Mini-revue Épidémiologie et histoire naturelle de l`infection par le

publicité
Mini-revue
Épidémiologie et histoire naturelle de
l’infection par le virus de l’hépatite B
Epidemiology and natural history of HBV infection
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
Stanislas Pol
Unité d’Hépatologie et Inserm U-567,
Hôpital Cochin, Paris
<[email protected]>
Résumé. La transmission du virus de l’hépatite B (VHB) se fait par voie parentérale, sexuelle
et materno-fœtale. Si une hépatite fulminante peut compliquer environ 1 % des hépatites
aiguës B symptomatiques, le problème principal de l’infection virale B est celui du portage
chronique de l’antigène HBs, classiquement défini par la persistance de l’Ag HBs 6 mois
après l’hépatite aiguë. Il survient dans 0,5 à 3 % des cas chez l’adulte immunocompétent,
mais plus fréquemment chez les enfants infectés tôt dans la vie (jusqu’à 90 %) ou chez les
immunodéprimés (30 à 100 %). Son évolution peut être marquée par des modifications
parfois bruyantes de la réplication virale avec l’existence d’arrêts spontanés de la multiplication virale et de réactivations. Sa physiopathogénie principalement immuno-médiée,
résultant des interactions hôte-virus mais aussi de la complexité de ce virus (intégration,
mutations, réplication résiduelle), explique le polymorphisme de présentation de l’infection
chronique par le VHB ; elle va de l’immuno-tolérance au portage inactif de l’antigène HBs, en
passant par une phase d’immuno-élimination où l’hépatite chronique active peut aboutir à la
cirrhose (incidence annuelle de 1,3 à 5,9 %). La cirrhose, avec ses complications propres
d’hypertension portale et d’insuffisance hépatocellulaire ou de carcinome hépatocellulaire,
est responsable de 80 % de la morbidité et de la mortalité liées à cette infection : en cas de
cirrhose constituée, la survie à 5 ans varie de 52 à 82 %. En plus des facteurs épidémiologiques, les principaux paramètres modifiant l’histoire naturelle de l’infection B sont l’immunosuppression et les cofacteurs incluant l’infection associée par le VHD et la surconsommation
d’alcool. Ainsi, l’infection virale B est un problème majeur de santé publique, particulièrement
dans les pays en voie de développement (qui sont souvent des zones de haute endémie)
rendant nécessaire l’intensification et l’universalisation de la vaccination.
Mots clés : hépatite aiguë, hépatite chronique, virus de l’hépatite B, antigène HBs,
épidémiologie
Abstract. The transmission of the hepatitis B virus (HBV) is parenteral, sexual and perinatal.
If a fulminant hepatitis may occur in 1 % of cases of symptomatic acute hepatitis, the main
problem of HBV infection is its chronicity, as defined by HBs antigen carriage for more than
6 months. It occurs in only 0.5 to 3 % of immunocompetent adults but more frequently in
children (up to 90 %) or in immunocompromised patients (30 to 100 %). Evolution of HBV
chronic infection is characterized by variations of viral réplication with spontaneous reactivations or discontinuations with potential clinical and biochemical exacerbations. Pathogeny
of HBV infection is mainly immune-mediated, resulting from the host-virus interactions but also
from the complexity of HBV (integration, mutation, occult réplication), explaining the
polymorphism of chronic HBV infection ; it includes immune tolerance, inactive carriage of
HBs antigen but also immune elimination with chronic active hepatitis which may lead to
cirrhosis (yearly incidence of 1.3 to 5.9 %). Cirrhosis may result in complications of portal
hypertension and liver failure or hepatocellular carcinoma, which explain 80 % of morbidity
and mortality of HBV : the 5-year survival of HBV-related cirrhosis ranges from 52 to 82 %.
Immunosuppression, delta virus superinfection or chronic alcohol consumption are the main
factors which modify the natural history of HBV infection. HBV chronic infection is a problem
of public health, particularly in developing countries, evidencing the need for universal HBV
vaccination.
Key words : acute hepatitis, hepatitis B virus, HBs antigen, chronic hepatitis, epidemiology
6
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, septembre 2007
gravement insuffisante (moins de
30 % des enfants français sont vaccinés contre plus de 80 % des
enfants allemands et plus de 90 %
des enfants américains). À l’inverse,
doi: 10.1684/hpg.2007.0139
D
es progrès majeurs ont été
faits ces dernières années
pour la prise en charge de
l’hépatite B. Certes, la vaccination
des nouveau-nés et des enfants reste
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
les progrès virologiques (et notamment l’amplification
génomique quantitative et le génotypage) ont permis
de mieux comprendre l’histoire naturelle de l’infection
par le virus de l’hépatite B (VHB). Les progrès biologiques (fibrotest, fibromètre) ou morphologiques (élastométrie par le fibroscan) dans l’évaluation non invasive
de la fibrose permettent de déterminer la sévérité de la
maladie hépatique et de poser ainsi les indications
thérapeutiques. L’autorisation de mise sur le marché de
l’interféron pégylé ou des analogues nucléosidiques
(lamivudine, entécavir, et prochainement telbivudine
ou clévudine) et nucléotidiques (adéfovir, et prochainement ténofovir) a élargi le champ d’intervention et
transformé l’efficacité comme en attestent les bénéfices
cliniques évidents associés aux traitements des hépatopathies les plus sévères : nous avons désormais le
choix entre des traitements « courts » (48 à 96 semaines d’interféron pégylé) ou « longs » (traitement de
durée indéfinie par un ou plusieurs analogues). La
connaissance de l’épidémiologie et de l’histoire naturelle de l’infection par le VHB permet une définition
dynamique et individualisée de l’hépatopathie conduisant à un choix thérapeutique adapté. La connaissance
de l’histoire naturelle de l’infection virale B est indispensable à l’interprétation des études thérapeutiques en
particulier pour apprécier l’efficacité d’une thérapeutique donnée (comparaison du taux de séroconversion
induit par la thérapeutique à celui spontanément
observé). Les progrès de la biologie moléculaire ont
permis de mieux démembrer et d’analyser les
différentes étapes de l’infection virale B [2]. Dans cette
partie clinique, l’influence de la variabilité génomique
sur l’histoire naturelle du VHB (mutants pré-C, mutants
d’échappement à la vaccination et influence des différents génotypes) ne sera pas abordée.
