http://portaildoc.univ-lyon1.fr Creative commons : Paternité - Pas d’Utilisation Commerciale Pas de Modification 2.0 France (CC BY-NC-ND 2.0) http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/2.0/fr LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) UNIVERSITE CLAUDE BERNARD - LYON 1 FACULTE DE PHARMACIE INSTITUT DES SCIENCES PHARMACEUTIQUES ET BIOLOGIQUES 2015 THESE n°91 THESE pour le DIPLOME D'ETAT DE DOCTEUR EN PHARMACIE présentée et soutenue publiquement le 1er octobre 2015 par Mlle LAPOSTOLET Nathalie Née le 2 octobre 1990 A Dreux (28) ***** SOINS DE SUPPORT ONCOLOGIQUES : ACTUALISATION DE LA PRISE EN CHARGE DES MUCITES ET DES NAUSEES ET VOMISSEMENTS CHIMIO-INDUITS AU SEIN D’UN CENTRE HOSPITALIER GENERAL ***** JURY Mme RIOUFOL Catherine, Maitre de Conférences Universitaires et Pharmacien Hospitalier Mme COURSIER Sandra, Pharmacien Hospitalier M. ODIER Luc, Médecin Hospitalier M. DUPUY Julien, Pharmacien Officinal LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 2 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 4 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 5 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 6 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) REMERCIEMENTS A Madame Catherine Rioufol, Vous nous avez fait l’honneur d’accepter la présidence de ce jury, soyez assurée de mes remerciements les plus sincères et de mon profond respect. A Madame Sandra Coursier, Je te remercie de m’avoir permis de réaliser ce travail et d’avoir accepté de diriger cette thèse. Reçois ici le témoignage de ma gratitude pour le temps que tu m’as consacré et pour tes précieux conseils. A Monsieur Luc Odier, Vous me faites l’honneur de juger ce travail et je tiens à vous remercier pour votre enthousiasme et votre soutien tout au long de ce travail. Soyez assuré de ma profonde estime. A Monsieur Julien Dupuy, Je vous remercie d’avoir accepté de juger ce travail, ainsi que pour ces années de travail dans votre officine qui m’ont beaucoup appris. Soyez assuré de mon estime et de ma sincère reconnaissance. 7 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) A Jérémy, l’amour de ma vie, tu sais déjà tout mais je ne te remercierai jamais assez pour tout le soutien que tu m’as apporté et le courage que tu as eu de me supporter durant toutes ces années. Fini le stress, en tout cas c’est promis d’essayer ! Je t’aime plus que tout… A mes parents, Catherine et Didier, sans qui je n’en serai pas là aujourd’hui, merci pour votre soutien et pour tout ce que vous faites pour moi. J’espère vous rendre fiers, je vous aime. A Jérôme, qui est toujours là pour moi malgré tout et que j’aime même si nous ne sommes jamais d’accord ! A mes grands parents Mamie Théo, Papi Lou, Mamy Thérèse et Papy André pour leur soutien et leurs encouragements depuis toujours. A toute ma famille et plus particulièrement à mon parrain Philippe et à ma marraine Christine pour ces bons souvenirs de vacances en famille. A ma belle famille pour leurs encouragements et plus particulièrement à Georges et Véronique pour tout ce qu’ils font pour nous. A mon Djé sans qui rien n’aurait été pareil, je ne sais pas si j’en serai là aujourd’hui si tu n’avais pas toujours été là pour me remotiver. Tout ce chemin parcouru depuis les cours de maths au lycée… A nous la vraie vie ! 8 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) A tous mes amis qui ont rendu toutes ces années bien plus agréables : Anaïs, Charline, Eloïse, Lucille, Margaud, Marie, Soraya, Yannis. J’espère que vous ferez partie de ma vie encore longtemps. A toute l’équipe de la pharmacie Caladoise, pour tout ce qu’ils m’ont appris et surtout pour m’avoir fait découvrir et aimer l’officine. C’est un plaisir de travailler parmi vous. A toute l’équipe de la pharmacie hospitalière de l’Hôpital Nord Ouest et plus particulièrement à Mr Bontemps, pour avoir rendu ce stage aussi enrichissant, tant sur le plan personnel que professionnel. A toute l’équipe de la pharmacie Vial, pour m’avoir fait profiter de leurs connaissances et de leur expérience et pour le temps qu’ils m’ont consacré durant mon stage. Avec une pensée pour William et toute la famille Colnel. 9 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) TABLE DES MATIERES TABLE DES MATIERES .................................................................... 10 LISTE DES TABLEAUX .................................................................... 14 LISTE DES FIGURES ....................................................................... 15 TABLE DES ABREVIATIONS .............................................................. 16 INTRODUCTION ........................................................................... 19 1. 1.1. LES SOINS DE SUPPORT ONCOLOGIQUES ....................................... 20 Définition ............................................................................................... 20 1.2. Objectifs ................................................................................................ 21 1.2.1. Améliorer la lisibilité du parcours de soin .................................................. 21 1.2.2. Développer le principe de continuité des soins ............................................ 21 1.2.3. Favoriser une organisation transversale et coordonnée .................................. 