soins de support oncologiques actualisation de la prise en charge

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LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
UNIVERSITE CLAUDE BERNARD - LYON 1
FACULTE DE PHARMACIE
INSTITUT DES SCIENCES PHARMACEUTIQUES ET BIOLOGIQUES
2015
THESE n°91
THESE
pour le DIPLOME D'ETAT DE DOCTEUR EN PHARMACIE
présentée et soutenue publiquement le 1er octobre 2015
par
Mlle LAPOSTOLET Nathalie
Née le 2 octobre 1990
A Dreux (28)
*****
SOINS DE SUPPORT ONCOLOGIQUES :
ACTUALISATION DE LA PRISE EN CHARGE DES MUCITES ET DES NAUSEES ET
VOMISSEMENTS CHIMIO-INDUITS AU SEIN D’UN CENTRE HOSPITALIER GENERAL
*****
JURY
Mme RIOUFOL Catherine, Maitre de Conférences Universitaires et Pharmacien Hospitalier
Mme COURSIER Sandra, Pharmacien Hospitalier
M. ODIER Luc, Médecin Hospitalier
M. DUPUY Julien, Pharmacien Officinal
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REMERCIEMENTS
A Madame Catherine Rioufol,
Vous nous avez fait l’honneur d’accepter la présidence de ce jury, soyez assurée
de mes remerciements les plus sincères et de mon profond respect.
A Madame Sandra Coursier,
Je te remercie de m’avoir permis de réaliser ce travail et d’avoir accepté de
diriger cette thèse. Reçois ici le témoignage de ma gratitude pour le temps que
tu m’as consacré et pour tes précieux conseils.
A Monsieur Luc Odier,
Vous me faites l’honneur de juger ce travail et je tiens à vous remercier pour
votre enthousiasme et votre soutien tout au long de ce travail. Soyez assuré de
ma profonde estime.
A Monsieur Julien Dupuy,
Je vous remercie d’avoir accepté de juger ce travail, ainsi que pour ces années
de travail dans votre officine qui m’ont beaucoup appris. Soyez assuré de mon
estime et de ma sincère reconnaissance.
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A Jérémy, l’amour de ma vie, tu sais déjà tout mais je ne te remercierai jamais
assez pour tout le soutien que tu m’as apporté et le courage que tu as eu de me
supporter durant toutes ces années. Fini le stress, en tout cas c’est promis
d’essayer ! Je t’aime plus que tout…
A mes parents, Catherine et Didier, sans qui je n’en serai pas là aujourd’hui,
merci pour votre soutien et pour tout ce que vous faites pour moi. J’espère vous
rendre fiers, je vous aime.
A Jérôme, qui est toujours là pour moi malgré tout et que j’aime même si nous
ne sommes jamais d’accord !
A mes grands parents Mamie Théo, Papi Lou, Mamy Thérèse et Papy André pour
leur soutien et leurs encouragements depuis toujours.
A toute ma famille et plus particulièrement à mon parrain Philippe et à ma
marraine Christine pour ces bons souvenirs de vacances en famille.
A ma belle famille pour leurs encouragements et plus particulièrement à
Georges et Véronique pour tout ce qu’ils font pour nous.
A mon Djé sans qui rien n’aurait été pareil, je ne sais pas si j’en serai là
aujourd’hui si tu n’avais pas toujours été là pour me remotiver. Tout ce chemin
parcouru depuis les cours de maths au lycée… A nous la vraie vie !
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A tous mes amis qui ont rendu toutes ces années bien plus agréables : Anaïs,
Charline, Eloïse, Lucille, Margaud, Marie, Soraya, Yannis. J’espère que vous
ferez partie de ma vie encore longtemps.
A toute l’équipe de la pharmacie Caladoise, pour tout ce qu’ils m’ont appris et
surtout pour m’avoir fait découvrir et aimer l’officine. C’est un plaisir de
travailler parmi vous.
A toute l’équipe de la pharmacie hospitalière de l’Hôpital Nord Ouest et plus
particulièrement à Mr Bontemps, pour avoir rendu ce stage aussi enrichissant,
tant sur le plan personnel que professionnel.
A toute l’équipe de la pharmacie Vial, pour m’avoir fait profiter de leurs
connaissances et de leur expérience et pour le temps qu’ils m’ont consacré
durant mon stage.
Avec une pensée pour William et toute la famille Colnel.
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TABLE DES MATIERES
TABLE DES MATIERES .................................................................... 10
LISTE DES TABLEAUX .................................................................... 14
LISTE DES FIGURES ....................................................................... 15
TABLE DES ABREVIATIONS .............................................................. 16
INTRODUCTION ........................................................................... 19
1.
1.1.
LES SOINS DE SUPPORT ONCOLOGIQUES ....................................... 20
Définition ............................................................................................... 20
1.2.
Objectifs ................................................................................................ 21
1.2.1.
Améliorer la lisibilité du parcours de soin .................................................. 21
1.2.2.
Développer le principe de continuité des soins ............................................ 21
1.2.3.
Favoriser une organisation transversale et coordonnée .................................. 22
1.2.4.
Anticiper les besoins et améliorer la prise en charge .................................... 23
1.3.
Acteurs et organisation .............................................................................. 24
1.3.1.
Acteurs ............................................................................................ 24
1.3.1.1. Professionnels de santé habituels ........................................................ 24
1.3.1.1.1. Professionnels de santé référents qui interviennent au domicile ............. 24
1.3.1.1.2. Professionnels de santé spécifiques de l’oncologie et des soins de support . 25
1.3.1.2. Professionnels de recours .................................................................. 25
1.3.1.3. Acteurs de la « vie civile » ................................................................. 26
1.3.2.
Structures ........................................................................................ 26
1.4.
Mise en place des soins de support ............................................................... 27
1.4.1.
Au niveau national .............................................................................. 27
1.4.1.1. Association Francophone pour les Soins Oncologiques de Support .................. 27
1.4.1.2. Institut National du Cancer ................................................................ 28
1.4.2.
Au niveau des territoires de santé ........................................................... 28
1.4.2.1. Schéma Régional d’Organisation Sanitaire .............................................. 29
1.4.2.2. Réseaux Régionaux de Cancérologie ..................................................... 30
1.4.3.
Au niveau des établissements ................................................................. 31
1.4.3.1. Centre de Coordination en Cancérologie ................................................ 31
1.4.3.2. Département ou Service ou Fédération Interdisciplinaire de Soins de Support pour
le Patient en Onco-hématologie ........................................................................ 31
1.4.4.
Au niveau de l’Hôpital Nord Ouest ........................................................... 32
2.
A QUELS BESOINS LES SOINS DE SUPPORT REPONDENT-ILS ? ............... 34
2.1.
L’impact des chimiothérapies sur la qualité de vie ........................................... 34
2.1.1.
Contexte .......................................................................................... 34
2.1.2.
Concept de qualité de vie ..................................................................... 34
2.1.3.
Implication des traitements dans l’altération de la qualité de vie .................... 35
2.2.
Les effets indésirables des chimiothérapies .................................................... 36
10
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2.2.1. Généralités .......................................................................................... 36
2.2.2.
Mucites ............................................................................................ 39
2.2.2.1. Définition ...................................................................................... 39
2.2.2.2. Physiopathologie ............................................................................. 39
2.2.2.3. Evaluation de la mucite .................................................................... 42
2.2.2.4. Facteurs de risque ........................................................................... 44
2.2.2.5. Epidémiologie et molécules à risque ..................................................... 45
2.2.2.6. Complications ................................................................................ 46
2.2.3.
Nausées et vomissements ...................................................................... 48
2.2.3.1. Définition ...................................................................................... 48
2.2.3.2. Physiopathologie ............................................................................. 50
2.2.3.3. Evaluation ..................................................................................... 53
2.2.3.4. Facteurs de risque liés au patient ........................................................ 54
2.2.3.5. Facteurs protecteurs liés au patient ..................................................... 56
2.2.3.6. Facteurs de risque liés au traitement .................................................... 56
2.2.3.7. Complications ................................................................................ 59
3.
3.1.
PRISE EN CHARGE DES MUCITES CHIMIO-INDUITES............................ 60
Objectifs ................................................................................................ 60
3.2.
Matériels et méthodes ............................................................................... 60
3.2.1. Références ........................................................................................... 60
3.2.2. Mesures préventives ............................................................................... 61
3.2.2.1. Bilan bucco-dentaire ........................................................................ 61
3.2.2.2. Education du patient ........................................................................ 62
3.2.2.3. Conseils d’hygiène bucco-dentaire ....................................................... 63
3.2.2.4. Soins de bouche .............................................................................. 64
3.2.2.5. Cryothérapie .................................................................................. 66
3.2.2.6. Laser de faible puissance ................................................................... 66
3.2.2.7. Palifermine.................................................................................... 67
3.2.2.8. Caphosol® ..................................................................................... 68
3.2.2.9. Suivi du patient .............................................................................. 68
3.2.3. Prise en charge curative des mucites buccales ............................................... 68
3.2.4. Prise en charge des autres problèmes de bouche ............................................ 71
3.2.4.1. Candidoses oropharyngées ................................................................. 71
3.2.4.2. Herpès ......................................................................................... 73
3.2.4.3. Bouche douloureuse ......................................................................... 74
3.2.5. Prise en charge des mucites gastro-intestinales .............................................. 75
3.2.6. Sélection des protocoles dans le logiciel Cristal Link ........................................ 75
3.2.6.1. Critères d’inclusion .......................................................................... 75
3.2.6.2. Critères d’exclusion ......................................................................... 75
3.3.
Résultats ................................................................................................ 76
3.4.
Plan d’amélioration .................................................................................. 78
3.4.1.
Fiche conseil d’hygiène bucco-dentaire .................................................... 78
3.4.2.
Nouveaux protocoles Cristal Link ............................................................ 78
3.4.2.1. En fonction du grade de mucite ........................................................... 78
3.4.2.1.1. Grade 0 ................................................................................... 78
3.4.2.1.2. Grade 1 ................................................................................... 79
3.4.2.1.3. Grade 2 ................................................................................... 79
3.4.2.1.4. Grade 3 ................................................................................... 80
3.4.2.1.5. Grade 4..................................................................................... 80
3.4.2.2. En fonction des problèmes de bouche ................................................... 81
3.4.2.2.1. Bouche sèche ............................................................................. 81
3.4.2.2.2. Candidoses................................................................................. 81
3.4.2.2.2.1. Forme minime et modérée ........................................................ 81
3.4.2.2.2.2. Forme étendue, sévère et/ou récidivante ..................................... 82
11
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3.4.2.2.3. Herpès ...................................................................................... 82
3.4.2.2.4. Aphtose .................................................................................... 82
3.4.2.2.5. Bouche douloureuse avec ou sans lésions ............................................ 82
3.4.2.2.6. Bouche hémorragique ................................................................... 83
3.4.3. Nouvelles ordonnances de sorties ............................................................... 83
3.4.3.1. En fonction du grade de mucite ........................................................... 83
3.4.3.1.1. Grade 0..................................................................................... 83
3.4.3.1.2. Grade 1..................................................................................... 84
3.4.3.1.3. Grade 2..................................................................................... 84
3.4.3.1.4. Grade 3..................................................................................... 84
3.4.3.1.5. Grade 4..................................................................................... 85
3.4.3.2. En fonction des problèmes de bouche ................................................... 85
3.4.3.2.1. Bouche sèche ............................................................................. 85
3.4.3.2.2. Candidoses................................................................................. 85
3.4.3.2.3. Herpès ...................................................................................... 85
3.4.3.2.4. Aphtose .................................................................................... 85
3.4.3.2.5. Bouche douloureuse avec ou sans lésions ............................................ 86
3.4.3.2.6. Bouche hémorragique ................................................................... 86
3.4.4. Communication ..................................................................................... 86
3.5.
Evaluation .............................................................................................. 87
3.6.
Conclusion .............................................................................................. 88
4.
4.1.
PRISE EN CHARGE DES NAUSEES ET VOMISSEMENTS CHIMIO-INDUITS ..... 89
Objectifs ................................................................................................ 89
4.2.
Matériels et méthodes ............................................................................... 89
4.2.1.
Références ....................................................................................... 89
4.2.2.
Mesures non médicamenteuses ............................................................... 89
4.2.2.1. Education du patient ........................................................................ 89
4.2.2.2. Conseils hygiéno-diététiques .............................................................. 90
4.2.2.3. Médecines complémentaires ............................................................... 92
4.2.3.
Médicaments disponibles ...................................................................... 92
4.2.3.1. Antagonistes des récepteurs dopaminergiques de type 2 ............................ 92
4.2.3.2. Antagonistes des récepteurs sérotoninergiques de type 3 ou sétrons .............. 94
4.2.3.3. Corticoïdes .................................................................................... 96
4.2.3.4. Antagonistes des récepteurs aux neurokinines de type 1 ............................ 97
4.2.3.5. Benzodiazépines ............................................................................. 99
4.2.3.6. Autres médicaments......................................................................... 99
4.2.4.
Protocoles de prise en charge ............................................................... 101
4.2.4.1. Définition du niveau émétisant des molécules ........................................ 101
4.2.4.2. Définition du niveau émétisant des protocoles ........................................ 102
4.2.4.3. Prophylaxie en fonction du niveau émétisant du protocole ........................ 102
4.2.4.3.1. Hautement émétisant ................................................................ 102
4.2.4.3.2. Modérément émétisant ............................................................... 103
4.2.4.3.3. Faiblement émétisant ................................................................ 104
4.2.4.3.4. Très faiblement émétisant .......................................................... 105
4.2.4.3.5. Traitement de secours ............................................................... 105
4.2.4.3.6. Cas particuliers ........................................................................ 106
4.2.4.3.6.1. Nausées et vomissements anticipés .......................................... 106
4.2.4.3.6.2. Chimiothérapie en continue ................................................... 106
4.2.5. Sélection des protocoles dans le logiciel Asclépios II ....................................... 107
4.2.5.1. Critères d’inclusion ......................................................................... 107
4.2.5.2. Critères d’exclusion ........................................................................ 107
4.3.
Résultats .............................................................................................. 108
4.3.1.
Protocoles hautement émétisant............................................................ 108
12
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(CC BY-NC-ND 2.0)
4.3.2.
4.3.3.
4.3.4.
4.4.
5.
Protocoles modérément émétisants ........................................................ 109
Protocoles faiblement émétisants .......................................................... 111
Protocoles très faiblement émétisants ..................................................... 113
Conclusion ............................................................................................ 114
DISCUSSION ......................................................................... 115
5.1.
Analyse du travail effectué ....................................................................... 115
5.2.
Bilan sur les soins de support oncologiques .................................................. 117
5.3.
Coordination hôpital-ville et rôle du pharmacien d’officine.............................. 120
CONCLUSIONS ............................................................................ 124
BIBLIOGRAPHIE .......................................................................... 126
ANNEXES .................................................................................. 133
13
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LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Médicaments hautement émétisants
Tableau 2 : Médicaments modérément émétisants
Tableau 3 : Médicaments faiblement émétisants
Tableau 4 : Médicaments très faiblement émétisants
Tableau 5 : Aliments à privilégier ou à éviter pour éviter les mucites
Tableau 6 : Protocoles de traitement des mucites à l’HNO
Tableau 7 : Prophylaxies recommandées pour les molécules hautement
émétisantes
Tableau 8 : Prophylaxies recommandées pour les molécules modérément
émétisantes
Tableau 9 : Prophylaxies recommandées pour les molécules faiblement
émétisantes
Tableau 10 : Prophylaxies recommandées pour les molécules très faiblement
émétisantes
Tableau 11 : Résultats du travail effectué pour les protocoles hautement
émétisants
Tableau 12 : Résultats du travail effectué pour les protocoles modérément
émétisants
Tableau 13 : Résultats du travail effectué pour les protocoles faiblement
émétisants
Tableau 14 : Résultats du travail effectué pour les protocoles très faiblement
émétisants
14
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LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Continuité et globalité des soins de support oncologiques
Figure 2 : Physiopathologie de la mucite : un processus en 5 étapes
Figure 3 : Mécanisme pharmacologique des nausées et vomissements
Figure 4 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules hautement
émétisantes
Figure 5 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules modérément
émétisantes
Figure 6 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules faiblement
émétisantes
Figure 7 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules très faiblement
émétisantes
15
LAPOSTOLET
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TABLE DES ABREVIATIONS
3C : Centre de Coordination en Cancérologie
5-FU : 5-Fluoro-Uracile
5-HT3 (récepteurs) : sérotoninergiques de type 3
ACORESCA : Association des Coordonateurs de Réseaux de Cancérologie
ADN : Acide Désoxyribonucléique
AESCO : Association Européenne pour les Soins de Confort en Oncologie
AFSOS : Association Francophone pour les Soins Oncologiques de Support
AMM : Autorisation de Mise sur le Marché
APA : Activité Physique Adaptée
ARS : Agence Régional de Santé
ASCO : American Society of Clinical Oncology
BZD : Benzodiazépines
CB1 (récepteurs) : cannabinoïdes de type 1
CHT : Communauté Hospitalière de Territoire
CHU : Centre Hospitalier Universitaire
CISSPO : Cellule Interdisciplinaire de Soins de Support pour le Patient en Oncohématologie
CLAN : Comité de Liaison en Alimentation et Nutrition
CLIC : Centres Locaux d’Information et de Coordination
CLIN : Comité de Lutte contre les Infections Nosocomiales
CLUD : Comité de LUtte contre la Douleur
CNAMTS : Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés
CNHIM : Centre National Hospitalier d’Information sur le Médicament
CPG : Central Pattern Generator
CTC : Common Toxicity Criteria
CTZ : Chemoreceptive Trigger Zone
D2 (récepteurs) : dopaminergiques de type 2
DDC : Dossier Médical Communiquant
DHOS : Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins
DGOS : Direction Générale de l’Offre de Soins
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DISSPO : Département Interdisciplinaire de Soins de Support pour le Patient en
Onco-hématologie
DP : Dossier Pharmaceutique
ESMO : European Society for Medical Oncology
EVA : Echelle Visuelle Analogique
FISSPO : Fédération Interdisciplinaire de Soins de Support pour le Patient en
Onco-hématologie
FNCLCC : Fédérations Nationale des Centres de Lutte Contre le Cancer
GEX : Groupes EXperts
GRASSPHO : Groupe de Réflexion sur l’Accompagnement et les Soins de Support
pour les Patients en Hémato-Oncologie
HAD : Hospitalisation A Domicile
HAS : Haute Autorité de Santé
HNO : Hôpital Nord Ouest
HPST (loi) : Hôpital, Patients, Santé, Territoires
HSV : Herpes Simplex Virus
IDE : Infirmières Diplômées d’Etat
J1 : premier jour de la chimiothérapie
IL-1 IL-6 : Interleukines 1 et 6
INCa : Institut National du Cancer
ISOO : International Society of Oral Oncology
ITK : Inhibiteur de la Tyrosine Kinase
IV : Intraveineux
MASCC : Multinational Association of Supportive Care in Cancer
MAT : MASCC Antiemetic Tool
MCO (Etablissements de) : Médecine, Chirurgie, Obstétrique
MRS : Maisons Régionales de Santé
NCCN : National Comprehensive Cancer Network
NCI : National Cancer Institute
NK1 (récepteurs) : à la Neuro Kinine de type 1
NTS : Noyau du Tractus Solitaire
NVCI : Nausées et Vomissements Chimio-Induits
OAG : Oral Assessment Guide
17
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OMS : Organisation Mondiale de la Santé
ORL (sphère) : Oto-Rhino-Laryngée
PCA : Patient Control Analgesia
PDSES : Permanence Des Soins en Etablissement de Santé
PPAC : Programme Personnalisé de l’Après Cancer
PPS : Plan Personnalisé de Soins
PRS : Projets Régionaux de Santé
PUI : Pharmacie à Usage Intérieur
RCP : Réunion de Concertation Pluridisciplinaire
ROS : Reactive Oxygen Species
RTOG : Radiation Therapy Oncology Group
RRC : Réseaux Régionaux de Cancérologie
SFAP : Société Française d’Accompagnement et de soins Palliatifs
SFPC : Société Française de Pharmacie Clinique
SFPO : Société Française de Pharmacie Oncologique
SISSPO : Service Interdisciplinaire de Soins de Support pour le Patient en Oncohématologie
SNC : Système Nerveux Central
SOS : Soins de Support Oncologiques
SROS : Schéma Régional d’Organisation Sanitaire
SSIAD : Service de Soins Infirmiers A Domicile
TNF-α : Tumor Necrosis Factor-Alpha
URCC : Unité de Reconstitution Centralisée des Cytotoxiques
UNR-Santé : Union Nationale des Réseaux de Santé
18
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
INTRODUCTION
Le cancer est une maladie multifactorielle en expansion ces dernières années.
Elle peut, de plus en plus, être qualifiée de chronique de par l’utilisation de
traitements efficaces qui augmentent la survie des patients. Celle-ci doit avoir lieu dans
les meilleures conditions possibles, ce qui est l’enjeu des soins de support oncologiques.
Leur objectif principal est d’améliorer la qualité de vie des patients sous
chimiothérapie. Leur organisation a pour but de rendre le parcours de soin plus lisible
pour le patient, de favoriser la continuité et la coordination des soins et de permettre
d’anticiper les besoins des patients et de leur entourage. Pour cela, ils doivent être
proposés à toutes les étapes de la chimiothérapie, lors de la consultation d’annonce, de
la mise en place de la chimiothérapie mais aussi après les traitements. Ils sont donc
différents des soins palliatifs qui sont eux proposés uniquement lors de l’arrêt des
traitements spécifiques.
Les chimiothérapies ont de nombreux effets indésirables pour lesquels les soins
de support peuvent apporter un bénéfice au patient. Deux axes ont été définis pour ce
travail : la prise en charge des mucites, mal connues des patients et sources de
complications ; puis celle des nausées et vomissements, redoutés des patients et dont le
contrôle joue un rôle essentiel dans l’adhérence à la chimiothérapie.
Dans une première partie, la définition et l’organisation des soins de support
oncologiques seront abordés. Ce développement amènera à comprendre à quels besoins
les soins de support répondent de manière générale, puis plus spécifiquement dans les
thématiques de ce travail : les mucites et les nausées et vomissements. Dans un second
temps, les recommandations actuelles de prise en charge de ces effets indésirables
seront rappelées, avant de décrire la méthodologie mise en place pour l’harmonisation
de la prise en charge des mucites et l’actualisation des protocoles de prise en charge
des nausées et vomissements chimio-induits au sein de l’Hôpital Nord Ouest. Enfin les
résultats obtenus permettront d’aborder le rôle du pharmacien d’officine et donc
l’importance de la mise en place d’une coordination hôpital-ville dans le parcours de
soins des patients.
19
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
1. Les soins de support oncologiques
1.1.Définition
Les soins de support oncologiques ont été définis pour la première fois en 2004 comme
« l’ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades tout au long de la
maladie
conjointement
aux
traitements
oncologiques
ou
hémato-oncologiques
spécifiques lorsqu’il y en a. ». Cette définition est inspirée de la définition du
« supportive care » donnée en 1990 par la Multinational Association of Supportive Care
in Cancer (MASCC) : « the total medical, nursing and psychosocial help, which the
patients need besides the specific treatment ». Cette définition est étendue puisqu’elle
intègre autant le champ de la guérison, avec d’éventuelles séquelles, que celui des
soins palliatifs(1). Selon la ligue contre le cancer, les soins de support désignent
l’ensemble des soins et soutiens qui permettent aux patients de mieux supporter les
conséquences de la maladie(2).
Les soins de support répondent aux besoins du patient et de son entourage qui
concernent la prise en charge de la douleur, de la fatigue, des problèmes nutritionnels,
des troubles digestifs, des troubles respiratoires, des troubles génito-urinaires, des
troubles moteurs, des handicaps, des problèmes odontologiques, des difficultés
sociales, de la souffrance psychique, des perturbations de l’image corporelle et de
l’accompagnement de fin de vie. Les soins palliatifs intègrent donc totalement la
problématique des soins de support(3).
Figure 1 : Continuité et globalité des soins de support oncologiques(1)
20
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
La première définition officielle des soins de support a été reprise dans la circulaire du
22 février 2005 relative à l’organisation des soins en cancérologie. Cette circulaire
précise également que les soins de support ne sont pas une nouvelle discipline, mais une
coordination des compétences et leur mise à disposition pour le patient et ses
proches(4).
1.2.Objectifs
1.2.1. Améliorer la lisibilité du parcours de soin
Le premier objectif des soins de support est de faciliter et de clarifier le parcours de
soin du patient et de ses proches. La création d’un « guichet unique » permet une
meilleure lisibilité et améliore ainsi le service rendu aux malades et aux équipes, en
limitant les démarches et en rassemblant les informations(1)(2)(5). Il est représenté par
un médecin référent, avec un secrétariat commun à tous les soins de support de
l’établissement, pour permettre une vision globale des ressources disponibles et ainsi
pouvoir organiser et coordonner tous les soins dont un patient a besoin. Il peut
également participer au soutien des proches et s’assurer de la continuité des soins en
dehors de l’hôpital(1)(2).
Les patients et leurs proches doivent avoir connaissance des ressources proposées dans
le cadre des soins de support. C’est pour cela qu’ils doivent être proposés à chaque
patient atteint de cancer dans le cadre du Plan Personnalisé de Soins (PPS) qui lui sera
remis. Le PPS contient entre autre les coordonnées des personnes ressources pour
chacune des composantes des soins de support et/ou les coordonnées d’un lieu
d’information à la disposition du patient. Les autres outils qui peuvent être utilisés pour
diffuser ces informations sont : le livret d’accueil de l’établissement, le site internet de
l’hôpital, les réseaux de santé et enfin les associations d’aide aux malades(3).
1.2.2. Développer le principe de continuité des soins
L’accès aux soins de support doit être possible dès le diagnostic, pendant la phase
curative et/ou palliative et jusqu’à l’après cancer(5). Les patients doivent donc pouvoir
y faire appel tout au long du parcours du soin, pendant ou à distance des traitements,
quel que soit l’endroit où ils se trouvent, en institution ou à domicile(3)(5).
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Les soins de support doivent participer à la continuité des soins entre les équipes
hospitalières et les équipes au domicile du patient(5). En effet, d’après l’annexe 4 de la
circulaire du 22 février 2005, « cette approche globale de la personne malade suppose
que, l’ensemble des acteurs de soins impliqués en cancérologie prenne en compte la
dimension des soins de support dans la prise en charge de leurs patients, notamment en
terme de continuité des soins »(6). De plus, selon la Ligue contre le cancer, la
continuité dans le temps et dans l’espace est un aspect fondamental des soins de
support. Ils sont dispensés en établissement de soins mais aussi sur le lieu de vie, et
cette continuité implique un lien étroit entre la structure de soin et le domicile, qui
passe généralement par le médecin traitant. La communication et la transmission des
informations sont donc indispensables aux soins de support(2).
Par exemple, le cahier ou classeur de liaison permet d’assurer le suivi du patient à son
domicile et de donner les informations essentielles à la coordination et la continuité des
soins(5). Cet outil a pour objectif d’informer le patient et les professionnels de santé
qu’il est amené à rencontrer, sur sa maladie, son traitement et les résultats des
examens médicaux qu’il a réalisés. Il permet ainsi au patient de garder une trace écrite
de son état de santé au domicile et de faciliter la communication entre les différents
professionnels de santé intervenant auprès du patient.
1.2.3. Favoriser une organisation transversale et coordonnée
Un des objectifs des soins de support est d’optimiser les pratiques des professionnels de
santé qui prennent en charge le patient, en renforçant la transversalité et les pratiques
collaboratrices. Les différents acteurs doivent donc mettre en place des moyens pour
organiser la complémentarité et formaliser les coopérations dans chaque territoire de
santé(7). En effet, les soins de support constituent une organisation coordonnée de
compétences qui sont mutualisées et mises en avant pour répondre aux besoins des
patients et de leurs proches(8).
Il s’agit d’une démarche interdisciplinaire qui nécessite une concertation entre les
acteurs concernés afin de permettre un parcours de soin optimal(5). La coordination est
justifiée par la pluridisciplinarité, elle-même liée à l’hyperspécialisation et à
l’hypertechnicité des professionnels, mais aussi par une insuffisance de communication
entre les équipes et enfin par les difficultés administratives que rencontrent les équipes
participant aux soins de support(1).
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L’objectif de cette coordination n’est pas de créer des équipes identifiées « soins de
support », mais d’organiser et de renforcer les structures déjà en place. L’offre de soins
est évaluée au sein d’un territoire de santé, car le but de la mutualisation est de
regrouper les compétences. Cette coordination nécessite également le partage de
l’information, via le dossier médical partagé ou via l’échange de données médicales
transmissibles(3).
La mise en place d’une démarche participative avec des réunions pluridisciplinaires au
sein des unités de soins est indispensable, tant pour l’élaboration des projets de soins
destinés aux patients, que pour l’organisation des soins. Ce décloisonnement peut faire
apparaître des recouvrements de compétences ou des carences dans l’offre de soins de
support, qui doivent être régulés par la concertation. De plus, il est nécessaire que ce
dernier conduise à un changement culturel dans les pratiques et l’organisation des
professionnels(7).
La coordination en soins de support peut constituer la mission essentielle de certains
réseaux de santé transversaux, centrés sur l’approche globale de la personne et dont
l’ancrage peut être en ville ou à l’hôpital(7). Ces réseaux de soins assurent donc un rôle
de coordination entre l’hôpital et les professionnels libéraux. Ils permettent de
préparer la sortie de l’hôpital et veillent à ce que le retour à domicile se fasse dans les
meilleures conditions possibles. Ils se composent d’une équipe pluridisciplinaire
(médecins, infirmières, diététicienne, assistante sociale par exemple) et agissent le plus
souvent au niveau régional(2).
1.2.4. Anticiper les besoins et améliorer la prise en charge
En règle générale dans les soins de support, une approche globale de la personne est à
privilégier, c’est-à-dire une prise en charge du patient sur le plan physique,
psychologique, social, et pas uniquement de sa maladie(8). D’autre part pour orienter
précocement les patients vers la prise en charge la plus adaptée, il est nécessaire
d’anticiper les besoins et de repérer les situations à risque(3)(7). C’est pourquoi il est
indispensable que les équipes soignantes soient formées à repérer les situations à
risque(3).
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La mesure 40 du Plan cancer 2003-2007 demande la mise en place d’un dispositif
d’annonce, lors du diagnostic, dans tous les établissements traitant des patients
atteints de cancer. Celui-ci permet, entre autre, d’effectuer une première évaluation
des besoins par l’équipe de soins de support(5). Les besoins sont ensuite réévalués dans
les différents domaines de compétences des soins de support, à chaque étape du
parcours
du
patient,
par
les
équipes
référentes
de
l’établissement
ou
du
domicile(5)(7)(8).
1.3.Acteurs et organisation
L’organisation des soins de support doit s’appuyer sur les ressources existantes. Les
compétences disponibles doivent être mobilisées et celles non disponibles doivent être
rendues accessibles(3).
1.3.1. Acteurs
1.3.1.1.
Professionnels de santé habituels
Les soins de support supposent d’associer autour du patient et de ses proches le
médecin traitant, les professionnels médicaux et paramédicaux du domicile et les
acteurs des traitements spécifiques dans les équipes hospitalières(7).
