapeute et le patient cherchent à définir les objectifs thérapeu-
tiques et à établir un “contrat” thérapeutique qui porte sur les buts de
la thérapie et les moyens du traitement. Le programme thérapeutique
mis en place utilisera les principes et les techniques définis au préa-
lable avec le patient. L’évaluation des résultats du traitement s’effectue
en utilisant des mesures répétées avant, durant et après le traitement.
La durée de traitement des troubles anxieux est brève ; elle s’étend,
en général sur quelques mois (10-20 séances).
Nous proposons, dans cette première partie, de résumer, les modèles
expérimentaux, les techniques thérapeutiques et les études d’effica-
cité pour les phobies spécifiques, le trouble d’anxiété généralisée et
le trouble panique avec ou sans agoraphobie. Une deuxième partie,
(à paraître dans notre prochain numéro) portera sur la thérapie com-
portementale et cognitive dans la phobie sociale, le trouble obses-
sionnel compulsif et le trouble : état de stress post-traumatique.
* Service de psychiatrie adulte,
hôpital Lariboisière-Fernand-Widal,
Assistance publique hôpitaux de Paris.
Thérapies comportementales et cognitives
dans les troubles anxieux (Ire partie)
Phobies spécifiques, trouble d’anxiété généralisée, trouble panique et agoraphobie
C. Musa*
Act. Méd. Int. - Psychiatrie (17) n° 10, décembre 2000 358
15 % des phobiques ne se souviennent
d’aucun événement spécifique à l’origine
de leur phobie, alors que 58 % attribuent
leur phobie à un événement traumatique.
De plus, un conditionnement peut se pro-
duire sans que le sujet en ait conscience
(3).
La théorie de l’apprentissage vicariant de
Bandura (4) a également eu de l’impor-
tance pour la compréhension des PS et le
développement des techniques thérapeu-
tiques appropriées. Elle stipule que les
peurs peuvent être apprises par la simple
observation d’un modèle, et cela a été
démontré dans une série d’études au cours
des années 1960.
Les techniques thérapeutiques
La plus ancienne de toutes les techniques
comportementales pour les PS est la
désensibilisation systématique dévelop-
pée dans les années 1950 par Joseph
Wolpe. Elle comporte plusieurs étapes. La
première est l’apprentissage d’une
méthode de relaxation. Le plus souvent,
on propose la méthode de Jacobson. Paral-
lèlement, le thérapeute et le patient
construisent une “hiérarchie” de situations
phobogènes. Par la suite, le travail de
désensibilisation va commencer. Le thé-
rapeute décrit au patient la situation la
moins anxiogène de la hiérarchie. Le
patient relaxé doit la visualiser dans les
détails. Chaque fois qu’il ressent de
l’anxiété, le thérapeute interrompt la
visualisation et propose de reprendre la
relaxation. Le thérapeute alterne ainsi la
relaxation et l’imagination de la situation
phobogène jusqu’à ce que le patient puisse
l’évoquer sans anxiété. À ce moment, il
passe à l’item suivant et ainsi de suite jus-
qu’à ce qu’il ait franchi tous les niveaux
d’une hiérarchie. On voit que cette tech-
nique peut prendre beaucoup de temps.
D’ailleurs, de nombreux auteurs ont sug-
géré que c’est l’exposition ou l’affronte-
ment des situations anxiogènes qui est le
point essentiel et commun à toutes les
techniques qui se sont révélées efficaces
pour traiter les phobies simples. En géné-
ral, l’exposition est graduée et se déroule
soit in vivo, soit en imagination. Parfois,
on procède d’emblée à l’exposition aux
situations les plus anxiogènes. Il s’agit des
techniques d’immersion (in vivo) ou
d’implosion (en imagination). Dans le cas
de la phobie du sang, des injections et des
blessures, une technique thérapeutique
s’est révélée utile pour éviter l’évanouis-
sement lors de l’exposition. Il s’agit de la
technique de “tension appliquée” qui,
consiste à demander au patient de tendre
ses muscles pendant quinze secondes, puis
de les détendre au moins cinq fois de suite,
dans le but de maintenir une pression san-
guine et un rythme cardiaque satisfaisants
(5). Le modelage de participation, tech-
nique issue des travaux de Bandura, a éga-
lement démontré une certaine efficacité
dans le traitement des phobies simples.
Avec cette technique, le thérapeute va
affronter une situation phobogène pour le
patient, en ayant un comportement non
anxieux ; puis il va demander au patient
de l’imiter. Les techniques cognitives
peuvent également être utilisées dans le
traitement des phobies simples ; toutefois,
il semble qu’elles n’apportent pas un réel
avantage par rapport aux techniques d’ex-
position seules (6).