22 1.2.4. Anticiper les besoins et améliorer la prise en charge .................................... 23 1.3. Acteurs et organisation .............................................................................. 24 1.3.1. Acteurs ............................................................................................ 24 1.3.1.1. Professionnels de santé habituels ........................................................ 24 1.3.1.1.1. Professionnels de santé référents qui interviennent au domicile ............. 24 1.3.1.1.2. Professionnels de santé spécifiques de l’oncologie et des soins de support . 25 1.3.1.2. Professionnels de recours .................................................................. 25 1.3.1.3. Acteurs de la « vie civile » ................................................................. 26 1.3.2. Structures ........................................................................................ 26 1.4. Mise en place des soins de support ............................................................... 27 1.4.1. Au niveau national .............................................................................. 27 1.4.1.1. Association Francophone pour les Soins Oncologiques de Support .................. 27 1.4.1.2. Institut National du Cancer ................................................................ 28 1.4.2. Au niveau des territoires de santé ........................................................... 28 1.4.2.1. Schéma Régional d’Organisation Sanitaire .............................................. 29 1.4.2.2. Réseaux Régionaux de Cancérologie ..................................................... 30 1.4.3. Au niveau des établissements ................................................................. 31 1.4.3.1. Centre de Coordination en Cancérologie ................................................ 31 1.4.3.2. Département ou Service ou Fédération Interdisciplinaire de Soins de Support pour le Patient en Onco-hématologie ........................................................................ 31 1.4.4. Au niveau de l’Hôpital Nord Ouest ........................................................... 32 2. A QUELS BESOINS LES SOINS DE SUPPORT REPONDENT-ILS ? ............... 34 2.1. L’impact des chimiothérapies sur la qualité de vie ........................................... 34 2.1.1. Contexte .......................................................................................... 34 2.1.2. Concept de qualité de vie ..................................................................... 34 2.1.3. Implication des traitements dans l’altération de la qualité de vie .................... 35 2.2. Les effets indésirables des chimiothérapies .................................................... 36 10 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 2.2.1. Généralités .......................................................................................... 36 2.2.2. Mucites ............................................................................................ 39 2.2.2.1. Définition ...................................................................................... 39 2.2.2.2. Physiopathologie ............................................................................. 39 2.2.2.3. Evaluation de la mucite .................................................................... 42 2.2.2.4. Facteurs de risque ........................................................................... 44 2.2.2.5. Epidémiologie et molécules à risque ..................................................... 45 2.2.2.6. Complications ................................................................................ 46 2.2.3. Nausées et vomissements ...................................................................... 48 2.2.3.1. Définition ...................................................................................... 48 2.2.3.2. Physiopathologie ............................................................................. 50 2.2.3.3. Evaluation ..................................................................................... 53 2.2.3.4. Facteurs de risque liés au patient ........................................................ 54 2.2.3.5. Facteurs protecteurs liés au patient ..................................................... 56 2.2.3.6. Facteurs de risque liés au traitement .................................................... 56 2.2.3.7. Complications ................................................................................ 59 3. 3.1. PRISE EN CHARGE DES MUCITES CHIMIO-INDUITES............................ 60 Objectifs ................................................................................................ 60 3.2. Matériels et méthodes ............................................................................... 60 3.2.1. Références ........................................................................................... 60 3.2.2. Mesures préventives ............................................................................... 61 3.2.2.1. Bilan bucco-dentaire ........................................................................ 61 3.2.2.2. Education du patient ........................................................................ 62 3.2.2.3. Conseils d’hygiène bucco-dentaire ....................................................... 