1.3.1.1.1.
Professionnels de santé référents qui interviennent au
domicile
En général, la période passée à l’hôpital est beaucoup plus courte que celle passée chez
soi : la plupart des soins se font à domicile et sont dispensés par des professionnels
libéraux. Le médecin traitant a une présence régulière et rassurante pour le patient. Sa
proximité fait qu’il pourra percevoir précocement les besoins du malade(2).
Les acteurs référents sont les professionnels de santé habituels choisis par le patient,
qui interviennent au domicile dans la prise en charge globale et spécifique, par exemple
le médecin traitant, l’infirmier, le masseur-kinésithérapeute, le pharmacien, l’aide
soignant. L’hospitalisation à domicile et les réseaux de soins font également partie des
acteurs qui peuvent intervenir à domicile, selon le contexte du patient(7).
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1.3.1.1.2.
Professionnels de santé spécifiques de l’oncologie et des
soins de support
Le médecin oncologue est le principal professionnel de santé qui s’investit à la fois dans
les traitements spécifiques de l’oncologie et dans les soins de support. En effet, il prend
en charge les effets secondaires des traitements, comme les nausées et les
vomissements, ainsi que certains symptômes liés à la maladie, comme la douleur.
De plus, l’équipe soignante évalue les symptômes inconfortables et organise la prise en
charge globale des patients. Le chirurgien fait également partie de ces professionnels
puisqu’il peut donner des conseils liés aux interventions chirurgicales, par exemple pour
la stomie(7).
1.3.1.2.
Professionnels de recours
Les professionnels de santé précédemment cités sont les interlocuteurs privilégiés du
patient, mais en cas de besoin, ils pourront faire appel à d’autres professionnels,
notamment ceux qui s’occupent des traitements spécifiques du cancer comme la
radiothérapie, l’oncologie, l’hématologie et les services de spécialité.
Par ailleurs, les professionnels de santé peuvent également faire appel à l’équipe
d’évaluation et de traitement de la douleur, aux professionnels formés dans les
domaines
des
soins
palliatifs,
de
la
prise
en
charge
psychologique,
de
l’accompagnement social des patients, de la nutrition et de l’alimentation, de la
réadaptation fonctionnelle et de la rééducation dont font partie l’ergothérapie et la
kinésithérapie, et de l’odontologie pour les soins bucco-dentaires. D’autre part les
professionnels non acteurs de santé, formés à la socio-esthétique et à l’art-thérapie
peuvent également participer aux soins de support(7)(5).
Enfin, les professionnels spécialisés en prise en charge type sophrologie, relaxation et
réflexologie, et les professionnels spécialisés en médecines complémentaires type
mésothérapie, auriculothérapie et homéopathie, peuvent répondre aux besoins
spécifiques des patients(5).
Les professionnels de recours doivent se coordonner entre eux et avec les professionnels
habituels pour éviter le chevauchement des interventions(7).
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1.3.1.3.
Acteurs de la « vie civile »
Certains non professionnels de santé peuvent intervenir dans le cadre des soins de
support, par exemple les associations de bénévoles d’accompagnement, d’aumônerie et
les associations de patients et de représentants des usagers. Leur intervention se fait en
lien et en accord avec les équipes soignantes. Ils peuvent être directement sollicités par
les patients et leurs proches(7)(5).
La ligue contre le cancer, qui est une association loi 1901, en fait partie. Elle joue un
rôle d’information, de sensibilisation et de prévention contre le cancer. Elle cherche à
améliorer la qualité de vie des personnes malades et de leurs proches. Dans chaque
département, il existe des services de soutien financier, d’accès au prêt, d’Activité
Physique Adaptée (APA), d’aide psychologique, de soin socio-esthétique, d’amélioration
du confort à l’hôpital et d’aide ménagère. Elle œuvre également auprès des institutions
et des entreprises pour promouvoir les droits des patients et des usagers du système de
santé(9).
1.3.2. Structures
Les structures de soins de support font partie d’établissements publics ou participants
au service public hospitalier, ou d’établissements privés.
En plus des structures qui concernent les différents champs d’action des soins de
support, des réseaux de santé de cancérologie et des autres domaines des soins de
support sont également présents. Par ailleurs, l’Hospitalisation A Domicile (HAD), les
Services de Soins Infirmiers A Domicile (SSIAD), l’équipe mobile ou l’unité ou les réseaux
de santé de soins palliatifs et les centres de prise en charge de la douleur chronique
rebelle sont également impliqués dans cette démarche(3)(5)(7)(10).
Toutes ces structures peuvent interagir avec le Comité de LUtte contre la Douleur
(CLUD), le Comité de Lutte contre les Infections Nosocomiales (CLIN) et le Comité de
Liaison en Alimentation et Nutrition (CLAN)(10).
La création de fédérations, départements ou pôles de responsabilité de soins de support
est possible, avec une coordination de base impliquant les activités de prise en charge
de la douleur chronique rebelle, de soins palliatifs, de prise en charge psychologique et
d’accompagnement social. Cette coordination peut s’étendre en fonction de
l’histoire et des missions des établissements(1).
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D’autre part, les professionnels de santé de recours, qui interviennent auprès des
services hospitaliers, peuvent également intervenir dans les établissements de santé et
médico-sociaux ayant passé convention avec l’établissement de santé auquel ils sont
rattachés. De même, ils peuvent intervenir auprès des acteurs du domicile, notamment
dans le cadre de conventions passées entre l’établissement de santé auquel ils sont
rattachés et le réseau de santé, le service d’HAD, les SSIAD, ou les Centres Locaux
d’Information et de Coordination gérontologique (CLIC)(7).
1.4.Mise en place des soins de support
1.4.1. Au niveau national
1.4.1.1.
Association Francophone pour les Soins Oncologiques de Support
L’Association Francophone pour les Soins Oncologiques de Support (AFSOS) a été créé en
2008 à l’initiative de l’Association Européenne pour les Soins de Confort en Oncologie
(AESCO), du groupe de soins de support de la Fédérations Nationale des Centres de
Lutte Contre le Cancer (FNCLCC) et du Groupe de Réflexion sur l’Accompagnement et
les Soins de Support pour les Patients en Hémato-Oncologie (GRASSPHO), avec le soutien
de la MASCC. Cette association constitue une plateforme d’échanges autour de la
cancérologie, entre les équipes dédiées aux soins oncologiques spécifiques et celles
dédiées aux soins oncologiques de support. Son but est de mutualiser les compétences
dans les domaines concernés, au sein d’une société savante unique, de dimension
internationale.
L’AFSOS a vocation à promouvoir la connaissance et la mise en œuvre des soins de
support oncologiques en collaborant avec les sociétés savantes et en servant d’interface
entre les professionnels de la cancérologie, de la douleur, de la psycho-oncologie, de la
nutrition, de la réadaptation et des soins palliatifs, par exemple. Un de ses objectifs est
d’améliorer la prise en charge des symptômes, l’accompagnement et la démarche
palliative au sein des équipes intra et extra hospitalières(11).
D’autre part elle encourage la formation de Groupes Experts (GEX) dont le but est de
promouvoir la recherche et la pratique clinique, dans les différents domaines des soins
oncologiques de support.
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Leur rôle est de réunir les professionnels de l’AFSOS sur des thèmes d’intérêt ou des
symptômes, et de mener des actions qui visent à améliorer la formation, les bonnes
pratiques et la recherche sur les thèmes choisis. Les missions des GEX sont de participer
à la conception et au déploiement de formations sur le thème du GEX, de participer à la
rédaction et à la diffusion de recommandations en lien avec l’Haute Autorité de Santé
et l’Institut National du Cancer (INCa), ou encore de référentiels en lien avec les
réseaux de cancérologie dans le cadre de l’action nationale menée par l’AFSOS,
l’Association des Coordonateurs de Réseaux de Cancérologie (ACORESCA) et l’Union
Nationale des Réseaux de Santé (UNR-Santé) et enfin de participer à la recherche sous
toutes ses formes sur les thèmes correspondants aux GEX(12).
1.4.1.2.
Institut National du Cancer
L’Institut National du Cancer (INCa) est une agence sanitaire et scientifique de l’Etat,
chargée de coordonner les actions de lutte contre le cancer. Il a été créé par la loi de
santé publique du 9 août 2004, dans le cadre du Plan cancer 2003-2007. Il est placé sous
la tutelle conjointe du ministère des Affaires sociales et de la Santé et du ministère de
l’Enseignement Supérieur et de la Recherche. Il rassemble les acteurs de la lutte contre
le cancer en France, dans le but de contribuer à diminuer la mortalité par cancer en
France et d’améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d’un cancer.
Le programme de travail de l’INCa s’inscrit dans les axes des Plans cancer, c’est pour
cela que l’institut participe au comité de pilotage en charge de la mise en œuvre du
plan et qu’il en assure le suivi. Ses différentes missions sont d’animer les réseaux
d’acteurs territoriaux, tels que les réseaux régionaux de cancérologie et les
cancéropôles, d’articuler son action avec les Agences Régionales de Santé (ARS) et de
développer des collaborations internationales. Il a également pour objectif d’initier et
soutenir l’innovation scientifique, médicale, technologique et organisationnelle(13)(14).
1.4.2. Au niveau des territoires de santé
Les territoires de santé sont définis « selon les activités et les équipements » et
« constituent un espace infrarégional, régional, interrégional ou national ». C’est la
direction de l’ARS qui définie les limites des territoires de santé. Elles doivent tenir
compte de la réalité locale et non pas des limites administratives. Les territoires de
santé ont pour mission d’assurer la coordination et la continuité des soins.
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Les activités et les équipements des territoires de santé relèvent du Schéma Régional
d’Organisation Sanitaire (SROS)(5).
1.4.2.1.
Schéma Régional d’Organisation Sanitaire
En 2009, suite à la loi Hôpital, Patients, Santé, Territoires (HPST), les Schémas
Régionaux d’Organisation Sanitaires (SROS) sont devenus les Schémas Régionaux
d’Organisation des Soins. Ils s’intègrent aux Projets Régionaux de Santé (PRS) et
s’étendent aux soins ambulatoires. Les PRS quant à eux, sont responsables de
l’évaluation des besoins de santé, de l’offre de soins et de la détermination des
orientations stratégiques de la région en matière de santé.
Les SROS doivent faire évoluer l’offre de soins en fonction des besoins de la population,
pour garantir l’amélioration de l’état de santé et la réduction des inégalités d’accès aux
soins. Pour améliorer la qualité et la sécurité des soins, les SROS doivent poursuivre les
restructurations de l’offre de soins, en favorisant les alternatives à l’hospitalisation
complète et sans oublier de prendre en compte le contexte macro-économique(15).
La circulaire DGOS/R5/2011/311 du 1er août 2011 présente le guide méthodologique
d’élaboration du SROS, destiné principalement aux ARS.
La première partie de ce guide aborde les enjeux de transversalité et d’articulation du
SROS. En effet la loi HPST découpe le SROS en deux volets, l’un relatif à l’offre de soins
ambulatoire et l’autre relatif à l’offre de soins hospitalière. De plus, différents aspects
des modalités de coordination hôpital-ville sont évoqués, ainsi que les objectifs du SROS
pour chacun d’entre eux.
La partie 3.11 de ce guide, parle plus précisément des traitements du cancer. En effet,
les orientations nationales sont d’améliorer : l’accès aux soins, en garantissant un
parcours de soins personnalisé et coordonné comme cela était demandé dans le Plan
cancer 2009-2013 ; la qualité et la sécurité des prises en charge ; l’efficience, en
renforçant la coordination ville-hôpital avec des réseaux de santé territoriaux, avec
l’HAD et avec des maisons de santé pluri professionnelles, par exemple. Un des points
d’articulation avec la prévention et le médico-social est l’organisation de la coopération
hôpital-ville pendant et après le traitement du cancer. En effet, coordonner les acteurs
impliqués dans la prise en charge d’un patient atteint d’un cancer permet d’améliorer
la fluidité des prises en charge(16).
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1.4.2.2.
Réseaux Régionaux de Cancérologie
Les réseaux régionaux de cancérologie (RRC) sont évoqués pour la première fois dans la
mesure 29 du Plan cancer 2003-2007. Ils ont un rôle de coordination des soins à
l’échelle régionale, entre l’ensemble des acteurs de la prise en charge du patient
atteint de cancer, qu’ils se trouvent dans les établissements de soins ou en ville. Ils ont
également pour mission d’harmoniser et d’améliorer la qualité des pratiques, de
développer l’évaluation et de créer des outils de communication communs. Ils
permettent donc d’assurer la continuité des soins, depuis l’annonce du diagnostic
jusqu’au retour au domicile du patient. Tout établissement de santé qui traite des
malades atteints de cancer doit appartenir au RRC de sa région. D’autre part, le RRC
doit signer une convention avec l’ARS de sa région et l’INCa(5)(17).
La circulaire du 25 septembre 2007, qui définit l’organisation des RRC, a été rédigée par
la Direction de l’Hospitalisation et l’Organisation des Soins (DHOS) qui est devenue la
Direction Générale de l’Offre des Soins (DGOS), ainsi que par la Caisse Nationale de
l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS) et l’INCa. Le but des RRC est
d’offrir aux pathologies tumorales une organisation des soins avec une structure
régionale de partage des connaissances, de mise en commun des compétences, des
ressources techniques et des moyens.
En pratique, les RRC élaborent et valident des référentiels régionaux de cancérologie,
qui constituent des protocoles de référence et sont garants de la qualité et de la
cohérence des pratiques médicales. Ce sont des outils opérationnels qui comportent des
arbres décisionnels. Ces référentiels sont évolutifs et des procédures de mise à jour
doivent être prévues chaque fois que les recommandations nationales et internationales
connaissent des avancées diagnostiques et/ou thérapeutiques significatives, mais aussi
en fonction de l’évolution du contexte régional et/ou scientifique qui fera l’objet de
transmissions nationales, et, en tout état de cause, tous les deux ans. Le RRC doit
assurer la diffusion des référentiels auprès de tous ses membres et partenaires, et
notamment aux Centres de Coordination en Cancérologie (3C), aux réseaux territoriaux
de cancérologie, aux établissements de santé et aux professionnels de santé concernés
dont font partie les médecins traitants et les spécialistes libéraux. Le contenu de ces
référentiels régionaux doit également pouvoir être diffusé aux patients.
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Enfin, l’INCa assure la coordination nationale des RRC sur les missions précisées dans le
référentiel national, et l’accompagnement et l’animation des RRC sont réalisés par
l’INCa en concertation avec la DGOS et la CNAMTS et en lien avec les Maisons Régionales
de Santé (MRS)(18).
1.4.3. Au niveau des établissements
1.4.3.1.
Centre de Coordination en Cancérologie
D’après la mesure 32 du Plan cancer 2003-2007, tout établissement de santé prenant en
charge des patients atteints de cancer doit organiser ses activités de cancérologie dans
le cadre d’un Centre de Coordination en Cancérologie (3C). Il s’agit du pivot de
l’organisation territoriale en réseau puisqu’ils coordonnent les soins de support
oncologiques et en évaluent régulièrement le fonctionnement.
Leur mission principale est de coordonner médicalement la cancérologie au sein de
l’établissement. Ils doivent également s’assurer que tous les patients bénéficient d’une
Réunion
de
Concertation
Pluridisciplinaire
(RCP),
du
PPS
et
d’un
suivi
individualisé(5)(17).
1.4.3.2.
Département ou Service ou Fédération Interdisciplinaire de Soins
de Support pour le Patient en Onco-hématologie
En fonction de la taille des établissements, l’organisation pourra se faire sous forme de
Service (SISSPO), de Département (DISSPO) ou encore de Fédération (FISSPO) ou de Pôle
de soins de support. Il s’agit d’un regroupement d’unités fonctionnelles ou de services
n’appartenant pas aux mêmes institutions(10).
Les DISSPO ou les FISSPO, sont des exemples de guichets uniques qui permettent donc
de limiter les démarches et de rassembler les informations qui concernent les soins de
support. L’équipe du DISSPO et des différentes unités de l’établissement se réunissent
régulièrement afin de discuter des projets de soins des patients hospitalisés. Des
rencontres hebdomadaires sont également organisées avec les équipes d’hospitalisation
à domicile(2).
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1.4.4. Au niveau de l’Hôpital Nord Ouest
Pour terminer, la mise en place des soins de support s’est effectuée à l’échelle des
hôpitaux comme c’est le cas à l’Hôpital Nord Ouest (HNO). Grâce au Plan cancer de
2003-2007, une consultation d’annonce est systématiquement mise en place depuis
mars 2010 afin de soutenir et d’accompagner le patient et ses proches face au
diagnostic(17). Ensuite, tous les dossiers de nouveaux patients atteints de cancer, ainsi
que l’ensemble des changements de ligne de traitement, passent en RCP pour que les
professionnels de santé présents décident du parcours thérapeutique prévisionnel et en
effectuent une synthèse sous la forme d’un PPS. Le but de la RCP est de respecter
l’équité des soins, de faciliter la transmission d’informations et de permettre aux
médecins généralistes membres de réseau de soin de cancérologie de participer à la
décision(17).
Un carnet de liaison est ensuite remis au patient. Il contient le PPS, les éléments
principaux du dossier médical, ainsi que les ordonnances et les résultats d’analyses
biologiques récentes. Au centre de ce carnet, une partie liaison avec un diagramme de
soins de synthèse et des pages de correspondances médicales et paramédicales sont
présentes dans le but de faciliter l’échange d’informations entre professionnels de
santé. Une fiche de contact pour la ville et pour l’hôpital regroupe toutes les
coordonnées des professionnels de santé que le patient est amené à rencontrer. De plus
un calendrier prévisionnel permet au patient de visualiser les dates de ses prises de
sang, de ses cures de chimiothérapie et éventuellement de ses hospitalisations pour
bilan d’évaluation. Une fiche d’information et conduite à tenir rappelle au patient les
principaux effets indésirables des traitements anticancéreux et les conseils d’hygiène
de vie à respecter. Ensuite, une partie intitulée « dossier médical », résume les
antécédents du patient et l’histoire de sa maladie. Enfin, une courbe de poids, à
remplir par le patient, permet de détecter un éventuel état de dénutrition.
Les principales spécialités qui pratiquent l’oncologie sur l’établissement sont la
pneumologie, la gastro-entérologie, l’hématologie et la gynécologie. Un service
d’oncologie ambulatoire permet aux patients dont le traitement ne nécessite pas une
hospitalisation, de venir à l’hôpital sur la journée pour recevoir leur cure de
chimiothérapie. Dans ce cas, les patients effectuent leurs analyses biologiques la veille,
en laboratoire d’analyses médicales de ville, puis rencontrent le médecin en
consultation.
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Le jour prévu de la cure, le médecin effectue un examen clinique du patient et analyse
ses résultats biologiques. Il va notamment regarder l’état général du patient, son
capital veineux, mais aussi son poids et sa taille afin de définir sa surface cutanée. Une
fois que tous les critères sont validés, il établit la prescription de la chimiothérapie et
donne son feu vert médical. La prescription de la chimiothérapie est alors soumise à la
validation pharmaceutique. Une fois vérifiée, la prescription est préparée sous forme de
poches de chimiothérapie par les préparateurs en pharmacie hospitaliers, dans l’Unité
de Reconstitution Centralisée des Cytotoxiques (URCC) qui se trouve au sein de la
Pharmacie à Usage Intérieur (PUI). En 2014 la production de l’URCC a atteint 7500
préparations, avec une augmentation de 115% entre 2009 et 2014. La dispensation des
poches de chimiothérapie s’effectue ensuite au niveau du guichet de la PUI, auprès de
l’Infirmière Diplômée d’Etat (IDE) du service de soins. La dernière étape est
l’administration de la chimiothérapie par les IDE du service concerné.
L’HNO organise également des ateliers saveurs avec une diététicienne qui intervient
deux fois par semaine, dans la matinée. Son but est de faire participer les patients
présents dans le service d’oncologie ambulatoire et qui le souhaitent, à un atelier de
cuisine où la diététicienne propose des recettes adaptées aux patients atteints de
cancer. L’intérêt de cette activité est de leur faire retrouver goût à cuisiner leurs repas
même s’ils vivent seul, ou que leurs nausées sont trop importantes. Les recettes sont
élaborées pour être équilibrées mais enrichies en lipides et en protéines pour contrer la
perte de poids qui concernent souvent ces patients et qui peut être responsable d’une
dégradation de leur état général. Les recettes sont relativement simples et rapides à
réaliser et elles sont suivies d’une dégustation des plats. Cet atelier permet également
aux patients de passer un moment convivial et de leur changer les idées pendant
l’administration de leur chimiothérapie.
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2. A quels besoins les soins de support répondent-ils ?
2.1.L’impact des chimiothérapies sur la qualité de vie
2.1.1. Contexte
Le cancer est une maladie de plus en plus fréquente puisque, selon la Ligue contre le
cancer, un homme sur 2 et une femme sur 3 se verra diagnostiquer un cancer avant 85
ans(19). En 2012, le nombre de nouveaux cas de cancer en France métropolitaine est
estimé à 355 000, dont 200 000 chez l’homme et 155 000 chez la femme(20). C’est
également la première cause de mortalité en France avec plus 150 000 décès liés au
cancer chaque année(19).
A l’inverse, près de 58% des cancers sont aujourd’hui guéris, ce qui signifie que plus de
la moitié des patients vont vivre après un cancer(19). Les progrès réalisés dans la prise
en charge et le traitement de nombreux cancers ces dernières années ont permis
d’améliorer la survie et les conditions de vie des malades. Cependant tous les cancers
ne répondent pas aux traitements et les effets secondaires des thérapies peuvent
parfois être difficiles à supporter(21).
2.1.2. Concept de qualité de vie
En 1946, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a défini la santé comme un état de
complet bien-être physique, mental et social, qui ne consiste pas seulement en une
absence de maladie ou d’infirmité(22). C’est pourquoi l’optimisation de la qualité de
vie représente l’un des enjeux majeurs de la prise en charge des personnes atteintes
d’une maladie chronique et plus spécifiquement par le cancer.
Ainsi, le Plan cancer 2009-2013 et les différents plans nationaux qui concernent des
maladies chroniques, ont ciblé comme essentiels les enjeux de qualité de vie(21).
Le concept de la qualité de vie est employé en cancérologie depuis une trentaine
d’années.
A
l’époque,
elle
se
limitait
à
rechercher
l’absence
de
toxicité
médicamenteuse et seule la dimension physique était prise en compte.
Aujourd’hui, le concept de qualité de vie est une évaluation subjective et globale de la
vie du patient atteint de cancer.
34
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(CC BY-NC-ND 2.0)
Elle est subjective car c’est le patient lui-même qui évalue sa qualité de vie. Cette
évaluation doit être globale, en intégrant les dimensions physiques, psychologiques,
sociales voire spirituelles(21).
Une étude britannique a comparé l’état de santé et le bien être ressenti des patients
ayant survécu à un cancer, avec ceux des individus qui n’ont pas eu de cancer et ceux
des patients ayant une pathologie chronique sévère autre que le cancer. L’étude a
permis de définir 13 critères pour évaluer la santé et le bien-être ressenti par les
individus. Le résultat de l’étude montre que les patients ayant survécus au cancer sont
significativement plus susceptibles de déclarer des problèmes de santé parmi les 13
critères, que les individus n’ayant pas d’antécédent de cancer ou de pathologie
chronique. En revanche, l’état de santé des patients ayant survécu à un cancer est
similaire à celui des patients ayant une pathologie chronique sévère autre que le
cancer. L’étude a donc conclu qu’un nombre important de patients a un mauvais état
de santé et de bien-être après un cancer et des traitements anticancéreux. Dans ce
contexte, elle suggère de développer une aide et un soutien spécifiques pour les
patients ayant survécu au cancer(23).
2.1.3. Implication des traitements dans l’altération de la qualité de vie
Les nombreux effets délétères auxquels les personnes atteintes d’un cancer doivent
faire face, peuvent persister à plus ou moins long terme. Ils sont le plus souvent la
conséquence des traitements anticancéreux administrés(21).
En 2012, 273 892 patients ont été traités par chimiothérapie dans les établissements de
médecine, chirurgie, obstétrique (MCO). Ce nombre est en augmentation de 1 à 2%
chaque année depuis 2009(20). Dans le cadre de la deuxième enquête « La vie deux ans
après un diagnostic de cancer », 37.9% des personnes interrogées ont déclaré avoir reçu
une chimiothérapie et 1.5% ont refusé ce traitement(21).
Les thérapies ciblées ont l’avantage d’être mieux tolérées que les chimiothérapies
classiques. Elles se sont beaucoup développées ces dernières années. Entre 2004 et
2012, 41 molécules anticancéreuses ont obtenu une première autorisation de mise sur le
marché européenne centralisée en cancérologie, dont un peu plus de la moitié étaient
des thérapies ciblées.
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Avant 2004, seulement 4 molécules de thérapies ciblées avaient une AMM : 3 anticorps
monoclonaux (le rituximab, le trastuzumab, et l’alemtuzumab) et un Inhibiteur de la
Tyrosine Kinase (ITK) (l’imatinib)(20).
Cependant, malgré le développement des thérapies ciblées, les chimiothérapies
cytotoxiques traditionnelles restent le traitement médical de référence de nombreux
cancers(21).
2.2. Les effets indésirables des chimiothérapies
2.2.1. Généralités
Les médicaments de chimiothérapie ont la particularité d’agir sur les cellules dont le
renouvellement est rapide. Les cellules cancéreuses en font partie, mais les cellules
saines qui se multiplient rapidement peuvent également être touchées, ce qui entraîne
un certain nombre d’effets secondaires(24). En effet, une majorité de ceux-ci sont dus
à l’activité cytotoxique des chimiothérapies(25).
Les principales cellules concernées sont celles qui constituent les cheveux, les ongles,
le revêtement de la paroi du tube digestif, mais aussi les cellules de la moelle osseuse
qui fabriquent les cellules sanguines que sont les globules rouges, les globules blancs et
les plaquettes. Les effets secondaires à court terme peuvent se manifester lors de la
chimiothérapie, tout de suite après, ou seulement quelques semaines plus tard. Ils sont
en général temporaires(24).
Les plus fréquents sont les nausées et vomissements qui peuvent parfois être très
sévères. Leur délai d’apparition, leur durée et leur puissance sont variables selon la
molécule utilisée(25). La muqueuse digestive est également touchée par des
inflammations de la bouche que l’on appelle stomatites ou mucites buccales et par des
troubles du transit(24)(25). Les pathologies de la cavité buccale résultent soit de
l’action directe du traitement anticancéreux sur la sphère ORL, soit de complications
hématologiques de la chimiothérapie(26). Elles peuvent se présenter sous la forme de
lésions à l’intérieur de la bouche, d’aphtes ou de rougeurs et sont généralement
douloureuses(27).
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Les autres tissus les plus affectés sont les tissus hématopoïétiques avec une
myélotoxicité provoquant des neutropénies, voire des agranulocytoses, et plus
tardivement des thrombopénies et des anémies(25). Une aplasie médullaire peut
entraîner un risque d’infection grave en cas de neutropénie, mais aussi des ecchymoses
et des saignements en cas de thrombocytopénie et enfin une fatigue, une pâleur ou un
malaise en cas d’anémie(24). Cette toxicité est réversible, dose dépendante et non
cumulative. Il s’agit du principal facteur limitant de la chimiothérapie et la raison pour
laquelle les cures sont espacées. En effet, l’intercure permet la reconstitution des
cellules hématopoïétiques.
Une alopécie réversible peut apparaître dans les 10 jours à 2 mois suivant la cure de
chimiothérapie(25). Des troubles respiratoires tels qu’un essoufflement, une respiration
sifflante ou encore une toux peuvent également être observés. Des lésions au niveau
des nerfs peuvent s’exprimer sous la forme d’engourdissement ou de picotements dans
les mains et les pieds dans le cas d’une neuropathie périphérique, par des
bourdonnements ou des tintements d’oreille dans le cas d’acouphènes, ou encore par
une baisse d’audition en cas d’ototoxicité.
D’autre part, des réactions allergiques peuvent se manifester avec une difficulté à
respirer, une éruption cutanée, une urticaire, ou encore des rougeurs au niveau de la
face et du cou. Des symptômes pseudo-grippaux avec de la fièvre et des douleurs
musculaires et articulaires peuvent apparaître. Enfin, il peut y avoir une asthénie, des
malaises avec sensation de faiblesse, des œdèmes des membres inférieurs, ou une
perturbation du cycle menstruel chez la femme(24).
Les cytotoxiques freinent également les processus de cicatrisation et peuvent causer
des troubles de l’appétit avec notamment une perte d’appétit, un amaigrissement, des
altérations du goût et une augmentation de la soif(24)(25). Les thromboses veineuses
quant à elles peuvent être une complication du cancer lui-même mais les cytotoxiques
en augmentent également le risque.
Le traitement détruisant rapidement un grand nombre de cellules, il entraîne la
libération d’une importante quantité de produits de dégradation. Un syndrome de lyse
tumorale
est
donc
observé,
associant
une
hyperuricémie
et
des
troubles
hydroélectrolytiques tels que l’hyperkaliémie, l’hyperphosphorémie et l’hypocalcémie.
Il peut y avoir plusieurs conséquences, notamment une insuffisance rénale aiguë et des
troubles du rythme cardiaque ventriculaire(25).
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Enfin, la plupart des cytotoxiques administrés par voie veineuse sont irritants au niveau
du site d’administration, ce qui peut produire une douleur locale, une irritation et une
inflammation sous la forme de douleur et/ou de rougeur au point d’injection(24)(25).
De plus en cas d’extravasation, selon le produit utilisé, il peut y avoir des ulcérations
voire des nécroses sévères(25).
Les effets secondaires à long terme sont peu fréquents. Ils se manifestent bien après la
chimiothérapie et peuvent être définitifs. Les patients peuvent ressentir une fatigue
persistante, une perte de l’audition, un retentissement sur la vie sexuelle, une baisse
de la fertilité, une insuffisance rénale, une insuffisance cardiaque, une perte de la
motricité et de la sensibilité des mains et des pieds. Ces effets sont prévenus dans la
mesure du possible par une surveillance attentive tout au long des cycles de
chimiothérapie(24).
La toxicité sur la fertilité fait intervenir la destruction des cellules germinales qui peut
provoquer des azoospermies et des ménopauses précoces. Cet effet indésirable est
variable selon la molécule utilisée, la dose administrée et l’âge du patient. De plus, la
toxicité rénale est dose dépendante et varie selon la molécule utilisée, la toxicité
cardiaque peut être aiguë ou chronique et la neurotoxicité de type neuropathie est
cumulative(25).
Les effets secondaires de la chimiothérapie sont fréquents mais ils ne sont pas
systématiques. Ils dépendent surtout du type de médicament choisi, de la dose
administrée et de l’état de santé global de la personne malade. Ils peuvent être
variables d’une cure de chimiothérapie à l’autre. Les chimiothérapies n’entraînent pas
toutes des effets secondaires et cela ne signifie pas pour autant que le traitement est
inefficace. Lorsqu’ils sont présents, ils n’apparaissent pas tous en même temps.
