S P E C I A L I S S U E S I N G E N I TA L P R O L A P S E IMAGERIE DES PROLAPSUS PÉRINÉAUX http://www.lebanesemedicaljournal.org/articles/61-1/review2.pdf Jean-François LAPRAY* Lapray JF. Imagerie des prolapsus périnéaux. J Med Liban 2013 ; 61 (1) : 13-22. RÉSUMÉ : La colpocystodéfécographie (CCD) et l’IRM dynamique (IRMd) avec déféco-IRM permettent d’une part l’alternance de la vidange et de la réplétion des organes creux, et d’autre part une poussée abdominale maximale attestée par la défécation. L’application en imagerie de ces deux principes dévoile les prolapsus masqués (en compétition défavorable) ou sous-stadifiés lors de l’examen clinique. Le respect d’une technique rigoureuse garantit des résultats presque équivalents pour les deux examens. Les avantages de la CCD sont l’obtention de clichés mictionnels et une meilleure analyse de la pathologie ano-rectale spécifique (intussuception, anisme) au prix d’une irradiation et d’un examen plus invasif. Les avantages de l’IRMd sont la visibilité permanente du compartiment péritonéal, des coupes dans les trois plans de l’espace et l’étude associée de la morphologie des organes pelviens et des moyens de soutien avec le défaut d’un examen encore actuellement en décubitus, et parfois d’échecs liés à l’impossibilité d’obtenir une défécation en décubitus. Les résultats normaux et pathologiques (cystoptose, hystéroptose, élytrocèle, intussuception ano-rectale, périnée descendu et descendant, incontinence urinaire et anale) et les avantages et les limites respectives des différentes méthodes d’imagerie sont détaillés. L’échographie dynamique par voie périnéale et introïtale reste plus limitée que la CCD et l’IRMd pour l’étude des colpocèles postérieures et surtout de la pathologie ano-rectale. L’échographie endoanale est l’examen de première intention du sphincter anal, et l’échographie introïtale et endovaginale est utile pour apprécier certaines complications de bandelettes sousurétrales et des prothèses. Les examens d’imagerie morphologique et dynamique sont un complément essentiel de l’examen physique lorsque ce dernier ne permet pas d’analyser avec précision les raisons anatomiques de la plainte fonctionnelle exprimée par la patiente ou bien lors de la prise en charge des situations complexes notamment de récidive postopératoire. L’imagerie des prolapsus a réalisé de grands progrès depuis une quinzaine d’années grâce à deux examens qui reflètent bien la conception actuelle de l’approche globale *Centre de Radiologie, 151, av. de Saxe, 69003 Lyon, France. Lapray J-F. Imaging of pelvic organ prolapse. J Med Liban 2013 ; 61 (1) : 13-22. ABSTRACT : Colpocystodefecography (CCD) and dynamic MRI with defecography (MRId) allow an alternation between filling and emptying the hollow organs and the maximum abdominal strain offered by the defecation. When applied in imaging these two principles reveal the masked or underestimated prolapses at the time of the physical examination. A rigorous application of the technique guarantees almost equivalent results from the two examinations. The CCD provides voiding views and improved analysis of the anorectal pathology (intussusception, anismus) but involves radiation and a more invasive examination. MRId has the advantage of providing continuous visibility of the peritoneal compartment, and a multiplanar representation, enabling an examination of the morphology of the pelvic organs and of the supporting structures, with the disadvantage of still necessitating a supine examination, resulting sometimes in an incomplete or impossible evacuation. The normal and abnormal results (cystoptosis, vaginal vault prolapse, enterocele, anorectal intussuception, rectocele, descending perineum, urinary and fecal incontinence) and the respective advantages and limits of the various imaging methods are detailed. Dynamic perineal and introital ultrasound remains more limited in the appreciation of posterior colpoceles and especially in anorectal disorders, than CCD or MRId. Endoanal ultrasound is the first line morphological evaluation of the anal sphincter. Transvaginal and introital ultrasound can detect some complications of suburethral tapes and meshes. Morphological and dynamic imaging are essential complementary tools to the physical examination, especially when a precise anatomic assessment is required to understand the functional complaint or when a reintervention is needed. et non plus segmentaire du pelvi-périnée, même si la contrainte de l’exposé nécessite de détailler successivement l’analyse des quatre étages (étage antérieur vésico-urétral, étage moyen utéro-vaginal, étage postérieur ano-rectal et étage supérieur péritonéal). Le premier examen utilise les rayons X et correspond à la colpocystodéfécographie (CCD) qui est l’extension à l’étage antérieur urologique et supérieur péritonéal de Correspondance : [email protected] Journal Médical Libanais 2013 • Volume 61 (1) 13 l’ancienne défécographie [1]. Le deuxième initié par Yang [2] est l’IRM dynamique (IRMd), qui a bénéficié de l’évolution de la CCD et qui permet avec des séquences de coupes rapides de réaliser un examen sensiblement comparable à la CCD avec bien sûr ses avantages et ses inconvénients. L’échographie dynamique, par voie périnéale ou