63 3.2.2.4. Soins de bouche .............................................................................. 64 3.2.2.5. Cryothérapie .................................................................................. 66 3.2.2.6. Laser de faible puissance ................................................................... 66 3.2.2.7. Palifermine.................................................................................... 67 3.2.2.8. Caphosol® ..................................................................................... 68 3.2.2.9. Suivi du patient .............................................................................. 68 3.2.3. Prise en charge curative des mucites buccales ............................................... 68 3.2.4. Prise en charge des autres problèmes de bouche ............................................ 71 3.2.4.1. Candidoses oropharyngées ................................................................. 71 3.2.4.2. Herpès ......................................................................................... 73 3.2.4.3. Bouche douloureuse ......................................................................... 74 3.2.5. Prise en charge des mucites gastro-intestinales .............................................. 75 3.2.6. Sélection des protocoles dans le logiciel Cristal Link ........................................ 75 3.2.6.1. Critères d’inclusion .......................................................................... 75 3.2.6.2. Critères d’exclusion ......................................................................... 75 3.3. Résultats ................................................................................................ 76 3.4. Plan d’amélioration .................................................................................. 78 3.4.1. Fiche conseil d’hygiène bucco-dentaire .................................................... 78 3.4.2. Nouveaux protocoles Cristal Link ............................................................ 78 3.4.2.1. En fonction du grade de mucite ........................................................... 78 3.4.2.1.1. Grade 0 ................................................................................... 78 3.4.2.1.2. Grade 1 ................................................................................... 79 3.4.2.1.3. Grade 2 ................................................................................... 79 3.4.2.1.4. Grade 3 ................................................................................... 80 3.4.2.1.5. Grade 4..................................................................................... 80 3.4.2.2. En fonction des problèmes de bouche ................................................... 81 3.4.2.2.1. Bouche sèche ............................................................................. 81 3.4.2.2.2. Candidoses................................................................................. 81 3.4.2.2.2.1. Forme minime et modérée ........................................................ 81 3.4.2.2.2.2. Forme étendue, sévère et/ou récidivante ..................................... 82 11 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.4.2.2.3. Herpès ...................................................................................... 82 3.4.2.2.4. Aphtose .................................................................................... 82 3.4.2.2.5. Bouche douloureuse avec ou sans lésions ............................................ 82 3.4.2.2.6. Bouche hémorragique ................................................................... 83 3.4.3. Nouvelles ordonnances de sorties ............................................................... 83 3.4.3.1. En fonction du grade de mucite ........................................................... 83 3.4.3.1.1. Grade 0..................................................................................... 83 3.4.3.1.2. Grade 1..................................................................................... 84 3.4.3.1.3. Grade 2..................................................................................... 84 3.4.3.1.4. Grade 3..................................................................................... 84 3.4.3.1.5. Grade 4..................................................................................... 85 3.4.3.2. En fonction des problèmes de bouche ................................................... 85 3.4.3.2.1. Bouche sèche ............................................................................. 85 3.4.3.2.2. Candidoses................................................................................. 85 3.4.3.2.3. Herpès ...................................................................................... 85 3.4.3.2.4. Aphtose .................................................................................... 85 3.4.3.2.5. Bouche douloureuse avec ou sans lésions ............................................ 86 3.4.3.2.6. Bouche hémorragique ................................................................... 86 3.4.4. Communication ..................................................................................... 86 3.5. Evaluation .............................................................................................. 87 3.6. Conclusion .............................................................................................. 