Certains des effets secondaires peuvent être prévenus, limités, voire évités par des
soins et des médicaments adaptés. Il est important que les patients suivent les
recommandations qui concernent les effets secondaires puisqu’elles visent à améliorer
leur qualité de vie(24)(28).
Les mucites et les nausées et vomissements ont été choisis comme axe de travail car
leur prévention et leur traitement font intervenir une prise en charge médicamenteuse.
D’autre part, ce sont des effets indésirables aigus pour lesquels une prévention est
possible et efficace. Les professionnels de santé ont donc un rôle important à jouer
dans l’éducation des patients et avec les conseils hygiéno-diététiques associés.
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En pratique, les protocoles antiémétisants n’avaient pas été mis à jour depuis plusieurs
années à l’HNO. Ils intégraient les référentiels validés au moment de leur création et
seuls les protocoles les plus récents contenaient les recommandations des référentiels
actuels. Concernant les mucites, aucun travail spécifique n’avait été entrepris pour
créer des protocoles adaptés à leur prise en charge sur l’établissement.
2.2.2. Mucites
2.2.2.1.
Définition
La mucite est une toxicité induite par la chimiothérapie à la suite d’un processus
irritatif. Cette inflammation de la muqueuse qui recouvre l’intérieur des cavités et des
viscères peut s’étendre de la bouche à l’anus, en passant par le tractus gastrointestinal. Il s’agit d’une altération de l’épithélium et de l’ensemble des muqueuses et
du tissu conjonctif sous-jacent. Elle est caractérisée par un défaut de renouvellement
des cellules épithéliales, allant de l’atteinte superficielle à l’ulcération, voire à la
nécrose(26)(29)(30)(31)(32). Elle apparaît 7 à 14 jours après le cycle de traitement
anticancéreux et peut durer quelques semaines(33).
Les mucites buccales sont également appelées stomatites(29). Elles touchent la
muqueuse labiale, les surfaces buccales, le plancher de la langue et le palais. Elles
peuvent être associées à une dysphagie parfois totale(33). Les mucites gastrointestinales se présentent avec des symptômes de douleurs, de nausées, de
vomissements et de diarrhées(30).
Cet effet indésirable est invalidant pour le patient et douloureux dans ses formes les
plus sévères(26).
2.2.2.2.
Physiopathologie
La mucite est l’aboutissement d’une série d’événements et d’interactions biologiques
complexes qui se produisent à tous les niveaux de la muqueuse. Des études sur la
relation entre les cytokines pro-inflammatoires et la toxicité au niveau de la muqueuse
suggèrent que la mucite n’est pas juste un processus épithélial.
39
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En effet, l’augmentation des taux sanguins périphériques de TNF-α (tumor necrosis
factor-alpha) et d’IL-1 et IL-6 (interleukines 1 et 6) est corrélée avec le degré de
toxicité non-hématologique chez les patients sous chimiothérapie. De même, les taux
d’IL1-β et du gène d’expression du TNF-α au niveau de la muqueuse sont liés au
développement de mucites chez le modèle animal. Enfin, les molécules connues pour
diminuer l’expression de ces cytokines ont démontré leur efficacité dans la prévention
expérimentale et clinique des mucites.
L’atteinte de la muqueuse peut être schématisée en 5 phases : l’initiation, la
potentialisation avec la production de messagers, la transmission et l’amplification du
signal, l’ulcération avec l’inflammation et enfin la guérison(34).
Figure 2 : Physiopathologie de la mucite : un processus en 5 étapes(34)(35)
La phase 1 est la phase d’initiation, elle correspond aux lésions directes de la
chimiothérapie qui provoquent une altération des cellules et des brins d’ADN dans
l’épithélium basal et la sous-muqueuse. Des radicaux libres ou Reactive Oxygen Species
(ROS) sont générés et jouent un rôle de médiateur dans les événements biologiques des
phases ultérieures. Ils peuvent être responsables de dommages directs sur la muqueuse
et indirects par l’activation des facteurs de transcription(35).
La phase 2 est la phase de potentialisation ou réponse primaire. L’altération des
cellules et de l’ADN, ainsi que les ROS, activent une cascade de réponses qui entraîne la
production de cytokines pro-inflammatoires. Ces composés stimulent plusieurs voies
menant à des lésions ou à l’apoptose des cellules basales. L’activation indirecte des
facteurs de transcription et des macrophages est observée, ainsi que la formation et la
potentialisation de médiateurs à l’origine de dommages tissulaires complexes(35)(36).
40
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La phase 3 correspond à l’amplification du signal, c’est-à-dire que le processus
biologique au sein du tissu s’accélère pour conduire à l’ulcération(35)(36). La libération
de cytokines pro-inflammatoires endommage les cellules et fournit un feed-back positif
qui amplifie les lésions causées par la chimiothérapie(35).
La phase 4 est la phase d’ulcération. Elle est caractérisée par la colonisation
bactérienne du tissu ulcéré. Cette prolifération bactérienne va causer de nouveaux
dommages tissulaires et activer la production et la libération de cytokines proinflammatoires supplémentaires par les cellules mononucléaires infiltrantes. A ce stade,
il y a donc une augmentation du risque infectieux(35)(36).
Enfin, la phase 5 correspond à la cicatrisation pendant laquelle l’épithélium prolifère et
se différencie, pour aboutir au rétablissement de la flore microbienne locale(35)(36).
Bien que ce modèle semble linéaire, l’atteinte intervient très rapidement et
simultanément dans tous les tissus(34). La mucite est généralement un événement aigu
disparaissant progressivement après l’arrêt du traitement anticancéreux(35).
Ce modèle a été défini pour la muqueuse orale mais il peut aussi s’appliquer aux
muqueuses de l’ensemble du tube digestif. Contrairement à ce qui était pensé
auparavant, il n’y a pas de raison de supposer que la physiopathologie des mucites
gastro-intestinales est moins complexe que celle des mucites orales. Le développement
embryologique commun de l’ensemble du tractus gastro-intestinal rend probable que la
physiopathologie de base des mucites soit similaire, avec des différences locales dues à
la différenciation spécifique de chaque partie du tube digestif(34).
Les mucites gastro-intestinales, quant à elles, sont retrouvées au niveau de l’intestin
grêle, de l’œsophage, de l’estomac ou du gros intestin. Dans l’intestin grêle, les
molécules cytotoxiques agissent à différents niveaux de la hiérarchie cellulaire des
cryptes et conduisent à une hypoplasie suivie d’une régénération. Après la
chimiothérapie, une augmentation de l’apoptose est relevée dans l’intestin grêle au
premier jour de la chimiothérapie (J1), suivie d’une réduction de la longueur des
cryptes, de la surface des villosités et de l’index mitotique, qui atteignent leur point le
plus bas à J3. Il s’en suit une hyperplasie rebond à J5, puis une normalisation(34).
Néanmoins, Pritchard et al. ont montré qu’une augmentation de l’apoptose n’est pas
nécessairement corrélée avec la sévérité de la mucite déclarée, ce qui suggère une
contribution de p53 et p21(34)(37). Gibson et al. ont confirmé ceci chez un modèle de
rat(34)(38).
41
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D’autre part, le rapport de gènes pro-apoptotiques sur anti-apoptotiques est plus élevé
dans l’intestin grêle que dans le gros intestin, ce qui peut expliquer que les mucites s’y
développent différemment. Les rapports entre les gènes pro-apoptotiques et antiapoptotiques retrouvés aux différents niveaux du tractus gastro-intestinal sont
probablement en lien avec les différences fonctionnelles de ceux-ci. En effet, l’intestin
grêle reçoit potentiellement un grand volume de toxines, dont la plupart sont
neutralisées avant d’arriver dans le colon(34).
Le colon n’est donc pas considéré comme une zone particulièrement sensible aux
mucites chimio-induites(34). Gibson et al. ont relevé des atteintes de la crypte au
niveau du colon après un traitement par methotrexate et irinotecan, mais l’atteinte
observée était moins importante que celle relevée dans l’intestin grêle(34)(39).
La détérioration des cellules qui se divisent et se différencient rapidement par la
chimiothérapie conduit également à l’amincissement et à l’ulcération de l’épithélium
de l’œsophage. Le taux de prolifération des cellules du tissu conjonctif de la lamina
propria est modifié, ce qui se traduit par une augmentation de la perméabilité
vasculaire et un infiltrât inflammatoire. Ceci provoque ensuite une fibrose et une
ischémie tissulaire. Il y a peu d’informations dans la littérature concernant les mucites
de l’œsophage car la plupart des symptômes localisés au niveau de l’œsophage sont
généralement attribués à la maladie du reflux gastro-œsophagien, ou bien à une
infection virale ou fongique, qui peut, par ailleurs, coexister avec toute toxicité chimioinduite directe(34).
Enfin, peu de données existent concernant les mucites de l’estomac, cependant Sartori
et al. ont décrit des érosions gastriques après une chimiothérapie associant le
cyclophosphamide, le methotrexate et le 5-Fluoro-Uracile (5-FU), ou avec du 5-FU
seul(34)(40)(41).
2.2.2.3.
Evaluation de la mucite
Le grade de la mucite est évalué en fonction des possibilités d’alimentation orale, de la
déglutition et des douleurs bucco-pharyngées. Pour cela, 9 sites repères sont à
examiner : les lèvres, les joues, les faces ventrales et latérales de la langue, le plancher
buccal et le voile du palais(35).
42
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La classification des mucites se fait selon les National Cancer Institute, Common
Toxicity Criteria (NCI-CTC) et Radiation Therapy Oncology Group (RTOG) en 6 grades.
Les caractéristiques du grade 0 sont : une alimentation solide, l’absence de douleur et
une muqueuse d’aspect normal.
Pour le grade 1, l’alimentation est toujours solide, mais il y a des douleurs ainsi qu’un
énanthème, c’est-à-dire une rougeur de la muqueuse.
Pour le grade 2, l’alimentation solide est modifiée et des douleurs, un énanthème et
des ulcérations localisées, ou pseudo-membranes, sont observés.
Le grade 3 correspond à une impossibilité d’alimenter ou d’hydrater le patient de façon
adéquate par voie orale. Il y a également présence de douleurs, d’énanthèmes diffus et
d’ulcérations ou pseudo-membranes confluentes.
Lors du grade 4, il y a une aphagie et des douleurs et le pronostic vital est en jeu. Des
énanthèmes diffus et des nécroses tissulaires sont également observés.
Le grade 5 est défini par le décès du patient(35).
Il existe une seconde classification par l’OMS avec 5 grades(42). Ils correspondent aux
grades 0 à 4 de la classification NCI-CTC et RTOG.
Les critères d’évaluation des mucites utilisent la grille Oral Assessment Guide (OAG) qui
comprend 8 items (la voix, la déglutition, la langue, la salive, les muqueuses, les
gencives, les dents et les lèvres) et pour chacun d’entre eux, un outil de mesure, une
méthode de mesure et une graduation de 1 à 3. Les critères sont à évaluer deux fois par
jour.
Le score est obtenu en faisant la somme des différents items : un score de 8 correspond
à une bouche normale et le score le plus élevé, qui est 24, correspond à une bouche
très atteinte. Il est possible de choisir les items à réaliser en fonction de l’état du
malade : s’il est inconscient par exemple, certains items ne pourront pas être évalués.
En fonction du résultat, le type de soin (préventif ou curatif) et le rythme de réalisation
de ces soins sont déterminés(42). (ANNEXE 1)
Historiquement, la plupart des classifications de mucites sont basées sur celle
développée par l’OMS pour l’évaluation clinique des patients recevant une thérapie
anticancéreuse. De nombreuses classifications similaires ont ensuite été développées et
promues, comme celle du NCI-CTC qui est très utilisée dans le domaine de l’oncologie
par les groupes de coopération et les chercheurs.
43
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La classification NCI-CTC et celle de l’OMS utilisent les mêmes éléments de mesure, qui
sont les plus pertinents pour la gestion clinique des mucites. Les avantages de ces
classifications sont d’être largement utilisées dans le domaine de la recherche et dans
les établissements de soins, mais aussi de contenir des critères d’évaluation spécifiques
pour les patients sous radiothérapie de la tête et du cou, sous chimiothérapie, ou pour
ceux qui vont subir une greffe de cellules souches hématopoïétiques. L’inconvénient de
ces classifications est que le résultat n’est pas forcément révélateur de l’état du
patient car, pour un même score obtenu, la combinaison des symptômes, des signes et
des changements fonctionnels observés, peuvent être variables(34).
2.2.2.4.
Facteurs de risque
Les facteurs de risque des mucites sont pour une majorité liés au terrain de l’individu.
Parmi ceux-ci : le type de cancer, l’état nutritionnel, les traitements antérieurs et
associés, un déficit en acide folinique, en vitamine B12 ou en dihydropyrimidine
déshydrogénase,
l’état
oxydatif
tissulaire,
une
xérostomie
et
notamment
médicamenteuse due aux anti cholinergiques ou aux opiacés, certaines comorbidités
comme un diabète chez un patient de moins de 20 ans ou de plus de 65 ans, une
maladie cardio-pulmonaire, une insuffisance rénale ou une insuffisance hépatique, et
enfin l’âge, car après 55 ans le renouvellement des cellules épithéliales est moins
rapide(36)(43). Certains polymorphismes génétiques ont également été identifiés
comme influençant le métabolisme des agents cytotoxiques et donc leur toxicité(36).
Les facteurs favorisant l’apparition des mucites et qu’il faut éliminer sont : une
mauvaise hygiène buccale, l’alcoolisme et le tabagisme(43). L’état bucco-dentaire du
patient joue un rôle dans la survenue et la gravité des symptômes(26). D’autre part, la
neutropénie est un facteur aggravant pour les mucites(43). Enfin, la flore buccale
jouerait un rôle secondaire dans la physiopathologie des mucites(36).
Par ailleurs, la stomatite peut devenir plus sévère à chaque cycle de chimiothérapie, du
fait d’une cicatrisation partielle de la muqueuse buccale. La probabilité de survenue
d’une mucite et son grade de sévérité sont donc d’autant plus importants chez les
patients ayant des antécédents de mucites(36).
44
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Les mucites sont également plus fréquentes chez la femme et l’enfant à cause de la
vitesse de renouvellement plus rapide de la muqueuse, et le sujet âgé à cause du défaut
de clairance rénale augmentant la toxicité de la chimiothérapie(36).
2.2.2.5.
Epidémiologie et molécules à risque
Historiquement, l’épidémiologie des mucites a été biaisée par un certain nombre de
paramètres, dont la sous-déclaration, la variabilité des termes utilisés pour les décrire,
l’existence de différents critères et grilles d’évaluation, et la corrélation entre les
mucites et les autres séquelles cliniquement observées(34).
Elting et al. ont observé des mucites orales dans 22% des cures de chimiothérapie
myélosuppressive, des mucites gastro-intestinales dans 7% des cures, et à la fois des
mucites orales et gastro-intestinales dans 8% des cures(34)(43).
L’incidence des mucites est en général de 5 à 15%, sans compter l’allogreffe de cellules
souches hématopoïétiques et la radiothérapie de la tête et du cou(31)(44). Dans les cas
de conditionnement à la greffe de cellules souches hématopoïétiques, les taux de
mucites atteignent en moyenne 75 à 85%. Si l’irradiation corporelle totale y est
associée, les taux de mucites de grades 3 et 4 sont supérieurs à 60%. Dans le cas
contraire, les taux de mucites de grades 3 et 4 atteignent quand même les 30 à 50%(31).
Enfin, la radiothérapie de la tête et du cou provoque 100% de mucites orales, dont 60%
de grades 3 et 4(31).
Cette toxicité est dose-dépendante, mais aussi schéma-dépendante. En effet, il est
connu que l’utilisation de hautes doses peut augmenter le risque de mucites, mais
d’autre part l’association radio-chimiothérapie, les perfusions continues d’anti
métabolites et l’association de certains cytotoxiques entre eux, peuvent aussi aggraver
les mucites(33)(36).
Selon le Centre National Hospitalier d’Information sur le Médicament (CNHIM), les
principales molécules anticancéreuses impliquées dans les mucites sont : amsacrine,
bléomycine, busulfan, chlorméthine, cyclophosphamide, cytarabine, capécitabine,
daunorubicine,
docétaxel,
doxorubicine,
épirubicine,
étoposide,
5-fluorouracile
notamment en perfusion continue, hydroxyurée, idarubicine, melphalan, methotrexate,
paclitaxel, procarbazine.
45
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D’autre part, les anticancéreux sécrétés dans la salive, comme le méthotrexate et
l’étoposide, sont directement toxiques pour la muqueuse buccale(33).
Les études analysées révèlent que la plupart des traitements à base d’anthracyclines
sont associés à un taux de mucites buccales de grades 3 et 4 de l’ordre de 1 à 10%, sauf
quand le traitement contient du 5-FU. Des taux équivalents sont répertoriés pour les
traitements à base de taxanes et de platines, sauf s’ils sont associés au 5-FU(34).
Avec l’administration de 5-FU, le taux de mucites orales peut atteindre 40%, dont 10 à
15% de grades 3 et 4(31)(34)(44). Si le 5-FU est associé à la radiothérapie, les taux de
grades 3 et 4 sont supérieurs à 30%(31)(44). Avec l’administration d’irinotecan,
l’incidence des mucites gastro-intestinales est supérieure à 20%(34)(44).
Les thérapies ciblées sont également responsables de mucites dans environ 22% des cas,
et dans 41% des cas pour l’administration de temsirolimus(33).
Les nouvelles molécules, comme l’imatinib, sont associées à une très faible incidence
de mucites buccales et gastro-intestinales(34).
2.2.2.6.
Complications
Même si les taux de mucites orales ou gastro-intestinales de grades 3 et 4 ne sont que
de 5 à 15%, ils sont quand même significatifs cliniquement, à cause de la gravité des
conséquences pour les patients(34).
Les mucites se manifestent surtout par des douleurs, une dysphagie et une
dysphonie(45). Les complications possibles sont la dénutrition, la déshydratation, le
risque infectieux, surtout en cas de neutropénie, le risque hémorragique, et enfin un
risque de désocialisation, de détresse psychologique, de dépression, voire un pronostic
vital engagé(31)(36)(45). Parmi les patients recevant une dose standard de
chimiothérapie, 70% des patients avec une mucite orale de grade 3 ou 4 ont dû
bénéficier d’une nutrition entérale pour maintenir un apport suffisant, environ 60% des
patients ont eu de la fièvre, et l’état de 62% des patients a nécessité une
hospitalisation(34).
D’autre part, pendant les cures des patients présentant une mucite, l’incidence des
effets indésirables graves conduit à doubler le nombre moyen de jours d’hospitalisation
par cure(34). En effet dans une étude chez environ 600 patients, la durée moyenne
d’hospitalisation est de 8 jours chez les patients souffrant de mucites orales sévères,
versus 4 jours chez les patients sans mucite(45).
46
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Les traitements nécessaires et l’augmentation de la durée de l’hospitalisation ont pour
conséquence un surcoût dans la prise en charge de ces patients(31).
La fatigue est également un signe plus fréquent dans les cures des patients avec
mucite, que dans les cures des patients sans mucite(34).
Chez certains patients, les mucites sévères peuvent devenir un facteur limitant en
nécessitant la réduction des doses de chimiothérapie ou une pause dans le traitement,
ce qui peut influencer négativement le pronostic et conduire à une perte de contrôle de
la maladie(30)(31)(34). En effet, la cure suivante de chimiothérapie a dû être retardée
pour environ 35% des patients ayant des mucites de grades 3 et 4, les doses de
chimiothérapie ont été réduites pour environ 60% des patients, et le traitement a dû
être interrompu pour environ 30% des patients(34). Au total, cela revient à une
modification du protocole du traitement anticancéreux chez environ un tiers des
patients(45).
Les mucites peuvent entraîner des modifications du goût, de la salivation et des
douleurs intenses. La perturbation de la salivation, à plus long terme, peut favoriser le
développement des caries, le déchaussement des dents et des ostéonécroses(46).
D’autre part, si la douleur est importante, cela peut compromettre l’apport nutritionnel
et la qualité de vie du patient à cause d’une dysphagie(26)(30).
Parmi les patients avec une tumeur solide recevant une chimiothérapie, des infections
sont apparues dans 73% des cures compliquées par une mucite, et dans seulement 36%
des cures sans mucite, avec une myélosuppression similaire(34).
Les infections buccales, et notamment les candidoses oropharyngées, sont fréquentes et
exposent également à un risque de dénutrition. Cependant, le principal facteur de
gravité reste le risque de dissémination systémique(26)(33). En effet, les mucites
peuvent constituer une porte d’entrée pour les infections bactériennes et mycotiques,
en particulier chez les patients en neutropénie, chez lesquels il y a un risque important
de sepsis(26)(34)(46). De plus, la xérostomie est un facteur qui, associé aux
complications hématologiques de la chimiothérapie, favorise la survenue d’infections
fongiques(26).
Les signes cliniques des candidoses buccales sont un enduit blanc sur fond de muqueuse
érythémateuse, une perlèche et une coloration de la langue(33).
47
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(CC BY-NC-ND 2.0)
Les infections virales, notamment à Herpes Simplex Virus (HSV), sont quant à elles très
fréquentes chez les malades greffés et elles sont plus douloureuses et prolongées que
les autres infections buccales(33).
Par ailleurs, dans un contexte de mucite associée, l’état dentaire du patient peut se
compliquer d’hémorragies(26). En cas d’hémorragie grave, une intubation préventive
peut être mise en place pour protéger les voies aériennes(45).
2.2.3. Nausées et vomissements
2.2.3.1.
Définition
La nausée est une sensation de malaise général avec envie de vomir et dégoût de la
nourriture, souvent associée à une stase gastrique et à des crampes de l’épigastre. Elle
peut être accompagnée de sueurs froides, pâleur, salivation, diarrhées, tachycardie ou
palpitations. Elle est passagère lorsqu’elle précède le vomissement, ou bien
permanente. Ce symptôme est plus difficile à traiter que les vomissements, notamment
parce qu’il est subjectif et peu quantifiable(47)(48). En effet, selon l’American Society
of Clinical Oncology (ASCO), les cliniciens sous estiment l’incidence des nausées et elles
ne sont pas aussi bien contrôlées que les vomissements(49).
Le vomissement correspond quant à lui à l’expulsion du contenu gastrique par la
bouche, suite à une violente contraction du diaphragme et de l’estomac avec ouverture
du cardia. Parallèlement, la respiration est modifiée de façon réflexe et une
hyperexcitation vagale provoque une hypersalivation et une bradycardie(47)(48).
La chimiothérapie anticancéreuse peut provoquer des nausées et des vomissements,
qu’elle soit sous forme de comprimés ou administrée en perfusion. Les nausées
débutent souvent le soir ou le lendemain de l’administration et ne persistent
généralement pas plus de 3 jours, soit 72 heures. Les vomissements quant à eux ne sont
pas systématiques et ils ne persistent en général pas plus de 48 heures après le
traitement(50)(51).
Il existe 5 types de Nausées et Vomissements Chimio-Induits (NVCI) : anticipés, aigus,
retardés, non maîtrisés et réfractaires.
48
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(CC BY-NC-ND 2.0)
Les NVCI anticipés se produisent typiquement avant même l’administration de la
chimiothérapie. Ils sont provoqués par des stimuli externes et potentialisés par
l’appréhension et l’anxiété du patient(47).
Ce type de NVCI se manifeste dans environ 25% des cas, même si l’incidence peut varier
de 20 à 60%. Les nausées anticipatoires sont fréquentes puisqu’elles apparaissent chez
29% des patients, soit 1 patient sur 3, alors que les vomissements anticipatoires se
produisent seulement chez 11% des patients, soit 1 patient sur 10.
Ils sont plus particulièrement présents chez les patients ayant eu un mauvais contrôle
de cet effet indésirable lors d’un cycle antérieur. La principale méthode pour les
maîtriser consiste donc à contrôler autant que possible les nausées et les vomissements
aigus(47)(48)(33)(52)(53).
Ensuite, parmi les NVCI post-administration, les NVCI aigus sont ceux qui apparaissent
dans les 24 heures et les NVCI retardés ceux qui se produisent après les 24 premières
heures. Même s’il n’y a pas de limite dans le temps pour cette dernière catégorie, ils
s’arrêtent généralement après 96 heures.
Les NVCI aigus sont parfois immédiats, comme avec l’actinomycine D ou la
chlorméthine, mais en général le pic d’apparition se situe entre 5 et 6 heures après
l’administration de la chimiothérapie. Avec le cisplatine et le cyclophosphamide, leur
apparition peut être plus tardive, avec un pic situé entre la 12ème et la 24ème heure.
Le pic des NVCI retardés se situe entre 48 et 72 heures. Dans le cas du cisplatine, les
nausées et vomissements peuvent persister pendant une semaine(33)(47)(48)(54).
L’importance des NVCI retardés est inversement proportionnelle à la maîtrise des NVCI
aigus. En effet, un bon contrôle des NVCI aigus permet de prévenir avec efficacité les
symptômes retardés.
Le cisplatine, le carboplatine, le cyclophosphamide, la
doxorubicine, l’ifosfamide et l’association de cyclophosphamide et d’anthracyclines
sont les traitements les plus susceptibles de provoquer des NVCI retardés, notamment si
les doses sont élevées ou si l’administration a lieu sur au moins 2 jours
consécutifs(47)(48)(53).
L’incidence des NVCI aigus et retardés a été étudiée sur des protocoles de
chimiothérapie hautement et modérément émétisants, chez des patients provenant de
6 pays différents. Les résultats ont montré qu’en moyenne 59% des patients ont eu des
NVCI retardés et 36% des NVCI aigus, dont plus de 35% des nausées aiguës et 13% des
vomissements aigus. Chez les patients recevant une chimiothérapie hautement
émétisante, 60% ont eu des nausées retardées et 50% des vomissements retardés.
49
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(CC BY-NC-ND 2.0)
Chez les patients recevant une chimiothérapie modérément émétisante, 52% ont eu des
nausées retardées et 28% des vomissements retardés(53).
Ensuite, il y a les NVCI non maîtrisés, qui se produisent malgré une prophylaxie
adéquate. Ils nécessitent une thérapie de secours et, selon la situation, une
modification ou une prolongation de la prophylaxie(47).
Enfin, il y a les NVCI réfractaires qui sont ceux qui ne répondent pas à une thérapie
habituelle, même si celle-ci est a priori bien menée(47)(54).
2.2.3.2.
Physiopathologie
Le réflexe émétique est un mécanisme complexe de protection de l’organisme contre
un poison ingéré. Il est déclenché par l’excitation du centre de vomissement situé dans
le tronc cérébral, au niveau du mésencéphale. Le centre du vomissement a été
découvert en 1892 par Thumas, puis exploré en 1923 par Hatcher et Weiss. Il est
également appelé Central Pattern Generator (CPG). Actuellement, il n’est pas considéré
comme une zone anatomique bien définie, mais plutôt comme un réseau de neurones
interconnectés qui pénètrent dans le Noyau du Tractus Solitaire (NTS)(48)(55)(56).
Le CPG, ou centre du vomissement, est stimulé par deux voies principales. La première
est une voie d’origine périphérique constituée de neurones vagaux afférents(56).
Hatcher et Weiss ont constaté que ces noyaux sensitifs du nerf vague jouent un rôle
important dans la physiopathologie des NVCI(55). La stimulation des récepteurs, en
particulier 5-HT3, provoque un potentiel d’action qui va ensuite remonter le long de la
moelle épinière. Ce stimulus afférent arrive finalement dans le tronc cérébral dorsal, au
niveau du NTS, où il active le CPG et induit en retour une sensation de nausée et de
vomissement(57).
La deuxième voie, d’origine centrale et issue de l’area postrema, est également
appelée « zone gâchette » ou Chemoreceptive Trigger Zone (CTZ). L’area postrema est
une zone du tronc cérébral située dans le plancher du quatrième ventricule(56). Wang
et Borison ont identifié la zone de déclenchement des chimiorécepteurs en dehors de la
barrière hémato-encéphalique. L’area postrema est donc sensible à la fois aux stimuli
émétisants provenant du sang et à ceux provenant du liquide céphalo-rachidien(55).
50
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La barrière hémato méningée est donc poreuse au niveau de l’area postrema et les antitumoraux ou leurs métabolites peuvent stimuler directement les neurones de la
CTZ(56). La CTZ envoie ensuite des influx nerveux au CPG, lequel provoque une
stimulation vagale efférente et ainsi le réflexe de vomissement(48).
Ce mécanisme dépendant des voies vagales motrices est considéré comme prédominant
à la phase aiguë(56).
Figure 3 : Mécanisme pharmacologique des nausées et vomissements
Le mécanisme des NVCI implique la libération de neurotransmetteurs, comme la
dopamine, la sérotonine et la substance P, qui se lient aux récepteurs localisés au
niveau périphérique ou au niveau du Système Nerveux Central (SNC), pour transmettre
l’influx nerveux(55). Les récepteurs centraux sont situés au niveau de la CTZ, tandis que
les récepteurs périphériques sont essentiellement gastro-intestinaux mais aussi
vestibulaires, corticaux, gustatifs et olfactifs(48).
Par exemple, l’activation des récepteurs D2 par la dopamine au niveau de l’area
postrema déclenche un réflexe émétique(57).
La substance P, quant à elle, active les récepteurs NK1 présents dans le NTS(55).
D’autres neurotransmetteurs sont également impliqués dans l’arc réflex émétique, dont
l’histamine, l’acétylcholine, les endorphines, l’acide gamma-aminobutyric et les
cannabinoïdes(55).
51
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En pratique, les anti-tumoraux stimulent la libération de neuromédiateurs par les
cellules entérochromaffines présentes dans la partie supérieure de l’intestin grêle, soit
par le biais de mécanismes muqueux directs, soit par des mécanismes d’origine
sanguine. Une fois libérés, ces médiateurs se lient aux récepteurs présents sur les
extrémités terminales des voies vagales afférentes, en particulier sur les récepteurs 5HT3, NK1 et ceux à la cholécystokinine(56).
La
lyse
des
cellules
entérochromaffines
entraîne
ensuite
la
libération
des
neuromédiateurs et en particulier de la sérotonine qui joue le rôle le plus
important(48)(56). En effet, les cellules entérochromaffines sont très riches en
sérotonine puisqu’elles synthétisent et stockent 90% de la sérotonine du tractus gastrointestinal. Elles ne représentent que 1% des cellules épithéliales intestinales mais avec
une densité plus élevée au niveau du duodénum et du rectum.
La sérotonine stimule plusieurs types de récepteurs localisés au niveau du système
nerveux entérique, des muscles intestinaux et des cellules sécrétrices. Elle joue donc un
rôle dans la motilité intestinale en régulant l’activité des ganglions entériques grâce aux
récepteurs 5-HT3 et 5-HT4 et en contractant les muscles lisses intestinaux, gastriques et
œsophagiens grâce aux récepteurs 5-HT2.