endocavitaire, permet la visualisation des prolapsus et parfois des anomalies associées (avec des limites sérieuses du fait de l’absence de défécation et de sa réalisation en général en décubitus). Son caractère facilement répétable compense difficilement son apport plus imprécis, plus segmentaire et plus personnalisé. Elle reste très utile et même suffisante pour l’évaluation de la mobilité cervico-urétrale dans l’incontinence urinaire d’effort féminine et aussi des éventuelles complications de son traitement le plus courant représenté par les bandelettes sous-urétrales [3]. Il paraît inutile de rappeler que l’échographie reste par ailleurs l’examen d’imagerie de première intention dans l’évaluation du résidu post-mictionnel et de la pathologie périurétrale, de l’analyse morphologique du sphincter anal ainsi que de la morphologie de la plupart des organes pelviens. L’échographie pelvienne doit être systématiquement associée à la CCD à titre préopératoire. À la lumière d’une pratique quotidienne de la CCD et de l’IRMd, que nous effectuons depuis 1998 avec un protocole pratiquement inchangé, cette mise au point ne développe volontairement pas les pathologies associées aux prolapsus génito-urinaires (incontinence urinaire et anale, pathologie fonctionnelle urinaire et ano-rectale) du fait de l’ampleur du sujet. LES TECHNIQUES D’IMAGERIE Il s’agit d’examens effectués sur mesure par le radiologue qui doit débuter l’examen par un interrogatoire, obtenir la coopération et la compréhension physique et intellectuelle des manœuvres de poussée et d’évacuation par la patiente en réalisant, au début de l’examen, un rapide examen clinique avec les touchers pelviens au repos et en valsalva lorsque la patiente est installée sur la table de radiologie ou sur le statif de l’IRM [3]. Colpocystodéfécographie Initialement baptisé « colpocystodéfécographie dynamique », cet examen comporte deux phases [3]. La première est une cystographie rétrograde dynamique et mictionnelle, et la seconde est la défécographie obtenue après une opacification vaginale et rectale et de l’intestin grêle avec une technique adaptée de celle décrite par Kelvin et Maglinte et associés [4-6]. La technique que nous utilisons a été détaillée précisément par ailleurs [7]. Nous insisterons sur les points essentiels. La première phase correspond à la cystographie mictionnelle de profil en position assise, après sondage vésical et réplétion avec du produit de contraste, et opacification vaginale barytée. L’intestin grêle pelvien est déjà opacifié en début d’examen à la suite de l’ingestion de sulfate 14 Journal Médical Libanais 2013 • Volume 61 (1) de baryum par la patiente, 90 minutes avant l’examen. Il est indispensable de commencer l’examen par l’étude vésicale car une vessie en réplétion risquerait de masquer un autre prolapsus. La deuxième phase correspond à la défécographie. Après une réplétion rectale avec de la baryte (épaissie avec de la fécule de pomme de terre, afin d’obtenir une consistance proche de celle des selles) les clichés de défécographie de profil en position assise sur une commode spéciale avec réceptacle débutent par un cliché en position neutre, puis par un cliché en retenue, qui permettent de juger d’un périnée descendu pour le premier et de l’effet de la contraction musculaire pour le second. Environ six clichés sont effectués pendant l’évacuation rectale qui doit être aussi complète que possible (Fig. 1). Il est intéressant de faire reproduire par la patiente en fin d’examen les éventuelles manœuvres digitales vaginales ou para-anales qu’elle utilise de façon courante pour faciliter l’évacuation rectale, si celle-ci est difficile et incomplète. Il est important de noter la vitesse (lente, normale ou très rapide) et la qualité de l’évacuation ainsi que le résidu intrarectal après passage aux toilettes. Il est parfois nécessaire de réaliser, en position debout, des clichés avec refoulement d’un prolapsus très largement dominant avec une pince porte-tampon. L’examen est terminé, après vidange rectale et vésicale aux toilettes aussi complète que possible, par un cliché final avec un effort de poussée maximum en position assise (Fig. 1). C’est souvent le dernier cliché qui montrera le mieux ou parfois dévoilera une entérocèle. Chez l’homme, l’examen est limité à une défécographie avec opacification de l’intestin grêle correspondant à la deuxième phase, l’exploration radiologique de la vessie et de l’urètre par urétro-cystographie rétrograde et mictionnelle s’adressant généralement à d’autres pathologies. La durée de l’examen est d’environ 40 à 50 mn. Dosimétrie L’irradiation n’est pas négligeable car la dose délivrée au centre du pelvis peut être estimée à 1-1,7 mGy par exposition, atténuée par la numérisation, à 20-25 mGy pour la CCD. Ceci implique d’éviter tout cliché inutile [3]. IRM dynamique L’IRM dans l’étude des prolapsus pelviens doit comporter une phase dynamique et une phase morphologique. L’IRM dynamique (IRMd) permet de réaliser une vision dynamique des quatre compartiments périnéopelviens (urinaire, gynécologique, proctologique et péritonéal) comme la CCD, ainsi que l’appréciation morphologique de l’ensemble des viscères intrapelviens et des structures musculo-ligamentaires. L’inconvénient principal est actuellement la réalisation de cet examen en décubitus dorsal (tant que les aimants ouverts qui permettent des séquences en position assise ne sont pas disponibles en pratique courante) [8]. Parmi les différentes techniques d’examen qui ont été proposées dans la littérature, celle que nous utilisons J.