88 4. 4.1. PRISE EN CHARGE DES NAUSEES ET VOMISSEMENTS CHIMIO-INDUITS ..... 89 Objectifs ................................................................................................ 89 4.2. Matériels et méthodes ............................................................................... 89 4.2.1. Références ....................................................................................... 89 4.2.2. Mesures non médicamenteuses ............................................................... 89 4.2.2.1. Education du patient ........................................................................ 89 4.2.2.2. Conseils hygiéno-diététiques .............................................................. 90 4.2.2.3. Médecines complémentaires ............................................................... 92 4.2.3. Médicaments disponibles ...................................................................... 92 4.2.3.1. Antagonistes des récepteurs dopaminergiques de type 2 ............................ 92 4.2.3.2. Antagonistes des récepteurs sérotoninergiques de type 3 ou sétrons .............. 94 4.2.3.3. Corticoïdes .................................................................................... 96 4.2.3.4. Antagonistes des récepteurs aux neurokinines de type 1 ............................ 97 4.2.3.5. Benzodiazépines ............................................................................. 99 4.2.3.6. Autres médicaments......................................................................... 99 4.2.4. Protocoles de prise en charge ............................................................... 101 4.2.4.1. Définition du niveau émétisant des molécules ........................................ 101 4.2.4.2. Définition du niveau émétisant des protocoles ........................................ 102 4.2.4.3. Prophylaxie en fonction du niveau émétisant du protocole ........................ 102 4.2.4.3.1. Hautement émétisant ................................................................ 102 4.2.4.3.2. Modérément émétisant ............................................................... 103 4.2.4.3.3. Faiblement émétisant ................................................................ 104 4.2.4.3.4. Très faiblement émétisant .......................................................... 105 4.2.4.3.5. Traitement de secours ............................................................... 105 4.2.4.3.6. Cas particuliers ........................................................................ 106 4.2.4.3.6.1. Nausées et vomissements anticipés .......................................... 106 4.2.4.3.6.2. Chimiothérapie en continue ................................................... 106 4.2.5. Sélection des protocoles dans le logiciel Asclépios II ....................................... 107 4.2.5.1. Critères d’inclusion ......................................................................... 107 4.2.5.2. Critères d’exclusion ........................................................................ 107 4.3. Résultats .............................................................................................. 108 4.3.1. Protocoles hautement émétisant............................................................ 108 12 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 4.3.2. 4.3.3. 4.3.4. 4.4. 5. Protocoles modérément émétisants ........................................................ 109 Protocoles faiblement émétisants .......................................................... 111 Protocoles très faiblement émétisants ..................................................... 113 Conclusion ............................................................................................ 114 DISCUSSION ......................................................................... 115 5.1. Analyse du travail effectué ....................................................................... 115 5.2. Bilan sur les soins de support oncologiques .................................................. 117 5.3. Coordination hôpital-ville et rôle du pharmacien d’officine.............................. 120 CONCLUSIONS ............................................................................ 124 BIBLIOGRAPHIE .......................................................................... 126 ANNEXES .................................................................................. 133 13 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) LISTE DES TABLEAUX Tableau 1 : Médicaments hautement émétisants Tableau 2 : Médicaments modérément émétisants Tableau 3 : Médicaments faiblement émétisants Tableau 4 : Médicaments très faiblement émétisants Tableau 5 : Aliments à privilégier ou à éviter pour éviter les mucites Tableau 6 : Protocoles de traitement des mucites à l’HNO Tableau 7 : Prophylaxies recommandées pour les molécules hautement émétisantes Tableau 8 : Prophylaxies recommandées pour les molécules modérément émétisantes Tableau 9 : Prophylaxies recommandées pour les molécules faiblement émétisantes Tableau 10 : Prophylaxies recommandées pour les molécules très faiblement émétisantes Tableau 11 : Résultats du travail effectué pour les protocoles hautement émétisants Tableau 12 : Résultats du travail effectué pour les protocoles modérément