Épidémiologie
Le VHB est un virus à ADN enveloppé. La physiopathogénie de l’hépatite B est essentiellement immunomédiée. La réponse immunitaire, en particulier cellulaire induit la nécrose hépatocytaire par
reconnaissance des antigènes viraux exprimés sur la
membrane des hépatocytes. Ces mécanismes pathogéniques où l’interaction hôte-virus a un rôle central
rendent compte de la diversité de présentations de
cette hépatite [1] : modifications de l’histoire naturelle
(selon les zones de haute et faible endémies et l’âge à
la contamination, risque de co-infection ou surinfection
delta dans certaines populations épidémiologiquement
déterminées), physiopathologiques (évolution différente selon le statut immunitaire, existence de porteurs
inactifs) et virologiques (profil clinico-biologique modifié en cas de mutant, en particulier pré-C) de cette
infection.
Le VHB est largement répandu dans le monde : on
estime à environ 2,5 milliards le nombre de sujets
exposés et à 375 millions le nombre de porteurs chroniques du VHB sur le globe. On distingue schématiquement : des régions à forte prévalence de l’antigène HBs
(Afrique, Asie du Sud-Est) où 5 à 15 pour-cent de la
population est porteuse chronique du VHB ; des
régions à prévalence intermédiaire où entre 2 à
5 pour-cent de la population générale est porteuse
chronique du virus (Italie, Afrique du Nord, Espagne
du Sud, Grèce, Japon) ; des régions de faible prévalence (Europe du Nord et États-Unis) où 0,3 pour-cent
de la population générale est porteuse chronique de
l’antigène HBs [2]. Cette prévalence élevée s’explique
par la forte contagiosité du VHB, liée à une virémie
élevée, et par de nombreux modes de transmission.
D’une manière générale, le VHB est essentiellement
transmis par les sécrétions et par le sérum, et la durée
d’incubation varie de 1 à 3 mois.
La transmission du VHB est principalement parentérale,
sexuelle et materno-fœtale. Elle est principalement liée,
dans les zones de faible endémie, aux injections intraveineuses (essentiellement chez les usagers de drogue), aux relations homo- ou hétérosexuelles avec une
personne infectée par le virus, voire aux transfusions
sanguines, surtout avant la mise en place des mesures
d’hémovigilance efficaces en 1987 ; dans environ
20 % des cas, aucun facteur de contamination n’est
identifié. Dans les zones de forte endémie, l’infection
est principalement materno-fœtale, liée au passage
transplacentaire (ou lors de la délivrance), en Asie
notamment, ou à une contamination transcutanée dans
la petite enfance, en Afrique principalement [2]. Ce
risque de transmission est d’autant plus fort que la mère
présente des signes de multiplication du virus B : antigène HBe, titre élevé d’ADN du VHB dans le sérum.
Le risque de transmission maternelle a donc deux
implications essentielles : a) la recherche de l’antigène
HBs doit être systématique au cours d’une grossesse ;
b) chez une femme porteuse de l’antigène HBs au
troisième trimestre de la grossesse, une prévention de
la transmission de l’hépatite chez le nouveau-né par
immunoglobulines et vaccination doit être organisée.
Le risque de portage chronique du virus est en effet
particulièrement élevé chez le nouveau-né infecté à la
naissance (30 à 90 pour-cent des cas contre moins de
5 pour-cent chez l’adulte) [2]. En Afrique, la transmission se fait essentiellement par voie horizontale dans la
petite enfance. Si de nombreux mécanismes sont
potentiellement envisageables (transmission par l’allaitement), un passage transcutané du VHB par des égratignures est très probable.
L’hépatite B est particulièrement fréquente chez les
toxicomanes, chez les homosexuels et chez les prostituées. Ces « populations à risque » sont donc les
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, septembre 2007
7
Mini-revue
mêmes que pour l’infection par le VIH : environ
90 pour-cent des sujets infectés par le VIH ont également été exposés au virus de l’hépatite B puisqu’ils
possèdent des anticorps (anti-HBs et anti-HBc) qui
témoignent d’une infection antérieure. En outre, environ 10 pour-cent des sujets infectés par le VIH sont
antigènes HBs positifs et donc infectés par le virus
B. Au-delà de ces facteurs de risque, la naissance dans
un pays d’endémie reste la cause principale d’exposition au VHB.
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
Les estimations de prévalence en France de l’infection
par les virus de l’hépatite B (VHB) et de l’hépatite C
(VHC) en population générale proviennent d’une
enquête réalisée par l’Institut de veille sanitaire (InVS),
en partenariat avec la Caisse nationale d’assurancemaladie des travailleurs salariés (CNAMTS), en 20032004 auprès d’un échantillon aléatoire de près de
15 000 assurés sociaux du régime général âgés de 18
à 80 ans [3]. Les résultats préliminaires permettent de
disposer pour la première fois d’une estimation en
France métropolitaine du taux de prévalence du portage de l’antigène HBs. L’estimation de la prévalence
de l’infection chronique par le VHB (antigène HBs
positif) est de 0,65 % (IC 95 % = 0,45-0,93) soit
280 821 personnes (IC 95 % = 179 730-381 913).
Le portage de l’antigène HBs est plus élevée chez les
hommes (1,10 %) que chez les femmes (0,21 %) et en
particulier chez ceux âgés de 18 à 29 ans et de 50 à
59 ans. On observe également une prévalence élevée
du portage chez les personnes en situation de précarité
sociale : l’estimation de la prévalence est en effet trois
fois plus élevée chez les bénéficiaires de la couverture
médicale universelle (CMU) que chez les nonbénéficiaires (1,80 % versus 0,57 %). La prévalence
varie également selon les interrégions, allant d’une
prévalence de 0,20 % dans la région ouest à une
prévalence de 1,12 % dans la région nord-est 3. Des
variations selon le continent ou le sous-continent de
naissance sont également observées.