Le réflexe péristaltique est activé par stimulation de fibres nerveuses sensitives tout au
long du tube digestif lors du passage du bol alimentaire. La sérotonine libérée par les
cellules entérochromaffines participe à cette stimulation en se liant aux récepteurs 5HT3 et 5-HT4 situés sur les fibres sensitives. Ce réflexe correspond schématiquement à
une contraction des muscles circulaires en amont du bol alimentaire et à une relaxation
en aval. Ainsi, les agonistes 5-HT3 et 5-HT4 sont susceptibles d’augmenter le transit et
parallèlement d’augmenter les sécrétions muqueuses, mais, en contrepartie, ils
augmentent également les sensations douloureuses. Les agonistes 5-HT4 sont
particulièrement efficaces au niveau de l’œsophage avec un effet anti-reflux par
stimulation de la motricité du tube digestif.
Au contraire, les antagonistes ralentissent donc le transit intestinal et diminuent les
sécrétions muqueuses et les douleurs intestinales.
Le système nerveux entérique comporte, en plus des fibres motrices parasympathiques
(vagales) et des fibres sympathiques, de nombreux petits neurones peptidergiques,
notamment opioïdes(57).
52
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Concernant le mécanisme des nausées et vomissements anticipés, plusieurs hypothèses
ont été proposées. La plus probable est le conditionnement classique, aussi connu sous
le nom de conditionnement pavlovien ou de l’intimé. Le principe du conditionnement
classique est qu’un stimulus précédemment neutre suscite une réponse conditionnée
après un certain nombre d’appariements ou d’essais d’apprentissage.
Dans le cadre d’une chimiothérapie, les premières perfusions sont les essais
d’apprentissage. Les médicaments sont les stimuli inconditionnels qui provoquent les
nausées et vomissements post-chimiothérapie. Ces médicaments sont ensuite associés à
une variété d’autres stimuli environnementaux, comme une odeur, une personne ou un
endroit. Ces stimuli, neutres au départ, deviennent alors des stimuli conditionnés et
suscitent des nausées et vomissements anticipés lors des prochains cycles de
chimiothérapie. Les nausées et vomissements anticipés sont donc une réponse acquise
qui, dans d’autres situations de la vie courante, comme une intoxication alimentaire,
conduit l’organisme à une réaction d’évitement.
Une série d’études empiriques confirment cette théorie de conditionnement classique.
Notamment par le fait que la prévalence des nausées et vomissements anticipés avant
toute chimiothérapie est très rare et que peu de patients ont des nausées et
vomissements anticipés sans avoir eu de nausées et vomissements post-chimiothérapie
lors d’une cure précédente. Par ailleurs, la plupart des études ont montré une
augmentation de la probabilité de nausées et vomissements anticipés avec le nombre de
perfusions de chimiothérapie reçues par le patient, ainsi qu’une augmentation de
l’intensité de ces derniers à mesure que les patients se rapprochent du moment de leur
perfusion(53).
2.2.3.3.
Evaluation
Le NCI a élaboré la dernière version de la classification CTC pour les effets indésirables
en juin 2010(36). Elle classe les nausées selon 3 grades et les vomissements selon 5
grades. Les nausées de grade 1 consistent en une perte d’appétit sans modification des
habitudes alimentaires. Celles de grade 2 sont caractérisées par une réduction des
apports alimentaires sans perte de poids, ni déshydratation ou dénutrition significatives
et/ou avec une hydratation intraveineuse pendant moins de 24 heures. Enfin, le grade 3
correspond à un apport calorique ou hydrique insuffisant nécessitant une hospitalisation
pour hydratation intraveineuse ou nutrition parentérale totale pendant au moins 24
heures(36)(54).
53
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Concernant les vomissements, il y a le grade 1 de un à deux vomissements par 24
heures, le grade 2 de trois à cinq vomissements par 24 heures avec une hydratation
intraveineuse pendant moins de 24 heures et le grade 3 qui correspond à plus de 6
vomissements par 24 heures avec une nécessité d’hospitalisation pour hydratation
intraveineuse et/ou une nutrition parentérale totale pendant au moins 24 heures.
Chaque épisode de vomissements doit être séparé d’au moins 5 minutes pour être
comptabilisé en tant que tel. Le grade 4 est atteint lorsque le risque vital du patient est
engagé avec des mesures de réanimation nécessaires et enfin le grade 5 correspond au
décès du patient(36)(54).
Selon l’OMS, le grade 1 des NVCI correspond aux nausées, le grade 2 à des vomissements
transitoires, le grade 3 à des vomissements nécessitant un traitement antiémétique et
le grade 4 à des vomissements incoercibles(33).
Outre ces classifications, il est indispensable d’analyser les caractéristiques des nausées
et vomissements : leur quantité, leur nature, leurs circonstances et horaires de
survenue. L’inconfort du malade doit également être évalué à l’aide d’échelles d’autoou d’hétéro-évaluation(48).
L’outil antiémétique de la MASCC ou MASCC Antiemetic Tool (MAT) est une application
pour smartphone destinée aux patients recevant une chimiothérapie et qui a pour but
d’aider les médecins à évaluer si, et à quel point, le traitement anticancéreux est à
l’origine de nausées et vomissements. Il s’agit d’un questionnaire développé et validé
par la MASCC, qui se compose de 4 questions sur l’intensité et la fréquence des nausées
et/ou vomissements après une séance de chimiothérapie. En remplissant le MAT, les
patients ont la possibilité d’envoyer les résultats aux professionnels de santé en temps
réel pour permettre un suivi et une gestion rapide de cet effet indésirable(58).
2.2.3.4.
Facteurs de risque liés au patient
Le facteur principal de NVCI est le risque émétogène de la chimiothérapie administrée.
Cependant il existe également des facteurs individuels qui augmentent également le
risque de NVCI : avoir moins de 55 ans, être une femme, avoir des antécédents de
nausées gravidiques et/ou de mal des transports, être de nature anxieuse, penser être à
haut risque de NVCI et avoir des antécédents de NVCI lors d’une précédente cure de
chimiothérapie(54)(56).
54
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L’incidence et la sévérité des nausées et vomissements lors des précédents cycles de
chimiothérapie est à prendre en compte puisque les patients dont les NVCI ont été mal
contrôlés lors de leur cure de chimiothérapie, sont plus susceptibles d’en avoir à
nouveau lors du cycle suivant(53). La première cure de chimiothérapie est très souvent
déterminante dans le succès ou l’échec du contrôle des nausées et vomissements lors
des chimiothérapies ultérieures(48).
D’autre part, l’état d’anxiété au moment des perfusions de chimiothérapie et
l’appréhension du patient vis-à-vis des NVCI sont des facteurs prédictifs de NVCI postchimiothérapie. Cependant, la crainte des patients est un facteur difficile à étudier car
c’est un sentiment qui peut évoluer au fil des cures : en effet si les NVCI sont mieux
contrôlés
par
un
traitement
antiémétique,
ce
sentiment
va
diminuer
et
inversement(53). Le risque de NVCI est également augmenté chez les sujets souffrant
de dégoûts alimentaires avant le traitement et chez les malades ayant des pathologies
associées. Les facteurs de stress comme le bruit, les odeurs écœurantes, l’attente
prolongée et la promiscuité aggravent ces troubles digestifs(48).
Enfin, un système nerveux autonome plus réactif, un pourcentage élevé de perfusions
de chimiothérapie suivie de nausées, les vertiges et/ou étourdissements postchimiothérapie, un faible temps de latence entre l’administration de la chimiothérapie
et l’apparition des nausées et vomissements, sont d’autres facteurs favorisant les
NVCI(53).
Plusieurs facteurs ont été étudiés comme pouvant avoir une incidence sur les NVCI
anticipés. Par exemple, un âge inférieur à 50 ans, des nausées et vomissements après la
dernière séance de chimiothérapie, un sentiment de chaleur après la dernière séance
de chimiothérapie, une sensibilité au mal des transports et une transpiration ou une
faiblesse généralisée après la dernière séance de chimiothérapie sont des facteurs qui
semblent augmenter le risque de NVCI anticipés. Un patient avec moins de 3 de ces 8
critères a donc peu de risque de développer des NVCI anticipés(53).
D’autres étiologies doivent aussi être évaluées et prises en charge avant la
chimiothérapie pour diminuer le risque de NVCI : l’obstruction partielle ou complète du
transit intestinal, un dysfonctionnement vestibulaire, des métastases cérébrales, un
déséquilibre électrolytique ou des traitements associés de type opiacés(33).
55
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(CC BY-NC-ND 2.0)
2.2.3.5.
Facteurs protecteurs liés au patient
L’intoxication alcoolique est un facteur qui diminue le risque de NVCI(54). En effet, ils
sont moins fréquents chez les patients ayant des antécédents d’alcoolisme chronique,
c’est-à-dire pour une consommation supérieure à 100g d’alcool ou un mélange d’au
moins cinq alcools par jour(53)(48).
Des facteurs environnementaux jouent également un rôle dans la tolérance digestive
des chimiothérapies, comme la qualité de l’accueil, de l’information, le type
d’hospitalisation, le transport et les activités de détente proposées (lecture, musique,
télévision, mots croisés). L’entourage familial, les repas conviviaux et les aliments bien
présentés et variés sont également des éléments positifs.
Enfin comme cela a été vu, le contrôle efficace des NVCI lors de la première cure de
chimiothérapie est très souvent déterminant pour les chimiothérapies ultérieures(48).
2.2.3.6.
Facteurs de risque liés au traitement
Les facteurs de risque liés au traitement sont fonction du potentiel émétisant des
molécules et de la dose de la chimiothérapie(53)(56). En effet, le type, la dose et le
mode d’administration de la chimiothérapie jouent un rôle dans l’apparition de
NVCI(36). Par exemple, les fortes doses sont plus émétisantes que les doses dites
standard ou conventionnelles et les injections continues sont en principe mieux tolérées
que les bolus. D’autre part, les administrations sur plusieurs jours déclenchent moins de
NVCI que la même dose de chimiothérapie délivrée sur une seule journée(48).
Les molécules utilisées dans les chimiothérapies sont classées en 4 catégories :
hautement émétisantes, modérément émétisantes, faiblement émétisantes et très
faiblement émétisantes. En fonction de leur catégorie, la prise en charge des NVCI sera
différente.
La MASCC et l’European Society for Medical Oncology (ESMO) ont publié des
recommandations en 2010 qui ont été mises à jour en 2013. Le référentiel interrégional
de l’AFSOS a pour référence celles de 2010.
Au niveau national, la Société Française de Pharmacie Oncologique a coopéré avec le
CNHIM pour publier leurs recommandations.
56
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(CC BY-NC-ND 2.0)
Tableau 1 : Médicaments hautement émétisants
Recommandations MASCC et ESMO
Molécules ajoutées par la SFPO et le CNHIM
2010 (source de l’AFSOS)(59)
2013(33)
cisplatine, cyclophosphamide
Médicaments
>1.5g/m², carmustine,
injectables
dacarbazine, mechlorethamine,
streptozocine
Médicaments per os
altrétamine, chlorméthine, procarbazine,
association anthracyclines (daunorubicine,
doxorubicine, épirubicine, idarubicine,
mitoxantrone, doxorubicine liposomale) +
cyclophosphamide
hexamethylmelamine, procarbazine
Tableau 2 : Médicaments modérément émétisants
Recommandations MASCC et ESMO 2010
(source de l’AFSOS)(59)
alentuzumab, azacitidine, bendamustine,
carboplatine, clofarabine,
Médicaments
injectables
cyclophosphamide <1.5g/m², cytarabine
>1g/m², daunorubicine, doxorubicine,
epirubicine, idarubicine, ifosfamide,
irinotecan, oxaliplatine, temozolomide,
trabectédine
Médicaments per os
Molécules
Molécules ajoutées
retirées par la
par la SFPO et le
MASCC et l’ESMO
CNHIM en 2013(33)
en 2013(60)
amsacrine, busulfan,
dactinomycine,
fotémustine,
temozolomide,
lomustine,
trabectédine
melphalan,
méthotrexate >1g/m²
cyclophosphamide, temozolomide,
vinorelbine, imatinib
57
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(CC BY-NC-ND 2.0)
Tableau 3 : Médicaments faiblement émétisants
Molécules
Molécules
Molécules
Recommandations MASCC et
ajoutées par
retirées par la
ajoutées par la
ESMO 2010 (source de
la SFPO et le
MASCC et
MASCC et
l’AFSOS)(59)
CNHIM
l’ESMO en
l’ESMO en
201(33)
2013(60)
2013(60)
bortézomib, cabazitaxel,
Médicaments
injectables
catumaxumab, cetuximab,
bexarotène,
cytarabine <1g/m², docétaxel,
nilotinib,
doxorubicine liposomale pégylée,
pazopanib,
étoposide, eribuline, 5-
thiotépa,
fluorouracile, gemcitabine,
topotécan per
methotrexate, mitomycine,
os, trétinoïne,
mitoxantrone, paclitaxel,
vandetanib,
panitumumab, pemetrexed,
vindésine,
temsirolimus, topotécan,
vorinostat
cabazitaxel,
éribuline
ixabépilone
trastuzumab
capécitabine, fludarabine,
Médicaments per os
étoposide, sunitinib, éverolimus,
tegafur uracile
lapatinib, lénalidomide,
thalidomide
Tableau 4 : Médicaments très faiblement émétisants
Molécules
Molécules
Recommandations
Molécules ajoutées par la
retirées par
ajoutées par
MASCC et ESMO 2010
SFPO et le CNHIM en
la MASCC et
la MASCC et
(source de l’AFSOS)(59)
2013(33)
l’ESMO en
l’ESMO en
2013(60)
2013(60)
asparaginase, bortézomib,
bévacizumab,
bléomycine, busulfan, 2Médicaments
chlorodéoxyadénosine,
injectables
fludarabine, ipilimumab,
vinblastine, vincristine,
vinflunine, vinorelbine
cétuximab, cladribine,
dasatinib, décitabine,
gemtuzumab ozogamycine,
lapatinib, lénalidomide,
mercaptopurine, nélarabine,
ipilimumab,
vinflunine
ofatumumab, panitumumab,
pentostatine, rituximab,
thalidomide, trastuzumab
chlorambucil, erlotinib,
gefitinib, hydroxyurée,
Médicaments per os
méthotrexate, L-
melphalan
melphalan
phénylalaline mustard,
sorafenib, 6-thioguanine
58
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(CC BY-NC-ND 2.0)
2.2.3.7.
Complications
Les NVCI peuvent avoir des répercutions sur la qualité de vie, les activités quotidiennes
et professionnelles et la vie sociale et relationnelle. Ils peuvent également induire des
complications métaboliques graves(36)(47)(54).
Un mauvais contrôle des NVCI peut avoir des conséquences néfastes sur le patient,
comme favoriser l’anxiété ou détériorer l’état physique et mental avec un
retentissement psychologique sur le malade et son entourage ainsi qu’une dégradation
de l’autonomie et des capacités fonctionnelles.
D’autre part, il y a un risque de retentissement nutritionnel avec dénutrition, perte de
poids, faiblesse, déshydratation, hypoglycémie, voire des troubles métaboliques graves.
Ensuite, les NVCI peuvent amener à retarder ou à réduire les doses, voire à suspendre le
traitement anticancéreux, alors que celui-ci est potentiellement curatif. Ils peuvent
également empêcher l’assimilation d’un traitement par voie orale, qu’il soit
anticancéreux ou non(47)(53)(48).
Il arrive également que la chimiothérapie provoque un goût métallique dans la bouche
et masque la saveur des aliments. Les patients peuvent également se plaindre
d’anorexie, de satiété précoce ou de sensation de plénitude(47).
Enfin certains troubles peuvent venir compliquer la situation, comme les fausses-routes,
les pneumopathies de déglutition, les brûlures œsophagiennes, les hémorragies
digestives, les perforations de l’œsophage, les fractures et la déhiscence des
plaies(53)(48).
59
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3. Prise en charge des mucites chimio-induites
3.1.Objectifs
Les objectifs fixés dans cet axe de travail sont :
-
d’améliorer la prise en charge des mucites et autres problèmes de bouche
entraînés par les protocoles de chimiothérapie,
-
de mettre à jour les protocoles de prévention et de traitement des mucites et
des autres problèmes de bouche sur l’établissement
-
et enfin de communiquer sur la prévention des mucites et autres problèmes de
bouche auprès des patients et des professionnels de santé.
La prise en charge des mucites dans le cadre d’une radiothérapie et le cas particulier de
la prise en charge pédiatrique ne seront pas traités dans ce travail.
3.2.Matériels et méthodes
3.2.1.
Références
Les recommandations MASCC/International Society of Oral Oncology (ISOO) définissent
les recommandations concernant les soins de base à effectuer pour prévenir et traiter
les mucites orales(31).
Au cours de la dernière décennie, d’autres organisations ont également publié des
recommandations contre les mucites, comme l’ESMO, qui a suivi celles de la
MASCC/ISOO, et la US Nation Comprehensive Cancer Network, qui a combiné les
recommandations
de
la
MASCC/ISOO
avec
des
avis
d’experts.
Ainsi,
les
recommandations pour les mucites de la MASCC/ISOO sont les recommandations de
référence pour la pratique clinique. Suite au grand nombre de documents publié depuis
la dernière mise à jour, la MASCC a entrepris une révision de ses recommandations en
2014(30).
Le référentiel interrégional de l’AFSOS de 2010 est la principale référence utilisée qui
sera adaptée en fonction des recommandations plus récentes, ou selon ce qu’il est
possible de réaliser en pratique.
60
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3.2.2.
3.2.2.1.
Mesures préventives
Bilan bucco-dentaire
Quel que soit le type de traitement anticancéreux et la localisation du cancer, il est
nécessaire d’effectuer un bilan et une remise en état bucco-dentaire au moins 3
semaines avant le début de la chimiothérapie(44)(61). En premier lieu, un examen
clinique et radiologique est toujours effectué. Ensuite, un détartrage sera réalisé si le
bilan sanguin ne montre pas de risque de saignement ou d’infection trop important(61).
Si cela est nécessaire, une pulpectomie, des soins parodontaux, ainsi qu’un contrôle et
un réajustement des prothèses dentaires pourront être effectués afin d’éviter les
traumatismes(26)(33). Les dents à haut risque infectieux devront être extraites 15 jours
à 3 semaines avant le premier cycle de chimiothérapie, sachant qu’en cas d’absence
d’hygiène buccale, l’exérèse est préférée à la réparation(33). Selon la revue
« Prescrire », une étude randomisée est en faveur de l’efficacité préventive des soins
bucco-dentaires(45). En effet les soins bucco-dentaires réalisés en amont de la
chimiothérapie préviennent ou réduisent les complications buccales(26).
En règle générale, les soins locaux sont à éviter lors d’une cure de chimiothérapie.
Toute décision d’intervention dentaire au cours de la chimiothérapie devra donc tenir
compte de l’état hématologique du patient et de l’avis de l’hématologue et/ou de
l’oncologue. Lorsqu’ils sont nécessaires et que les taux leucocytaire et plaquettaire le
permettent, ils doivent impérativement être réalisés sous surveillance étroite et sous
couverture antibiotique à large spectre(26).
Au cours de la chimiothérapie, la présence de foyers infectieux, avérés ou potentiels,
est
à
surveiller
car
une
prise
en
charge
précoce
permettra
d’éviter
les
complications(61).
L’évaluation régulière de l’état de la bouche est indispensable pour prévenir et prendre
en charge le plus tôt possible les pathologies buccales. L’état de la bouche est
considéré comme normal, score 1 selon la grille OAG, s’il respecte les critères suivants :
bouche libre de mucus ou autre débris, lèvres lisses, rosées et humides, dents ou
prothèses propres, langue humide, rosée et papilles présentes, gencives rosées et
fermes, muqueuses humides, rosées, sans dépôts ni lésions, salive claire présente et
aqueuse(42).
61
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3.2.2.2.
Education du patient
Avant le début de la chimiothérapie, il est recommandé d’identifier les populations à
risque et d’insister sur l’éducation du patient pour que les soins buccaux soient réalisés
correctement(31)(42)(44). L’ensemble de l’équipe soignante doit veiller à la
sensibilisation et à l’éducation du patient envers les mesures préventives à effectuer au
cours de la chimiothérapie mais aussi au-delà(26). Le patient devra être informé des
effets secondaires buccaux possibles pendant et après la chimiothérapie, ainsi que de
leur caractère réversible(61). En effet, l’implication du patient favorise une prise en
charge adaptée et diminue ainsi la sévérité de la mucite(33).
Il est important de boire au moins deux litres par jour, si cela n’est pas contre-indiqué
par une insuffisance cardiaque ou une insuffisance rénale, sous forme d’eaux minérales,
de thé, tisanes ou de boissons fraîches et pétillantes comme les boissons à base de cola,
pour assurer une bonne hydratation des muqueuses(27)(42).
Le tabac et l’alcool sont à éviter puisqu’ils favorisent la survenue des problèmes de
bouche. Si des douleurs ou des aphtes apparaissent, le patient doit impérativement
prévenir son médecin afin de mettre en place un traitement le plus rapidement
possible(27).
Concernant l’alimentation, les patients doivent privilégier les aliments moelleux ou
mixés à la texture douce pour ne pas irriter l’intérieur de la bouche et éviter les
aliments secs, durs ou croquants. Les aliments qui favorisent l’apparition d’aphtes,
comme les noix, le gruyère ou l’ananas doivent être évités, tout comme les aliments
trop épicés ou acides comme le jus de citron, la vinaigrette ou la moutarde(27).
Tableau 5 : Aliments à privilégier ou à éviter pour prévenir les mucites(36)
Aliments à privilégier
Aliments à éviter
Aliments secs, écorchant ou croquants : pain
Aliments finement hachés
Aliments bien cuits
Aliments en sauce
Produits lactés notamment froids
sec, noisettes
Aliments acides ou âpres : tomates, agrumes,
raisins, pomme
Aliments épicés : poivre, sel, curry
Alcool et tabac
Café
62
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Le comité de la MASCC confirme que l’utilisation de protocoles de soins de bouche qui
incluent l’éducation du patient permet de réduire la sévérité des mucites chimioinduites(63).
3.2.2.3.
Conseils d’hygiène bucco-dentaire
Le patient doit respecter une hygiène bucco-dentaire rigoureuse(26). Pour cela il faut
lui rappeler les règles d’un brossage hygiénique des dents(33). Si le taux de plaquettes
est supérieur à 30 G/L, le nettoyage peut se faire avec une brosse à dent souple type
chirurgicale et un dentifrice fluoré sans menthol après chaque repas(42)(33).
L’utilisation d’un fil dentaire est également recommandée. En revanche, si le taux de
plaquettes est inférieur à 30 G/L, le nettoyage doit être effectué à l’aide d’un coton
tige ou d’un hydropulseur à jet léger(33).
Le patient devra également faire en sorte de réduire les risques de traumatismes de la
muqueuse buccale pour prévenir les gingivorragies qui pourraient être accentuées par
une thrombopénie sévère(26). Si le patient porte des prothèses, il devra en réduire le
temps de port et les entretenir convenablement(26)(61). En effet, le nettoyage
quotidien des prothèses dentaires est indispensable en les brossant puis en les laissant
sécher à l’air libre après chaque repas(64).
Le patient doit idéalement hydrater ses lèvres et les protéger avec des bâtonnets
glycérinés neutres, du beurre de cacao, de la vaseline ou un gel humidifiant comme la
paraffine liquide (Lansoyl®)(27)(42). Ces corps gras sont contre-indiqués si le patient
est sous oxygène, à cause du risque de brûlure(27).
Le maintien de la salivation est le plus sûr moyen d’empêcher le développement de
caries(33). Il est donc important de bien hydrater la cavité buccale pour éviter la
xérostomie(31). La consommation de fruits frais comme l’ananas et le kiwi, de sorbets,
de glaçons ou de glace pilée, aromatisés ou non, de bonbons acidulés sans sucre ou de
chewing-gums est recommandée pour stimuler la salivation(26)(42). L’utilisation de
cristaux de citrate de sodium placés sous la langue, de stimulants de la salivation
comme la pilocarpine à 5 mg (Salagen®), de gel buccal hydratant Oralbalance®, de
salive
artificielle,
d’humidificateur
ou
de
brumisateur
est
également
possible(31)(33)(42).
63
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3.2.2.4.
Soins de bouche
Les soins de bouche sont définis comme les soins permettant de maintenir une hygiène
buccale adéquate, afin d’assurer le confort du patient, de maintenir les caractéristiques
physiologiques de la bouche, de prévenir toutes complications ou lésions et de rétablir
l’intégrité de la muqueuse et la capacité fonctionnelle de la bouche. De nombreuses
études ont montré que les soins de bouche fréquents et réguliers, sont un moyen
efficace de prévenir et de traiter les affections de la cavité buccale(64). En effet, les
soins de bouche permettent de diminuer la flore microbienne orale, la douleur, les
saignements et le risque de complications dentaires comme les caries et les
gingivites(31).
Les mesures préventives non médicamenteuses visent à rendre la muqueuse buccale
aussi saine que possible avant un traitement et à la protéger au cours du
traitement(45).
Actuellement,
il
n’existe
pas
de
produit
ou
de
protocole
universellement efficace(44). L’importance du soin réside avant tout dans sa fréquence
dans le but d’humidifier et d’alcaliniser la bouche(64). En effet les bains de bouche sont
à répéter aussi souvent que possible, environ 4 à 6 fois par jour, en gargarisme si
possible, en le laissant dans la bouche 30 à 60 secondes avant de le recracher. Une
astuce peut consister à le proposer comme solution de rinçage après chaque brossage de
dents(33)(62).
Ensuite, l’action mécanique prime sur le type de produit utilisé même si les solutions de
chlorure de sodium 0,9% ou de bicarbonate de sodium sont à préférer(33)(64).
L’avantage du bicarbonate est qu’en plus de dissoudre le mucus et les débris,
d’hydrater et de nettoyer la muqueuse buccale, il augmente le pH de la cavité buccale
ce qui diminue le risque d’infection fongique(31).
Le comité de la MASCC affirme que dans la prévention ou le traitement des mucites
orales, aucune recommandation n’est possible entre le bicarbonate de sodium ou les
solutions salines pour les soins de bouche, même s’il reconnait que l’usage courant du
bicarbonate de sodium peut apporter un confort au patient et être une aide dans le
maintien de l’hygiène bucco-dentaire(65).
D’après la revue « Prescrire », en l’absence d’évaluation probante des autres
préparations,
autant
en
rester
au
sérum
physiologique
ou
à
une
solution
bicarbonatée(45). Les recommandations actuelles sont donc de ne pas y mélanger des
antifongiques ou des antiseptiques pour la prévention des candidoses(33).
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L’association bicarbonate, amphotéricine B (Fungizone®) et lidocaïne (Xylocaïne®) est
même contre-indiquée en prévention des mucites orales(62). D’autre part, le mélange
de produits et l’utilisation simultanée ou successive d’antiseptiques sont à éviter car il y
a un risque d’interférence et d’instabilité entre les différents produits(44).
En cas de maintien de mélange, il est recommandé d’éviter les solutions contenant de
l’alcool qui sont asséchantes et irritantes pour la muqueuse buccale, ainsi que les
formes galéniques contenant du sucre, pour limiter le risque de caries(33)(44).
Si une préparation est nécessaire, comme par exemple avec le bicarbonate de sodium
en poudre, elle devra être extemporanée, c'est-à-dire réalisée avant chaque soin(44).
Les modalités de préparation sont les suivantes : ½ cuillère à café de bicarbonate de
sodium en poudre dans un verre d’eau(42).
Enfin, le produit de dilution, que ce soit de l’eau minérale ou stérile, du sérum
physiologique ou du bicarbonate de sodium 1,4%, doit être renouvelé régulièrement(44).
Selon le Vidal, le bicarbonate de sodium Lavoisier 1,4% doit être utilisé immédiatement
après ouverture(66). Selon l’AFSOS, il doit être utilisé dans les 8 heures après
l’ouverture du flacon(42). En pratique, il est recommandé de toujours dater l’ouverture
du flacon et de le conserver au réfrigérateur 24 à 48 heures maximum(44)(67)(68).
Même si la chlorhexidine aqueuse pourrait permettre de prévenir les infections de la
muqueuse buccale ou d’éviter une carie ou une autre maladie parodontale en diminuant
la plaque dentaire, son utilisation à long terme n’est pas possible en raison du risque de
coloration des dents(64). D’autre part, l’utilisation prolongée de bains de bouche
antiseptiques modifie la flore buccale favorisant le développement de certaines
bactéries et de mycoses(45). Selon le groupe de travail de l’AFSOS l’utilisation de
chlorhexidine est déconseillée(62).
En conclusion, bien que les preuves de leur efficacité ne soient pas assez fortes pour
conduire à une recommandation, la MASCC est en faveur de l’utilisation des protocoles
de soins de bouche pour la prévention des mucites orales dans toutes les modalités de
traitement du cancer(30). En revanche, aucune recommandation n’est possible pour
l’utilisation des protocoles de soins de bouche en traitement des mucites orales, à
cause de l’insuffisance ou de la contradiction des preuves(65).
65
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3.2.2.5.
Cryothérapie
En parallèle de ces mesures, il est possible de minimiser l’impact des agents
cytotoxiques sur les cellules de la muqueuse buccale lors des cures de chimiothérapie.
En effet, le fait de sucer des glaçons pendant au moins 30 minutes peut agir en tant que
cryothérapie et permettre de réduire de 2 à 5 fois l’incidence des mucites
sévères(26)(33). Par le même mécanisme que celui du casque réfrigérant utilisé pour
limiter l’apparition d’une alopécie, notamment avec les taxanes, le froid provoque
localement une vasoconstriction qui limite les concentrations en agents anticancéreux
au niveau des cellules buccales(26).
Trois essais comparatifs randomisés ont montré que sucer des glaçons lors de la
chimiothérapie réduit leur incidence : 4 à 21% de mucites orales sévères avec les
glaçons, versus 14 à 74% chez les témoins(45).
En revanche, l’inconvénient de cette méthode est qu’elle ne fonctionne pas avec tous
les types de chimiothérapie. Elle est efficace surtout avec les médicaments à demi-vie
courte, comme par exemple le melphalan et le 5-FU en bolus. Pour le 5-FU, il est
recommandé de sucer des glaçons pendant 30 minutes en commençant 5 minutes avant
l’administration. Pour le melphalan, il est recommandé de sucer des glaçons pendant 60
minutes en commençant 15 minutes avant l’administration.
Les effets indésirables de la cryothérapie sont une sensation d’engourdissement de la
bouche, des céphalées et des nausées(31). Ils sont donc acceptables et aucun autre
traitement préventif n’a une meilleure efficacité démontrée, alors qu’ils ont des effets
indésirables plus graves ou mal évalués(45).
Le comité de la MASCC recommande que les patients recevant une chimiothérapie avec
un bolus de 5-FU suivent une cryothérapie orale de 30 minutes pour prévenir les mucites
orales(63). Il suggère également que la cryothérapie orale soit utilisée pour prévenir les
mucites orales chez les patients recevant une haute dose de melphalan, avec ou sans
irradiation corporelle totale(30).
3.2.2.6.
Laser de faible puissance
Le laser de faible puissance représente une avancée importante dans la prévention des
mucites
radio
et
chimio-induites,
grâce
à
ses
propriétés
antalgiques,
anti-
inflammatoires et cicatrisantes. Son efficacité et sa bonne tolérance font de lui un des
espoirs des méthodes protectrices(26).
