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Olivier Dyer, CEO
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« Eclairer l’actualité économique et financière pour mieux anticiper et maîtriser les risques »
Les banques centrales: juges et partis.
LETTRE MENSUELLE
JANVIER 2015
N°87
Il y a près de 4 ans, le Franc Suisse défrayait déjà la chronique en
enregistrant une appréciation brutale qui amenait la Banque Nationale
Suisse à adopter sa désormais funeste stratégie dite de PEG qui a
consisté à maintenir le cours du Franc à 1.20 contre Euro.
Cette stratégie a donc être abandonnée le 15 janvier dernier. Le
coût de cette décision s’avère considérable, d’abord pour le
contribuable suisse puisque la BNS va devoir enregistrer une perte
sans doute proche de 60 Milliards de Francs Suisses, soit 10% du
PNB, mais aussi pour nombre d’acteurs de la sphère financière ayant
eu le tort de croire à la parole d’une banque centrale. C’est aussi
une illustration supplémentaire que les cygnes noirs prospèrent
toujours malgré les filets de la réglementation.
Le temps est très mal choisi, mais il arrivera sans doute un moment
où se posera la question pour la Suisse de rejoindre l’union monétaire
comme elle l’avait déjà fait au dix-neuvième siècle lorsque la
confédération décidait de rejoindre l’Union Monétaire Latine.
La disproportion entre la taille du secteur financier et la taille de
l’économie rend en effet difficile leur coexistence. Et si la Suisse veut
continuer à servir de terre d’accueil aux capitaux fuyant l’instabilité
tout en développant ses industries mécanique, pharmaceutique ou
agro-alimentaire, elle devra sans doute choisir.
Héritière de la pensée de Napoléon, l’Union Monétaire Latine est née
en 1865. Elle a rassemblé jusqu’à 27 pays dont la Suisse. Elle est
finalement dissoute en 1927, à l’initiative de la Belgique, après plus
de quatre-vingts années d’existence.
Mise en perspective sur près de deux cents ans, période qui inclut
donc la phase d’union, l’évolution relative du Franc Suisse vis-à-vis du
Franc Français ou de son équivalent Euro depuis 1999, illustre le côté
très illusoire du pouvoir de la « manipulation monétaire » à
transformer de façon durable les situations patrimoniales.
La Suisse n’est pas aujourd’hui un pays 500 fois plus riche que la
France, même si le revenu par habitant y est plus élevé que chez son
voisin.
Dans des économies de plus en plus ouvertes, plus de 50% des
produits industriels sont importés ou exportés, l’arme du change est
une arme à double tranchant susceptible de pénaliser durablement
l’investissement, l’emploi et la croissance.
On comprend donc mieux pourquoi la Banque Nationale Suisse a
vigoureusement défendu sa monnaie depuis 2010.
Dans une première étape, elle vigoureusement défendu la barre
officieuse des 1,45 par Euro —un plus bas de plus de 15 ans—
dépensant au passage plus de 140 milliards de Francs Suisses.
Par la suite, elle a imposé un cours objectif de 1,20 CHF par Euro. Et
pour défendre ce cours entre le mois d’Août 2011 et le mois de janvier
2015, la BNS aura vendu prés de 300 milliards de Francs Suisses,
augmentant au passage son bilan jusqu’à 90% de son PNB. Ce fut
l’opération de Quantitative Easing la plus importante jamais
pratiquée par une Banque Centrale. Très loin en tout cas des plans
présentés récemment par la BCE, même si l’objectif de cette dernière
n’est sans doute pas tant la quantité que le message.
Dans le contexte qui prévaut aujourd’hui en Europe avec les
questions que posent les dernières élections grecques, l’exemple
de l’histoire du franc suisse ne manque pas d’ironie dans la mesure
où, finalement, c’est la monnaie forte qui a donc été poussée dehors.
Mise en perspective, l’évolution du cours du franc suisse n’est-elle
pas une invitation à croire que la fin d’une union monétaire n’est
pas la fin du monde et que les destins parallèles de la France et de la
Suisse ne les ont pas conduit à des positions très écartées de leur
point de départ ? Mais s’agissant de la Grèce, l’histoire nous enseigne
cependant que d’autres pays en d’autres temps ont bénéficié de
traitements spécifiques au nom de l’intérêt collectif. Ce fut le cas de
l’Allemagne lors des accords de Londres de 1953, lorsque ses
dettes avaient été « remises » de moitié et étalées sur 66 ans à un
taux nul.
Malgré les efforts sans précédent déployés par les banques centrales
et les régulateurs pour rendre notre monde plus sûr, la volatilité
semble de retour, et avec elle l’augmentation du coût du risque. Le
paradoxe est qu’en économie monétaire et financière c’est
l’accumulation des règles elles-mêmes qui semble finalement
créer les accidents. En donnant l’impression de sécurité, elle
favorise des prises de positions qui n’auraient qu’une logique
financière à court terme et aucune logique économique à long terme.
Les « agioteurs » sur le franc suisse l’ont appris à leur dépends. Il en
sera sans doute de même des créanciers de la Grèce. Sauf à
imaginer que la BCE permette d’acheter du temps.
Pour le troisième mois consécutif, l’actualité économique, financière et réglementaire s’est écrite sur les marchés de change.
Après le rouble en novembre, l’euro en décembre, c’est au tour du franc suisse d’occuper le devant de la scène au mois de
janvier aux côtés de ses prédécesseurs: les scénarii d’exception se multiplient et devraient continuer à entrainer un
renchérissement fort du coût du risque.
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