Infection aiguë par le VHB
Hépatite aiguë
La transmission du virus de l’hépatite B (VHB) se fait par
voie parentérale, sexuelle et materno-fœtale. La durée
d’incubation varie de 1 à 3 mois et est en moyenne de
10 semaines. Environ 85 % des infections aiguës sont
asymptomatiques et la fréquence des formes symptomatiques augmente avec l’âge au moment de la contamination [4].
Dans la forme classique, on observe une phase préictérique durant 3 à 7 jours faite de symptômes non
spécifiques à type de nausées, asthénie et anorexie.
Parfois, il existe un syndrome associant fièvre, arthralgies et urticaire. L’ictère va durer en moyenne 2 à
3 semaines. Au stade d’hépatite aiguë, l’activité des
aminotransférases est constamment augmentée de 10
à 30 fois les valeurs normales. L’évolution des marqueurs sérologiques peut être résumée de la façon
suivante : l’antigène HBs est détecté environ 3 semaines avant les signes cliniques et disparaît généralement
dans le mois suivant ; sa persistance au-delà de 2 mois
fait craindre le passage à la chronicité de l’infection
virale. Les anticorps anti-HBs neutralisants sont détectés
de façon retardée (1 à 6 mois). L’anticorps anti-HBc
apparaît dès le début de la symptomatologie (IgM) et
persiste pendant la phase d’infection aiguë puis pendant la phase de guérison (IgG). Ainsi, la détection de
l’IgM anti-HBc permet d’affirmer le caractère récent de
l’infection. L’antigène HBe apparaît peu avant l’ictère
et disparaît rapidement après le début des signes
cliniques avec apparition précoce des anticorps antiHBe [4]. L’ADN du VHB est constamment détecté au
cours de l’hépatite aiguë (tableau 1).
Hépatite fulminante
Elle complique environ 1 % des hépatites aiguës B
symptomatiques. Elle est définie par l’apparition d’une
encéphalopathie hépatique associée à une diminution
Tableau 1. Principaux profils sérologiques et virologiques de l’histoire naturelle de l’hépatite B.
Hépatite aiguëa
Hépatite aiguë guérieb
Porteur inactif de l’Ag HBsb
Hépatite chroniquea (VHB sauvage)
Hépatite chroniquea (mutant pré-C)
Cirrhose activea
Cirrhose inactiveb
Ag HBs
Ac HBs
Ag HBe
Ac HBe
Ac HBc
ADN VHB
+
+
+
+
+
+/-
+
+/-
+
+
+
-
+
+
+
+
+ (IgM)
+ (IgG)
+
+
+
+
+
+
-*
+
+**
+
-
* Négatif en hybridation standard mais positif dans 90 % des cas par PCR ; ** réplication faible et fluctuante.
a
Activité sérique augmentée des aminotransférases ;
b
Activité sérique normale des aminotransférases.
8
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, septembre 2007
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
du facteur V inférieure à 50 % survenant dans les 15
premiers jours de l’ictère ou jusqu’à 3 mois pour les
hépatites subfulminantes. Le VHB est la cause la plus
fréquente dans le monde d’hépatite fulminante d’origine virale [5]. En France, le virus B est en cause dans
environ 70 % des hépatites fulminantes d’origine
virale. L’évolution fulminante est plus fréquente en cas
de co-infection par le virus delta et son association avec
les mutants pré-C est discutée. La mortalité globale en
l’absence de transplantation hépatique est d’environ
80 % des cas et elle est plus faible en cas de disparition
précoce de l’antigène HBs [6]. En cas d’évolution
spontanément favorable, le passage à la chronicité est
exceptionnel [7-8]. Les IgM anti-HBc pouvant parfois
être détectables en cas de réactivation, l’hépatite aiguë
B compliquée d’hépatite fulminante doit être distinguée
d’une réactivation grave chez un patient ayant une
hépatopathie chronique.
Incidence en France
Selon les premiers résultats de la déclaration obligatoire des hépatites aiguës B entre mars 2003 et décembre 2005 en France, 413 cas d’hépatites aiguës symptomatiques ont été répertoriés dont 137 en 2003, 139
en 2004 et 137 en 2005 (données provisoires pour
cette dernière année) [9]. Ces 413 cas incluaient 9 cas
(dont 6 morts) d’hépatite fulminante. Le nombre réel
d’hépatites est certainement très supérieur au nombre
de cas répertoriés : d’une part, il existe une sousdéclaration des cas symptomatiques (suspectée devant
le fait que plus de la moitié des cas sont déclarés par
des médecins hospitaliers) et d’autre part, les infections
aiguës ne sont symptomatiques que dans 5 % des cas
avant 1 an, 10 % entre 1 et 15 ans et 40 % au delà.
Contage
Passage à la chronicité
Le problème principal de l’infection virale B, est celui
du passsage à la chronicité. Il survient dans 0,5 à
10 % des cas chez l’adulte immunocompétent [10]
(figure 1), mais plus fréquemment chez les enfants
infectés tôt dans la vie (jusqu’à 90 %) ou chez les
immunodéprimés (30 à 100 %). En l’absence de sérovaccination néonatale, plus de 70 % des enfants nés
de mères infectées développeront une infection chronique. À côté de l’âge à la contamination et des situations d’immunosuppression patentes, les facteurs
influençant le passage à la chronicité sont principalement immunogénétiques mais restent discutés. Il a été
suggéré que le passage à la chronicité était associé à
l’absence d’HLA DR2 et à la présence d’HLA DR7 [11].
Des études comparatives ont montré que l’absence de
passage à la chronicité était associée à une forte
réponse immune cellulaire dirigée contre les antigènes
HBc et HBe [12] avec un profil de type TH1 [13]. Le fait
que le passage à la chronicité soit moins fréquent en
cas d’hépatite aiguë symptomatique [14] renforce
cette hypothèse.
