II- Le siècle des Lumières.
A/ Le triomphe de la raison.
Les philosophes et écrivains dans toute l’Europe veulent « éclairer » leurs contemporains et prennent pour
modèle le régime politique anglais. La raison humaine selon eux, peut permettre le progrès, en effet les
sciences se développent rapidement : il s’agit, par la raison et la connaissance, de critiquer ce qui est établi.
Ainsi, le philosophe français Fontenelle, découvrant les progrès de Newton, Leibniz et
Pascal (mathématiques, physique, chimie), dira en 1702 que le savant est supérieur aux princes et aux
conquérants.
Un initiateur, John Locke :
En Angleterre, Locke réagit à la Révocation de l’Edit de Nantes par Louis XIV en 1685. Il va nier
l’absolutisme religieux en affirmant la liberté de conscience. Dans son Traité du gouvernement civil (Two
Treatises of Government, 1690), il insiste sur l’origine humaine du pouvoir, et non divine. Pour lui, les
hommes sont pourvus de droits naturels et confient par contrat le pouvoir aux gouvernants chargés de faire
respecter ces doits.
Les ouvrages de Locke sont interdits en France mais circulent illégalement : sa pensée va influencer tout le
XVIIIe siècle. Notamment parce qu’il fonde toute connaissance sur l’expérience (empirisme).
Les philosophes français :
Aucun ne remettra en cause l’existence d’un Etre suprême, mais ils se veulent les champions de la tolérance,
notamment au niveau politique : les libertés doivent être assurées (de penser, s’exprimer et agir).
Voltaire, dans ses Lettres philosophiques, publiées en 1724, puis dans ses écrits et contes philosophiques,
dénonce sans cesse le fanatisme religieux et l’arbitraire de la justice, et prône la tolérance et le progrès.
Cependant il défend l’idée d’une monarchie modérée et libérale. Il s’oppose ainsi à Rousseau, plus radical.
Montesquieu publie l’Esprit des lois en 1748 : il y défend l’idée de la séparation des pouvoirs exécutif,
législatif et judiciaire sans rejeter le régime monarchique (monarchie constitutionnelle donc).
Rousseau, affirme quant à lui son idéal démocratique dans le Contrat social, publié en 1762, idéal fondé sur
le libre consentement de citoyens égaux juridiquement et socialement. : les gouvernants seraient issus de la
souveraineté populaire exprimée par le suffrage universel, et doivent donc rendre des comptes.
Locke, et à sa suite, la plupart des philosophes des Lumières, réclament un libéralisme économique :
« laisser faire, laisser passer », c’est-à-dire liberté de produire sans réglementation : donc l’abolition des
privilèges et des corporations qui sont la base de l’économie mercantiliste (système imposé par Colbert qui
veut le contrôle de l’Etat sur le commerce et la production). Le Laisser passer suppose l’abolition des
douanes intérieures.
B/ La diffusion des idées nouvelles.
Elles se développent d’abord à travers les cercles et les clubs, ou les cafés littéraires, les salons tenus par des
femmes de l’aristocratie, enfin par des académies provinciales (sociétés masculines réunissant savants et
hommes de lettres) ou des loges maçonniques (société réglée par des rites, fondée sur des idéaux de
tolérance et d’entraide). Se développe ainsi, dans toute l’Europe, dans l’aristocratie et la haute bourgeoisie,
et plus généralement parmi toutes les élites cultivées, une « opinion publique ».
Le livre tient une place primordiale dans la diffusion des idées des Lumières, en particulier l’Encyclopédie,
œuvre monumentale entreprise par Diderot et d’Alembert avec la participation de nombreux savants,
philosophes et écrivains, et publiée à partir de 1751 : elle vulgarise les idées de droits naturels de l’homme,
de tolérance, de constitution politique et répand la critique de l’absolutisme : la censure imposée par les rois
ne parvient pas à stopper la diffusion des articles de l’Encyclopédie.
Enfin, certains savants parcourent l’Europe, de cour en cour, et diffusent auprès de souverains « éclairés »,
les idées politiques et économiques des Lumières. Voltaire voyage ainsi en Prusse à la cour de Frédéric II,
Diderot conseille Catherine II de Russie, Turgot, ministre de Louis XV, entreprend des réformes
économiques libérales.
Mais les souverains prennent peu à peu la mesure des conséquences et reculent : Voltaire est vite déçu du
despotisme éclairé de Frédéric II, trop conquérant, Turgot tombe en disgrâce en 1776.
L’alliance entre monarchie absolue et Lumières est brisée dans les années 1770, et entraîne une crise fatale.