2) une domination multiforme qui transforme les territoires colonisés
Le statut des territoires colonisés est variable (intégration au territoire national (Algérie)
administration directe ou protectorat (Maroc, Tunisie)) mais dans tous les cas l’administration coloniale,
essentiellement française, est dirigée par un représentant du pouvoir français. Les populations locales
sont toujours placées dans une situation d’infériorité qui se traduit par l’existence d’une justice et de
droits différents, d’une tendance à la séparation (notamment dans les villes où s’individualisent ville
européenne et ville indigène). Dans tous les cas, même en Algérie, la population française reste
minoritaire.
Les Français présents dans les colonies sont généralement présents pour administrer les
territoires ou pour diriger l’exploitation économique. Les colonies françaises sont essentiellement des
colonies d’exploitation : plantations de produits exotiques, prélèvement des matières premières. Cette
exploitation se fait au détriment des populations locales (recul des cultures vivrières, achat de produits
industriels fabriqués en métropole). Pour permettre cette exploitation, de grands aménagements
(présentés comme des éléments de progrès apportés aux indigènes) sont réalisés (ports, voies ferrées)…
et les populations contraintes au travail par le fait qu’elles se retrouvent soumises à l’impôt et ont
besoin de gagner de l’argent pour acheter ce qu’on ne produit plus sur place.
Un équipement
colonial : la voie
ferrée du Congo-
Océan
La construction du chemin de fer Congo-Océan (502 km), reliant le port de
Pointe-Noire à Brazzaville, a été rendue nécessaire par la nécessité de
construire un moyen de transport contournant les rapides se trouvant sur le
fleuve Congo. Il s’agit aussi de relier l’intérieur du pays (la « capitale »
Brazzaville mais aussi des mines de manganèse). Sa construction qui a duré de
1921 à 1934 aurait fait entre 15 000 et 30 000 morts, décès imputables aux
maladies tropicales ou aux conditions de travail précaires imposées par
l’administration française colonisatrice (il existe encore le principe du travail
forcé).
L’exploitation économique se double d’une acculturation des peuples colonisés. Outre la
maîtrise de la langue (et de l’Histoire) française(s), ces peuples sont en partie christianisés. Les cadres
traditionnels sont cassés et les élites locales n’ont d’autres choix que de se former selon les normes du
colonisateur… ce qui n’empêche que, même après avoir réussi dans ce cadre-là, ils demeureront
toujours en position d’infériorité.
3) une contestation naissante
Après la Première Guerre mondiale, les élites des peuples colonisés attendent une
reconnaissance de la métropole, reconnaissance qui ne vient pas. Une contestation commence à
s’organiser mais sans forcément prendre la forme de révoltes. Celle-ci, inspirée par le communisme (Hoc
Hi Minh fonde le PC indochinois en 1930) ou par un rejet de l’acculturation (concept de négritude forgé
par Léopold Sédar Senghor dans les années 30), se traduit par la création d’organisations politiques
réclamant une autonomie puis l’indépendance. C’est par ce biais que cette contestation se diffuse dans
les masses et provoque l’expansion de ces mouvements contestataires. Le pouvoir français réagit par la
traque et l’arrestation des meneurs, par la répression lorsque des soulèvements se produisent.
Cette maturation de la contestation dans les territoires colonisés s’accompagne d’un début de
contestation de la colonisation en France. Au nom de la liberté et de la lutte contre l’impérialisme, les
communistes rejettent l’idée coloniale. Quelques intellectuels (André Gide, Albert Londres, les
surréalistes…) entament dans les années de l’entre-deux-guerres une critique des méfaits de la
colonisation.