Infection chronique par le VHB
L’infection chronique par le VHB est classiquement
définie par la persistance de l’Ag HBs, 6 mois après
l’hépatite aiguë. Elle est caractérisée par son polymorphisme de présentation incluant le portage inactif de
l’antigène HBs, les variations de la réplication virale au
cours du temps alternant arrêts spontanés de la multiplication virale et épisodes de réactivation (tableau 1),
ou une évolution possible vers la cirrhose et le carci-
Hépatite aiguë
90-95 %
5-10 %
70 % asymptomatique
30 % symptomatique
1 % fulminante
TH
Ag HBs+
Guérison
Ag HBsAntiHBs+ & HBc+
Infection chronique
70 %
Hépatite chronique
30 %
20 %
CHC
Cirrhose
Portage inactif
20 % (3-5 %/an)
Figure 1. Histoire naturelle de l’infection virale B.
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, septembre 2007
9
Mini-revue
nome hépatocellulaire [1], et ce parfois malgré l’arrêt
spontané durable de la multiplication virale voire une
disparition de l’AgHBs et parfois l’apparition des anticorps anti-HBs (figure 2).
Portage inactif de l’antigène HBs
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
Environ un tiers des porteurs chroniques de l’Ag HBs
sont des porteurs inactifs (antérieurement improprement appelés porteurs sains). La définition stricte du
« portage sain » de l’Ag HBs, impliquait les 5 caractéristiques suivantes : l’absence de symptôme clinique ;
l’absence d’anomalie biologique, et notamment une
activité sérique des aminotransférases normale, de
façon répétée (au moins 2 dosages à 1 mois d’intervalle) ; la présence des anticorps anti-HBe sériques et
l’absence de détection de l’ADN viral par les techniques usuelles d’hybridation ; un foie histologiquement
normal et l’absence de détection de l’antigène HBc en
immunohistochimie dans les hépatocytes ; enfin,
l’absence d’infection associée par les virus de l’hépatite D (VHD) ou C (VHC) [15]. Cette définition permettait de distinguer les porteurs « sains » des porteurs
« asymptomatiques » pouvant avoir une hépatopathie
chronique ou une multiplication virale persistante. Ces
incertitudes sur le caractère « sain » du foie et sur les
risques de réactivation virale ou de complications
hépatiques ont fait préférer de façon récente le terme
de porteurs inactifs du VHB [16]. La définition suppose
l’absence de symptôme clinique, d’anomalie biologique et d’infection associée par les virus de l’hépatite
delta (VHD) ou C (VHC) et la présence des anticorps
anti-HBe sériques. La détection de l’ADN viral par les
nouvelles techniques d’amplification génomique est
observée chez près de 90 % des sujets mais la charge
virale est habituellement inférieure à 100 000 copies
virales/mL. La définition du portage inactif ne préjuge
pas de la situation histologique hépatique. La supério-
rité de cette nouvelle définition est qu’elle permet
d’inclure tous les patients sans préjuger, parfois à tort,
de la cinétique de leur infection virale et du retentissement hépatique de cette infection au moment où le
patient est vu en consultation.
Ces porteurs inactifs incluent :
– les anciens porteurs sains : s’il existe, du fait de
l’existence d’une réplication virale résiduelle détectable par PCR chez 90 % d’entre eux par PCR [17], des
risques théoriques de réactivation, de surinfection delta
ou de survenue d’un CHC, ceux-ci sont, en pratique et
en l’absence d’immunodépression, très faibles
[18-19] ;
– des patients ayant une réplication intermittente avec
un risque d’aggravation au cours d’une réactivation
virale ;
– des patients ayant spontanément (ou avec un traitement antiviral) arrêté leur réplication virale : pour les
patients infectés par un virus sauvage, une séroconversion HBe/antiHBe est survenue et la multiplication
virale continue habituellement de décroître pour devenir négative.
Du fait de la difficulté de distinguer ces 3 populations,
en l’absence de données cinétiques et par une seule
mesure ponctuelle de la quantification virale B par
PCR, il semble logique de proposer une surveillance,
au moins, annuelle de ces patients par une biologie
standard (transaminases, alpha fœtoprotéine), une
PCR quantitative (pour évaluer les fluctuations de la
charge virale qui permettront de mieux classer les
sujets dans ces 3 cadres), une échographie hépatique
(dépistage précoce du carcinome hépatocellulaire lié à
une cirrhose méconnue ou à l’hépatocarcinogenèse
virale, notamment par mutagenèse insertionnelle) et
des tests non invasifs de fibrose lors de la prise en
charge initiale pour s’assurer de l’absence de fibrose
significative [20].
Hépatite chronique
ADN du VHB Log10 UI/ml
13
Charge virale élevée
Tolérance
immunitaire
Charge virale
intermédiaire
Clairance
immunitaire
11
9
7
5
3
1
Réactivation
Charge virale faible
Portage
inactif
Indétectable
Figure 2. Définition « dynamique » des 3 situations physiopathologiques observées au cours de l’infection virale B.
10
Environ deux tiers des patients porteurs de l’antigène
HBs vont développer des lésions d’hépatite chronique
associant nécrose, inflammation et fibrose. L’évolution
naturelle de l’infection chronique par le VHB peut être
schématisée en 3 phases [21-22] (figure 2).
La première phase d’« immunocompétence », de
durée variable (quelques mois à plusieurs années), est
marquée par une multiplication active du virus, des
transaminases normales et l’absence de retentissement
hépatique significatif. Durant cette phase, la contagiosité du malade est importante.