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Son mécanisme d’action est d’agir directement sur le système énergétique
mitochondrial, en diminuant la production de radicaux libres et en activant la
transformation des fibroblastes en myofibroblastes. Plusieurs études ont reconnu son
efficacité dans le traitement préventif et curatif des mucites. Il est possible d’utiliser le
laser helium-néon (longueur d’onde à 632.8nm) ou le laser à diode (longueur d’onde
entre 650 et 905nm).
En revanche les paramètres, comme le type de laser, la puissance et l’énergie par cm²
ne sont pas encore officiellement validés(31). D’autre part, il nécessite un équipement
coûteux et une formation spécialisée. De plus les essais cliniques sont difficiles à mener
et leurs résultats sont difficiles à comparer à cause de la variabilité interopérateur.
Le comité de la MASCC constate l’accumulation des preuves en faveur du laser de faible
puissance et pour les centres capables de supporter la technologie et la formation
nécessaire, il suggère donc son utilisation dans le but de réduire l’incidence des mucites
orales et la douleur associée chez les patients recevant une chimiothérapie à haute
dose
ou
une
chimiothérapie
avant
une
transplantation
de
cellules
souches
hématopoïétiques(30)(63).
Le groupe de travail de l’AFSOS recommande quant à lui l’utilisation du laser
uniquement en cas de mucite de grade 2 induite par la radiothérapie(62).
3.2.2.7.
Palifermine
Le recours à des traitements d’action systémique comme la palifermine (Kepivance®)
est une autre option(26). Il s’agit d’un analogue recombinant du facteur de croissance
humain des kératinocytes (KGF-1).
La palifermine a montré une diminution de l’incidence et de la sévérité des mucites
pour les perfusions de méthotrexate à fortes doses et dans les cancers ORL traités par
radiothérapie. Elle est recommandée par la MASCC pour réduire l’incidence, la sévérité
et la durée de la mucite buccale chez les patients atteints d’une hémopathie maligne et
traités par une chimiothérapie et/ou radiothérapie intensives avant une autogreffe de
cellules souche à la dose de 60 µg/kg/jour en bolus par voie intraveineuse 3 jours avant
et 3 jours après(30)(31)(33).
Ses points négatifs sont son coût élevé et ses effets indésirables qui sont surtout des
réactions anaphylactiques cutanées de type rash, prurit, éruption multifocale, mais
aussi des arthralgies, des œdèmes, une dysesthésie et une modification du goût. Une
surveillance
des
enzymes
pancréatiques
amylases
et
lipases
est
également
nécessaire(31)(33)(45).
67
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Concernant les risques à long terme, en particulier de cancers secondaires, ils sont mal
cernés(45). A cause du risque de prolifération tumorale, il n’est pas possible de
l’utiliser dans le cas de tumeurs solides(31). Elle est également suspectée d’exposer à
un risque accru de cataracte. Enfin, d’après la revue « Prescrire », la palifermine n’a
pas été comparée à la cryothérapie et son efficacité en prévention des mucites orales
n’aurait pas été démontrée(45).
3.2.2.8.
Caphosol®
Le Caphosol® est une solution électrolytique sursaturée en phosphate de calcium
actuellement indiquée comme adjuvant aux traitements standards d’hygiène buccale
dans la prévention et le traitement des mucites causées par une chimiothérapie à haute
dose, principalement dans le cas d’une sécheresse buccale(31)(33)(62). En effet, le
phosphate apporté permet à la cellule de se réparer. Son inconvénient principal est son
prix élevé(31).
A ce jour, il n’y a pas d’étude permettant de comparer ce produit au traitement de
référence que sont les bains de bouche de bicarbonate de sodium(62).
3.2.2.9.
Suivi du patient
Après la chimiothérapie, le patient devra continuer à avoir une hygiène bucco-dentaire
appropriée, ainsi qu’un suivi bucco-dentaire régulier par le chirurgien dentiste de ville,
dont la fréquence sera à adapter en fonction du contexte clinique, tous les 6 à 12 mois.
Pendant les rémissions et les guérisons, il n’y a pas de prise en charge bucco-dentaire
spécifique(61).
3.2.3.
Prise en charge curative des mucites buccales
Selon le comité de la MASCC, aucune recommandation n’est possible quant à l’usage de
protocoles de soins de bouche pour le traitement des mucites orales(30).
L’AFSOS recommande d’évaluer l’état de la bouche pour définir la prise en charge. Si la
bouche présente une ou plusieurs altérations (ulcérations, saignements ou abcès), la
pondération selon la grille OAG sera entre 2 et 3 et il faudra appliquer les conseils pour
une bouche à problèmes.
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Les problèmes de bouche peuvent être classés en deux catégories : les symptômes
(sècheresse, saignements, douleur, etc.) et les lésions (aphtes, candidoses, mucites,
herpès, etc.)(42).
Tout d’abord, contre la sécheresse buccale, il est recommandé de consommer des
boissons
pétillantes non sucrées et des
jus de fruits frais.
Si nécessaire,
l’anétholtrithione (Sulfarlem S25®) avec 1 à 2 comprimés 3 fois par jour ou la
pilocarpine (Salagen®) avec 1 à 3 comprimés par jour peuvent être utilisés(42).
Concernant les saignements buccaux, en plus des soins systématiques de base, il est
recommandé d’effectuer des badigeonnages doux de lidocaïne adrénaline (Xylocaïne®
adrénaline) avec une compresse stérile ou un bâtonnet pour réduire l’hémorragie par
vasoconstriction et la douleur associée par anesthésie locale. Il faut prévenir le patient
de ne pas manger ou boire dans les 2 heures qui suivent l’application. D’autre part, le
patient devra consommer une alimentation froide et non irritante. En cas de
saignements, il pourra réaliser des bains de bouche avec de l’acide tranexamique
(Exacyl®) buvable et, selon la gravité, il pourra ajouter 2 à 4 ampoules d’acide
tranexamique buvable en 2 à 3 prises par jour. Pendant cette période, le brossage des
dents est à proscrire et le port des prothèses dentaires devra être réduit(42).
En cas d’aphtes, en plus des soins systématiques de base, des badigeonnages de gel oral
de lidocaïne 2%, des bains de bouche de sucralfate (Ulcar®) ou d’acétylsalicylate de
lysine (Aspegic®), ainsi que des cataplasmes de sucralfate ou de salicylate de choline et
chlorure de cétalkonium (Pansoral®) pourront être effectués. D’autre part, le patient
devra éviter les aliments acides comme le café, les agrumes, les tomates, mais aussi
ceux qui favorisent les aphtes(42).
Concernant les mucites, le grade doit tout d’abord être défini entre 0 à 4 pour adapter
la prise en charge. Dans le cas d’un grade 0, qui correspond à une absence d’atteinte, il
est recommandé de suivre une hygiène bucco-dentaire adaptée et d’effectuer des bains
de bouche avec un sachet de sucralfate dilué dans un verre d’eau.
Dans le cas d’un grade 1, il est recommandé d’utiliser les antalgiques adaptés de palier
I (paracétamol, néfopam) ou II (codéine, poudre d’opium, tramadol) en plus des bains
de bouche de sucralfate et des bains de bouche avec de la glace.
69
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Dans le cas d’un grade 2, il est recommandé d’utiliser, en plus des antalgiques de palier
II et des bains de bouche de sucralfate, la préparation suivante : bicarbonate 1,4%,
méthylprednisolone (Solumedrol®) 40 mg et ½ flacon de lidocaïne (Xylocaïne®) 1%. De
plus, des badigeonnages avec des compresses de gel oral de lidocaïne (Xylocaïne®
visqueuse 2%) ou bien avec de la lidocaïne en crème buccale (Dynexan® 2%) pourront
être effectués, en attendant 2 heures avant de manger ou de boire(42).
Avec un produit anesthésique local, des risques de réaction d’hypersensibilité, de fausse
route, de sensation de brûlure et de troubles du goût existent. Les anesthésiques locaux
ont une efficacité temporaire et ne sont pas évalués par des essais comparatifs. Les
conséquences de leur absorption par une muqueuse lésée sont mal connues(45). Le
comité de la MASCC considère qu’aucune recommandation n’est possible pour les agents
anesthésiques à cause de l’insuffisance des preuves(30).
D’autre part, l’efficacité des corticoïdes en solution pour bains de bouche dans le
traitement des mucites orales n’a pas été évaluée par des essais comparatifs. Appliqués
sur la muqueuse buccale, les corticoïdes exposent à un risque accru d’infections,
notamment de candidoses. De plus, même si le passage systémique des corticoïdes en
usage local est limité, il peut toujours y avoir des effets indésirables généraux comme
l’hypercorticisme,
l’insuffisance
surrénalienne,
l’hypertension
artérielle,
l’hypokaliémie, la rétention hydrosodée et les troubles oculaires avec une utilisation
prolongée(45).
Dans le cas d’un grade 3, des antalgiques de palier III (morphine, oxycodone, fentanyl)
devront être administrés, ainsi que des bains de bouche de la préparation suivante :
bicarbonate 1,4%, 120 mg de méthylprednisolone et ½ flacon de lidocaïne 1%. Des
antibiotiques et des corticoïdes par voie parentérale peuvent également être
nécessaires(42).
Dans le cas d’un grade 4, la prise en charge doit être décidée au cas par cas en Réunion
de Concertation Pluridisciplinaire. Une pompe à morphine ou Patient Control Analgesia
(PCA) et une alimentation entérale ou parentérale pourront être nécessaire en fonction
du contexte clinique(42).
Quel que soit le grade de la mucite, la prise en charge des patients doit reposer avant
tout sur la sédation de la douleur et sur les mêmes règles d’hygiène buccale que celles
mises en œuvre pour la prévention des mucites(45). En effet selon le CNHIM, l’efficacité
et la sécurité d’emploi des autres pratiques ne sont toujours pas établies(33).
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3.2.4.
3.2.4.1.
Prise en charge des autres problèmes de bouche
Candidoses oropharyngées
En prévention des candidoses, il est recommandé de maintenir un bon état buccodentaire, mais aucun traitement médicamenteux n’est préconisé(42). Le fluconazole
per os est le seul antifongique actuellement indiqué en prévention des infections
fongiques à Candida après une induction ou une consolidation pour leucémie et chez un
patient subissant une allogreffe. Ses effets indésirables sont rares mais plusieurs études
ont mis en évidence l’émergence de souches résistantes, c’est pourquoi sa prescription
systématique n’est plus recommandée et doit être évaluée au cas par cas(33).
En cas de candidose avérée, il faudra définir la gravité et l’étendue de l’atteinte(42).
Les recommandations actuelles proposent d’utiliser en première intention un
antifongique topique et de réserver les formes systémiques pour les candidoses
invasives ou sévères(33).
S’il s’agit d’une forme minime ou modérée, il faudra donc utiliser un traitement
antifongique sous forme :
-
de comprimés gingivaux muco-adhésifs de miconazole (Loramyc®) à 50 mg à
coller une fois par jour au-dessus d’une incisive,
-
de gel buccal de miconazole (Daktarin®) 2%, deux cuillères mesures à appliquer
4 fois par jour, à continuer une semaine après que les symptômes aient disparu,
-
de suspension buvable d’amphotéricine B 10%, une cuillère à café 3 à 4 fois par
jour à utiliser en bain de bouche et à recracher, de préférence en dehors des
repas,
-
de suspension buvable de nystatine (Mycostatine®) 100 000 UI par ml, à utiliser
en badigeonnage local 4 à 6 fois par jour et continuer deux jours après
l’éradication des lésions(33)(42).
Ces médicaments doivent être pris à distance des repas et des boissons et il est
conseillé de maintenir le produit en bouche le plus longtemps possible, dans l’idéal
quelques minutes. Le gel buccal de miconazole est contre-indiqué en association avec
les antivitamines K et les sulfamides hypoglycémiants et chez les patients sous
oxygénothérapie.
En cas de port de prothèses dentaires, il faudra également les traiter en les brossant
par exemple avec le gel de miconazole(42).
71
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S’il
s’agit
d’une
forme
invasive
(atteinte
œsophagienne),
sévère
(patient
neutropénique) ou récidivante, il faudra utiliser un traitement antifongique par voie
systémique sous forme :
-
de suspension buvable d’amphotéricine B 10%, une cuillère à café 3 à 4 fois par
jour à utiliser en bain de bouche et à avaler, de préférence en dehors des repas,
ce qui permet d’avoir une action locale sur la muqueuse buccale mais aussi sur
la partie haute du tube digestif,
-
de comprimés ou de gélules de fluconazole (Triflucan®), de 100 à 400 mg par
jour ou d’itraconazole (Sporanox®) 100 mg une ou deux gélules en une seule
prise avec une boisson, immédiatement après un repas ; la posologie peut être
augmentée à 400 mg en deux prises par jour,
-
d’injection intraveineuse de fluconazole si la voie orale est non envisageable,
entre 3 à 6 mg/kg/j, soit 100 à 200 mg pour un adulte pendant 15
jours(33)(42)(69).
Selon le laboratoire, la solution d’amphotéricine B se conserve 10 jours après ouverture
à température ambiante(66). Les traitements doivent être administrés jusqu’à
disparition des signes cliniques, c’est-à-dire pendant 7 à 15 jours en général. D’autre
part, les bains de bouche utilisés ne doivent pas contenir d’antiseptique.
Dans le cas de lésions secondaires à l’emploi du méthotrexate, il est possible d’ajouter
une ampoule d’acide folinique (folinate de calcium) dans chaque bain de bouche ou de
l’administrer en sublingual(33).
La solution CESCO ou solution Guggisberg, composée de nystatine, bicarbonate,
vitamines et chlorure de sodium a eu l’avantage de sensibiliser le personnel soignant à
la problématique des soins bucco-dentaires. En réalité, une étude a montré que l’action
antimycosique de cette solution était négligeable, la nystatine étant en trop faible
concentration. D’autre part, la nystatine est très sensible à l’air et à la lumière et son
activité diminue rapidement avec le temps en présence de vitamines. La solution CESCO
était donc instable avec une perte d’efficacité rapide si elle n’était pas conservée au
réfrigérateur et à l’abri de la lumière. De plus, il est possible que de multiples
utilisations quotidiennes de cette solution provoquent l’apparition de résistances. Les
Hôpitaux Universitaires de Genève ont donc conclu qu’il serait préférable de mettre au
point une solution sans nystatine et de la réserver au traitement des candidoses
avérées.
72
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Plusieurs études et revues de littérature ont comparé les différents types de soins de
bouche. Il en ressort qu’aucun produit n’a apporté de preuves cliniques de son
efficacité dans le traitement des candidoses buccales, mais que tous sont utiles dans la
prévention de ces complications(64).
Par ailleurs, une étude a montré que les solutions buvables d’antifongiques, nystatine et
amphotéricine B, une fois mélangées au bicarbonate, n’avaient pas d’activité sur
Candida albicans, l’espèce la plus fréquemment impliquée dans les candidoses buccales.
Selon cette même étude, un bain de bouche à base d’antiseptique tel que l’héxétidine
peut être réalisé à distance des bains de bouche antifongiques pour permettre de
diminuer l’adhérence de Candida aux cellules épithéliales. L’antiseptique ne doit
cependant pas être mélangé aux bains de bouche afin d’éviter toute interaction
physicochimique. L’étude conclut que l’association largement répandue d’antifongiques
et de bicarbonate doit être proscrite dans tous les cas(69). En effet, le traitement
antifongique ne doit jamais être déclenché à titre préventif dans le cas de l’existence
d’une mucite seule.
Si l’antifongique est utilisé, le bain de bouche doit être effectué de préférence après
celui de bicarbonate de sodium et pas en même temps(62).
3.2.4.2.
Herpès
Le virus herpès peut également créer des lésions au niveau buccal(33). En plus des soins
systématiques de base, le gel buccal lidocaïne 2% et la vaseline pourront être appliqués
pour soulager le patient. La crème à l’aciclovir (Zovirax®) peut être prescrite dans le
but de traiter les lésions.
Si cela est insuffisant, le valaciclovir (Zelitrex®) à un comprimé deux fois par jour sur 5
jours pourra être utilisé(42). Si le patient a des difficultés à s’alimenter, le traitement
par aciclovir sera initié par voie intraveineuse. Ensuite, un relais per os sera réalisé dès
que possible(33).
Le comité recommande que l’aciclovir et ses analogues ne soient pas utilisés en routine
pour prévenir les mucites(63).
La mise en route du traitement antiviral peut être décidée sur la base de la clinique
lorsqu’elle est très évocatrice, c’est-à-dire avec des vésicules regroupées en bouquet,
ou alors dans les tableaux majeurs c’est-à-dire en cas de mucite de grade 3(62).
73
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
3.2.4.3.
Bouche douloureuse
Le traitement antalgique est primordial dans la prise en charge des mucites(33). En
raison des risques d’inconfort et de malnutrition inhérents aux mucites, il est
indispensable de prendre en charge la douleur associée(26). Dans le cas d’une bouche
douloureuse, avec des lésions associées ou non, il est recommandé d’évaluer et de
réévaluer systématiquement et quotidiennement la douleur, afin de pouvoir adapter les
traitements antalgiques.
Localement, le patient pourra réaliser des bains de bouche d’acétylsalicylate de lysine
(Aspegic®) 1000mg 3 fois par jour en alternance avec des bains de bouche de la
préparation suivante : bicarbonate 1,4% 500 ml avec ½ flacon de lidocaïne 1%, ainsi que
des badigeonnages de gel buccal de lidocaïne 2%, en attendant 2 heures avant de
manger ou de boire, ou de crème buccale de lidocaïne (Dynexan®) 2%.
Par voie générale, les traitements antalgiques selon les 3 paliers de l’OMS seront
utilisés(42). Certaines mucites, notamment après greffe, sont très douloureuses et
nécessitent un recours aux antalgiques du palier III comme la morphine en perfusion
continue à faible dose(33).
Les corticoïdes pourront être utilisés en cas d’inflammation importante responsable de
dysphagie, sauf en cas d’aplasie où il faudra être prudent(42).
Le
traitement
symptomatique
repose
donc
sur
les
antalgiques.
L’utilisation
d’anesthésiques locaux, bien qu’apportant un soulagement certain au malade, doit être
prudente car elle expose au risque de fausse route et de troubles du goût(26).
Si nécessaire, la douleur sera traitée localement par des anesthésiques topiques et
éventuellement par des bains de bouche de morphine(31). Pour soulager la douleur, le
patient peut également sucer des glaçons, de la glace pilée, des glaces à l’eau, des
sorbets ou des bonbons à la menthe(27).
Le comité de la MASCC recommande que l’analgésie contrôlée par le patient (PCA) avec
de la morphine, soit utilisée pour traiter la douleur due à la mucite orale chez les
patients subissant une greffe de cellules souches hématopoïétiques. Le fentanyl
transdermique peut également être efficace pour traiter la douleur causée par les
mucites orales chez les patients recevant une chimiothérapie conventionnelle ou à
haute dose, avec ou sans irradiation corporelle totale.
74
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
D’autre part, les bains de bouche à 2% de morphine peuvent être efficaces pour traiter
la douleur due aux mucites orales chez les patients qui reçoivent une radiochimiothérapie de la tête et du cou.
Enfin, les bains de bouche à 0.5% de doxépine peuvent être efficaces pour traiter la
douleur due aux mucites orales(30).
3.2.5.
Prise en charge des mucites gastro-intestinales
Concernant les mucites gastro-intestinales, le comité recommande la ranitidine ou
l’oméprazole en prévention des douleurs épigastriques après un traitement par
cyclophosphamide, méthotrexate et 5-FU ou après un traitement avec 5-FU avec ou
sans chimiothérapie à base d’acide folinique.
Dans le cas d’une chimiothérapie combinée à la radiothérapie, le comité suggère
l’utilisation de l’amifostine, un cytoprotecteur, pour réduire les œsophagites induites
par une chimiothérapie et une radiothérapie concomitantes, chez les patients avec un
cancer du poumon non à petites cellules(45)(63).
Enfin, en raison de l’insuffisance et de la contradiction des données, aucune
recommandation n’est possible pour de nombreuses molécules passées en revue, dont la
palifermine fait partie(30).
3.2.6.
3.2.6.1.
Sélection des protocoles dans le logiciel Cristal Link
Critères d’inclusion
Depuis son implantation progressive en 2005 dans l’établissement, la base de protocoles
présente dans le logiciel Cristal Link s’est enrichie notamment par des pratiques de
services de soins qui ne reposent pas forcément sur les recommandations d’experts.
Les protocoles existants ont été recherchés dans le logiciel par les mots clés suivants :
« bain de bouche », « soins de bouche » et « mucite ».
3.2.6.2.
Critères d’exclusion
Les prescriptions de soins de bouche effectuées en dehors d’un protocole informatique
n’ont pas été prises en compte.
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(CC BY-NC-ND 2.0)
3.3. Résultats
Les protocoles préexistants à l’Hôpital Nord Ouest dans le logiciel de prescription sont
au nombre de 5 le 14/01/2014. Le nombre de prescriptions de ces protocoles a été
évalué le même jour.
Les dates de modification relevées montrent que les protocoles ont été peu mis à jour
depuis leur création. D’autre part les protocoles ne sont pas cohérents entre eux,
excepté les protocoles qui s’adressent aux grades 2 et 3 des mucites.
Seulement 2 des 5 protocoles ont déjà été prescrits et l’un des deux 7 fois plus que
l’autre. C’est d’ailleurs celui-ci, le plus prescrit, qui est le plus éloigné des
recommandations actuelles. De plus il ne précise pas d’indication ni de description de
symptômes correspondants.
Les 3 protocoles qui n’ont jamais été prescrits sont pourtant proches des
recommandations actuelles, ce qui montre qu’une communication insuffisante a nuit à
leur utilisation.
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LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Tableau 6 : Protocoles de traitement des mucites à l’HNO
Protocoles
Bain de bouche
fungizone bicar
Bain de bouche
(mucites)
Détails
-
Bicarbonate de sodium 1.4% 250ml
-
Fungizone 10% 0.33 flacon
Date de
modification
1339 entre
09/10/2013
A partir de J1 : bain de bouche 3 fois/jour
-
Bicarbonate 1.4% 500ml
-
Fungizone 1 flacon
-
Xylocaïne 1% ½ flacon=10ml
-
Solumedrol 120mg
A partir de J1 : 1 application 2 à 8 fois/jour
-
Ulcar 1g 1 sachet dans 20ml d’eau
Nombre de
prescriptions
11/09/2009 et
13/01/2014 : 308
prescriptions/an
41 entre
14/12/2012 et
10/06/2013
12/12/2013 : 41
prescriptions/an
stérile
A partir de J1 : en alternance avec la
préparation (bicar+fungi+xylo+solu),
gargarisme 2 à 3 minutes 4 fois/jour
-
Ulcar 1g 1sachet
A partir de J1 : en gargarisme 2 à 3 minutes
ou en application locale par DENTASWAB 8
fois/jour
Soins de bouche
ulcérée et
douloureuse
-
Bicarbonate 1.4% 500ml
-
Fungizone 1 flacon
-
Xylocaïne 1% ½ flacon=10ml
-
Solumedrol 120mg
15/11/2012
0
18/09/2013
0
18/09/2013
0
A partir de J1 : uniquement si ulcérations
mucitiques, 4 à 8 applications/jour
-
Xylocaïne visqueuse 2% gel
A partir de J1 : uniquement si bouche
douloureuse, 6 applications/jour ; attendre
2 heures avant de manger
Soin de bouche
-
Méthylprednisolone 40mg
mucite grade 2
-
Lidocaïne 10mg/ml ½ flacon
(ulcère
-
NaCl 0.9% 100ml
érythème)
A partir de J0 : 1 application 3 fois/jour
Soin de bouche
-
Méthylprednisolone 120mg
mucite grade 3
-
Lidocaïne 10mg/ml ½ flacon
(ulcération
-
NaCl 0.9% 150ml
douleur majeure)
A partir de J0 : 1 application 3 fois/jour
77
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
3.4. Plan d’amélioration
3.4.1.
Fiche conseil d’hygiène bucco-dentaire
L’hygiène bucco-dentaire est indispensable à la prévention des mucites, c’est pourquoi
il a été décidé de créer une fiche conseil, intégrée au carnet de liaison des patients
sous chimiothérapie. (ANNEXE 2)
La fiche a été validée par la commission des soins de support de l’HNO (médecin
spécialiste en soins palliatifs, infirmières et cadre d’oncologie ambulatoire) et
présentée à la réunion des 3C de l’établissement.
3.4.2.
Nouveaux protocoles Cristal Link
Les protocoles s’adressent à des patients adultes hospitalisés à l’HNO et actuellement
sous chimiothérapie. La cause de l’hospitalisation n’est pas un critère pour la
prescription des protocoles.
Après leur élaboration, les protocoles ont également été validés par la commission des
soins de support de l’HNO et présentés à la réunion des 3C de l’établissement.
3.4.2.1.
En fonction du grade de mucite
Dans chaque protocole, la symptomatologie du grade de mucite correspondant est
rappelée au prescripteur. Un document récapitulant tous les protocoles existants et
toutes les symptomatologies de mucites associées a également été joint à chaque
protocole. (ANNEXE 3)
3.4.2.1.1.
Grade 0
L’hygiène bucco-dentaire du grade 0 comprend les bains de bouche de bicarbonate qui
sont les soins de bouche de base à effectuer par tous les patients en prévention des
mucites. Contrairement à ce que propose le référentiel de l’AFSOS, les bains de bouche
de sucralfate n’ont pas été inclus au protocole car des recommandations plus récentes
de la MASCC suggèrent que l’efficacité de ce médicament en prévention des mucites
n’est pas prouvée.
En effet, vingt études examinant l’utilisation de l’agent de revêtement muqueux
sucralfate dans divers contextes ont été examinées par la MASCC.
78
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Les preuves soutiennent des recommandations contre l’usage du sucralfate dans la
prévention ou le traitement des mucites orales chez les patients recevant une
chimiothérapie(30).
De plus, cela permet de simplifier les soins à effectuer par le patient, tout en restant
efficace, puisque le plus important est d’effectuer des soins de bouche, peu importe le
produit utilisé.
Enfin, la dernière raison est que le sucralfate est un médicament qui n’est pas
référencé au livret thérapeutique de l’HNO et le protocole du grade 0 est celui qui sera
le plus largement prescrit puisqu’il concerne, en théorie, tous les patients sous
chimiothérapie. Ce médicament peut être commandé sur demande auprès de l’équipe
pharmaceutique, si cela est nécessaire.
3.4.2.1.2.
Grade 1
Concernant les soins de bouche du grade 1, le sucralfate a été prescrit comme cela est
recommandé, à réaliser en plus des bains de bouche au bicarbonate de sodium. Il doit
être dilué dans une ampoule d’eau stérile.
Concernant la prise en charge de la douleur, en concertation avec le médecin
responsable des soins palliatifs sur l’HNO, le tramadol à libération prolongée à 100 mg a
été prescrit deux fois par jour avec, en cas de douleurs, 1 g de paracétamol toutes les 6
heures ou un comprimé de paracétamol et tramadol (Ixprim®) si l’Echelle Visuelle
Analogique (EVA) est supérieur à 3. Le nombre de prises maximum de paracétamol et
tramadol a été calculé pour que la dose totale de tramadol ne dépasse pas 400 mg par
jour, soit 5 comprimés de paracétamol et tramadol par jour.
La possibilité de prescrire un laxatif dans le protocole, en cas de constipation due au
tramadol, a été ajoutée.
D’autre part, une auto-évaluation de la douleur par le patient, sous forme d’EVA à faire
4 fois par jour a été insérée. Si le patient a des difficultés à communiquer, une
évaluation Algoplus est également possible. (ANNEXE 4)
3.4.2.1.3.
Grade 2
Pour la prise en charge de la douleur dans le grade 2, les mêmes antalgiques que le
grade 1 ont été prescrits. Le référentiel propose des antalgiques de palier II seuls, mais
les discussions avec les différents spécialistes ont abouti à préférer la possibilité de
combiner les antalgiques de palier I et de palier II, comme pour le grade 1.
79
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Concernant les badigeonnages d’anesthésique local, le gel oral de lidocaïne 2% a été
choisi à la place de la crème buccale de lidocaïne 2%, car c’est le médicament que
l’HNO possède à son livret thérapeutique.
Concernant la préparation à base de méthylprednisolone et lidocaïne 1%, les bains de
bouche sont à réaliser en alternance avec ceux de sucralfate et la préparation se
conserve maximum 72 heures au réfrigérateur après le mélange des différents produits,
ce qui est en général conseillé pour les mélanges extemporanés ne contenant pas de
conservateur.
3.4.2.1.4.
Grade 3
Concernant la prise en charge de la douleur dans le grade 3, le paracétamol a été
prescrit 1 g toutes les 6 heures et le sulfate de morphine (Oramorph®) en gouttes toutes
les 6 heures si l’EVA est supérieur ou égale à 4 malgré des prises systématiques de
paracétamol. Le nombre de gouttes est laissé au libre choix du prescripteur. La
prescription de laxatif a été prévue en cas de constipation due au sulfate de morphine.
Le référentiel recommande également un traitement parentéral par antibiotiques et
corticoïdes. Le traitement antibiotique n’a pas été intégré au protocole pour laisser au
prescripteur le libre choix de l’antibiotique et de la posologie adaptés pour traiter ou
prévenir une infection. Concernant les corticoïdes, le référentiel ne donne pas de
notion de posologie, ils n’ont donc pas été inclus dans le protocole. Par ailleurs, il se
trouve que les patients sous chimiothérapie ont déjà très souvent des corticoïdes en
cure continue ou discontinue dont il faudra tenir compte. Si les corticoïdes sont
nécessaires pour soulager le patient, le prescripteur pourra les ajouter en dehors du
protocole.
3.4.2.1.5.
Grade 4
Pour la prise en charge de la douleur dans le grade 4, même s’il existe déjà des
protocoles PCA spécifiques, la pompe à morphine a été incluse dans le protocole pour
faciliter sa prescription. En revanche il existe déjà des protocoles de nutrition entérale
et parentérale avec une bonne visibilité dans Cristal Link sur l’établissement, ils n’ont
donc pas été inclus dans ce protocole.
Bien que les recommandations du référentiel pour le grade 4 comportent uniquement
une prise en charge de la douleur et de la nutrition, il a été choisi de conserver les soins
de bouche du grade 3, c’est-à-dire la préparation et les badigeonnages. Ceci dans le but
que des soins locaux soient proposés aux patients, s’ils sont capables de les réaliser.
80
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Le cas de ces patients étant à étudier en RCP, les autres prescriptions souhaitées par
l’équipe pluridisciplinaire seraient à réaliser hors protocole.
3.4.2.2.
En fonction des problèmes de bouche
De même que pour les protocoles de prise en charge des mucites, un rappel de la
symptomatologie correspondant aux problèmes de bouche a été inclus dans chaque
protocole. Un document récapitulant tous les protocoles existant et toutes les
symptomatologies de problèmes de bouche associées a été joint à chaque protocole.
3.4.2.2.1.
Bouche sèche
Concernant les soins locaux, la salive artificielle (Artisial®) a été ajoutée avec 6 à 8
pulvérisations par jour. Le bicarbonate de sodium a été intégré au protocole en bains de
bouche jusqu’à 6 fois par jour pour hydrater les muqueuses.