-F. LAPRAY – Imagerie des prolapsus périnéaux a b c d Figure 1. Colpocystodéfécographie • Deuxième temps : défécographie. a. Cliché au repos. La vessie (V), le vagin (va), le rectum (R), l’intestin grêle (IG) sont opacifiés. Ligne pubo-coccygienne (trait noir). b. Cervicocystoptose, rectocèle (étoile), descente du col utérin dans le dôme vaginal (flèche). c. Fin de la vidange rectale laissant la place à une intussuception rectale intra-anale, cervicocystoptose (C), hystéroptose (flèche) plus importante que la descente du dôme vaginal. L’entérocèle se démasque (IG). d. Après vidange vésicale et rectale aux toilettes, cliché en poussée. Noter l’accentuation de l’entérocèle (IG) qui devient plus importante que l’hystéroptose (fléche blanche). depuis 13 ans est dérivée de la CCD et comporte une évacuation rectale (une déféco-IRM) [9-11]. En effet, la clé de la réussite d’une IRMd est la certitude d’avoir obtenu une poussée maximum par la patiente (souvent délicate pour la patiente en décubitus, et difficile à apprécier pour l’examinateur) qui est garantie par la vidange rectale au cours de l’examen [10]. Cette technique permet en outre une approche de la pathologie ano-rectale intrinsèque. L’insuffisance des techniques utilisées explique souvent les discordances – et parfois des erreurs – dans la littérature. Comme pour la CCD, le détail de la technique a été précisé par ailleurs [7]. J.-F. LAPRAY – Imagerie des prolapsus périnéaux Phase dynamique La patiente est installée en décubitus dorsal, le périnée reposant sur des alèses absorbantes. La vessie est presque vide. Une vidange rectale a été effectuée à la maison avant l’examen. L’examen débute comme pour la CCD par des explications claires, et la répétition des manœuvres de poussée lors des touchers pelviens qui permettent, outre une rapide appréciation cinique, l’assurance de la compréhension par la patiente des efforts qui lui seront demandés. Une opacification du vagin (20 cc de gel échographique stérile) puis du rectum (120 cc de gel échographique) est effectuée avec une seringue à embout conique de 60 cc. Journal Médical Libanais 2013 • Volume 61 (1) 15 a b FIGURE 2. Cystoptose et hystéroptose c • IRM dynamique (déféco-IRM) Au repos (a) : pas de trouble statique. Au cours de la vidange rectale (b) et en fin d’évacuation (c) : cervicocystoptose et hystéroptose de stade 3 en compétition. Il existe une petite rectocèle de stade 1 et des plissements de la jonction ano-rectale sans intussuception manifeste. Noter la position du cul-de-sac de Douglas (flèche) témoignant d’une très fine élytrocèle laminée par l’utérus, peut-être minorée par l’opacification vaginale résiduelle. (V) vessie (U) utérus (va) vagin opacifié (R) rectum opacifié (F) fibromyome utérin (trait blanc) ligne pubo-coccygienne Les séquences utilisées sont des séquences rapides type FIESTA ou SS-FSE ou HASTE qui permettent la répétition de coupes rapides d’environ 2 secondes, avec des images séquentielles, en coupes sagittales. Par exemple, les paramètres des séquences FIESTA (steady state) que nous utilisons avec une IRM General Electric 1,5 T sont : temps d’écho 2 ms, champ 30 cm, épaisseur de coupe 15 mm, matrice 320x224, bande passante 100 KHz, angle de bascule 45°. Elles peuvent être visualisées en ciné-loop secondairement. Des séquences dynamiques sont possibles dans les deux autres plans, coronal et axial. L’examen comporte des images au repos permettant de choisir le plan de coupe qui passe dans l’axe de l’urètre et du canal anal, puis en poussée, puis en poussée maximum lors de l’évacuation du gel rectal permettant une défécoIRM (Fig. 2). Il est nécessaire d’effectuer plusieurs cycles (2 parfois jusqu’à 5) pour atteindre l’évacuation rectale la plus complète possible. Certains auteurs réalisent une dernière série après passage aux toilettes (triphasic IRMd) superposable à la CCD [9]. Nous utilisons cette modalité, qui allonge le temps d’examen (nécessaire repositionnement des coupes), lorque le gel rectal n’a pas été évacué du fait de troubles de l’évacuation : dyssynergie, akinésie rectale, etc., ou de l’impossibilité liée aux conditions de l’examen, afin de ne pas méconnaître un prolapsus masqué (en particulier une élytrocèle). De nombreuses variantes sont proposées dans la littérature [12]. L’IRMd a été étudiée avec des IRM ouvertes (rares dans le parc actuel des appareils) permettant des séquences de déféco-IRM en position assise [8, 13-14]. L’examen est généralement complété par plusieurs séquences à visée morphologique. Phase morphologique L’examen comporte au moins deux séquences morphologiques T2 balayant le pelvis dans le plan axial puis sagittal à la recherche d’une pathologie viscérale, éven16 Journal Médical Libanais 2013 • Volume 61 (1) tuellement complétées par d’autres séquences appropriées à la pathologie rencontrée ou suspectée. La durée de l’examen est d’environ 20 à 25 mn. RÉSULTATS Méthodes de mesures La ligne pubo-coccygienne La ligne de