La deuxième phase de « rupture de tolérance » est
marquée par une multiplication active du virus, des
transaminases anormales et un retentissement hépatique significatif avec hépatite chronique active pouvant
aboutir à la constitution de la cirrhose dans 10 à 20 %
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, septembre 2007
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
des cas. Cette phase peut se terminer par l’arrêt
progressif et spontané de la multiplication virale ; il est
souvent associé à une accentuation de la nécrose
hépatocytaire avec élévation transitoire des transaminases, vraisemblablement due à la réponse immunitaire cytotoxique. L’incidence annuelle de clairance de
l’antigène HBe est d’environ 10 à 15 %. Les anticorps
antiHBe apparaissent dans 61 % des cas de clairance
de l’Ag HBe. Les facteurs déterminant l’apparition de la
séroconversion sont inconnus : les sujets présentant
une séroconversion sont plus âgés et ont une durée
d’évolution de leur hépatite plus longue [23]. Après la
séroconversion, une multiplication virale résiduelle
détectable par PCR est présente 6 à 12 mois après
l’épisode dans plus de 80 % des cas, expliquant une
possible réactivation ultérieure [24]. La majorité des
sujets ayant présenté une séroconversion vont rester
porteurs de l’Ag HBs. Il faudra distinguer deux situations très différentes consécutives à ces séroconversions :
– la sélection de mutant pré-C, événement fréquent
témoignant du déséquilibre dans le temps des quasiespèces virales et d’une sélection prépondérante et
paradoxale dans le temps (car ils ont une moindre
capacité réplicative) des mutants pré-C : ils sont
aujourd’hui majoritaires puisqu’environ 65 % des
sujets ayant une infection chronique par le VHB sont
anti-HBe+ avec une réplication virale significative (>
20 000 UI/mL) ;
– une extinction spontanée de la réplication virale où
séroconversion HBe/anti-HBe, négativation de l’ADN
du VHB sérique par des méthodes sensibles, négativation de l’Ag HBs voire séroconversion anti-HBs se
succèdent, reflétant un arrêt complet et rare de l’infection virale B, qui pourrait suggérer une guérison virologique mais qui ne doit pas faire méconnaître une
hépatopathie sous-jacente, parfois cirrhotique. En
effet, l’arrêt spontané de la multiplication virale peut
coïncider dans le temps avec la constitution de la
cirrhose [23]. Ainsi, la survenue d’une « exacerbation » biochimique et histologique au cours de l’hépatite chronique peut-être liée à différentes causes : arrêt
spontané de la multiplication virale (15 % par an),
réactivation virale B (15 % par an), surinfections virales en particulier par le VHD, aujourd’hui, rares ou le
VHC.
Au cours de la troisième phase d’« inactivation » (portage inactif), le sujet peut toujours être porteur chronique de l’antigène HBs mais la multiplication virale et sa
conséquence, l’activité nécrotico-inflammatoire hépatique, ont disparu. L’incidence annuelle de séroconversion « s » définie par l’apparition de l’anticorps HBs
varie de 0 à 1 % selon les études [25] ; elle s’accompagne d’une amélioration nette en termes d’activité
histologique et d’une disparition complète de la multi-
plication virale. Cette séroconversion « s » ne met pas
totalement à l’abri de réactivations ultérieures [26] en
cas de survenue d’immunosuppression ou de survenue
de carcinome hépatocellulaire en cas de cirrhose constituée [27].
Cirrhose et carcinome hépatocellulaire
• Cirrhose
La cirrhose est un événement crucial dans l’histoire
naturelle de l’hépatite chronique B car les complications propres d’hypertension portale et d’insuffisance
hépatocellulaire qu’elle entraîne sont en grande partie
responsables de la morbidité et de la mortalité liées à
cette infection [28].
L’incidence annuelle de survenue de la cirrhose varie
de 1,3 à 5,9 % et dans les études transversales sa
prévalence est d’environ 20 %. On estime qu’elle survient entre 20 à 30 ans après le contage.
La survenue d’une cirrhose B ou de lésions sévères est
un événement rare chez l’enfant (de l’ordre de 3 %
environ) en particulier du fait de phénomènes de tolérance pour les infections acquises en période néo- (en
Asie) et péri-natale mais il existe un risque d’aggravation après l’adolescence avec la survenue possible
d’un carcinome hépatocellulaire dans les zones de
fortes endémies.
Le risque de survenue de cirrhose est indépendamment
associé à une activité histologique initiale importante,
une multiplication virale persistante et un âge avancé,
ce dernier reflétant probablement la durée de l’infection [23]. L’évolution vers la cirrhose semble aussi
associée à l’existence de réactivations antérieures
[22]. Les autres facteurs associés à une évolution vers
une hépatopathie plus sévère sont l’immunodépression, la surinfection virale par le VHD ou le VHC et la
présence de virus mutant pré-C, qui témoigne lui aussi
d’une infection de durée plus ancienne ayant permis la
sélection de ce mutant et l’extinction du virus sauvage
associé à la présence de l’AgHBe. Le rôle favorisant de
l’alcool dans la survenue d’une cirrhose chez des sujets
ayant une hépatite chronique B est indiscutable. Les
syndromes dysmétaboliques (surpoids, diabète et dyslipidémie) par le biais d’une stéatohépatite influencent
indiscutablement le risque de cirrhose. Le niveau de
charge virale augmente le risque de cirrhose et de
survenue du carcinome hépatocellulaire. Parmi ces
facteurs indéniablement associés au risque de fibrose,
nombre d’entre eux peuvent être contrôlés par des
interventions préventives ou thérapeutiques : la
consommation d’alcool, les syndromes dysmétaboliques, l’infection virale elle-même et les co-infections par
les traitements antiviraux ou antirétroviraux.
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, septembre 2007
11
Mini-revue
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
• Carcinome hépatocellulaire
Le carcinome hépatocellulaire est le huitième cancer
par ordre de fréquence dans le monde et le plus
fréquent dans certaines régions d’Afrique et d’Asie. Il
survient dans plus de 80 % des cas sur une cirrhose
sous-jacente, le plus souvent chez les sujets de sexe
masculin [29]. L’association entre les infections par le
virus de l’hépatite B (VHB) et le carcinome hépatocellulaire est suggérée par l’augmentation d’incidence de
ce cancer dans les zones d’endémie virale, par les
études cas-contrôles montrant que les sujets porteurs de
l’antigène HBs ou des anticorps anti-HBc avaient plus
fréquemment un carcinome hépatocellulaire que les
patients sans marqueur viral, avec un risque relatif de
10 à 300 dans les zones d’endémie [30]. Enfin, les
études prospectives, notamment à Taïwan, et les modèles animaux d’infections par les Hepadna virus (particulièrement le virus de la marmotte), confirment l’association entre les infections par le VHB et le carcinome
hépatocellulaire [29-30].