Pour les traitements per os, le référentiel recommande l’anétholtrithione (Sulfarlem®)
ou la pilocarpine (Salagen®). L’anétholtrithione à 12,5 mg a été préféré avec un
comprimé 3 fois dans la journée, 30 minutes avant le repas. En effet, la pilocarpine
peut avoir des effets indésirables plus fréquents et qui peuvent être plus graves comme
une détresse respiratoire, une confusion ou des troubles du rythme cardiaque(66).
3.4.2.2.2.
Candidoses
3.4.2.2.2.1.
Forme minime et modérée
Les recommandations proposent diverses formes galéniques d’antifongiques locaux. Le
bain de bouche avec la suspension d’amphotéricine B à recracher a été retenu pour ce
protocole. Il est précisé que le flacon se conserve 10 jours après ouverture à
température ambiante selon le laboratoire qui le commercialise(66).
Le bicarbonate de sodium a été ajouté pour lutter contre la candidose en alcalinisant le
pH de la bouche. D’ailleurs, d’après l’étude de stabilité et d’efficacité, son utilisation
est recommandée avant l’amphotéricine B. En effet, le mélange des deux produits
diminue l’efficacité in vitro de l’amphotéricine B(69).
81
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
3.4.2.2.2.2.
Forme étendue, sévère et/ou récidivante
Les recommandations proposent un traitement antifongique par bain de bouche avec
une suspension buvable à avaler, comprimé, gélule ou injection intraveineuse. Le même
protocole que précédemment a été prescrit, en précisant cette fois que l’amphotéricine
B est à avaler après le bain de bouche. D’autre part, le prescripteur a la possibilité de
prescrire du fluconazole par voie orale en adaptant la posologie puisque celle-ci peut
être variable. La forme intraveineuse n’a pas été incluse dans le protocole.
3.4.2.2.3.
Herpès
La vaseline n’a pas été prescrite à cause du risque de brûlure pour les patients sous
oxygène. La crème aciclovir à 5% a été prescrite avec 5 applications par jour.
Concernant les traitements par voie systémique, seuls les comprimés de valaciclovir ont
été prescrits à la posologie de 500 mg deux fois par jour(66).
3.4.2.2.4.
Aphtose
Dans ce protocole, une prise en charge de la douleur pouvant combiner les paliers I à III
est proposée, avec les mêmes règles de prescription que celles citées précédemment.
Une évaluation de la douleur et une prise en charge de l’éventuelle constipation
associée avec un laxatif ont été incluses.
Concernant les soins locaux, les badigeonnages de gel buccal de lidocaïne 2% et les
bains de bouche de sucralfate ont été conservés. Les bains de bouche d’acétylsalicylate
de lysine n’ont pas été prescrits à cause du risque de saignement, surtout en cas de
thrombopénie. D’autre part, les applications locales de sucralfate et de salicylate de
choline et chlorure de cétalkonium (Pansoral®) n’ont pas été prescrites.
3.4.2.2.5.
Bouche douloureuse avec ou sans lésions
Concernant la préparation à utiliser en bains de bouche, la procaïne 2% a été remplacée
par la lidocaïne 1% dans les mêmes proportions. Il est précisé que la préparation une
fois mélangée se conserve 72 heures au réfrigérateur et qu’elle est à utiliser en
alternance avec les bains de bouche d’un sachet d’acétylsalicylate de lysine 1000mg
dilué dans un verre d’eau et recraché pour limiter le risque de saignement.
82
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Concernant le badigeonnage d’anesthésique local, seul le gel buccal de lidocaïne 2% est
proposé. Ensuite, le protocole habituel de prise en charge de la douleur a été prescrit,
sans inclure les corticoïdes au protocole pour les mêmes raisons que celles citées
précédemment.
3.4.2.2.6.
Bouche hémorragique
Seuls les bains de bouche avec une ampoule d’acide tranexamique ont été prescrits, à
renouveler 3 fois par jour, à avaler selon la gravité, ainsi que des badigeonnages d’acide
tranexamique à l’aide d’une compresse non tissée à distance des repas. La pommade
HEC n’a pas été prescrite car elle est adaptée à la muqueuse nasale mais pas forcément
à la muqueuse buccale et son efficacité n’est pas prouvée. D’autre part, les
badigeonnages de gel buccal de lidocaïne n’ont pas été prescrits puisqu’ils ne traitent
pas l’hémorragie en elle-même. Si le patient a besoin de soulager sa douleur, le
protocole « bouche douloureuse avec ou sans lésions » doit être associé puisqu’il
contient la totalité des traitements antalgiques et pas seulement un anesthésique local.
3.4.3.
Nouvelles ordonnances de sorties
Les ordonnances de sortie ont été créées en collaboration avec la secrétaire d’oncologie
ambulatoire. Elles ont été mises à disposition dans le service d’oncologie ambulatoire et
transmises aux secrétaires des autres services de soins prenant en charge des patients
sous chimiothérapie pour qu’elles les intègrent dans le logiciel de prescription de leur
service. Les prescriptions sont pour une durée d’un mois, afin que le patient puisse
renouveler les médicaments selon ses besoins, jusqu’à la prochaine cure où son état
devra être réévalué. Le prescripteur a la possibilité d’ajuster cette durée si nécessaire.
3.4.3.1.
En fonction du grade de mucite
3.4.3.1.1.
Grade 0
Le bicarbonate de sodium 1,4% a été choisi car cette forme est remboursée. Son
inconvénient est que le flacon ne se garde pas plus de 48 heures au réfrigérateur après
ouverture et comme le patient doit pratiquer des soins de bouche tous les jours pendant
la chimiothérapie, cela représente une grande quantité de flacons à se procurer et à
stocker.
83
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Une alternative avec le bicarbonate de sodium sous forme de poudre a été proposée,
non remboursée, mais à préparer extemporanément. Cette forme à mettre en
suspension peut être préférée par certains patients pour son côté pratique. (ANNEXE 5)
3.4.3.1.2.
Grade 1
Le sucralfate est à mettre en suspension dans de l’eau de boisson pour éviter au patient
de se procurer des ampoules d’eau stérile puisque la préparation de cette suspension
est extemporanée.
Concernant le traitement antalgique, deux ordonnances types ont été préparées. La
première contient un antalgique de palier I par défaut et la seconde des antalgiques de
palier I et de palier II avec un traitement de fond à base de tramadol à libération
prolongée associé à des interdoses de l’association de paracétamol et tramadol. La dose
totale ne dépasse pas 400 mg de tramadol et 3 g de paracétamol par jour. Pour cela un
comprimé 3 fois par jour de paracétamol 500 mg et maximum 4 comprimés par jour de
l’association de paracétamol et tramadol par jour ont été prescrits.
3.4.3.1.3.
Grade 2
Dans cette ordonnance, le bain de bouche de sucralfate a été prescrit en alternance
avec la préparation de bicarbonate, corticoïdes et anesthésique local.
Le gel buccal de lidocaïne est prescrit avec des compresses non tissées car elles sont
plus douces que les compresses de gaze.
Le même protocole antalgique que précédemment a été conservé.
3.4.3.1.4.
Grade 3
Le bain de bouche de sucralfate a été supprimé car, à ce stade, l’effet bénéfique est
trop minime pour soulager le patient. La préparation de bicarbonate et anesthésique
local contient une dose plus élevée de corticoïdes pour augmenter l’effet antiinflammatoire.
Les antalgiques n’ont pas été prescrits car le sulfate de morphine nécessite une
ordonnance sécurisée, il devra donc être prescrit à part.
84
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
3.4.3.1.5.
Grade 4
Cette ordonnance de sortie n’a pas été créée à cause des antidouleurs stupéfiants qui
nécessitent une ordonnance sécurisée, ce qu’il n’est pas possible de réaliser de façon
pré-remplie. D’autre part l’intérêt des soins locaux sera discuté au cas par cas en RCP.
3.4.3.2.
En fonction des problèmes de bouche
3.4.3.2.1.
Bouche sèche
Dans la première version créée, seuls les bains de bouche au bicarbonate de sodium et
la salive artificielle sont prescrits. Dans la seconde, l’anétholtrithione a été ajoutée
dans le cas où les traitements locaux s’avèrent insuffisants.
3.4.3.2.2.
Candidoses
Pour ces ordonnances, la durée de traitement n’a pas été pré-remplie afin que le
prescripteur puisse choisir la durée minimale de traitement et ainsi éviter que le
patient utilise l’amphotéricine B en continu. Une première version a été créée pour les
candidoses minimes à modérées, le bain de bouche d’amphotéricine B est à recracher,
tandis que pour les formes étendues, sévères ou récidivantes, le bain de bouche
d’amphotéricine B est à avaler.
3.4.3.2.3.
Herpès
Dans la première version, l’antiviral a été prescrit uniquement par voie locale à 5
applications par jour.
Dans la seconde version, l’antiviral par voie locale a été associé à la voie orale à un
comprimé de valaciclovir 500 mg deux fois par jour pendant 5 jours. La voie
intraveineuse est réservée aux cas d’hospitalisation.
3.4.3.2.4.
Aphtose
La première version comprend le traitement antalgique de palier I associé aux soins
locaux. La seconde version comprend une combinaison d’antalgiques de palier I et de
palier II.
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(CC BY-NC-ND 2.0)
3.4.3.2.5.
Bouche douloureuse avec ou sans lésions
Les soins locaux et le traitement antalgique de palier I ont été prescrits dans une
première version. Dans la seconde, les antalgiques de palier I et II ont été combinés.
3.4.3.2.6.
Bouche hémorragique
Les ampoules d’acide tranexamique ont été prescrites en applications locales et en bain
de bouche à avaler sur la même ordonnance pour que le patient adapte en fonction de
ses saignements si les applications sont insuffisantes.
3.4.4.
Communication
Une communication la plus large possible sur les nouveaux protocoles a été entreprise
pour éviter qu’ils ne soient pas prescrits ou mal utilisés comme les protocoles
préexistants.
Pour commencer les anciens protocoles ont été désactivés afin d’éviter qu’ils
continuent à être utilisés.
Ensuite, un lien vers un fichier PDF résumant tous les stades de mucites ou tous les
problèmes de bouche avec les recommandations associées a été inclus dans chaque
protocole.
Ces protocoles ont également été présentés à la réunion des 3C, auprès des principaux
médecins oncologues de l’hôpital. Un mail a été envoyé à tous les médecins et les
internes en médecine de l’hôpital pour les informer de la création des protocoles et des
ordonnances de sortie correspondantes. Les internes en pharmacie ont également été
informés pour qu’ils diffusent l’information dans les services dans lesquels ils
interviennent.
Enfin, les documents PDF résumant la prise en charge et les symptômes des grades de
mucites et des différents problèmes de bouche ont été inclus au module des aides
soignantes et des infirmières afin qu’elles puissent alerter le médecin sur des signes
observés et surtout pour qu’elles soient au courant de la méthode de prise en charge.
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(CC BY-NC-ND 2.0)
3.5. Evaluation
Les patients ont été interrogés grâce à un questionnaire à propos des ordonnances de
sortie prescrites et des traitements qu’ils pouvaient avoir à réaliser chez eux.
Ce questionnaire a été élaboré pour prendre moins de 5 minutes et pour s’adresser aux
patients ayant reçu une ordonnance contenant des traitements contre les mucites.
Seulement 10 patients ont été interrogés. (ANNEXE 6)
Les points positifs des résultats du questionnaire sont :
-
L’échantillon varié de patients obtenu puisqu’ils avaient des antécédents de 2 à
48 mois de chimiothérapie.
-
La bonne compréhension de l’ordonnance de soins de bouche, même pour ceux
qui ne les effectuaient pas en pratique.
-
La satisfaction des conseils qui leur ont été donnés lors de la dispensation à
l’officine.
En réalité, concernant ce qui leur a été conseillé, la plupart répondent qu’ils n’ont pas
reçu de conseils, mais qu’ils ne jugeaient pas cela nécessaire car ils ne voient pas ce qui
aurait pu leur être expliqué à ce sujet et ils n’ont aucune question à poser. Pour
beaucoup de patients, cette ordonnance « n’a rien de compliqué ». Beaucoup ont dit
que, comparé à la complexité de la chimiothérapie ou des traitements antiémétiques,
cela n’était « pas grande chose ». Les patients ont plus de commentaires à faire sur les
antiémétiques et la cortisone, qui se trouvent parfois sur la même ordonnance, que sur
les bains de bouche.
Les patients n’ont donc pas reçu de conseils d’hygiène bucco-dentaire, ni de conseils
d’hygiène de vie.
Un des patients, qui avait la bouche sèche, ne savait pas qu’il pouvait utiliser le bain de
bouche de bicarbonate de sodium plusieurs fois dans la journée pour hydrater la
muqueuse et il n’a pas entendu parler de la salive artificielle.
En creusant un peu, la majorité des patients ne savaient pas comment, ni combien de
temps conserver le bain de bouche, mais ils ne s’étaient même pas posé la question et
cela n’était pas un problème pour eux.
D’autre part, il est recommandé de conserver au réfrigérateur les solutions de bains de
bouche une fois ouverte mais l’utilisation froide est impossible pour certains patients à
cause d’une sensibilité dentaire.
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(CC BY-NC-ND 2.0)
Par ailleurs, l’efficacité préventive des traitements est difficile à évaluer car une
majorité de patients n’a pas de symptômes et n’en aurait peut être pas non plus sans
les traitements. A contrario, pour les patients qui ont une mucite, les traitements se
révèlent souvent insuffisants pour les soulager.
En résumé cette ordonnance parait négligée par les patients et par le pharmacien, alors
que des conseils simples pourraient augmenter l’efficacité de la prévention des
mucites.
3.6. Conclusion
Comme cela a été décrit, les traitements sont plus symptomatiques que spécifiques et
leur efficacité est sans cesse remise en cause devant des résultats peu convaincants.
Grâce à l’évolution des connaissances sur le processus biologique qui aboutit aux
mucites, de nouvelles cibles sont en train de voir le jour pour de potentiels nouveaux
traitements(34).
A l’heure actuelle, les mesures préventives sont le traitement le plus efficace et même
si elles peuvent paraître contraignantes, elles évitent aux patients de connaître les
désagréments des mucites(45). C’est pourquoi le rôle des professionnels de santé est si
important dans l’information, la motivation et l’éducation des patients(64).
D’autre part, les référentiels scientifiques fournissent peu de réponse pour la majorité
des patients. Ce travail s’est basé sur des référentiels plus pratiques, rédigés par des
professionnels de santé qui souhaitent apporter des solutions aux patients, malgré la
faible efficacité des produits. Ainsi, faute de mieux, et dans l’espoir de soulager les
patients, les bains de bouche combinant corticoïdes et anesthésique local ont été
conservés dans les protocoles et les ordonnances de sortie, malgré le fait qu’ils ne
soient pas recommandés par les référentiels scientifiques plus récents.
Le but de ce travail a été de tenter de diffuser au niveau local les recommandations
actuelles et de sensibiliser les professionnels de santé à une pathologie qui peut être
négligée dans un contexte de cancer.
88
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(CC BY-NC-ND 2.0)
4. Prise en charge des nausées et vomissements chimio-induits
4.1.Objectifs
L’objectif principal de ce travail est la mise à jour des protocoles de prévention et de
traitement des nausées et vomissements chimio-induits. D’autre part, le développement
de
la
communication
sur
les
conseils
d’hygiène
de
vie
et
les
médecines
complémentaires qui peuvent jouer un rôle dans le contrôle de cet effet secondaire est
également un axe majeur de ce travail.
4.2. Matériels et méthodes
4.2.1.
Références
Pour cet axe de travail, les référentiels utilisés sont ceux de l’AFSOS, mis à jour en 2013
à partir des recommandations MASCC/ESMO de la conférence de Perugia en 2009 et de
celles de l’ASCO publiées en 2011. Une étude sur plus de 1200 patients a montré que
l’adhésion aux recommandations du MASCC a augmenté de 31% la chance de n’avoir
aucun événement émétisant dans les 5 jours suivant une chimiothérapie hautement ou
moyennement émétisante par rapport aux patients pour lesquels ces recommandations
n’étaient pas pleinement suivies(70).
4.2.2.
4.2.2.1.
Mesures non médicamenteuses
Education du patient
Avant toute chose, il est important d’établir une relation de confiance avec le patient
en lui expliquant l’objectif thérapeutique et l’intérêt des antiémétiques.
Optimiser l’observance du protocole antiémétique est indispensable et le patient doit
respecter rigoureusement les horaires de prise des médicaments antiémétiques. Les
formes galéniques sont également variées pour favoriser l’observance. En effet,
certaines spécialités sont présentées en lyophilisats oraux ce qui présente l’avantage de
pouvoir se prendre n’importe où et sans eau puisqu’il se disperse en quelques secondes
sur la langue. Enfin, si le patient ne supporte pas la prise par voie orale, il existe des
suppositoires pour certaines spécialités(48).
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(CC BY-NC-ND 2.0)
L’éducation thérapeutique doit permettre d’insister sur l’observance, même si les
symptômes de nausées et vomissements sont absents, et les éventuelles conséquences
du non suivi du traitement doivent être expliquées(47).
4.2.2.2.
Conseils hygiéno-diététiques
Au-delà du traitement antiémétique, des mesures hygiéno-diététiques existent. Elles
permettent de réduire les nausées et vomissements induits par la chimiothérapie,
même si, de manière générale, l’adoption de bonnes habitudes de vie fait partie
intégrante des traitements du cancer(47)(54). Il est par exemple conseillé d’éviter le
tabac et, si le patient le souhaite, d’arrêter de fumer(50). Un accompagnement peut
être proposé dans ce cas.
Pendant les 24 heures qui précèdent la cure, afin de limiter l’incidence des aversions
alimentaires chimio-induites et de réduire les nausées et vomissements, il est
recommandé d’éviter la consommation d’aliments nouveaux ou que le patient aime
particulièrement. En effet, plus l’alimentation des 24 heures précédant la première
cure est diversifiée, plus le risque d’aversion alimentaire est important(48).
La chimiothérapie peut également affecter la sensibilité de l’odorat. Certaines odeurs,
jusque là supportables, deviennent désagréables et accentuent les nausées et les
vomissements. Il est donc préférable d’éviter les odeurs prononcées comme les fritures,
les poissons, les choux, les oignons, les peintures, les parfums et de modifier la
préparation et la cuisson de certains aliments, en pensant par exemple à réchauffer à
basse température pour limiter les odeurs(48).
Après la cure, il est conseillé d’adapter son alimentation(50). Les aliments froids
comme les sandwichs, les salades, les produits céréaliers, le pain grillé, les biscottes et
les fruits frais sont à privilégier(47)(48). Il faudra éviter les aliments acides, les
marinades et les aliments lourds ou difficiles à digérer comme les aliments frits, gras ou
épicés(47)(50).
Les repas conviviaux, soigner la présentation des aliments et varier les menus, sont des
éléments qui peuvent faciliter la prise alimentaire(48). D’autre part, le patient doit
prendre son temps et manger lentement afin de faciliter la digestion(50). Il est
également recommandé de rester en position assise pendant 30 minutes après le repas.
90
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Si la position couchée est utilisée, il est préférable de se mettre sur le côté droit afin de
favoriser la vidange gastrique(54).
Le patient ne doit pas s’angoisser si la quantité d’aliments ingérée est insuffisante car
le plus important est qu’il mange ce qui lui fait plaisir et envie(48)(50). En cas de perte
d’appétit, il faut favoriser l’hydratation afin de prévenir une insuffisance rénale,
fractionner l’alimentation en 6 à 8 petits repas, encourager l’enrichissement de
l’alimentation avec du beurre, des sauces, des jus, des œufs et de la crème par
exemple et privilégier les aliments à haute densité calorique(47)(50)(54). Si le patient
ne peut plus du tout manger pendant plusieurs jours, il peut être utile de lui proposer
des compléments hyperprotéinés et hypercaloriques aux parfums et textures variés(48).
Enfin, le patient devra boire plutôt avant ou après les repas des boissons à son goût en
variant entre eau, infusions, jus de pomme et boisson à base de cola dégazé, par
exemple. Si besoin, il pourra utiliser une paille dans une tasse fermée pour faciliter les
petites gorgées et éviter les odeurs(50)(54). De plus, les boissons gazeuses fraîches,
notamment les sodas frais à base de cola, peuvent participer à diminuer les
nausées(48)(50).
Si des vomissements surviennent, le patient doit se rincer la bouche à l’eau froide et
attendre 1 à 2 heures avant de manger à nouveau(50). En cas de vomissements
récurrents, des bains de bouche mentholés peuvent être proposés. L’horaire de
survenue, la fréquence des vomissements et une éventuelle perte de poids et d’appétit
devront être transmis rapidement au médecin(48).
A la suite de la chimiothérapie, les saveurs sucrées ou salées peuvent être perçues
différemment de manière temporaire. Les aliments peuvent également laisser un goût
métallique ou amer dans la bouche qui peut favoriser l’apparition des nausées.
En cas de goût métallique, il faut privilégier les poissons, les œufs et les laitages plutôt
que les viandes et remplacer les légumes verts par des féculents comme les pommes de
terre, les pâtes et le riz. Boire beaucoup peut également permettre d’atténuer le goût
étranger qui persiste dans la bouche, par exemple de l’eau, du thé, des jus de légumes
ou de fruits frais, des boissons gazeuses citronnées ou de la limonade.
D’autre part si la viande dégoûte le patient, il faut plutôt lui conseiller la volaille, les
œufs, le fromage et le poisson(48).
91
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4.2.2.3.
Médecines complémentaires
Il est important de lutter contre les facteurs favorisant les nausées et vomissements,
comme l’anxiété et le stress(48). Sur ce point, les médecines complémentaires ont un
rôle à jouer dans la prévention des NVCI(54).
L’efficacité de l’acupuncture est validée depuis 1997 et il est recommandé d’effectuer
une séance d’acupuncture la veille ou quelques heures après la chimiothérapie.
L’électrostimulation aurait une efficacité supérieure à l’acupuncture simple, sur
l’incidence des vomissements aigus. De même, l’acupression permet de diminuer la
sévérité des nausées aiguës mais il n’y a pour l’instant pas de données sur l’efficacité
sur les événements retardés.
Ces méthodes présentent peu d’effets indésirables et ils sont tous liés à
l’électrostimulation : rash transitoire, irritation de la peau aux points de l’électrode,
choc électrique et aggravation de la paresthésie chez un patient atteint de neuropathie
périphérique(54).
D’autre part, la pratique d’activités relaxantes comme le yoga ou les techniques de
respiration peuvent être bénéfiques. Le patient doit idéalement se libérer le plus
souvent possible des contraintes ménagères et professionnelles et surtout juste avant ou
après la cure(48).
4.2.3.
4.2.3.1.
Médicaments disponibles
Antagonistes des récepteurs dopaminergiques de type 2
Il existe 5 types de récepteurs dopaminergiques, mais jusqu’à de récentes découvertes,
seuls les récepteurs dopaminergiques de type 2 (D2) étaient connus pour être impliqués
dans la physiopathologie des nausées et vomissements(55).
Les antagonistes des récepteurs D2 agissent au niveau central. Ils bloquent de façon
spécifique et réversible les récepteurs D2 de l’area postrema. Ces médicaments
appartiennent à la classe thérapeutique la plus ancienne et avec l’index thérapeutique
le plus faible dans la prise en charge des NVCI(36)(48).
Les benzamides (alizapride et métoclopramide), les butyrophénones (dompéridone,
halopéridol) et les dérivés des phénothiazines (métopimazine) font partie de cette
famille. L’alizapride, le métoclopramide et la métopimazine agissent seulement sur
l’area postrema. L’halopéridol agit également sur le noyau du tractus solitaire et le
centre du vomissement.
92
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A fortes posologies, ils bloquent également les récepteurs sérotoninergiques 5-HT3 mais
leur activité antiémétique reste inférieure à celle des sétrons. Le métoclopramide
exerce en plus une action facilitatrice sur la vidange gastrique et tonique sur la
motricité intestinale. Il est notamment utilisé pour contrôler les nausées et
vomissements iatrogènes induits par l’administration d’antalgiques opiacés adjuvants au
traitement anticancéreux(48).
Tous les antagonistes dopaminergiques exposent à un risque de somnolence, d’asthénie,
de tremblements, d’étourdissements, d’anxiété et d’agitation ainsi qu’à des effets
neurovégétatifs tels qu’une hypotension orthostatique, une sécheresse buccale, une
constipation, des troubles de l’accommodation ou une rétention urinaire(47)(48).
L’halopéridol, en franchissant la barrière hémato encéphalique, peut être à l’origine
d’effets indésirables moteurs dose-dépendants, avec une akinésie, une rigidité
musculaire et des dystonies aiguës. L’alizapride, le métoclopramide, la métopimazine
ou la dompéridone ont moins d’effets secondaires centraux car ces molécules
franchissent difficilement la barrière hémato encéphalique(48).
Des effets endocriniens à type d’élévation de la prolactinémie avec gynécomastie,
galactorrhée ou troubles des règles, sont également décrits avec la métopimazine ou
l’alizapride(48). Des troubles extrapyramidaux ont été décrits de façon exceptionnelle
pour le métoclopramide. Par ailleurs, les effets secondaires tout comme l’efficacité du
métoclopramide augmentent avec la dose, probablement en raison de ses capacités
d’inhibition des récepteurs 5-HT3 à des concentrations sanguines élevées(36).
L’alizapride traverse peu la barrière hémato-méningée, ce qui explique qu’il ait la
toxicité neurologique la plus faible. Il vaut donc mieux préférer l’alizapride intra
veineux (IV) au métoclopramide IV(54).
Les antidopaminergiques sont le traitement privilégié en cas de mauvaise tolérance des
sétrons, d’échec de l’association sétrons et corticoïdes, de traitement de secours et de
prophylaxie des chimiothérapies faiblement émétisantes en cas de contre-indication aux
corticoïdes(36)(48).
En prophylaxie secondaire, il faudra préférer la perfusion continue d’alizapride avec 5 à
20 mg/kg/24h, soit 6 à 8 ampoules de 50 mg en perfusion continue.
En traitement de secours, la posologie d’alizapride sera de 2 à 4 ampoules de 50 mg en
perfusion de 15 minutes, renouvelable 3 fois(54).
Les doses usuelles, soit 20 mg pour le métoclopramide et 100 mg pour l’alizapride par
injection, peuvent être doublées. En cas d’inefficacité, il est recommandé de faire une
rotation avec d’autres antiémétiques plutôt que d’augmenter encore les doses(36).
93
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(CC BY-NC-ND 2.0)
4.2.3.2.
Antagonistes des récepteurs sérotoninergiques de type 3 ou
sétrons
Les sétrons sont des antagonistes hautement sélectifs des récepteurs 5-HT3 dont la
densité est élevée dans l’area postrema et dans les terminaisons nerveuses vagales
afférentes de l’intestin(48). L’inhibition périphérique de ces récepteurs au niveau des
fibres vagales afférentes constitue le principal mécanisme par lequel les anti-5-HT3
exercent leur effet antiémétique(56). En effet, les sétrons bloquent les influx vagaux
émétisants induits par la libération massive de sérotonine par les cellules
entérochromaffines de l’intestin, lorsque la muqueuse entérique est agressée par les
agents cytotoxiques. A cela s’ajoute une action antagoniste sérotoninergique centrale
par blocage des récepteurs de l’area postrema et du NTS(48).
Il existe 4 molécules : ondansétron, granisétron, tropisétron et palonosétron(54)(57).
Ces molécules sont sur le marché depuis les années 1990, sauf le palonosétron qui est
un sétron de deuxième génération commercialisé en France seulement depuis 2012(56).
Une étude chez des patients recevant du cyclophosphamide a montré que les sétrons
sont meilleurs que le placebo pour prévenir les vomissements(71).
Ils sont utilisés en prévention des NVCI aiguës. Les formes injectables sont administrées
par perfusion ou par intraveineuse lente avant la chimiothérapie. La voie orale à dose
adaptée est aussi efficace que la voie intraveineuse. Les formes orales sont également
administrées avant la chimiothérapie et la prise peut être renouvelée au bout de 12
heures, ce qui correspond au temps de demi-vie des sétrons de première génération.
D’autre part, l’efficacité des doses uniques quotidiennes est similaire à celles des doses
multiples(48)(54).
Une méta-analyse de 8 études a évalué l’utilisation des sétrons pour prévenir les
vomissements retardés après une chimiothérapie modérément émétisante. Elle a
conclue à une réduction minime du risque relatif de vomissements. Par ailleurs, une
analyse ultérieure met en doute la rentabilité de l’utilisation des sétrons dans la
prévention des vomissements retardés en ce qui concerne le rapport coût / efficacité.
En effet, l’une des plus grandes études incluse dans la méta-analyse évoquée
précédemment, est un essai qui compare un placebo versus la dexaméthasone, versus la
dexaméthasone et un sétron. Cet essai a démontré que la dexaméthasone est
supérieure au placebo pour diminuer les vomissements retardés, mais que la
dexaméthasone et le sétron ne sont pas supérieurs à la dexaméthasone seule. D’autre
part, l’association provoque plus de constipation chez les patients l’ayant reçu(71).
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Selon l’AFSOS il n’y a aucun bénéfice à donner un sétron en phase retardée des NVCI,
c’est-à-dire après J1(54).
L’impact sur les nausées et vomissements anticipés n’est pas clairement défini. Une
étude a montré une incidence plus faible des nausées et vomissements anticipés grâce
aux antagonistes des récepteurs 5-HT3 et trois études ont montré des taux similaires de
nausées et vomissements anticipés avec ou sans les antagonistes 5-HT3. Il semblerait
que ces molécules réduisent les vomissements post-chimiothérapie mais pas les nausées
post-chimiothérapie(53).
De manière générale, les différents sétrons sont équivalents en termes d’efficacité et
d’innocuité. Leur activité est puissante puisqu’en monothérapie ils donnent des taux de
réponse complète compris entre 40% et 60% pour les chimiothérapies hautement
émétisantes
et
entre
60%
et
80%
pour
les
chimiothérapies
moyennement
émétisantes(48)(71).
Le palonosétron a montré une efficacité supérieure aux sétrons de première génération
dans les NVCI retardées des chimiothérapies modérément émétisantes. Sa demi-vie est
de 40 heures, contrairement aux sétrons de 1ère génération et il a une meilleure
affinité pour les récepteurs 5-HT3(54)(71).
Bien que le palonosétron ait montré sa supériorité aux autres sétrons dans deux études,
la majorité du comité de la MASCC estime pour l’instant qu’il n’y a pas suffisamment de
preuve pour soutenir une recommandation en sa faveur. Il n’y a que dans le cas d’une
chimiothérapie
modérément
émétisante,
hors
association
anthracycline
et
cyclophosphamide, que le palonosétron est recommandé en première intention. Aucune
étude randomisée n’a évalué l’association du palonosétron avec les antagonistes des
récepteurs NK1, donc en cas d’association anthracycline et cyclophosphamide il est
préférable d’utiliser un autre sétron(59). La MASCC et l’ASCO ne recommandent pas un
sétron plus qu’un autre(71).
