LETEMPS,25janvier1892.
–Oh!merépondit‐il,lesItalienschantentnaturellementainsi!
LapreuvedecequelesItaliensnechantentpasnaturellement
commeRubini,Mario,MmesGrisi,Persiani,Alboni,c’estqu’aujourd’hui
ilschantentgénéralementcommes’ilsétaientsortisduConservatoirede
Paris.Maisilfautavouerque,pourlescompositeurs,l’Italievadevenir
l’Eldoradorêvé.EnFrance,commeenAllemagne,uncompositeurdoit
fairedesétudeslonguesetsérieuses,quandmalgrécela,ilveutaborderle
théâtre,ilrencontredesobstaclessouventconstatés:si,pourfaire
connaîtresonnom,ilécritunpeudemusiquesymphoniqueetqu’ensuite
ilveutfairejouerunopéra,oncriedetoutesparts:«C’estunsymphoniste,
iln’enfautpasauthéâtre.»Bizet,M.Massenetetd’autresenontfait
l’expérience.Namouna,deM.Lalo,aététraitéed’abomination;
aujourd’huiencore,ilyadesgensqui,pournepassedonnerdedémenti,
répètentqueleRoid’Ysn’estpasunopéra,maisdelamusique
symphonique.
EnItalie,aucontraire,voyezcommec’estsimple.Onresteunpeu
detempsdansunconservatoirepourapprendreàdistinguerunaccord
parfaitd’unaccorddeseptième,àréaliserunebassechiffréesansfaire
tropdesuccessionsdequintesetd’octaves;puis,pourlesnécessitésdela
vie,onécritdesopérettesetautremusiquedemêmeimportance;unbeau
jour,onentendparlerd’unconcourspourunopéra;onn’apasdepoème
toutprêt,onn’aplusquedeuxmoispoursemettreenrègle;mais
qu’importe?UnItalien,Fiorentino,n’a‐t‐ilpas,dansundesesfeuilletons,
conseilléauxcompositeursfrançaisdesedonnermoinsdepeinequ’ils
n’enprenaient?
«Voyez,leurdit‐il,lesItaliens:ilsfontviteetn’enfontquemieux!»
Puis,n’a‐t‐onpassoutenusouventquelasciencenuitàl’inspiration?M.
Mascagniétaitdoncdanslesmeilleuresconditionsetnepouvaitmanquer
deréussir:ilaréussi.Levoilàcélèbresurlaplusbellemoitiéduglobe
terrestreetilfaitautoritédanssonpays.Unjour,onluiprésentales
musiciensfrançaispensionnésàlavillaMédicis;unautrejour,onles
invitaàentendredesfragmentsdel’AmiFritz[L’AmicoFritz].Ensortant
delà,ilssedirentquel’auteurn’étaitpasunpuitsdesciencemusicale;
maisc’étaitpurejalousiedeleurpart.
Uncompositeurmeraconta,cesjours‐ci,qu’ilavaitvuàVienne,en
Autriche,lafameuseCavalleria.«Ehbien?–luidis‐je.Ilhaussal’épaule:–
Cettemusiqueagitsurlepublic»,merépondit‐il.Al’Opéra‐Comique,
cependant,jenemesuispasaperçuqu’elleagitbeaucoupsurlepublicde
larépétitiongénéraleetdelapremièrereprésentation.Onécoutait
attentivement,onattendaitcommesœurAnne,etl’onnevoyaitrienvenir
deréconfortant.MaisonavaittantvantéM.Mascagni!Onl’avait
proclamélesuccesseurdeVerdi!Parmisesproductionsonacitédes
symphonies:onignoraitdoncqu’enitalientouteouvertureoutout
préluded’opéraoud’opéretteestunesinfonia?Certes,lavéritable
symphonien’estpasinconnueenItalie;nousenavonsunedeM.
Sgambatietquiesttrèshonorable.Maiscegenredesinfoniaaété,jusqu’à
présent,interditàM.Mascagni.Toutélèvequiaobtenuunprix