référence la plus utilisée est la ligne pubococcygienne (LPC) tracée entre le bord inférieur de la symphyse pubienne et la dernière articulation coccygienne. La LPC est facilement reproductible et censée représenter la ligne d’attache des muscles et ligaments du plancher pelvien [2, 15]. Les mesures sont souvent effectuées perpendiculairement à cette ligne [9, 16], parfois verticalement. Cette ligne peut être utilisée aussi bien avec la CCD qu’avec l’IRMd. Cette ligne de référence, que nous utilisons, souffre des critiques. En particulier, l’examen clinique étant effectué par rapport à l’hymen et l’imagerie par rapport à la LPC, il est fréquemment difficile d’obtenir des corrélations. D’autres méthodes ont donc été proposées, centrées sur l’IRMd. Stadification HMO Cette méthode de quantification des prolapsus pelviens, appelée HMO, combine des mesures viscérales et musculaires à partir de repères osseux et des tissus mous sur les coupes sagittales d’IRMd [17-18]. La ligne médio-pubienne La méthode utilisant la ligne médio-pubienne souhaite se rapprocher de la classification clinique proposée par l’International Continence Society (ICS) qui utilise la référence de l’hymen. La ligne médio-pubienne est tracée sur les coupes sagittales selon le grand axe de l’os pubien, en passant en son centre. Cette ligne paraît corrélée avec la situation de l’hymen qui n’est pas visible en IRM [18]. J.-F. LAPRAY – Imagerie des prolapsus périnéaux En pratique, nous utilisons la ligne pubo-coccygienne comme référence, et comme de nombreux auteurs [6]. Cystocèle La cystocèle est définie par la descente de la base vésicale sous la LPC [4, 9-11, 14, 19]. Il existe une certaine confusion entre le terme clinique de cystocèle qui représente le bombement de la vessie dans la face antérieure du vagin et celui employé en imagerie. Les termes de cystoptose (descente de la base vésicale) et de cervicocystoptose (descente de la vessie et du col vésical) paraissent plus adaptés à l’imagerie et plus précis que le terme de cystocèle utilisé de façon globale dans la littérature radiologique anglo-saxonne (Fig. 1 & 2). La cystoptose est considérée comme modérée si la descente est inférieure à 3 cm, moyenne entre 3 et 6 cm, et importante si elle supérieure à 6 cm [4, 9]. Descente du dôme vaginal Elle est définie par la descente du dôme vaginal (ou du col utérin) sous la LPC [4 , 9-11, 14, 19]. Les mesures et les stades qui en découlent sont identiques à ceux utilisés pour la vessie : modérée si la descente est inférieure à 3 cm, moyenne entre 3 et 6 cm, et importante si elle supérieure à 6 cm [4, 9] (Fig. 1 & 2). En CCD, avec une opacification vaginale correcte, il est fréquent de pouvoir observer, lorqu’elle est présente, l’empreinte lacunaire du col utérin (avec un aspect tapiroïde dans les prolapsus importants) dans le dôme vaginal. La mesure de l’hystéroptose doit alors être effectuée à ce niveau, car il n’est pas rare que la descente utérine soit nettement plus importante que celle du dôme vaginal (« descente en piston »). L’IRMd a bien sûr l’avantage de voir directement la descente du col utérin et même tout l’utérus lorsque celui-ci n’est pas latéro-dévié. Élytrocèle Elle est définie par la descente du cul-de-sac de Douglas sous la LPC [4, 9-11, 14, 19] (Fig. 1 & 2). Les mesures et les stades qui en découlent sont identiques à ceux utilisés pour la vessie et le dôme vaginal : modérée si la descente est inférieure à 3 cm, moyenne entre 3 et 6 cm, et importante si elle supérieure à 6 cm [4, 9]. L’élytrocèle peut être septale (dans la cloison recto-vaginale), vaginale ou rectale (dans une intussuception rectale) [20], occupant fréquemment deux sites contigus. En CCD, la position du cul-de-sac de Douglas en poussée repérée par la présence de l’intestin grêle ou du sigmoïde opacifiés est considérée par certains auteurs comme normale si elle n’excède pas la limite entre le tiers proximal et les deux tiers distaux du dôme vaginal ou s’il n’existe pas d’élargissement de la cloison recto-vaginale [4, 16]. Nous utilisons pour cette mesure la LPC qui nous apparaît comme à d’autres auteurs plus cohérente et aussi plus judicieuse [6, 9, 11]. L’élytrocèle, parfois appelée péritonéocèle, peut contenir l’intestin grêle et s’appelle alors entérocèle, ou le sigmoïde et devient alors sigmoïdocèle, ou même d’autres J.-F. LAPRAY – Imagerie des prolapsus périnéaux constituants mobiles du pelvis (épiploon, ovaires). Rappelons que l’élytrocèle n’est souvent apparente que sur le dernier film de la CCD, en poussée, après évacuation complète aux toilettes : près de la moitié (43%) des entérocèles de la série de Kelvin ne sont vues que lors de cette manœuvre [4]. C’est dire aussi l’intérêt de la vidange rectale lors de l’IRMd. Lors de la CCD, contrairement à l’IRMd qui voit directement le contenu (ou l’absence de contenu) de l’élytrocèle, c’est l’opacification des anses grêles (donc forcément une entérocèle) qui permet de repérer la descente péritonéale. Ceci évite de l’apprécier uniquement sur l’élargissement de la cloison recto-vaginale ce qui est source d’erreurs si l’intestin grêle n’a pas été opacifié. Car l’élytrocèle peut aussi être vaginale, en cas d’hystérectomie, en s’impactant dans le dôme vaginal, ou rectale en se prolabant dans le