Les sétrons bénéficient en général d’une bonne tolérance. Les principaux effets
indésirables sont des céphalées, des sensations vertigineuses, des bouffées de chaleur,
des flushs, une rare élévation des transaminases, des douleurs abdominales transitoires
et surtout une constipation par diminution de la motilité intestinale et des sécrétions
liquidiennes entériques. Si cet effet peut s’avérer bénéfique chez des patients soumis à
un traitement anticancéreux induisant des diarrhées, il tend à aggraver une constipation
induite par l’administration d’antalgiques opiacés. L’usage de sétrons n’induit ni
troubles neurologiques extrapyramidaux, ni sédation.
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En revanche, il existe un risque d’hypersensibilité croisée entre tous les sétrons ainsi
qu’un risque cardiovasculaire de type douleurs thoraciques, hypotension, troubles du
rythme, fibrillation ventriculaire, notamment avec les formes injectables(48).
4.2.3.3.
Corticoïdes
Les corticoïdes limitent la réponse aux stimuli émétisants causés par la libération
massive dans le sang de produits de lyse cellulaire intestinale. Une régulation négative
de l’activité des cytokines et des prostaglandines pro-inflammatoires et émétisantes est
également un mécanisme décrit(48).
Ils sont indiqués dans la prophylaxie des NVCI retardés et leur intérêt, seul pour une
chimiothérapie peu émétisante, ou en association à d’autres médicaments pour une
chimiothérapie plus émétisante, a été démontré par plusieurs études randomisées. En
effet, les corticoïdes potentialisent l’effet des autres antiémétiques comme le
métoclopramide et les sétrons. L’association dexaméthasone et sétron permet un gain
compris entre 20% et 30% dans la réduction des nausées et des vomissements chez des
patients traités par cisplatine(47)(48).
Les corticoïdes s’administrent en prise unique journalière et l’efficacité per os est
similaire à celle par voie intraveineuse(47).
Le corticoïde de référence est la dexaméthasone, cependant il n’y a pas de supériorité
par rapport aux autres corticoïdes à posologie équivalente(47). La posologie
recommandée est de 20 mg de dexaméthasone en cas de chimiothérapie hautement
émétisante et de 8 mg en cas de chimiothérapie moyennement émétisante. La
méthylprednisolone ou la prednisolone peuvent également être utilisées selon
l’équivalence
suivante :
0,5
mg
de
dexaméthasone
équivaut
à
8
mg
de
méthylprednisolone et à 10 mg de prednisolone(48).
La supériorité de la dexaméthasone par rapport au placebo dans la prévention des
vomissements retardés chez les patients recevant une chimiothérapie modérément
émétisante a été démontrée dans plusieurs études(71).
Les effets indésirables fréquents des corticoïdes sont une insomnie, une agitation et des
bouffées vasomotrices de la face survenant le jour-même de la prise ou le
lendemain(54). Il peut également y avoir, à plus long terme, une hyperglycémie, des
œdèmes, une prise de poids, une augmentation de l’appétit et de l’acné(47).
96
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(CC BY-NC-ND 2.0)
4.2.3.4.
Antagonistes des récepteurs aux neurokinines de type 1
Les tachykinines sont une famille de peptides de petites et moyennes tailles. Leurs
récepteurs sont couplés aux protéines G et sont appelés récepteurs aux neurokinines
(NK). La substance P a plus d’affinité pour les récepteurs NK1 que la tachykinine(55).
La substance P est un oligopeptide de onze acides aminés exerçant une activité
neuromédiatrice. Elle se trouve dans les fibres vagales afférentes au niveau du tube
digestif ainsi qu’au niveau du centre du vomissement dans l’encéphale. Son injection
déclenche chez l’animal des vomissements corrélés à sa liaison aux récepteurs NK1.
Les antagonistes des récepteurs NK1 s’opposent à l’action de la substance P sur les
fibres vagales et au sein même des structures cérébrales impliquées dans le contrôle
des vomissements(48). Mais même si les antagonistes des récepteurs NK1 peuvent avoir
un site d’action périphérique, leur efficacité clinique repose essentiellement sur leur
action centrale(56). Pour exercer leur action antiémétique, les antagonistes des
récepteurs NK1, doivent traverser la barrière hémato-encéphalique. Cette contrainte
explique leur délai d’action(55).
L’aprépitant, chef de file de cette famille, a été mis sur le marché en 2000(54)(56). Une
étude à grande échelle a confirmé que le fosaprépitant en une seule injection
intraveineuse est aussi efficace que l’aprépitant mais cette molécule n’est pour
l’instant pas disponible en France. Il n’y a donc qu’une forme par voie orale(36)(49).
L’aprépitant n’a été indiqué au départ que dans la prévention des nausées et des
vomissements aigus et retardés associés à une chimiothérapie anticancéreuse
hautement émétisante comprenant du cisplatine(48). Puis en 2005, il a obtenu
l’indication dans les chimiothérapies moyennement émétisantes(72).
Une étude a montré que malgré la prophylaxie par ondansétron, la majorité des
patients recevant une chimiothérapie avait des nausées. La fréquence des nausées
retardées était même deux fois plus élevée que celle des nausées aiguës. Ceci montre
bien quelle était l’importance de trouver un traitement efficace pour contrôler les
nausées retardées(52).
L’aprépitant associé aux autres antiémétiques améliore significativement le contrôle
des NVCI à la phase aiguë et retardée(36).
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L’aprépitant améliore la qualité de vie évaluée par le Functional Living Index, puisque
74% des patients l’ayant reçu reportent peu ou pas d’impact sur leur vie quotidienne dû
aux nausées et vomissements, contre 64% des patients témoins.
D’autre part, les données suggèrent que l’administration d’aprépitant annule le facteur
pronostic défavorisant qu’est le sexe féminin, chez les patientes qui reçoivent une
chimiothérapie hautement émétisante.
Par ailleurs, ces études randomisées précisent également le rôle de l’aprépitant dans la
prophylaxie des vomissements retardés. Deux études ont comparé la bithérapie qui
associe l’aprépitant à la dexaméthasone dans les jours qui suivent la chimiothérapie,
contre la dexaméthasone seule. Individuellement ou par une analyse groupée, ces
études ont montré que la bithérapie avec l’aprépitant est associé à une diminution
significative des vomissements retardés, comparés à la dexaméthasone seule(71).
Le traitement par aprépitant bénéficie d’une bonne tolérance. Les effets iatrogènes
rapportés sont des céphalées, une asthénie, des sensations vertigineuses, une anorexie,
des troubles digestifs de type constipation, diarrhée, dyspepsie, éructation et un risque
de survenue de hoquet(36)(48)(54).
L’aprépitant subit un important métabolisme hépatique au niveau de l’isoenzyme
CYP3A4 vis-à-vis duquel il agit à la fois comme inducteur et comme inhibiteur. De plus,
l’aprépitant est inducteur du CYP2C9(48).
Par conséquent, les interactions médicamenteuses sont nombreuses. L’aprépitant
accélère
le
catabolisme
de
divers
médicaments
anticancéreux,
dont
le
cyclophosphamide(48)(54). L’association avec l’ifosfamide entraîne un risque de toxicité
neurologique
sous
forme
d’encéphalopathie(36)(54).
La
diminution
des
doses
d’ifosfamide est donc à réaliser si les deux molécules doivent être associées(36).
L’AFSOS recommande même de ne pas associer l’aprépitant à l’ifosfamide en première
intention. De même avec la trabectédine, qui présente un risque d’hépatotoxicité de
type cytolyse hépatique, majoré par l’association à l’aprépitant. L’aprépitant n’est
donc pas recommandé en première intention avec cette molécule et si l’association est
nécessaire, l’aprépitant sera donné à dose diminuée et sous surveillance de la fonction
hépatique(54).
98
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
D’autre part, il inhibe le catabolisme de la dexaméthasone, avec laquelle il doit être
associé. Il est donc important de diminuer la posologie du corticoïde(48). La dose orale
habituelle de dexaméthasone et de méthylprednisolone doit être réduite d’environ 50%
et la dose habituelle de méthylprednisolone administrée par voie intraveineuse doit
être réduite d’environ 25%(36). Selon l’AFSOS, la posologie des corticoïdes à visée
antiémétique doit être diminuée de 40% quand ils sont associés à l’aprépitant : soit une
diminution de 20 mg à 12 mg pour la dexaméthasone dans les chimiothérapies
hautement émétisantes(54).
L’aprépitant diminue l’efficacité des contraceptifs à base d’éthinyloestradiol et de
norethindrone
et il est donc recommandé de recourir à un second moyen de
contraception(36).
Les
inducteurs
enzymatiques
comme
la
carbamazépine,
le
millepertuis, la phénytoïne, la rifampicine, le phénobarbital risquent de rendre
inefficace l’aprépitant(48). Avec la warfarine, l’INR doit être surveillé étroitement au
cours du traitement par l’aprépitant et au cours des 2 semaines suivantes. Les essais ont
montré que chez ces patients l’administration d’aprépitant était suivie d’une réduction
de 34% de la concentration résiduelle de la S-warfarine et d’une diminution de 14% de
l’INR 5 jours après la fin du traitement par aprépitant(36).
4.2.3.5.
Benzodiazépines
Les benzodiazépines ont une faible activité antiémétique indirecte. Elles ont un intérêt
dans la prophylaxie et le traitement des nausées et vomissements anticipés. Leur
activité est probablement liée à leur action sédative, anxiolytique et amnésiante. Ces
molécules potentialisent l’action de certains antiémétiques plus puissants comme le
métoclopramide et les corticoïdes. Elles peuvent également être utilisées en
complément des autres associations d’antiémétiques chez les patients anxieux. Sont
surtout prescrits le lorazépam, le clorazépate dipotassique et l’alprazolam. Il est
recommandé de préférer les benzodiazépines à demi-vie courte comme l’alprazolam
pour éviter le risque d’accumulation chez les patients âgés et les insuffisants
rénaux(48)(54).
4.2.3.6.
Autres médicaments
L’olanzapine dispose d’un effet inhibiteur sur les récepteurs dopaminergiques,
sérotoninergiques, alpha 1 adrénergiques, muscariniques et histaminergiques de type 1.
99
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Elle a été testée à 5 mg par jour contre placebo chez 44 patients recevant également
une prophylaxie antiémétique optimale. La fréquence d’événements antiémétiques
était significativement réduite dans le bras olanzapine(36)(73).
Une étude a montré que l’olanzapine était aussi efficace que l’aprépitant contre les
nausées et vomissements dus aux chimiothérapies hautement émétisantes. L’ajout de
l’olanzapine aux traitements antiémétiques classiques a permis de réduire les nausées
de grade 3 de 42 à 8% et les vomissements de grade 3 de 67 à 0%. 42% des patients n’ont
pas eu besoin de traitement antiémétique de secours malgré le mauvais contrôle de cet
effet indésirable lors du cycle précédent(73).
Enfin, une étude a comparé l’utilisation de l’olanzapine à 10 mg par jour durant 3 jours
au métoclopramide à 20 mg par jour pendant 3 jours chez des patients présentant des
NVCI réfractaires malgré une chimio-prophylaxie optimale dans des chimiothérapies
hautement émétisantes. Sur les 108 patients, 70% de ceux sous olanzapine n’ont
présenté aucun événement contre 39% de ceux sous métoclopramide(74).
L’olanzapine est donc efficace pour prévenir les NVCI aigus et retardés et notamment
en cas de NVCI réfractaires. Cette indication est pour l’instant toujours hors AMM et elle
n’est donc pas remboursée, sauf accord du médecin conseil. La posologie recommandée
est de 10 mg par jour(54).
L’ASCO, le National Comprehensive Cancer Network (NCCN) et l’ESMO/MASCC
considèrent tous l’olanzapine comme une option thérapeutique(36).
Concernant sa tolérance, 67% des patients se sont plaint de somnolence et de vertiges
de grade 1 et 33% de grade 2. Ceci a conduit à diminuer la dose ou la durée du
traitement par olanzapine tout en maintenant l’efficacité(73).
La mirtazapine et l’halopéridol entre 0,5 à 2 mg per os ou intraveineux toutes les 4 à 6
heures peuvent également apporter un bénéfice dans le contrôle des nausées(36)(54).
D’autre part, l’histamine et l’acétylcholine ont un rôle important dans le mal des
transports. La scopolamine transdermique pourrait avoir une efficacité, de même que
les phénothiazines, cependant les études concernant les antihistaminiques et les anticholinergiques montrent un faible effet ou pas d’effet contre les nausées et
vomissements chimio-induits(36)(55).
100
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Le seul autre neurotransmetteur connu pour être impliqué dans les vomissements
chimio-induits est le récepteur cannabinoïde de type 1 (CB1). Contrairement aux autres
antiémétiques, les cannabinoïdes exercent leur effet antiémétique par agonisme sur les
récepteurs CB1. Dans les années 70 et 80, des études ont montré que les molécules
comme le dronabinol et la nabilone ont un effet antiémétique chez les patients
recevant des chimiothérapies modérément émétisantes, mais leur utilisation est
restreinte à cause des effets indésirables associés, particulièrement chez les patients
âgés(55).
4.2.4.
Protocoles de prise en charge
Plusieurs voies émétogènes se combinent lors de l’administration d’une chimiothérapie,
ce qui justifie le recours à des médicaments ayant des mécanismes d’action
différents(48).
Tout d’abord la prophylaxie primaire consiste à donner un traitement préventif dès le
1er cycle de chimiothérapie, à la phase aiguë et retardée.
Ensuite, la prophylaxie secondaire consiste à réévaluer le traitement préventif et à
l’adapter
en
fonction
des
symptômes
apparus
lors
du
précédent
cycle
de
chimiothérapie.
Enfin, le traitement de secours est à mettre en place en cas d’apparition de NVCI, en
dépit d’une prophylaxie bien conduite(54).
4.2.4.1.
Définition du niveau émétisant des molécules
Par le passé, plusieurs classifications ont été proposées dans lesquelles les molécules
étaient divisées en 3 à 5 niveaux émétisants(59).
Aujourd’hui, les molécules sont classées en 4 niveaux émétisants, en fonction du
pourcentage de patients souffrant de NVCI avec chaque molécule. Au-delà de 90% la
molécule est hautement émétisante, entre 30 et 90% elle est modérément émétisante,
entre 10 et 30% elle est faiblement émétisante et en dessous de 10% elle est très
faiblement émétisante(54).
Cf Tableaux 1, 2, 3 et 4.
101
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
4.2.4.2.
Définition du niveau émétisant des protocoles
La molécule la plus émétisante du protocole de chimiothérapie définit le niveau
émétisant du protocole. En revanche, les niveaux émétisants ne s’ajoutent pas : avec
deux molécules moyennement émétisantes, le protocole est moyennement émétisant.
D’autre part, si le protocole se déroule sur plusieurs jours, chaque jour est considéré
comme un J1(54).
Selon la conférence de Perugia en 2009, la seule exception à ce protocole est le cas de
l’association
d’une
anthracycline
(doxorubicine
ou
épirubicine)
avec
le
cyclophosphamide. Selon une étude sur 866 patientes atteintes de cancer du sein,
l’association de cyclophosphamide et de doxorubicine s’est révélée être une
chimiothérapie modérément émétisante particulièrement puissante et qui nécessite un
protocole
antiémétique
plus
agressif
que
la
normale(59)(71).
L’association
d’anthracycline et de cyclophosphamide a donc été reclassée en tant que hautement
émétisante par l’ASCO(49).
4.2.4.3.
Prophylaxie en fonction du niveau émétisant du protocole
4.2.4.3.1.
Hautement émétisant
Tableau 7 : Prophylaxies recommandées pour les molécules hautement émétisantes(54)
Prophylaxie primaire
Prophylaxie secondaire
Aprépitant
Aprépitant
Phase aiguë
Corticoïdes
Sétron
Corticoïdes
Sétron
+ Benzodiazépines 1 heure avant
+ Anti D2
+/- Olanzapine *
Aprépitant J2-J3
Phase retardée
Aprépitant J2-J3
Corticoïdes J2-J4
+ Corticoïdes J2-J4
+ Anti D2
+ Benzodiazépines matin et soir J2-J4
+/- Olanzapine *
* : hors AMM
102
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
L’administration du sétron par voie orale ou, si besoin, intraveineuse, est recommandée
15 à 60 minutes avant l’administration de la chimiothérapie(48).
A J1, 60 mg de méthylprednisolone ou 80 mg de prednisone sont administrés. De J2 à J4
la dose recommandée est de 60 mg de prednisone.
L’aprépitant est administré à 125 mg à J1, puis à 80 mg à J2 et J3.
En cas de protocole hautement émétisant sur plusieurs jours, par exemple Bléomycine,
Etoposide, Platine sur 5 jours, il faudra prendre 125 mg d’aprépitant à J1, puis 80 mg de
J2 à J7(54).
Quatre études ont comparé l’ajout d’aprépitant au sétron et à la dexaméthasone dans
les protocoles de chimiothérapie hautement émétisants à base de cisplatine. Elles ont
toutes montrées une réduction significative des vomissements aigus.
Plusieurs preuves permettent aux experts d’affirmer que l’utilisation de la trithérapie
pour la prévention des vomissements aigus dans les chimiothérapies hautement
émétisantes est la norme minimale à recommander, ainsi que l’utilisation de la
bithérapie
pour
la
prévention
des
vomissements
retardés
pour
les
mêmes
chimiothérapies(71).
4.2.4.3.2.
Tableau 8
:
Modérément émétisant
Prophylaxies
recommandées
pour
les
molécules
modérément
émétisantes(54)
Prophylaxie primaire
Prophylaxie secondaire
Aprépitant
Phase aiguë
Aprépitant
Corticoïdes
Corticoïdes
Sétron
Sétron
+ Benzodiazépines 1 heure avant ou Anti D2
+/- Olanzapine *
Aprépitant J2-J3
Phase retardée
Aprépitant J2-J3
+ Corticoïdes J2-J3
+/- Olanzapine *
* : hors AMM
En prophylaxie primaire, pour la phase aiguë, le protocole est le même que les
molécules hautement émétisantes.
103
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
En ce qui concerne la phase retardée, seul l’aprépitant est administré à J2 et J3.
En cas d’échec, 60 mg de prednisone, et éventuellement l’olanzapine hors AMM,
pourront être ajoutés(54).
Une méta-analyse a examiné 11 études utilisant les sétrons dans les chimiothérapies
modérément émétisantes. Elle a montré que le risque de vomissements aigus diminue et
qu’il est réduit encore d’avantage s’ils sont associés à la dexaméthasone (71).
4.2.4.3.3.
Faiblement émétisant
Tableau 9 : Prophylaxies recommandées pour les molécules faiblement émétisantes(54)
Prophylaxie primaire
Phase aiguë
Phase retardée
Corticoïdes
Ou Anti D2
Prophylaxie secondaire
Corticoïdes + Sétron
Ou Anti D2 + Corticoïdes
+/- Olanzapine *
/
/
* : hors AMM
Ce protocole ne possède pas de traitement pour la phase retardée(54).
Il n’y a pas d’essai recherchant le traitement antiémétique approprié pour les
chimiothérapies
faiblement
émétisantes.
La
recommandation
d’utiliser
la
dexaméthasone est basée sur les preuves des bénéfices de cette molécule dans le
contrôle des NVCI dans les chimiothérapies hautement et modérément émétisantes.
Une méta-analyse de 32 essais incluant 5 613 patients a démontré que la
dexaméthasone était supérieure au placebo ou à l’absence de traitement pour assurer
la protection contre les vomissements aigus et retardés.
En résumé, bien qu’il y ait des preuves pour soutenir l’utilisation de la dexaméthasone
dans la prévention des vomissements aigus dans les protocoles faiblement émétisants,
les experts recommandent aux cliniciens de prendre une décision en se basant sur le
type de chimiothérapie utilisée et sur les caractéristiques du patient(71).
104
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
4.2.4.3.4.
Très faiblement émétisant
Tableau 10 : Prophylaxies recommandées pour les molécules très faiblement
émétisantes(54)
Prophylaxie primaire Prophylaxie secondaire
Phase aiguë
/
Phase retardée
/
Anti D2
+/- Olanzapine *
/
* : hors AMM
En prophylaxie primaire aucun traitement ne sera utilisé.
En revanche en cas d’échec, des antagonistes des récepteurs à la dopamine de type 2 et
éventuellement l’olanzapine hors AMM pourront être utilisés(54).
4.2.4.3.5.
Traitement de secours
Dans la mise à jour de ses recommandations en 2011, l’ASCO rappelle l’importance de
surveiller l’apparition ou l’évolution des symptômes tout au long du traitement(49).
Dans cette partie sont regroupés tous les traitements qu’il est possible d’utiliser en cas
d’échec immédiat des prophylaxies primaires et secondaires, ainsi qu’en cas de NVCI
réfractaires.
En cas d’échec immédiat, il est possible d’administrer une seconde injection de sétron
12 heures après la précédente, soit jusqu’à 32 mg par jour. Cette augmentation de
posologie est contre-indiquée en cas de syndrome du QT congénital, car elle entraîne un
risque d’allongement du QT. Il est également possible de recourir à une autre molécule
que celle précédemment administrée, par exemple le sétron de première génération
peut être remplacé par le palonosetron(36)(48)(54).
Concernant les antagonistes des récepteurs D2, le métoclopramide à 40 à 80 mg par
jour ou la métopimazine à 30 à 50 mg par jour peuvent être ajoutés(48)(54). Par voie
injectable, les 2 à 4 ampoules à 50 mg d’alizapride administrées en perfusion de 15
minutes pourront être renouvelées 3 fois. Le métoclopramide peut également être
105
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
donné par voie intraveineuse, cependant l’alizapride est à préférer car il passe moins la
barrière hémato-encéphalique(54). La métopimazine semble avoir un effet synergique
avec les sétrons et la dexaméthasone(36).
Le renouvellement de l’injection de corticoïdes est inutile,
de même que
l’augmentation des doses de l’aprépitant qui n’est pas recommandée. En revanche en
cas de NVCI réfractaires, une nouvelle cure d’aprépitant à 80 mg pendant 2 à 3 jours
peut être utile, dans le but de saturer les récepteurs NK1(36)(54).
En cas de symptômes d’angoisse et si les autres traitements échouent, il est
recommandé d’associer un anxiolytique comme les benzodiazépines per os ou par voie
intraveineuse(36)(54).
Dans tous les cas, la survenue de NVCI réfractaires devra faire réévaluer le traitement
de chimiothérapie pour les cures ultérieures(36).
4.2.4.3.6.
Cas particuliers
4.2.4.3.6.1.
Dans
la
prévention
et
le
Nausées et vomissements anticipés
traitement
des
NVCI
anticipées,
les
traitements
comportementaux et la prévention des NVCI aigues ou retardées sont également
essentiels. Les techniques de relaxation peuvent également trouver leur place(48).
L’administration d’une benzodiazépine deux jours avant la chimiothérapie peut
diminuer le risque. En effet, les benzodiazépines sont les seules molécules qui réduisent
l’apparition de NVCI anticipés mais l’inconvénient est que leur efficacité tend à
diminuer au fil des cures(48)(59).
4.2.4.3.6.2.
Chimiothérapie en continue
Les protocoles précédemment décrits sont adaptés pour des chimiothérapies qui ont
lieu sous forme de cure, ce qui est le plus courant, mais pas pour des chimiothérapies
qui ont lieu en continue. C’est le cas par exemple de la capécitabine.
106
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Les recommandations ne proposent pas d’utiliser les corticoïdes au long cours. Pour la
prophylaxie primaire, 10 mg de métoclopramide pourront être pris une heure avant la
chimiothérapie. Si ce n’est pas efficace, un sétron pourra être administré de façon
quotidienne en prophylaxie secondaire(54).
4.2.5.
Sélection des protocoles dans le logiciel Asclépios II
Les protocoles de prise en charge des NVCI à actualiser sont édités à partir du logiciel
de gestion du circuit des chimiothérapies Asclépios II.
4.2.5.1.
Critères d’inclusion
Les protocoles inclus sont ceux contenant les molécules hautement, modérément,
faiblement et très faiblement émétisantes. Ces protocoles sont prescrits uniquement à
des patients adultes sur l’Hôpital Nord Ouest.
Seule la prophylaxie primaire est intégrée aux protocoles de chimiothérapie car les
médicaments prescrits seront donnés systématiquement aux patients. Si une
prophylaxie secondaire est nécessaire elle devra être prescrite au cas par cas.
4.2.5.2.
Critères d’exclusion
Les protocoles des catégories « validés médicalement », « non validés », « bloqués » et
les protocoles d’essais cliniques n’ont pas été inclus dans ce travail.
Les molécules injectables suivantes n’étaient pas utilisées dans des protocoles de
chimiothérapie
à
l’Hôpital
cyclophosphamide à une dose
Nord
Ouest
:
méchloréthamine,
streptozotocine,
supérieure à 1.5g/m², daunorubicine, idarubicine,
clofarabine, alemtuzumab, trabectédine, témozolomide, ixabépilone, catumaxumab,
éribuline, cabazitaxel, busulfan, 2-chlorodexyadénosine, ipilimumab.
Concernant les médicaments per os, n’étaient pas utilisées dans des protocoles de
chimiothérapie à l’Hôpital Nord Ouest les molécules suivantes : hexamethylmelamine,
temozolomide, imatinib, sunitinib, everolimus, lapatinib, lenalidomide, thalidomide,
chlorambucil, hydroxyurée, L-phenylalanine mustard, 6-thioguanine, methotrexate,
sorafenib.
107
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
4.3. Résultats
4.3.1.
Protocoles hautement émétisant
Prophylaxie
secondaire
Prophylaxie
primaire
Phase aiguë
Aprépitant
125mg
Méthylprednisone
60mg IV
Sétron : 1 ampoule
renouvelable
Phase retardée
Aprépitant 80mg :
J2-J3
Prednisone 60mg :
J2-J4
Phase aiguë
Aprépitant
125mg
Méthylprednisone
60mg IV
Sétron : 1 ampoule
renouvelable
+ BZD 1h avant
+/- Anti D2
Phase retardée
Aprépitant 80mg :
J2-J3
Prednisone 60mg :
J2-J4
+ BZD matin et soir
+ Anti D2
Figure 4 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules hautement émétisantes
Les corticoïdes injectables sous forme de méthylprednisone ont été préférés pour le
premier jour de la chimiothérapie.
Les benzodiazépines (BZD) sont administrées à partir de la veille de la chimiothérapie.
En pratique l’alprazolam est prescrit sur l’HNO.
Concernant les anti-D2, les ampoules injectables de métoclopramide sont prescrites de
façon conditionnelle dans certains protocoles à risque. Elles sont peu utilisées en
pratique et c’est pourquoi il a été décidé de conserver le métoclopramide qui est au
livret thérapeutique de l’HNO plutôt que de prescrire l’alizapride comme cela est
recommandé par les référentiels.
La première colonne du tableau ci-dessous « protocoles contenant la molécule »
représente le nombre de protocoles créés dans le logiciel même si ceux-ci ne sont plus
utilisés à l’heure actuelle.
La seconde catégorie correspond au nombre de protocoles qui sont prescrits en pratique
sur l’établissement, pour chaque molécule.
La troisième colonne correspond au nombre de protocoles qui ont dû être modifiés lors
de ce travail et la quatrième à ceux qui avaient déjà été mis à jour pour une autre
molécule.
108
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
La dernière catégorie correspond aux protocoles qui n’avaient pas besoin d’être
modifiés, parce qu’ils étaient à jour ou parce qu’ils convenaient à la pratique en l’état.
Tableau 11 : Résultats du travail effectué pour les protocoles hautement émétisants
Protocoles
contenant la
molécule
Molécules
Protocoles
utilisés en
pratique
Protocoles
modifiés
lors de ce
travail
82
31
30
Carmustine
6
1
1
Dacarbazine
5
1
Procarbazine (per os)
3
2
1
96
35
32
Cisplatine
Total
Protocoles
déjà modifiés
pour une
autre
molécule
Protocoles
non modifiés
car corrects
1
1
1
1
2
Les modifications principales ont été d’ajouter l’aprépitant et d’harmoniser les doses et
la durée de prise des corticoïdes. Les doses de corticoïdes n’ont pas été diminuées avec
l’aprépitant comme cela est recommandé car aucun problème n’est rencontré en
pratique. Dans cette catégorie 32 protocoles ont été modifiés sur 35 utilisés, soit 91,4%.
4.3.2.
Protocoles modérément émétisants
Prophylaxie
secondaire
Prophylaxie
primaire
Phase aiguë
Aprépitant
125mg
Méthylprednisone
60mg IV
Sétron : 1 ampoule
renouvelable
Phase retardée
Aprépitant 80mg :
J2-J3
Phase aiguë
Aprépitant
125mg
Méthylprednisone
60mg IV
Sétron : 1 ampoule
renouvelable
+ BZD 1h avant
+/- Anti D2
Phase retardée
Aprépitant 80mg :
J2-J3
+ Prednisone 60mg :
J2-J4
Figure 5 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules modérément
émétisantes
109
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Tableau 12 : Résultats du travail effectué pour les protocoles modérément émétisants
Molécules
Protocoles
contenant
la
molécule
Protocoles
utilisés en
pratique
Protocoles
modifiés
lors de ce
travail
Protocoles déjà
modifiés pour
une autre
molécule
Protocoles
non
modifiés
car corrects
Cyclophosphamide(IV)<1,5g/m²
65
37
34
1
2
Cyclophosphamide (per os)
18
8
8
/
/
Oxaliplatine
26
10
6
/
4
Ifosfamide
11
5
5
/
/
Carboplatine
57
31
29
2
/
Doxorubicine
43
21
5
16
/
Epirubicine
10
3
/
3
/
Irinotécan
26
15
10
2
3
Azacitidine
1
1
/
/
1
Bendamustine
3
3
3
/
/
Vinorelbine (per os)
9
3
3
/
/
Cytarabine (IV) ≥ 1g/m²
8
5
/
5
/
282
142
103
29
10
Total
Les principales modifications effectuées sont les mêmes que pour les protocoles
hautement émétisants.
Parmi les 34 protocoles modifiés contenant du cyclophosphamide en voie intraveineuse
à dose inférieure à 1.5g/m², 13 protocoles contiennent l’association cyclophosphamide
IV et doxorubicine pour lequel la prophylaxie retardée de corticoïdes (de J2-J4 :
prednisone 60 mg) a été ajoutée puisque cette association a un risque émétisant plus
élevé que chaque molécule séparément(49)(59).
L’aprépitant a été retiré des protocoles contenant de l’ifosfamide comme cela est
recommandé par l’AFSOS, en première intention(54).
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(CC BY-NC-ND 2.0)
Dans cette catégorie, 103 protocoles ont été modifiés sur 142 protocoles utilisés, soit
72,5%.
4.3.3.
Protocoles faiblement émétisants
Prophylaxie
primaire
Phase aiguë
Méthylprednisone
60mg IV
ou Anti D2
Prophylaxie
secondaire
Phase retardée
Rien
Phase aiguë
Méthylprednisone 60mg
IV
+ Sétron
ou Anti D2
+ Méthylprednisone
Phase retardée
Rien
Figure 6 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules faiblement émétisantes
Il a fallu, dans la majorité des cas, supprimer des prises de corticoïdes et harmoniser les
doses. Certaines doses de corticoïdes ont été laissées plus élevées volontairement car
les protocoles étaient mal supportés en pratique. D’autre part, comme cela est
recommandé pour le docétaxel, une prise de corticoïdes a été laissée la veille de la
chimiothérapie pour le docétaxel et le paclitaxel, à cause du risque important
d’hypersensibilité avec ces molécules.