Ce risque est lié non seulement à la cirrhose mais aussi
à des effets directs du VHB incluant des mécanismes de
mutagenèse insertionnelle et de transactivation de
gènes cellulaires par les protéines virales X et préS2/S
[1-2]. Bien que les mécanismes d’hépatocarcinogenèse virale B soient acquis, il est probable qu’ils
interagissent avec d’autres facteurs étiologiques :
l’alcool, le virus de l’hépatite C ou la cirrhose ellemême (figure 3). Le risque relatif de survenue d’un
CHC en cas d’alcoolisme chronique est multiplié par
2,7. L’association entre cirrhose (liée au VHB) et carcinome hépatocellulaire rend compte de la nécessité
d’un dépistage précoce par l’échographie et le dosage
d’a-fœtoprotéine tous les 4 mois en cas de cirrhose
(figure 3).
Facteurs prédisposant à la cirrhose
et au carcinome hépatocellulaire
• Morbidité et mortalité
À côté de l’hépatite aiguë et de son évolution fulminante possible, la morbidité et la mortalité liées à
l’infection du VHB sont principalement la conséquence
de la cirrhose et de ses complications. Dans une étude
prospective concernant 379 sujets ayant une hépatite
chronique B dont 130 avaient une cirrhose, la survie à
5 ans sans traitement était respectivement de 97, 86 et
55 % en cas d’hépatite chronique persistante, d’hépatite chronique active et de cirrhose à l’inclusion. En cas
de cirrhose constituée, la survie à 5 ans varie de 52 à
82 % [28] et est étroitement liée aux complications de
la cirrhose. Quatre-vingt pour cent des décès chez le
cirrhotique sont directement liés à l’insuffisance hépatique, à l’hypertension portale et au CHC.
La survenue de réactivation au cours de la cirrhose
favorise la survenue de complications. L’existence
d’une séroconversion antérieure (en l’absence de cirrhose décompensée concomitante) est un facteur de
Hépatite chronique
Cirrhose
VHB
Facteurs de croissance (IGF-II)
Oncogènes
Réarrangements chromosomiques
Action directe
CHC
1. Mutagenèse par insertion
VHB
ADN cellulaire
2. Réarrangements chromosomiques au site d'intégration
3. Transactivation
PréS2/S délétés
Protéine X
ADN du VHB
Protéine X
ADN cellulaire
Figure 3. Hépatocarcinogenèse virale B.
12
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, septembre 2007
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
bon pronostic. Il est estimé que parmi les 350 millions
porteurs chroniques de l’antigène HBs, 13 % des femmes et 40 % des hommes mourront d’une maladie
hépatique liée au VHB, soit plus d’1 200 000 décès
par an. Ceci justifie l’introduction des traitements virosuppresseurs chez les patients les plus graves pour
limiter la multiplication virale et inactiver la maladie
hépatique ; l’efficacité de cette stratégie pour limiter la
survenue de complications de la cirrhose, incluant le
carcinome hépatocellulaire, est clairement montrée
après seulement 3 ans de virosuppression efficace
[31].
Manifestations extra-hépatiques
de l’infection par le VHB
Plusieurs manifestations extra-hépatiques peuvent
émailler l’histoire naturelle de l’hépatite B. On distingue schématiquement celles qui surviennent au
décours de l’hépatite aiguë et qui sont relativement
fréquentes et celles qui surviennent plus rarement chez
les porteurs chroniques de l’antigène HBs. Dans les 2
cas, le rôle des complexes immuns Ag HBs/AcHBs ou
Ag HBe/AcHBe est prépondérant.
Manifestations extra-hépatiques
de l’hépatite aiguë
Les manifestations extra-hépatiques les plus fréquentes
de l’hépatite aiguë sont cutanées et articulaires.
L’atteinte cutanée est le plus souvent à type d’urticaire
ou de macules et l’atteinte articulaire est faite plus
d’arthralgies que d’arthrite constituée. Une atteinte
cutanée plus rare et particulière est l’acrodermatite
papuleuse ou syndrome de Giannoti Crosti. Il survient
chez l’enfant et associe des lésions papuleuses qui
prédominent au niveau de la face et des membres. Il
existe des manifestations plus rares en particulier neurologiques incluant des mononévrites et des syndromes
de Guillain-Barré ainsi que des atteintes cardiaques à
type de péricardites.
Manifestations extra-hépatiques et hépatite
chronique
Les 2 manifestations extra-hépatiques principales au
cours de l’hépatite chronique sont la péri-artérite
noueuse (PAN) et la glomérulonéphrite extramembraneuse (GEM).
Le VHB est responsable de 20 à 50 % des PAN. La
PAN survient le plus souvent dans la première année
d’évolution et dans le cadre d’une multiplication virale
active [32]. Il s’agit d’une maladie sévère incluant à
côté des manifestations générales comme la fièvre, les
myalgies et les douleurs abdominales, une atteinte
multiviscérale neurologique, cardiaque, rénale et cutanée rendant compte d’une mortalité précoce non négligeable de 10 à 30 %.
La GEM est l’atteinte rénale la plus fréquente liée au
VHB. Dans les zones de haute endémie, c’est la cause
la plus fréquente de GEM. Elle se manifeste dans 2 tiers
des cas par un syndrome néphrotique. Dans ces 2
pathologies, un traitement antiviral efficace favorise
une rémission de la maladie.
Morbi-mortalité
Une étude menée sous l’égide de l’ANRS par le
CépiDC de l’Inserm, l’InVS et de sociétés scientifiques a
évalué la mortalité attribuable aux VHB et VHC [33].
Les certificats de décès de 2001 dans lesquels était
mentionnée une pathologie pouvant avoir un lien avec
une infection par le VHC ou le VHB (hépatite, cirrhose,
cancer ou autre maladie du foie, transplantation, etc.)
ont été analysés. Sur près de 35 000 certificats répondant à ces critères, un millier ont été tirés au sort et ont
fait l’objet d’une investigation poussée. Les médecins
ayant rempli ces certificats de décès ont eu à répondre
à un questionnaire, analysé par des experts hépatologues, afin d’évaluer l’imputabilité des décès à ces
virus.