rectum : ces deux dernières situations échappent généralement aux CCD où l’intestin grêle n’a pas été opacifié alors que l’IRMd offre toujours une vision permanente du péritoine. Il arrive exceptionnellement que malgré l’opacification correcte de l’intestin grêle, un écartement anormal de l’espace recto-vaginal en fin d’évacuation rectale soit visible à la CCD, correspondant vraisemblablement à une élytrocèle avec une boucle du colon sigmoïde, ou à un paquet d’anses grêles non opacifiées, voire à un autre composant mobile pelvien intrapéritonéal. Ces cas sont rares (9% dans la série de Kelvin [19]) d’autant que l’opacification barytée a l’avantage de lester l’intestin grêle. Ils correspondent probablement aux cas d’élytrocèles avec une mince lame de graisse visible en IRMd [10] (Fig. 3). La recherche d’une élytrocèle lors de l’imagerie est capitale car la détection d’une volumineuse élytrocèle, non vue à l’examen clinique, peut modifier pour certains l’abord chirurgical de la voie vaginale vers la voie haute [19]. L’élytrocèle est souvent en compétition FIGURE 3. Déféco-IRM : élytrocèle très étroite. En fin d’évacuation rectale, après vidange de la rectocèle non rétentive, apparaît une fine élytrocèle (flèche) à contenu graisseux, de diagnostic clinique évidemment difficile. Noter en outre la cervicocystoptose, l’hystéroptose et l’intussuception ano-rectale. Ligne pubo-coccygienne (trait blanc). Journal Médical Libanais 2013 • Volume 61 (1) 17 a b c FIGURE 4. Volumineuse colpocèle postérieure en présence de l’utérus. IRM dynamique, déféco-IRM. En (a), au repos, pas de trouble statique. Au cours de l’évacuation rectale (b), apparition d’une rectocèle. En fin d’évacuation rectale (c) la rectocèle (R), décelée cliniquement est presque vide, au contact d’une volumineuse sigmoïdocèle (S) avec petite cystoptose (C) et hystéroptose (H) ; périnée descendant. (V) vessie (va) vagin opacifié (U) utérus (trait noir) ligne pubo-coccygienne défavorable avec les autres prolapsus [3, 19]. Bien que nettement favorisée par l’hystérectomie associée à la cystopexie, l’élytrocèle n’est pas l’apanage des patientes hystérectomisées. Rectocèle La rectocèle est définie comme toute saillie antérieure de la paroi rectale par rapport à la ligne tracée dans l’axe de la paroi antérieure du canal anal (Fig. 1 & 4). Elle est mesurée orthogonalement à cet axe et considérée comme modérée si elle est inférieure à 3 cm, moyenne entre 3 et 5 cm, et importante si elle supérieure à 5 cm [3-4, 9-10]. La filière ano-rectale est analysée au repos, en retenue et lors de la défécation. Normalement la contraction de l’ampoule rectale est harmonieuse avec un effacement de l’empreinte du muscle pubo-rectal et une vidange complète et rapide de la totalité du produit de contraste. Les critères utilisés lors de la défécographie radiologique pour juger d’une rectocèle sont aussi applicables en IRMd (pas de protrusion de la paroi antérieure du rectum en avant d’une ligne tracée dans l’axe de la paroi antérieure du canal anal [4, 9-10]. Mais la fréquence du bombement de la paroi rectale antérieure lors de la défécation dans la population courante fait considérer une voussure ≤ 2 cm comme une image normale par la plupart des auteurs. La rectocèle n’est pas forcément symptomatique, et du fait de sa fréquence dans la population, elle n’est pas considérée comme pathologique à moins de 2 cm [10]. De ce fait d’autres critères sont ajoutés par certains auteurs pour définir une rectocèle pathologique : rétention du produit de contraste après passage aux toilettes, nécessité de manœuvres digitales pour l’évacuation de la rectocèle [14]. Le débat reste ouvert pour savoir s’il ne faut considérer comme pathologiques que les rectocèles avec défaut de vidange en fin d’évacuation, ou leur volume, ou la gêne fonctionnelle. Il est classique de distinguer les rectocèles 18 Journal Médical Libanais 2013 • Volume 61 (1) hautes, sus-lévatoriennes, des rectocèles basses qui sont situées sous le plan des élévateurs. La « rectocèle postérieure » est décrite comme une hernie de la paroi rectale postérieure à travers un défect de l’élévateur, appelée aussi « hernie périnéale ». Elle est latéralisée et visible au scanner et en IRM [19]. Intussuception L’intussuception (ou prolapsus rectal interne) correspond à l’invagination de la paroi rectale en direction du canal anal (Fig. 1 & 3). Elle peut être antérieure, postérieure ou circonférentielle, justifiant parfois un cliché de face en CCD. L’intussuception qui reste intrarectale n’est pas considérée comme pathologique du fait de sa fréquence dans la population asymptomatique. Elle le devient lorsqu’elle se prolonge dans le canal anal (prolapsus rectal interne intra-anal ou intussuception intra-anale), ou a fortiori lorsqu’elle s’extériorise constituant le prolapsus rectal externe, fréquemment associé à une incontinence anale. La visualisation de l’intussuception en IRMd est bien sûr largement favorisée par l’opacification rectale [10]. Il n’est pas rare qu’une entérocèle s’accompagne d’une intussuception dans la concavité de la paroi rectale antérieure. Toutefois le concept de la gêne causée à l’évacuation rectale par l’entérocèle (defecation block des AngloSaxons) [21] est remis en cause et une limitation de l’entérocèle par la mauvaise évacuation rectale est évoquée [19]. Périnée descendant et descendu La descente périnéale a été associée à des lésions nerveuses pudendales. Les mesures sont variables dans la littérature surtout en IRMd. La position de la jonction anorectale (JAR), qui permet d’étudier la descente périnéale, est considérée comme normale en CCD si elle est située au repos en regard du bord inférieur des ischions et à moins de 3,5 cm en poussée [3]. En IRMd, où la coupe J.