Un protocole contenant du topotécan n’a pas été modifié car il s’agit d’un protocole de
dernière ligne pratiqué chez des patients dont l’état de santé est altéré et le choix a
été fait de ne pas réduire la prise en charge antiémétique.
Trois protocoles contenant du trastuzumab n’ont pas été modifiés car ce sont des
monothérapies et en pratique elles sont bien tolérées sans corticoïde, ils n’ont donc pas
été ajoutés dans ces protocoles.
Le bortézomib IV a été remplacé par le bortézomib SC car il a une biodisponibilité et
une efficacité équivalente avec une meilleure tolérance(75).
Les protocoles existants n’ont pas été modifiés car par voie sous cutanée il semble y
avoir moins de NVCI que par voie intraveineuse.
111
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Dans cette catégorie, seulement 26 protocoles ont été modifiés sur 178 utilisés, soit
16,85%. Il se trouve que 68,5% des protocoles avaient déjà été modifiés lors des
précédentes catégories.
Tableau 13 : Résultats du travail effectué pour les protocoles faiblement émétisants
Molécules
Protocoles
contenant
la
molécule
Protocoles
utilisés en
pratique
Protocoles
modifiés
lors de ce
travail
Protocoles déjà
modifiés pour
une autre
molécule
Protocoles
non
modifiés car
corrects
1
1
/
1
/
Docétaxel
54
26
/
13
13
Paclitaxel
43
27
8
13
6
Mitoxantrone
3
2
/
/
2
Doxorubicine liposomale pégylée
8
4
3
1
/
Topotécan
6
3
/
2
1
24
11
/
10
1
9
0
/
/
/
19
6
2
4
/
Méthotrexate
9
4
2
2
/
Mitomycine
5
3
3
/
/
Gemcitabine
23
15
/
12
3
5-fluorouracile
78
35
5
30
/
Temsirolimus
1
1
1
/
/
Bortézomib (IV)
9
/
/
/
/
Cétuximab
15
11
2
9
/
Trastuzumab
39
24
/
21
3
Panitumumab
2
2
/
1
1
Capécitabine (per os)
4
/
/
/
/
Fludarabine (per os)
5
3
/
3
/
357
178
26
122
30
Cytarabine (IV) < 1g/m²
Etoposide (IV)
Etoposide (per os)
Pemetrexed
Total
112
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(CC BY-NC-ND 2.0)
4.3.4.
Protocoles très faiblement émétisants
Prophylaxie
secondaire
Prophylaxie
primaire
Phase aiguë
Phase aiguë
Phase retardée
+ Anti D2
Rien
Rien
Phase retardée
Rien
Figure 7 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules très faiblement
émétisantes
Tableau 14 : Résultats du travail effectué pour les protocoles très faiblement
émétisants
Molécules
Protocoles
contenant la
molécule
Protocoles
utilisés en
pratique
Protocoles
modifiés
lors de ce
travail
Protocoles déjà
modifiés pour
une autre
molécule
Protocoles
non modifiés
car corrects
Bléomycine
6
3
/
3
/
Fludarabine (IV)
6
2
/
2
/
Vinblastine
4
2
/
1
1
Vincristine
38
24
1
23
/
Vinorelbine
23
11
6
5
/
Bevacizumab
37
25
4
17
4
Géfitinib (per os)
2
/
/
/
/
Erlotinib (per os)
2
/
/
/
/
Vinflunine
1
/
/
/
/
119
67
11
51
5
Total
Pour les protocoles très faiblement émétisants, peu de modifications ont été effectuées
dans l’ensemble, si ce n’est de mettre à jour le grade émétisant du protocole.
113
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Dans cette catégorie, 11 protocoles ont été modifiés sur 67 utilisés, soit 16,4%. De
même ici, 76,1% des protocoles utilisés avaient déjà été modifiés lors des catégories
précédentes.
4.4.Conclusion
L’évolution des connaissances sur la physiopathologie des vomissements ainsi que les
nouvelles classes d’antiémétiques à fort index thérapeutique ont permis l’amélioration
du contrôle des NVCI ces dernières années(56). En revanche les nausées restent un
symptôme plus difficile à appréhender puisqu’elles ne sont pas mesurables de façon
objective. Il est donc nécessaire de rester attentif au ressenti du patient(59).
Bien qu’une prise en charge convenable existe déjà sur l’établissement et même avec
un traitement antiémétique adapté, une certaine probabilité de nausées et
vomissements aigus persiste. Par exemple, avec les chimiothérapies hautement
émétisantes, environ 11 à 17% des patients auront toujours des vomissements aigus,
malgré une trithérapie et environ 25 à 32% des patients auront toujours des
vomissements retardés malgré une bithérapie bien menée(71). Les NVCI continuent
d’altérer la qualité de vie des patients, malgré l’utilisation des traitements préventifs
recommandés(76).
Il est donc toujours possible d’améliorer la prise en charge des NVCI et la mise à jour
des protocoles a permis de modifier 88,9% des protocoles antiémétiques sur l’HNO.
Cependant une étude descriptive menée aux Etats-Unis montre que dans le domaine
particulier de l’oncologie thoracique, ces recommandations ne sont pas encore entrées
pleinement dans la pratique ce qui peut être extrapolé à la situation en France et
entraîne une perte de chance pour les patients(77).
114
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
5. Discussion
5.1.Analyse du travail effectué
Lors de ce travail, deux axes ont été définis mais les méthodologies choisies sont
différentes.
Pour la prise en charge des mucites, chaque professionnel du centre hospitalier
prescrivait en fonction de ses connaissances personnelles. Le seul protocole utilisé sur
l’établissement dans le logiciel de prescription était le mélange d’amphotéricine B et
bicarbonate de sodium, quel que soit le problème de bouche, en l’absence de consensus
au sein de l’établissement. Les objectifs principaux de l’uniformisation de la prise en
charge étaient la prévention des mucites et le soulagement de la douleur. Ils ont été
traités grâce à la réalisation d’une fiche conseil sur l’hygiène bucco-dentaire et à la
pratique systématique de soins de bouche d’une part et grâce à l’utilisation
d’anesthésiques locaux et d’antalgiques adaptés d’autre part.
En revanche, le protocole de prise en charge des mucites de grade 0 qui s’adresse à
tous les patients sous chimiothérapie quels que soient leurs facteurs de risque, n’est pas
clairement qualifié de protocole préventif par l’AFSOS. Ceci fait donc intervenir le libre
arbitre des praticiens d’effectuer ou non la prescription pour tous leurs patients. De
plus, ces mesures de soins de bouche à faire systématiquement pendant la cure peuvent
paraître contraignantes pour les patients qui, jusqu’alors, ne souffraient d’aucun
symptôme de mucite. Ils sont là encore libres d’utiliser ou non cette prescription et
d’en faire part ou non à leur pharmacien d’officine. Ce protocole de grade 0 demeure
donc encore très théorique et il est donc important de continuer à élargir sa pratique
puisqu’il s’agit du seul protocole qui ait fait la preuve de son efficacité.
Pour la prise en charge des NVCI, les recommandations sont très encadrées et les
traitements majoritairement efficaces. Elles ne sont donc pas complexes à mettre en
œuvre, même si le nombre de protocoles existant dans le logiciel a rendu la tâche
fastidieuse. Il s’avère que les protocoles créés récemment étaient à jour par rapport
aux dernières recommandations. Cependant, les classifications des molécules en
fonction de leur potentiel émétisant ainsi que les recommandations de prise en charge
sont en constante évolution puisqu’elles sont mises à jour au fil des nouvelles
publications.
115
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Les anciens protocoles n’étaient pas mis à jour à cause d’un retard dans l’actualisation
des connaissances et d’un manque de réactivité.
D’autre part, l’exploitation des résultats des études de NVCI est confrontée à une
difficulté d’ordre physiologique car même si les nausées et les vomissements semblent
apparaître et répondre aux traitements de manière identique, en réalité, ils ne sont pas
dus au même mécanisme. Le vomissement peut être mesuré objectivement en un
nombre d’épisodes, tandis que les nausées sont plus subjectives et requièrent différents
outils de mesure. Pour les études, une réponse complète est donc définie comme
« l’absence de vomissement et la non utilisation de thérapie de secours » mais celle-ci
ne se réfère pas aux nausées ou à une protection complète contre ces dernières. Tout
comme l’efficacité des médicaments antiémétiques est variable entre les vomissements
aigus et retardés, elle peut être variable entre les nausées et les vomissements(59).
Enfin, le palonosétron, recommandé par la MASCC/ESMO depuis 2009 et par l’ASCO
depuis 2011, a fait son entrée sur le marché français seulement fin 2012. Selon la
commission de transparence de la HAS, il a prouvé sa non-infériorité par rapport aux
autres sétrons mais son utilisation n’est pas encore très répandue en France, où les
habitudes de prescription peuvent être difficiles à changer. Il a donc été décidé de ne
pas prescrire le palonosétron dans les protocoles de prise en charge(54)(78).
Par ailleurs, un des biais de ce travail est que la prise en charge des soins de support
n’a pas été évaluée avant de commencer la mise à jour des protocoles.
Pour les mucites, dont la mise en place a été plus précoce, le ressenti des patients a
été sondé à l’aide d’un court questionnaire. Au vu des résultats, les questions choisies
ne paraissent pas les plus pertinentes et seulement 10 patients ont pu être interrogés.
L’analyse est donc plus qualitative que quantitative mais les patients ont quasiment
tous eu les mêmes réponses ce qui limite l’interprétation des résultats. Finalement, les
informations récoltées en dehors du questionnaire ont été plus intéressantes sur la
vision des traitements qu’avaient les patients et sur la prise en charge à l’officine. Ils
savaient quelles étaient les conditions d’utilisation des soins de bouche et, pour eux, ils
permettent d’éviter « les aphtes », car la plupart des patients ne connait pas le mot
« mucite ». Ils paraissent satisfaits de la dispensation en officine mais en réalité ils
n’ont pas reçu de conseils d’utilisation ni d’hygiène bucco-dentaire, ce qui pourrait
donc être un point à améliorer.
116
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
La mise en place des protocoles de prévention et de traitement des NVCI n’a pas été
évaluée au vu des nombreuses publications qui démontrent déjà l’efficacité des
traitements.
D’autre part, pour les mucites, les référentiels de l’AFSOS étaient moins encadrés que
pour les NVCI. Les recommandations de la MASCC étaient souvent faites par la négative
et ne concernaient que des cas très précis. Des choix ont donc dû être faits et les
recommandations ont été adaptées à ce qui était possible en pratique. Les décisions
prises hors référentiels ont été discutées aux réunions de concertation des soins de
support avec les professionnels concernés qui ont fait part de leur expérience, tout en
respectant dans la mesure du possible le livret thérapeutique de l’établissement, puis
elles ont été validées par les membres du 3C.
Les documents produits suite au travail sur la prise en charge des mucites et autres
problèmes de bouche, réalisés en collaboration avec le service d’oncologie ambulatoire,
ont également été ouverts aux patients bénéficiant d'une chimiothérapie en service
d'hospitalisation conventionnelle et aux patients sous chimiothérapie hospitalisés pour
un autre motif. Ceci dans le but d’harmoniser les pratiques sur l’ensemble de
l’établissement.
Par ailleurs, les nouveaux protocoles de prescription avaient pour cible le site principal
de la communauté hospitalière de territoire (CHT), c’est-à-dire l'HNO, même si les
services de gériatrie inclus n’ont pas fait l’objet d’un travail spécifique. Les
pharmaciens des autres sites (Tarare et Trévoux) ont cependant été informés de la
création des protocoles de soins de bouche afin d’harmoniser les pratiques au sein de la
CHT. En effet, le logiciel de prescription commun facilite la standardisation de la prise
en charge, ce qui renforce l’équité des soins entreprise depuis le Plan cancer 20032007(17).
5.2. Bilan sur les soins de support oncologiques
Les Plans cancer ont permis le financement des soins de support et l’uniformisation des
pratiques au sein des établissements, notamment avec la mesure 42 du Plan cancer
2003-2007 qui prévoit le développement des soins de support(17)(79).
117
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
Ces dernières années, l’organisation de l’accès aux soins, la coordination du parcours de
soins, la continuité de la prise en charge, ainsi que l’équité dans l’accès aux
traitements et à l’innovation se sont améliorés(28).
Actuellement, la communication sur les soins de support oncologiques est en
développement. Par exemple la revue « le Moniteur des Pharmacies » a publié en
septembre 2015 un cahier de formation sur l’accompagnement du patient cancéreux à
l’officine qui aborde sous plusieurs angles les soins de support et les conseils
associés(80). De plus, au niveau local, le journal « Le Progrès » a publié un supplément
dans son édition du 10 septembre 2015 sur la prise en charge des patients cancéreux et
les soins de support disponibles à l’HNO.
Malgré des efforts indéniables d’information et de sensibilisation, certaines personnes
affrontent encore seules les conséquences de leur traitement, en ignorant ou en
n’ayant pas accès aux soins de support. Des inégalités en matière de prise en charge
demeurent d’une région à l’autre, voire même d’un établissement à l’autre(2). Une
étude au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Grenoble avait pour objectif
d’évaluer les attentes des patients suivis en hôpital de jour d’oncologie hématologie.
Les entretiens ont montré que la prise en charge des effets indésirables pouvait être
optimisée par une meilleure connaissance et une meilleure utilisation des soins de
support(81).
Par exemple, la revue « le Moniteur des Pharmacies » a publié en 2014 un article sur les
soins de support oncologiques, déclarant qu’ils étaient encore trop méconnus. En
s’appuyant sur les résultats du second baromètre Soins Oncologiques de Support (SOS)
de l’AFSOS, elle suggère que les professionnels de santé de proximité comme les
pharmaciens pourraient participer à leur diffusion. Elle précise également que les soins
de support, mis en place précocement, permettrait d’augmenter de 25% l’espérance de
vie des patients, alors qu’à l’heure actuelle la mise en place est plus souvent tardive,
sous la forme de soins palliatifs(82).
En effet, une majorité de patients n’a jamais entendu le terme « soins de support »,
alors qu’à l’inverse une grande majorité connait le terme « palliatif » pour laquelle il
signifie d’abord « un accompagnement des traitements anticancéreux, pour améliorer
mon confort et ma qualité de vie », soit en réalité la définition des soins de support.
118
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(CC BY-NC-ND 2.0)
D’autre part, il faut attendre le stade métastatique et les soins palliatifs pour que les
soins de support soient proposés systématiquement dans 78% et 85% des cas. Au moment
du diagnostic et au stade adjuvant, ils ne sont pas systématiquement proposés dans plus
de la moitié des cas, ce qui confirme une prise en charge tardive. Le fait que les soins
de support n’interviennent qu’au stade palliatif souligne le manque d’information sur
les bénéfices de ces pratiques auprès des professionnels de santé et des patients.
Le pharmacien d’officine apparaît malgré tout dans les 6 intervenants ayant informé le
patient des effets positifs et négatifs des soins de support, avec l’oncologue référent,
l’équipe soignante du service hospitalier, le médecin traitant, l’infirmière d’annonce et
une autre équipe spécifique(83).
Une autre mesure du Plan cancer 2003-2007 était de former plus spécifiquement les
professionnels de santé, comme les infirmières, à la prise en charge des patients
atteints de cancer(17). Au niveau de l’HNO, les IDE dites « pivots » ont reçu une
formation spécifique et elles interviennent au niveau du service d’oncologie
ambulatoire dès la consultation d’annonce et à toutes les étapes de la chimiothérapie.
Elles organisent des réunions d’information en atelier collectif et rencontrent les
patients individuellement au sein du service d’oncologie ambulatoire. Ce sont des
acteurs de première ligne puisque les patients peuvent les joindre directement en cas
de problème de santé, ce qui permet de les orienter selon la gravité vers les urgences
ou vers une consultation avec le médecin, ou simplement de leur donner des conseils.
D’autre part, elles ont participé à l’élaboration du cahier de liaison qui a pour but de
faciliter le lien hôpital-ville en apportant toutes les informations nécessaires aux
professionnels de santé. En pratique, il s’avère que les patients utilisent ce cahier
presque exclusivement à l’hôpital auprès des différents professionnels qu’ils sont
amenés à rencontrer. Les acteurs de santé en ville comme le médecin traitant, l’IDE
intervenant au domicile et le pharmacien d’officine n’ont malheureusement que
rarement connaissance de ce cahier alors que les informations qu’il contient pourraient
leur être utile.
119
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
5.3.Coordination hôpital-ville et rôle du pharmacien d’officine
Parmi les professionnels de santé avec lesquels les patients sont en contact en dehors
de l’hôpital, le pharmacien d’officine apparaît en 3ème position après le médecin
traitant et l’infirmière libérale, avec 56%, soit à peine plus d’un patient sur deux
l’ayant désigné. Ceci peut être expliqué par le fait que ce professionnel, contrairement
aux autres, se déplace rarement au domicile du patient et d’autre part, un aidant ou un
membre de la famille peut venir chercher les traitements à la place du patient luimême, surtout si l’état de santé de ce dernier est détérioré. Ce fait complique la
communication car les aidants ont souvent peu d’informations à fournir au
pharmacien(83).
Le développement des chimiothérapies orales et leur sorties progressives de la réserve
hospitalière nécessitent une surveillance et un encadrement accrus(79). Leur
mécanisme d’action est plus spécifique mais engendre des effets indésirables jusque là
rarement rencontrés par le pharmacien en ville. Dans les officines, ce type de
dispensation est aujourd’hui peu fréquent puisque les patients sont répartis dans le
réseau des 22 279 officines(84). La maîtrise de cette nouvelle classe pharmaceutique
ainsi que la bonne connaissance des effets indésirables associés est indispensable.
Le pharmacien d’officine doit fournir un engagement de plus en plus spécifique dans sa
pratique et sa formation au quotidien(79). C’est un acteur privilégié dans la prise en
charge de ces patients mais pour cela la formation ainsi que la mise à jour de ses
connaissances sont indispensables(85). Les équipes officinales doivent prendre le temps
de se former afin d’être capable d’informer les patients et d’encadrer la dispensation
des traitements. A l’heure actuelle, les formations d’éducation thérapeutique ou de
Diplôme Universitaire spécialisé en oncologie par exemple sont très demandées.
L’HNO propose des formations, notamment en coopération avec le Centre Léon Bérard,
dans le domaine de l’oncologie aux professionnels de ville (médecins, pharmaciens,
infirmières) dans le but de créer un échange avec les professionnels hospitaliers et de
favoriser la coopération hôpital-ville. Travailler sur la création de formations dans le
domaine de l’oncologie visant spécifiquement un public de pharmaciens d’officine est
un des objectifs à court terme de l’équipe pharmaceutique de l’HNO, en collaboration
avec les autres professionnels hospitaliers. Une expérience « test » a été menée avec
succès sur la prise en charge du cancer du poumon en décembre 2014.
120
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
D’autre part, le premier référentiel de pharmacie d’officine publié en 2014 par la
Société Française de Pharmacie Clinique (SFPC) doit être un outil de travail pour tous
les pharmaciens d’officine afin d’améliorer la qualité de prise en charge des patients.
La loi HPST a défini précisément le cadre de l’intervention du pharmacien d’officine et
son rôle a été élargi, ce qui ouvre de grandes perspectives à l’exercice officinal. C’est
dans cette optique que ce professionnel doit allier ses compétences en oncologie avec
une large culture pharmaceutique lui permettant de faire appel aux médecines
complémentaires telles que l’homéopathie, la phytothérapie, l’aromathérapie et
l’oligothérapie. Par exemple, la revue « le Moniteur des Pharmacies » a publié en 2012
un cahier de formation sur les soins de support homéopathiques en oncologie agréée
pour la formation continue des professionnels de santé. Celui-ci détaille les souches
homéopathiques adaptées pour soulager des principaux effets indésirables, ainsi que
celles pouvant être utilisées en prévention dans les chimiothérapies les plus
courantes(86). Les pharmaciens peuvent ainsi répondre aux attentes des patients en
leur proposant une prise en charge non iatrogénique des effets secondaires des
traitements anticancéreux. Tous ces protocoles complémentaires personnalisés se
feront idéalement en concertation avec l’équipe soignante et donc en toute
transparence(79).
Les nouvelles missions du pharmacien telles que précisées dans la loi HPST le revalorise
en le projetant à la pointe d’un problème majeur de Santé Publique(79). Il reste
cependant rémunéré sur le volume de médicaments dispensés. Quelques évolutions ont
déjà eu lieu avec la mise en place des entretiens pharmaceutiques et des honoraires de
dispensation et d’ordonnance complexe, mais cela n’est pas encore jugé suffisant pour
compenser le temps passé à effectuer toutes les missions qui lui sont confiées.
D’autre part, il est important que les patients atteints d’une pathologie chronique
soient suivis dans une même pharmacie, ce qui est souvent le cas en pratique. Mais il
peut arriver, en déplacement ou pour des questions de commodités que les patients
aillent dans une autre pharmacie et c’est là que les Dossiers Pharmaceutiques (DP)
jouent un rôle important. En effet, le DP permet à la pharmacie qui ne connait pas le
patient d’avoir un historique de sa consommation médicamenteuse des 4 derniers mois.
De plus, certains hôpitaux, comme c’est le cas à l’HNO, peuvent consulter le DP, ce qui
s’avère très utile en cas d’hospitalisation en urgence afin de pouvoir tenir compte des
traitements des patients.
121
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
L’éducation thérapeutique est également appelée à devenir un outil d’amélioration et
de sécurisation de la prise en charge thérapeutique sur l’ensemble du parcours de soins,
permettant d’impliquer davantage le patient dans sa prise en charge(87). La
cancérologie est d’ailleurs un domaine où l’éducation thérapeutique est très importante
notamment pour pouvoir proposer aux patients des thérapies de soutien et de gestion
des effets indésirables. L’observance est également un paramètre essentiel pour
l’efficacité du traitement et il est donc nécessaire de sensibiliser le patient au bon suivi
de la prescription(47). Ceci est d’autant plus vrai avec les chimiothérapies par voie
orale qui peuvent entraîner une négligence de la part des patients, car cette forme
peut leur faire penser que c’est un traitement moins efficace que les perfusions. Tout
comme les traitements chroniques devant être pris sur le long terme, l’observance est
plus mauvaise avec les traitements par voie orale(88).
Au niveau de l’HNO, des consultations pharmaceutiques, voire pluridisciplinaires quand
la coopération avec l’IDE pivot est possible, sont mises en place depuis deux ans.
L’information du patient est une activité partagée entre les prescripteurs, l’équipe
soignante et le pharmacien. Elle doit comporter des recommandations en vu d’optimiser
la prise en charge thérapeutique notamment sur le bon usage des médicaments et la
gestion du risque médicamenteux(87). En effet, la bonne information ainsi que
l’obtention de bons réflexes participent à une prise en charge optimale des patients.
Lors d’une enquête sur les conditions de vie des patients cancéreux, 38% des répondants
ont estimé que le médecin n’avait pas pris assez de temps pour répondre à leurs
questions, 48% d’entre eux ont trouvé l’information trop compliquée et 33% des patients
ont jugé que l’information avait été donnée en trop grande quantité(81). C’est pourquoi
il est important que l’ensemble des professionnels du parcours de soins participe à
l’information du patient, puisque l’étude montre que les patients ne sont pas toujours
réceptifs et ils peuvent avoir des questions à propos de ce qu’il leur a été dit
précédemment.
Le pharmacien, en tant que spécialiste du médicament, dispose d’une position
stratégique puisqu’il se trouve en fin du parcours « consultation, diagnostic,
prescription, dispensation ». Ainsi, il doit participer à la prise en charge globale du
patient, puisqu’il voit toutes les ordonnances de l’oncologue ou des spécialistes
d’autres maladies chroniques et connait également les traitements d’automédication
utilisés par le patient. De plus, il entretient une relation de confiance avec les patients,
ce qui facilite le dialogue et permet au patient de se confier plus facilement.
122
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Le pharmacien est également en première ligne pour détecter l’apparition d’éventuels
effets indésirables. Dans le guide de la HAS qui s’adresse aux patients hospitalisés, il est
fait référence du rôle du pharmacien d’officine, ce qui montre l’omniprésence du lien
hôpital-ville dans la prise en charge des patients.
A l’HNO, une coopération hôpital-ville est déjà mise en place pour les instaurations de
traitement anticoagulant par voie orale. Dès que possible, le service de soins contacte
la pharmacie hospitalière pour demander la réalisation d’un entretien pharmaceutique
auprès du patient. Après avoir fait le point sur ses connaissances, la pharmacie
hospitalière contacte, avec l’accord du patient, la pharmacie qu’il a désignée pour les
prévenir de l’instauration du traitement et elle leur transmet le compte rendu de ce
premier entretien pharmaceutique. La pharmacie de ville est ainsi prévenue que son
patient va venir chercher un nouveau traitement et aura une idée de l’état de ses
connaissances à ce sujet et des points plus précis à revoir avec lui. Dans l’idéal, le
pharmacien d’officine devrait avoir accès aux analyses biologiques du patient, comme
cela est le cas à l’hôpital grâce au logiciel commun entre les services de soins et la
pharmacie hospitalière.
Malgré des progrès observables sur l’organisation des soins de support au niveau des
établissements, l’information sur les pratiques et l’éducation thérapeutique des
patients peuvent encore être améliorés. La perception des patients est en décalage
avec celle des médecins, ce qui suggère que l’information sur les soins de support doit
intervenir plusieurs fois dans le parcours de soins et être fournie par plusieurs
interlocuteurs pour être assimilée par le patient.
Les liens ville-hôpital sont à développer pour favoriser la continuité des soins mais pour
cela, tous les acteurs doivent s’impliquer dans une organisation transversale.
Actuellement, seulement deux interlocuteurs ressortent (l’oncologue référent et
l’équipe soignante du service hospitalier) et peu d’intermédiaires dans des pratiques qui
sont pourtant par essence pluridisciplinaires(83).
123
LAPOSTOLET
(CC BY-NC-ND 2.0)
CONCLUSIONS
Le nombre de cas de cancer croît chaque année, toutefois des traitements de plus en
plus ciblés permettent d’augmenter l’espérance de vie des patients atteints de cancer. Les
soins de support, soit « l’ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades en
dehors des traitements spécifiques », peuvent intervenir dans de nombreux domaines et il est
indispensable d’en faire bénéficier tous les patients sous chimiothérapie afin d’améliorer leur
qualité de vie.
Parmi l’ensemble des soins de support, deux axes de travail ont été sélectionnés : la
prise en charge des mucites et celles des nausées et vomissements. Actualiser les protocoles
de prise en charge des nausées et vomissements, ainsi que créer une prise en charge adaptée
des mucites au sein de l’établissement ont été définis comme prioritaires après discussion au
sein de l’instance des 3C (Centre de Coordination en Cancérologie).
Dans le cas des mucites, le maintien d’une bonne hygiène bucco-dentaire est primordial
pour éviter tous les problèmes de bouche qui peuvent compliquer une chimiothérapie. Le
traitement préventif des mucites repose essentiellement sur des soins de bouche. Les autres
traitements, qu’ils soient curatifs ou préventifs n’ont pas fait la preuve de leur efficacité et
certains peuvent même avoir des effets indésirables. C’est pourquoi très peu d’entre eux sont
utilisés en pratique et de nouvelles thérapies ciblant le mécanisme des mucites seraient
nécessaires. Un des objectifs de ce travail était une homogénéisation des pratiques au sein de
l’établissement, qui se résumait initialement à l’utilisation de l’association amphotéricine B et
bicarbonate de sodium en traitement préventif.
La prévention et le traitement des nausées et vomissements reposent sur des protocoles
antiémétiques bien précis qui s’appliquent aux molécules de chimiothérapie en fonction de
leur potentiel émétisant. Ces médicaments antiémétiques ont prouvé leur efficacité dans de
nombreuses études mais ils possèdent des effets indésirables qui peuvent être invalidant pour
les patients. L’actualisation des protocoles a permis notamment de requalifier l’association
d’anthracyclines et cyclophosphamide en hautement émétisante et de ne pas prescrire
l’aprépitant avec l’ifosfamide en première intention à cause du risque de neurotoxicité.
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Le pharmacien d’officine est un acteur central du parcours de soin grâce à sa proximité
géographique et à la relation privilégiée qu’il entretient avec les patients. Son rôle d’écoute
et de conseil a une place d’autant plus importante avec les patients sous chimiothérapie
parfois perdus face à la somme d’informations qui leurs sont transmises, aux différents
traitements qui leur sont prescrits et aux divers effets indésirables qu’ils peuvent ressentir. Ce
travail ébauche le développement d’une coordination hôpital-ville qui s’inscrit dans la
création d’une organisation transversale, dans le but d’améliorer la continuité des soins et
donc la prise en charge des patients.
125
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ANNEXES
ANNEXE 1
GRILLE OAG (Oral Assessment Guide)
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ANNEXE 2
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ANNEXE 3
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ANNEXE 4
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ANNEXE 5
139
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ANNEXE 6
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LAPOSTOLET Nathalie
Soins de support oncologiques : actualisation de la prise en charge des mucites et des nausées
et vomissements chimio-induits au sein d’un centre hospitalier général.
Th. D. Pharm., Lyon 1, 2015, 141p
RESUME
Les soins de support oncologiques font partie intégrante de la prise en charge des patients sous
chimiothérapie. Ils ont pour but d’améliorer le confort et la qualité de vie des patients.
L’objectif de ce travail est de mettre à jour les protocoles de prise en charge des mucites et
nausées et vomissements chimio-induits au sein d’un centre hospitalier général. Pour cela, les
référentiels inter-régionaux de l’AFSOS qui adaptent les recommandations de la MASCC à la pratique
ont été les principales références utilisées.
Dans un premier temps, une fiche conseil sur l’hygiène bucco-dentaire a été élaborée dans le
but de prévenir les mucites et les autres problèmes de bouche. Les protocoles de prise en charge et
les ordonnances de sortie hospitalières ont ensuite été adaptés en fonction des grades de mucite et
des différents problèmes de bouche.
Dans un second temps, les potentiels émétisants des protocoles de chimiothérapie ont été mis
à jour et la prise en charge antiémétique ajustée en fonction des recommandations actuelles.
La mise en place des soins de support dans les établissements hospitaliers est effective grâce
aux Plans cancer, mais ils sont encore peu connus par les patients et les professionnels intervenant
en ville. C’est à ce titre que la coopération hôpital-ville joue un rôle, afin de proposer les soins de
support aux patients le plus précocement possible et dans le but d’améliorer la continuité des soins
et donc la prise en charge des patients.
MOTS CLES
Soins de support
Mucites
Nausées et vomissements
Chimiothérapie
JURY
Mme RIOUFOL Catherine, Maitre de Conférences des Universités et Pharmacien
Hospitalier
Mme COURSIER Sandra, Pharmacien Hospitalier
M. ODIER Luc, Médecin Hospitalier
M. DUPUY Julien, Pharmacien Officinal
DATE DE SOUTENANCE
Jeudi 1er octobre 2015
ADRESSE DE L’AUTEUR
133 Rue de Stalingrad – 69400 Villefranche sur Saône
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