Études d’efficacité
Une revue d’études (2) montre que les thé-
rapies comportementales et cognitives
(TCC) sont particulièrement efficaces
dans le traitement des PS. Elles amélio-
rent, en général, plus de 80 % des sujets
(7), et leurs résultats semblent tenir, voire
s’améliorer, avec le temps.
Le trouble d’anxiété
généralisée
Modèles théoriques
Le trouble d’anxiété généralisée (TAG),
dont la définition est restée vague et
controversée pendant des années, n’a attiré
que tardivement l’intérêt des comporte-
mentalistes. C’est au travers de la notion
d’inquiétude que les premières théories de
l’anxiété généralisée ont été développées.
Ainsi, Borkovec (8) définit l’inquiétude
comme un enchaînement de pensées et
d’images chargées d’émotion négative dif-
ficiles à contrôler. Elle serait une tentative
pour résoudre un problème réel ou fictif.
Borkovec (9) note d’ailleurs que les
patients souffrant d’anxiété généralisée
sont des experts pour identifier des pro-
blèmes potentiels, mais beaucoup moins
performants lorsqu’il s’agit de les
résoudre. Dans leur modèle cognitif, Beck
et Emery (10) insistent sur l’importance
de certaines croyances erronées dans le
développement et le maintien de l’anxiété
généralisée. Il s’agit notamment de la
croyance sur l’effet protecteur du souci.
En effet, la pratique clinique confirme que
les patients ont tendance à penser que le
fait de s’inquiéter va leur permettre d’évi-
ter le pire. Freeston et al. (11) pensent que
l’intolérance à l’incertitude est la caracté-
ristique cognitive essentielle de l’anxiété
généralisée. C’est cette intolérance qui va
favoriser le développement des croyances
erronées à l’égard des inquiétudes, puis
nuire au processus de résolution des pro-
blèmes et contribuer à l’évitement cogni-
tif.
Techniques thérapeutiques
La relaxation est une des techniques prin-
cipales utilisées dans le traitement du
TAG. Plusieurs méthodes sont couram-
ment employées par des thérapeutes, dont
le “training autogène” de Schultz et la
méthode de relaxation musculaire, pro-
gressive de Jacobson. Le résultat recher-
ché est un relâchement musculaire, avec
ralentissement cardiaque et respiratoire,
accompagné d’une sensation subjective de
calme et de bien-être.
Partant du constat que l’évitement cogni-
tif (la tendance à chasser les pensées
anxiogènes) provoque inévitablement dans
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Mise au point
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un deuxième temps une recrudescence de
ces mêmes pensées, la technique d’expo-
sition en imagination aux craintes ima-
ginaires ultimes est aussi fréquemment
utilisée dans le traitement de l’anxiété
généralisée. Il s’agit de demander au
patient de reconnaître d’abord une inquié-
tude précise, de la décrire par écrit en iden-
tifiant toutes les pensées et images qui
envahissent son esprit. Un scénario est
ainsi obtenu et va être lu au patient plu-
sieurs fois de suite jusqu’à une baisse
significative de l’anxiété. Habituellement,
après une augmentation initiale, l’anxiété
va diminuer graduellement. Toutefois, le
thérapeute doit être vigilant et détecter les
tentatives inconscientes (automatiques) du
patient pour éviter ou neutraliser les élé-
ments du scénario les plus anxiogènes. On
peut utiliser des enregistrements sur cas-
sette pour augmenter l’efficacité de cette
technique en permettant aux patients de
refaire cet exercice régulièrement chez eux.
La restructuration cognitive est une tech-
nique de modification des pensées (cogni-
tions) conscientes et inconscientes. Elle
cherche, dans un premier temps, à identi-
fier les pensées automatiques des patients
anxieux (“Je dois avoir une maladie
grave”, “Je risque de rater mon année uni-
versitaire”). Les erreurs de logique, ou dis-
torsions cognitives typiques (généralisa-
tion excessive, inférence arbitraire), vont
également être repérées, ainsi que les
croyances inconscientes profondes (les
schémas cognitifs) qui dirigent la vie du
patient (“Je me protège ainsi que mes
proches en me faisant du souci”). Pour
obtenir une modification cognitive, le thé-
rapeute aura recours à la technique du
questionnement “socratique”. Celui-ci
consiste à aider le patient à “accoucher”,
à résoudre un problème ou à remettre en
question ses pensées et ses croyances sans
lui imposer des solutions, des conseils
directs ou des jugements. La forme inter-
rogative est de règle : “Que pourriez-vous
penser d’autre dans cette situation ?”, “N’y
a-t-il pas d’autres solutions ?”, “Sur quoi
vous fondez-vous pour tirer cette conclu-
sion ?”, etc. Il est souvent nécessaire de
remonter à des expériences précoces de
perte de contrôle pour mieux comprendre
les distorsions cognitives et croyances des
patients et les modifier. Des tâches pré-
cises, portant sur le contenu des croyances,
seront prescrites par le thérapeute dans le
but de leur changement.