-F. LAPRAY – Imagerie des prolapsus périnéaux sagittale ne permet pas la visibilité des ischions, la JAR est située approximativement au niveau de la LPC et pas à plus de 2 cm au repos chez les sujets normaux [16]. Elle est considérée comme anormale si elle descend en dessous de plus de 3 cm en poussée par certains [16] ou plutôt de 5 cm [12] (Fig. 1 & 3). En CCD, le périnée est considéré comme descendu si la JAR est située, au repos, en dessous du bord inférieur des ischions, et comme descendant si la JAR en défécation descend à plus de 3,5 cm du même repère [3]. En IRMd les définitions sont plus variables selon les auteurs, comme nous l’avons vu précédemment. Muscles Les moyens de soutien du plancher pelvien comportent le système actif, musculaire, essentiellement représenté par le muscle élévateur de l’anus ainsi que le système passif avec l’enceinte osseuse, les fascias (fascia pelvien, arcus tendineux du fascia pelvis, arcus tendineux de l’élévateur) et le tissu conjonctif. Les deux systèmes présentent des connexions multiples [10, 12]. L’élévateur de l’anus possède un tonus permanent sauf pendant la défécation. Il présente deux portions : • la portion ilio-coccygienne, avec un rôle de support, de convexité supérieure sur les coupes frontales en IRM ; • la portion ano-rectale, avec un rôle constrictif, qui ferme le hiatus uro-génital en formant une boucle autour de la face postérieure du rectum. En IRMd, la partie postérieure de la JAR qui correspond à la partie postérieure du faisceau pubo-rectal de l’élévateur de l’anus, permet de délimiter le plan des élévateurs et le hiatus uro-génital [12]. L’angle du plan des élévateurs peut être apprécié sur les coupes sagittales (angle entre le plan des élévateurs et la LPC) et frontales [10]. Des mesures additionnelles sont parfois effectuées. L’angle ano-rectal (ARA) est représenté par l’angle entre l’axe du canal anal et la paroi postérieure du rectum terminal d’environ 110° au repos. Sa reproductivité est considérée comme faible [5]. De nombreux articles, qu’il n’est pas possible de détailler ici, ont réalisé des études morphologiques et dynamiques du système de soutien, grâce aux possibilités de l’IRM, en tentant d’établir des corrélations avec le type et l’importance des prolapsus ainsi qu’avec les antécédents et la symptomatologie [22-24]. L’étude dynamique et morphologique des moyens de soutien qu’offre l’IRMd, malgré une abondante littérature, ne présente actuellement pas de conséquence directe manifeste sur la prise en charge des prolapsus. Dans l’incontinence anale, l’échographie endoanale reste le premier examen morphologique à mettre en œuvre permettant une visualisation excellente du sphincter interne, et semble-t-il plus imprécise du sphincter externe, en particulier pour sa périphérie, que celle qu’offrira l’IRM qui n’est pas encore ici une exploration de routine. En pratique, toute descente d’un organe en dessous de la LPC et une rectocèle supérieure à 2 cm sont considérées comme anormales [10]. J.-F. LAPRAY – Imagerie des prolapsus périnéaux DISCUSSION Comparaison CCD et IRMd Les conclusions des études comparant les résultats des examens radiologiques et de l’IRM dynamique dans l’évaluation des prolapsus sont, à première vue, divergentes [9, 25-26]. En fait, l’explication de ces divergences réside dans les techniques utilisées. Ainsi dans l’étude de Vanbeckevoort et al. chez 35 patientes, la sensibilité de l’IRMd (en poussée avec opacification rectale) est diminuée comparativement à la CCD I (avec poussée) et la CCD II (avec évacuation rectale) [25]. Les auteurs concluent donc à une faible sensibilité de l’IRMd, en particulier pour les compartiments antérieur et moyen. Cette différence peut être attribuée à l’absence de poussée suffisante en IRMd qui n’a pas comporté de défécation. À l’inverse, dans l’étude de Lieneman et al. comparant l’IRMd (en poussée, avec opacification rectale, en décubitus) à la CCD (sans opacification de l’intestin grêle, en poussée, en position debout) il existe une sensibilité et une spécificité nettement supérieures à celles de la CCD pour les descentes utérines et les entérocèles en IRMd [26]. Cette différence peut être expliquée par l’absence d’opacification barytée de l’intestin grêle lors de la CCD et par la visibilité des parties molles en IRMd [10]. En fait les études comparant la CCD et l’IRMd avec une technique rigoureuse et similaire et comportant une défécation montrent un score identique de détection des prolapsus [9]. C’est donc encore souligner le rôle crucial de la qualité de la poussée, tout particulièrement en IRMd où la patiente est en décubitus et où l’effort de poussée est non mesurable en l’absence de défécation. Il existe une minoration très significative du nombre des prolapsus par la CCD en