L’analyse aboutit à estimer 1 507 (IC = 640-2373)
décès imputables au VHB (2,2 pour 100 000/an) et
2 646 (IC = 1641-3650) décès imputables au VHC
(4,5 pour 100 000/an), soit au total 3 973 décès liés
à l’un ou l’autre de ces deux virus en 2001. Parmi les
sujets décédés d’une infection virale B, 94 % étaient
atteints d’une cirrhose (avec ou sans carcinome hépatocellulaire) et 35 % d’un carcinome hépatocellulaire
sur cirrhose. Parmi les sujets décédés d’une infection
virale C, 95 % étaient atteints d’une cirrhose (avec ou
sans carcinome hépatocellulaire) et 33 % d’un carcinome hépatocellulaire sur cirrhose. Une alcoolisation
excessive était rapportée dans 15 % des décès imputables au VHB et plus d’un tiers de ceux imputables au
VHC. L’âge au moment du décès était plus précoce
chez les patients pour lesquels une consommation
excessive d’alcool était rapportée. La co-infection par
le VIH concernait 11 % des décès imputables [33].
Chez les patients co-infectés par le VIH et le VHC ou le
VHB, une étude réalisée en 2000 indique que les
décès en rapport avec une hépatopathie (31 % des
décès) prédominaient sur les autres causes de décès,
soulignant l’importance pronostique de la co-infection
par le VHC chez les patients infectés par le VIH [34].
Chez les patients co-infectés, la disparition de la mortalité liée au VHB, par opposition à celle liée au VHC,
témoigne probablement de la virosuppression efficace
obtenue à la fin des années 1990 par les analogues
nucléos(t)idiques efficaces à la fois sur le VIH et le VHB.
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, septembre 2007
13
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
Mini-revue
En conclusion, l’infection virale B pose donc du fait de
son évolution potentielle vers la cirrhose et le carcinome hépatocellulaire, un problème majeur de santé
publique, particulièrement dans les pays en voie de
développement qui sont souvent des zones de haute
endémie pour cette infection. Ceci rend nécessaire
l’intensification et l’universalisation de la vaccination.
L’histoire naturelle de l’hépatite B est caractérisée par
la diversité des profils clinico-virologiques allant du
portage inactif voire sain à la cirrhose compliquée de
carcinome hépatocellulaire. Environ 20 % des patients
porteurs chroniques de l’antigène HBs évolueront vers
la cirrhose avec alors une incidence annuelle du CHC
de l’ordre de 3 à 5 %. À côté des facteurs épidémiologiques, les principaux paramètres modifiant l’histoire
naturelle de l’infection B sont le niveau de charge virale
B, l’immunosuppression et les cofacteurs incluant
l’infection associée par le VHD et la surconsommation
d’alcool. Son évolution peut être marquée par les
modifications parfois bruyantes de la réplication virale
avec l’existence d’arrêts spontanés de la multiplication
virale et de réactivations. Cette diversité rend compte
de la physiopathogénie de cette infection résultant de
l’interaction hôte-virus mais aussi de la complexité de
ce virus (intégration, mutation, réplication résiduelle).
Le diagnostic d’infection chronique par le VHB justifie
une évaluation de son impact hépatique qui conduira
la conduite thérapeutique éventuelle : le bénéfice
d’une virosuppression efficace est clairement montré
chez les patients les plus graves.
9. Antona DG, et al. Recent data on acute hepatitis B infections in France
through mandatory notification. 12th International Symposium on Viral
hepatitis and Liver Disease, Poster 463. Paris July &-5 2006. J Clin Virol
2006 : S204.
Références
20. Myers RP, Tainturier MH, Ratziu V, Piton A, Thibault V, ImbertBismut F, et al. Prediction of liver histological lesions with biochemical
markers in patients with chronic hepatitis B. J Hepatol 2003 ; 39 :
222-30.
1. Bréchot C, Hadchouel M, Scotto J, Degos F, Charnay P, Trepo C,
et al. Detection of hepatitis B virus DNA in liver and serum : a direct
appraisal of the chronic carrier state. Lancet 1981 ; 2 : 765-7.
2. Wright TL, Lau JYN. Clinical aspects of hepatitis B virus infection.
Lancet 1993 ; 342 : 1340.
3. Institut de Veille Sanitaire. Estimation des taux de prevalence des
anticorps anti-VHC et des marqueurs du virus de l’hépatite B chez les
assures sociaux du regime general de France métropolitaine, 20032004. Analyse descriptive, Janvier 2005.
4. Mc Mahon BJ, Alward LM, Hall DB, Heyward WL, Bender TR, Francis DP, et al. Acute hepatitis B virus infection : relation of age to the
clinical expression of disease and subsequent development of the carrier
state. J Infect Dis 1985 ; 151 : 599-603.
5. Krugman S, Overby LR, Mushahwar IK, Ling CM, Frösner GG, Deinhardt F. Viral hepatitis type B : studies on natural history and prevention
re-examined. N Engl J Med 1979 ; 300 : 101-6.
6. Saracco G, Macagno S, Rosina F, Caredda F, Antinori S, Rizzeto M.
Serologic markers with fulminant hepatitis in persons positive for hepatitis
B surface antigen. A worldwide epidemiology and clinical survey. Ann
Intern Med 1988 ; 108 : 380-3.
7. Bernuau J, Goudeau A, Poynard T, Dubois F, Lesage G, Yvonnet B,
et al. Multivariate analysis of prognostic factors in fulminant hepatitis B.
Hepatology 1986 ; 6 : 648-51.
8. Horney JT, Galambos JT. The liver during and after fulminant hepatitis.
Gastroenterology 1977 ; 73 : 639-45.
14
10. Tassopoulos NC, Papaevangelou GJ, Sjogren MH, RoumeliotouKarayannis A, Gerin JL, Purcell RH. Natural history of acute hepatitis B
surface antigen-positive hepatitis in Greek adults. Gastroenterology
1987 ; 92 : 1844-50.
11. Almarri A, Batchelor J-R. HLA and hepatitis B infection. The Lancet
1994 ; 344 : 1194-5.