Études d’efficacité
Trois études (12, 13, 14), utilisant une
méthodologie rigoureuse, démontrent l’ef-
ficacité de la thérapie comportementale et
cognitive dans la réduction de l’anxiété
chez les patients souffrant du TAG. Une
étude (15) portant sur 65 patients souffrant
du TAG compare l’efficacité de la relaxa-
tion, de la restructuration cognitive ou de
la combinaison des deux techniques. Les
trois traitements ont amélioré les symp-
tômes de l’anxiété avec un maintien au
suivi (à 6, 12 et 24 mois). Dans une étude
(16) comparant la relaxation, une thérapie
non directive et une thérapie comporte-
mentale et cognitive, la relaxation et la thé-
rapie comportementale et cognitive se sont
avérées plus efficaces que la thérapie non
directive. La thérapie comportementale et
cognitive a donné les meilleurs résultats
sur la tendance à s’inquiéter. Après un an,
seuls les sujets ayant bénéficié de la thé-
rapie comportementale et cognitive
avaient conservé leurs acquis.
Le trouble panique
avec ou sans agoraphobie
Modèles théoriques
Il existe un grand nombre de modèles
comportementaux et cognitifs du trouble
panique (TP) et de l’agoraphobie. Les
modèles comportementaux proposent
d’expliquer les attaques de panique par le
conditionnement intéroceptif. L’individu
agoraphobe est vulnérable biologique-
ment, ce qui va favoriser l’apparition
d’une attaque de panique. Selon le modèle
du conditionnement classique, l’attaque de
panique est le stimulus inconditionnel qui
va s’associer à la première situation ren-
contrée (stimulus neutre). Le patient va,
par la suite, éviter toutes les situations rap-
pelant la première et développer la pho-
bie. De plus, un conditionnement intéro-
ceptif se produit, c’est-à-dire toute
sensation physique semblable à celles
éprouvées lors des attaques de panique va
provoquer la peur, et donc une nouvelle
attaque de panique.
Le modèle biocomportemental de Barlow
(17) propose la comparaison avec un sys-
tème d’alarme trop sensible. Selon lui, les
personnes vulnérables biologiquement et
psychologiquement réagissent excessive-
ment aux stresseurs environnementaux,
déclenchant ainsi une réaction d’alarme
inappropriée, une sorte de “fausse alarme”
(l’attaque de panique). Par la suite, il se
produit un conditionnement par lequel les
sensations physiologiques se trouvent
associées à la réaction d’alarme et provo-
quent elles-mêmes une nouvelle attaque
de panique. L’individu souffrant d’un TP
va développer une hypervigilance à ses
propres sensations physiques. Le TP serait
donc le résultat d’une réaction d’alarme
conditionnée.
Le modèle cognitif de Clark (18) postule
que ce sont les interprétations des sensa-
tions physiques qui vont être essentielles
dans le développement du TP. L’attaque de
panique peut, selon Clark, être déclenchée
par différents stimuli internes (pensées,
images, sensations physiques) ou externes
(situation où la première attaque de
panique est apparue). Si l’individu inter-
prète ces stimuli comme menaçants, il
développe une anxiété anticipatoire. Cette
dernière déclenche des symptômes phy-
siques caractéristiques (par exemple, pal-
pitations) qui sont, à leur tour, interprétés
catastrophiquement (“Je suis en train de
faire une attaque de panique”). Cela va
intensifier les sensations physiques, et le
patient se trouvera dans un cercle vicieux
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Mise au point
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Mise au point
Act. Méd. Int. - Psychiatrie (17) n° 10, décembre 2000 360
qui conduira à l’attaque de panique. Nous
voyons que ces différents modèles mon-
trent que certains facteurs cognitifs et
comportementaux sont essentiels au déve-
loppement et au maintien du TP et de
l’agoraphobie : les facteurs cognitifs, tels
que l’hypervigilance, l’anticipation et les
erreurs d’interprétation, et les facteurs
comportementaux, comme l’évitement.
Les techniques thérapeutiques utilisées
vont donc chercher à les modifier.
Techniques thérapeutiques
La première étape du traitement consiste à
donner aux patients de l’information sur le
TP et/ou l’agoraphobie. C’est souvent d’une
très grande importance, car, en rassurant le
patient quant au caractère “non dangereux”
de ses symptômes, en lui expliquant qu’il
ne va pas devenir fou, faire une crise car-
diaque ou tomber, on agit sur un des prin-
cipaux facteurs de maintien du trouble qui
est l’interprétation catastrophique. Le thé-
rapeute va également rechercher des fac-
teurs précipitants et les facteurs de maintien
du trouble dans l’histoire du patient. Il va
expliquer le modèle de la thérapie compor-
tementale et cognitive ainsi que la physio-
logie des réactions de peur. Par la suite, il va
apprendre au patient à gérer ses symptômes
physiques pour apporter un soulagement
rapide à son anxiété. Ainsi, on va lui ensei-
gner les techniques de rééducation respi-
ratoire (efficaces notamment dans la ges-
tion de l’hyperventilation) et les techniques
de relaxation.