poussée comparativement à la CCD avec évacuation [25], d’où la nécessité d’une exonération en IRMd. Enfin, le rôle de l’évacuation rectale en plus de l’assurance d’une poussée satisfaisante est aussi celui de produire la vidange rectale, car les prolapsus sont en compétition (Fig. 1 à 4). Ceci est tout particulièrement vrai pour l’élytrocèle qui n’apparaît classiquement que sur le dernier cliché en poussée de CCD après passage aux toilettes avec une vidange rectale et vésicale, car elle est en compétition défavorable avec le rectum opacifié même non distendu [3] (Fig. 4). La critique majeure adressée à l’IRMd est celle d’être réalisée en décubitus tant que les IRM ouvertes ne sont pas facilement disponibles. Le décubitus minore l’importance des cystocèles et des entérocèles d’environ 10 à 15% comparativement à la CCD en position assise chez les mêmes patientes [9]. La défécation en décubitus peut aussi être initialement d’acceptation difficile ou de réalisation malaisée par la patiente, et c’est le rôle de l’examinateur d’expliquer et de banaliser la procédure en début d’examen. Dans l’étude de Kelvin comparant la CCD et l’IRMd avec défécation, la préférence des patientes entre les deux examens est répartie de façon égale. Nous penJournal Médical Libanais 2013 • Volume 61 (1) 19 sons, avec un recul de 13 ans de pratique routinière, comme Kelvin et al. [19] que plus de 90% des patientes arrivent à évacuer le gel rectal de façon satisfaisante en décubitus sur le statif d’IRM. Les IRM ouvertes ont l’avantage de permettre des séquences dynamiques en position assise. Toutefois l’IRMd reste imprécise même avec une IRM ouverte pour les intussuceptions comparativement à la défécographie radiologique [27]. Et il paraît exister un consensus, que nous partageons, pour penser que la procédure de choix pour l’analyse de la pathologie ano-rectale spécifique (en particulier intussuception et anisme) reste la défécographie radiologique, en position assise, avec opacification de l’intestin grêle, et avec une pâte barytée dont la consistance est proche de celle des selles. L’échographie dynamique est parfois aussi utilisée avec différentes voies d’abord (périnéale, introïtale, transvaginale et endorectale) dans le bilan des prolapsus. Son rôle dans l’évaluation segmentaire du compartiment antérieur, en particulier de la mobilité de la jonction vésico-urétrale et même l’appréciation des cystoptoses, est facilement admis [3]. Par contre l’étude du compartiment postérieur, la plus délicate sur le plan clinique, reste sujette à caution. En effet, l’échographie ne permet pas, à l’évidence, une étude en défécation dont nous avons vu le rôle primordial. Bien que les entérocèles puissent être détectées par voie endocavitaire et périnéale, il manque actuellement des études prospectives et comparatives de l’échographie dynamique [28]. En outre, les systèmes de mesure restent relativement complexes [29] et paraissent nécessiter des études de reproductibilité. Si l’IRMd présente l’inconvénient d’être réalisée en décubitus, elle offre l’avantage de l’absence de radiation, de l’absence d’ingestion orale de produit baryté et de l’absence de sondage vésico-urétral. Enfin les repères osseux sont toujours facilement identifiables, alors que la symphyse pubienne n’est pas toujours nettement individualisable lors de la CCD, en particulier dans les prolapsus volumineux (centrage abaissé des clichés) et chez les patientes obèses. L’IRMd garde cependant l’inconvénient de ne pas offrir de clichés mictionnels, même si elle peut montrer une ouverture de la JUV en poussée. Le temps morphologique de l’IRM a toutefois l’avantage d’offrir une excellente vision des tissus péri-urétraux [3]. Comparaison examen clinique et imagerie Il ressort des premières études comparant le taux de prolapsus décelé lors de l’examen clinique avec la CCD que le diagnostic clinique des cystocèles et des rectocèles est nettement meilleur que celui observé pour les élytrocèles puisque l’examen clinique méconnaît environ une élytrocèle sur deux [4, 25, 29-30]. Il apparaît probable que plusieurs raisons concourent à l’insuffisance de l’examen clinique [3-4, 30] : • la première est manifestement liée à l’importance de la poussée abdominale : l’examen clinique utilise la poussée en valsalva (en décubitus et en position debout) tandis que la CCD nécessite un effort de défécation en position assise ; 20 Journal Médical Libanais 2013 • Volume 61 (1) • la seconde réside dans le fait que l’examen clinique requiert un examen digital ou des valves de spéculum qui peuvent modifier la situation des différents organes tandis que l’imagerie se limite à l’observation ; • enfin, l’examen clinique a recours à la palpation, tandis que l’imagerie a l’avantage de visualiser directement les organes en cause. Ceci paraît probablement rendre compte d’une partie importante des élytrocèles méconnues en pratique courante, en particulier quand elles sont associées aux rectocèles, et où seules ces dernières sont diagnostiquées. Il faut toutefois souligner les écueils persistant encore dans la comparaison de la clinique et de l’imagerie. Comme nous l’avons vu plus haut, les méthodes de mesure utilisées actuellement en imagerie utilisent des repères osseux fixes tandis que l’examen