12. Ferrari C, Penna A, Bertoletti A, Valli A, Degli Antoni A, Giuberti T,
et al. Cellular immune response to hepatitis B virus-encoded antigens in
acute and chronic hepatitis B virus infection. J Immunol 1990 ; 145 :
3442-9.
13. Penna A, Del Prete G, Cavalli A, Bertoletti A, D’Elios M, Sorrentino R, et al. Predominant T-helper 1 cytokine profile of hepatitis B virus
nucleocapsid-specific T cells in acute self-limited hepatitis B. Hepatology
1997 ; 25 : 1022-6.
14. Bortollotti F, Cadrobbi P, Crivellaro C, Guido M, Rugge M, Noventa F, et al. Long-term outcoume of chronic type B hepatitis in patients who
acquire hepatitis B virus infection in childhood. Gastroenterology 1990 ;
99 : 805-10.
15. Zylberberg H, Pol S. Doit-on surveiller les « porteurs sains » de
l’antigène HBs? Gastroenterol Clin Biol 1996 ; 20 : 727-9.
16. Lok AS, Heathcote EJ, Hoofnagle JH. Management of hepatitis B :
2000 summary of a workshop. Gastroenterology 2001 ; 120 : 182853.
17. Gerken G, Paterlini P, Manns M, Housset C, Terre S, Diennes HP,
et al. Assay of hepatitis B virus DNA by polymerase chain reaction and its
relationship to pre-S and S-encoded viral surface antigens. Hepatology
1991 ; 13 : 158-66.
18. Villeneuve JP, Desrochers M, Infante-Rivard L, Willems B, Raymond G, Bourcier M. A long-term follow-up study of asymptomatic hepatitis B surface antigen-positive carriers in Montreal. Gastroenterology
1994 ; 106 : 1000-5.
19. De Franchis R, Meucci G, Vecchi M, Tatarella M, Colombo M, Dell
Nino E, et al. The natural history of asymptomatic hepatitis B surface
antigen carriers. Ann Intern Med 1993 ; 118 : 191-4.
21. Sakuma K, Saitoh N, Kaisa M, Jitsukawa H, Yshino I, Yamagushi M, et al. Relative risks of death due to liver disease among
Japanese male adults having various statutes for hepatitis B s and e
antigen/antibody in serum : a prospective study. Hepatology 1988 ; 8 :
1642-6.
22. Chu CM, Karayiannis P, Fowler MJF, Monjardino J, Liaw YF, Thomas HC. Natural history of chronic hepatitis B virus infection in Taiwan :
studies of hepatitis B virus DNA in serum. Natural history of chronic
hepatitis B virus infection in Taiwan : studies of hepatitis B virus DNA in
serum. Hepatology 1985 ; 5 : 431-4.
23. Realdi G, Alberti A, Rugge M, Bortolotti F, Rigoli AM, Tremolada F,
et al. Seroconversion from hepatitis B e antigen to Anti-HBe in chronic
hepatitis B virus infection. Gastroenterology 1980 ; 79 : 195-9.
24. Loriot MA, Marcellin P, Bismuth E, Martinot Peignoux M, Boyer N,
Degott C, et al. Demonstration of hepatitis B virus DNA by polymerase
chain reaction in the serum and the liver after spontaneous or therapeutically induced HBeAg to anti-HBe or HBsAg to anti-HBs sero-conversion
in patients with chronic hepatitis B. Hepatology 1992 ; 15 : 32-6.
25. Adachi H, Kaneko S, Matsushita E, Inagaki Y, Unoura M,
Kobayashi K. Clearance of HBsAg in seven patients with chronic hepatitis
B . Hepatology 1992 ; 16 : 1334-7.
26. Hoofnagle JH, Dusheiko GM, Shafer DF, Jones EA, Micetich KC,
Young RC, et al. Reactivation of chronic hepatitis B virus infection by
cancer chemotherapy. Ann Intern Med 1982 ; 96 : 447-9.
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, septembre 2007
27. Niederau K, Heintges T, Lange S, Goldmann G, Niederau CM,
Mohr L, et al. Long-term follow-up of HBeAg-positive patients treated with
interferon alfa for chronic hepatitis B. N Engl J Med 1996 ; 334 :
1422-7.
28. Weisberg JI, Andress LL, Smith CI, Weick S, Nichols JE, Garcia G,
et al. Survival in chronic hepatitis B. Ann Intern Med 1984 ; 101 : 613-6.
29. Fattovitch G, Brollo L, Giustina G, Noventa F, Pontisso P, Alberti A,
et al. Natural history and prognostic factors for chronic hepatitis B. Gut
1991 ; 32 : 294-8.
30. Beasley RP, Lin CC, Hwang LY, Chien CS. Hepatocellular carcinoma
and hepatitis B virus : a prospective study of 22707 men in Taiwan.
Lancet 1981 : 1129-33.
33. Marcellin P, Pequignot F, Delaroque-Astagneau E, Ganne N,
Hillon P, Bovet M, et al. Evidence for high rates of HCV and HBV related
mortality in France : a large-scale national survey. J Hepatol 2006 ; 44 :
S174 ; (468).
34. Rosenthal E, Pialoux G, Bernard N, Pradier C, Rey D, Bentata M,
et al. Liver-related mortality in human-immunodeficiency-virus-infected
patients between 1995 and 2003 in the French GERMIVIC Joint Study
Group Network (MORTAVIC 2003 Study)*. J Viral Hepat 2007 ; 14 :
183-8.
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
31. Liaw YF, Sung JJ, Chow WC, Farrell G, Lee CZ, Yuen H, et al. Lamivudine for patients with chronic hepatitis B and advanced liver disease. N
Engl J Med 2004 ; 351 : 1521-31.
32. McMahon BJ, Heyward WL, Templin DW, Clement D, Lanier AP.
Hepatitis B-associated polyarteritis nodosa in Alaskan eskimos : clinical
and epidemiologic features and long term follow-up. epatology 1989 ;
9 : 97-101.
Hépato-Gastro, vol. 14, numéro spécial, septembre 2007
15
Téléchargement