La restructuration cognitive (anxiété
généralisée, techniques thérapeutiques) aura
pour but la modification des pensées catas-
trophiques (“Je suis en train de devenir fou”)
et des distorsions cognitives telles que la dra-
matisation et la surestimation du danger. Les
techniques d’exposition aux situations et
aux sensations physiques (exposition inté-
roceptive) vont être indispensables pour ter-
miner le travail de modification cognitive.
L’ exposition intéroceptive va chercher à
provoquer les sensations physiques redou-
tées par des exercices précis (par exemple,
provocation de l’hyperventilation). Le but
est d’aider le patient à constater qu’il peut
supporter et contrôler ses symptômes, et que
ceux-ci vont spontanément diminuer après
un certain temps. Une fois que le patient a
appris à avoir moins peur des symptômes
de panique, il est prêt à affronter les situa-
tions qu’il évite.
L’ exposition progressive in vivo, technique
comportementale de base dans le traitement
des phobies, aide les patients à apprendre à
affronter les situations évitées, à prendre
conscience, encore une fois, que l’anxiété
ressentie n’est pas dangereuse et peut être
contrôlée. Le thérapeute et le patient vont
établir une hiérarchie des situations redou-
tées, et le patient va commencer en s’expo-
sant aux situations les moins anxiogènes de
la hiérarchie. Parfois, une exposition en
imagination va être proposée, soit parce
que l’anxiété est trop importante, soit parce
que la mise en situation est difficile (par
exemple, voyage en avion). Pour être effi-
cace, l’exposition doit être progressive,
régulière et suffisamment longue pour per-
mettre au patient de ressentir une baisse
considérable de l’anxiété. Il est donc préfé-
rable de choisir des exercices qui durent au
moins une vingtaine de minutes (effectuer
un trajet en métro sur 15 stations) ou répé-
ter les exercices courts plusieurs fois de suite
(par exemple, prendre un ascenseur).
Études d’efficacité
Plus d’une quarantaine d’études compa-
ratives avec groupe témoin démontrent
l’efficacité des thérapies comportemen-
tales et cognitives dans le traitement du TP
et de l’agoraphobie. Les TCC sont plus
efficaces que la liste d’attente (absence
d’intervention), que d’autres interventions
psychologiques (par exemple, thérapie de
soutien) et que les traitements pharmaco-
logiques. De 50 à 80 % des patients sont
complètement libérés de leurs attaques de
panique, de leurs comportements d’évite-
ment, et de leur détresse psychologique
après trois à quatre mois de thérapie. De
80 à 95 % de patients se trouvent signifi-
cativement améliorés. Les études de suivi
montrent que les effets se maintiennent,
voire s’améliorent encore.
Conclusion
Les résultats obtenus dans le traitement des
phobies spécifiques et du trouble panique,
avec ou sans agoraphobie, ont permis de
proposer les thérapies comportementales et
cognitives comme traitement de choix de
ces pathologies. En effet, les études mon-
trent des résultats supérieurs à ceux d’autres
psychothérapies et parfois à ceux des trai-
tements pharmacologiques. Le traitement
des phobies spécifiques, tout en étant
simple, est en général bref et très efficace.
Les modèles cognitifs du trouble panique
ont contribué au développement de tech-
niques spécifiques et à d’excellents résul-
tats thérapeutiques. D’une manière géné-
rale, les thérapies comportementales et
cognitives semblent particulièrement effi-
caces pour prévenir des rechutes dans les
troubles phobiques. Les progrès thérapeu-
tiques tiennent, voire s’améliorent, avec le
temps. C’est contraire à l’idée relativement
répandue, influencée par le modèle psy-
chanalytique, de déplacement ou substitu-
tion de symptômes après une prise en
charge comportementale et cognitive.
Le trouble d’anxiété généralisée, à cause
notamment de sa grande comorbidité, reste
difficile à définir et à traiter. Les techniques
comportementales et cognitives, tout en
donnant de bons résultats thérapeutiques,
doivent encore progresser. De nouvelles
stratégies thérapeutiques devraient per-
mettre d’éviter la surmédication (notam-
ment en benzodiazépines), une des consé-
quences majeures de ce trouble.
D’une manière générale, la relative simpli-
cité, l’efficacité et la brièveté de la prise en
charge comportementale et cognitive
répondent aux exigences actuelles des pou-
voirs publics et des patients. Il paraît impor-
tant aujourd’hui d’en faciliter l’accès à ces
derniers.
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