clinique se réfère à l’hymen. La stadification effectuée en IRMd selon la ligne médio-pubienne a pour but de se référer à l’hymen pour faciliter les comparaisons avec l’examen clinique et en particulier à la classification de l’ICS [18]. Elle pourrait être utilisée pour la CCD. Parmi les études utilisant la stadification avec la ligne médio-pubienne [11, 31], l’étude de Lieneman montre que la meilleure corrélation entre les résultats de l’IRMd (avec défécation) et de l’examen clinique (avec la classification de l’ICS) est obtenue avec la ligne pubo-coccygienne pour les compartiments antérieur et supérieur, et la ligne médiopubienne pour le compartiment postérieur. En particulier, les prolapsus ne présentent pas une descente dans un seul plan de l’espace, ni dans une seule direction (ventrocaudale) et les séquences de déféco-IRM montrent souvent un déplacement dorso-caudal associé avec une descente relativement circulaire [32]. L’utilisation de la ligne médiopubienne dans ces cas conduit à obtenir des mesures verticales identiques au repos et en poussée [11]. La LPC reste, pour l’instant, la méthode la plus facile en pratique pour juger d’un prolapsus en IRMd [11]. Il faut bien sûr aussi évoquer les limites de l’interprétation de l’imagerie : les sources d’erreur de mesures sont soulignées par Morren pour l’IRMd, et de la défécographie par Dobben [33-34]. Modifications de la stratégie chirurgicale L’approche moderne du périnée – la périnéologie – tend à faire disparaître l’ancienne segmentation urologique, gynécologique et proctologique en s’attachant à analyser les interdépendances des différents étages [3]. Il est admis que l’association des prolapsus est fréquente [3-4, 10, 35]. Les étude d’imagerie montrant la fréquence des associations des prolapsus sont nombreuses et, par exemple, 95% des patientes adressées pour prolapsus présentent des anomalies des trois compartiments dans l’étude de Maglinte [35]. L’imagerie est à même de montrer des anomalies non détectées par l’examen clinique. Ces constatations peuvent modifier la stratégie thérapeutique ou la voie d’abord et la technique chirurgicales. Kaufman observe une modification de la chirurgie initialement planifiée dans 41% des cas après l’examen avec CCD et IRMd [36]. Il note que J.-F. LAPRAY – Imagerie des prolapsus périnéaux l’IRMd était le seul examen à mettre en évidence les hernies de l’élévateur, tandis que la CCD révélait plus souvent que l’examen clinique et l’IRMd les sigmoïdocèles et les intussuceptions. La modification par l’imagerie de la chirurgie initialement planifiée est retrouvée dans d’autres articles : 36% dans l’étude de Brubaker [37], et 67% dans celle de Hetzer [38]. CONCLUSION L’analyse de la littérature et l’expérience personnelle de 13 ans de pratique routinière de la CCD et de l’IRMd avec défécation, selon des protocoles précis, ne montrent pas de consensus pour une technique meilleure mais confirment les avantages ainsi que les inconvénients et les limites de chacun de ces deux examens. Elles confirment une certitude : la poussée maximum est garantie par la défécation, et il existe toujours le soupçon de contraction, et non de relâchement, des muscles dans les examens comportant des efforts de poussée sans exonération [19]. De même, la vidange successive de la vessie et du rectum doit favoriser en fin d’examen la visualisation des prolapsus en compétition défavorable (en particulier l’élytrocèle) et il ne doit pas exister un prolapsus dominant pendant tout l’examen (nécessité du refoulement de l’utérus ou de l’entérocèle qui ne peuvent bien sûr pas être évacués). L’examen clinique et l’imagerie sont souvent mis en opposition : l’examen clinique et l’imagerie doivent se potentialiser et non se remplacer ou s’opposer, l’un corrigeant les insuffisances de l’autre. Les corrélations bénéficieraient d’une harmonisation des méthodes de mesure et de classification, aussi bien pour l’imagerie que pour la clinique, actuellement éloignées sur le plan conceptuel. L’incidence élevée des prolapsus, le taux non négligeable de récidive après chirurgie, l’impact important de l’accouchement par voie basse doivent pousser à poursuivre les recherches sur les causes et la prévention de cette pathologie [24]. L’imagerie y a son rôle. Mais déjà dans la pratique courante, à l’inverse d’autres secteurs pathologiques, son apport nous paraît parfois méconnu. Si l’indication de l’imagerie dans les prolapsus semble formelle lorsque la patiente a déjà été opérée ou que l’examen clinique est manifestement insuffisant (vagin étroit, coopération médiocre, etc.), les indications de l’imagerie restent largement fonction des écoles et des disponibilités locales. Elle ne nous paraît jamais inutile quand elle est effectuée avec rigueur, s’il existe des symptômes, et lorsque se discute une indication chirurgicale. En particulier si elle permet d’éviter une chirurgie disproportionnée, incomplète ou inadaptée. RÉFÉRENCES 1. Kelvin FM, Maglinte DT, Benson JT et al. Dynamic cystoproctography: a technique for assessing disorders of the pelvic floor in women. AJR 1994; 163: 368-70. 2. Yang A, Mostwin JL, Rosenhein NB, Zerhouni EA. Pelvic floor descent in women: dynamic evaluation with J.-F. 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