émétisants Tableau 13 : Résultats du travail effectué pour les protocoles faiblement émétisants Tableau 14 : Résultats du travail effectué pour les protocoles très faiblement émétisants 14 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) LISTE DES FIGURES Figure 1 : Continuité et globalité des soins de support oncologiques Figure 2 : Physiopathologie de la mucite : un processus en 5 étapes Figure 3 : Mécanisme pharmacologique des nausées et vomissements Figure 4 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules hautement émétisantes Figure 5 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules modérément émétisantes Figure 6 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules faiblement émétisantes Figure 7 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules très faiblement émétisantes 15 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) TABLE DES ABREVIATIONS 3C : Centre de Coordination en Cancérologie 5-FU : 5-Fluoro-Uracile 5-HT3 (récepteurs) : sérotoninergiques de type 3 ACORESCA : Association des Coordonateurs de Réseaux de Cancérologie ADN : Acide Désoxyribonucléique AESCO : Association Européenne pour les Soins de Confort en Oncologie AFSOS : Association Francophone pour les Soins Oncologiques de Support AMM : Autorisation de Mise sur le Marché APA : Activité Physique Adaptée ARS : Agence Régional de Santé ASCO : American Society of Clinical Oncology BZD : Benzodiazépines CB1 (récepteurs) : cannabinoïdes de type 1 CHT : Communauté Hospitalière de Territoire CHU : Centre Hospitalier Universitaire CISSPO : Cellule Interdisciplinaire de Soins de Support pour le Patient en Oncohématologie CLAN : Comité de Liaison en Alimentation et Nutrition CLIC : Centres Locaux d’Information et de Coordination CLIN : Comité de Lutte contre les Infections Nosocomiales CLUD : Comité de LUtte contre la Douleur CNAMTS : Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés CNHIM : Centre National Hospitalier d’Information sur le Médicament CPG : Central Pattern Generator CTC : Common Toxicity Criteria CTZ : Chemoreceptive Trigger Zone D2 (récepteurs) : dopaminergiques de type 2 DDC : Dossier Médical Communiquant DHOS : Direction de l’Hospitalisation et de l’Organisation des Soins DGOS : Direction Générale de l’Offre de Soins 16 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) DISSPO : Département Interdisciplinaire de Soins de Support pour le Patient en Onco-hématologie DP : Dossier Pharmaceutique ESMO : European Society for Medical Oncology EVA : Echelle Visuelle Analogique FISSPO : Fédération Interdisciplinaire de Soins de Support pour le Patient en Onco-hématologie FNCLCC : Fédérations Nationale des Centres de Lutte Contre le Cancer GEX : Groupes EXperts GRASSPHO : Groupe de Réflexion sur l’Accompagnement et les Soins de Support pour les Patients en Hémato-Oncologie HAD : Hospitalisation A Domicile HAS : Haute Autorité de Santé HNO : Hôpital Nord Ouest HPST (loi) : Hôpital, Patients, Santé, Territoires HSV : Herpes Simplex Virus IDE : Infirmières Diplômées d’Etat J1 : premier jour de la chimiothérapie IL-1 IL-6 : Interleukines 1 et 6 INCa : Institut National du Cancer ISOO : International Society of Oral Oncology ITK : Inhibiteur de la Tyrosine Kinase IV : Intraveineux MASCC : Multinational Association of Supportive Care in Cancer MAT : MASCC Antiemetic Tool MCO (Etablissements de) : Médecine, Chirurgie, Obstétrique MRS : Maisons Régionales de Santé NCCN : National Comprehensive Cancer Network NCI : National Cancer Institute NK1 (récepteurs) : à la Neuro Kinine de type 1 NTS : Noyau du Tractus Solitaire NVCI : Nausées et Vomissements Chimio-Induits OAG : Oral Assessment Guide 17 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) OMS : Organisation Mondiale de la Santé ORL (sphère) : Oto-Rhino-Laryngée PCA : Patient Control Analgesia PDSES : Permanence Des Soins en Etablissement de Santé PPAC : Programme Personnalisé de l’Après Cancer PPS : Plan Personnalisé de Soins PRS : Projets Régionaux de Santé PUI : Pharmacie à Usage Intérieur RCP : Réunion de Concertation Pluridisciplinaire ROS : Reactive Oxygen Species RTOG : Radiation Therapy Oncology Group RRC : Réseaux Régionaux de Cancérologie SFAP : Société Française d’Accompagnement et de soins Palliatifs SFPC : Société Française de Pharmacie Clinique SFPO : Société Française de Pharmacie Oncologique SISSPO : Service Interdisciplinaire de Soins de Support pour le Patient en Oncohématologie SNC : Système Nerveux Central SOS : Soins de Support Oncologiques SROS : Schéma Régional d’Organisation Sanitaire SSIAD : Service de Soins Infirmiers A Domicile TNF-α : Tumor Necrosis Factor-Alpha URCC : Unité de Reconstitution Centralisée des Cytotoxiques UNR-Santé : Union Nationale des Réseaux de Santé 18 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) INTRODUCTION Le cancer est une maladie multifactorielle en expansion ces dernières années. Elle peut, de plus en plus, être qualifiée de chronique de par l’utilisation de traitements efficaces qui augmentent la survie des patients. Celle-ci doit avoir lieu dans les meilleures conditions possibles, ce qui est l’enjeu des soins de support oncologiques. Leur objectif principal est d’améliorer la qualité de vie des patients sous chimiothérapie. Leur organisation a pour but de rendre le parcours de soin plus lisible pour le patient, de favoriser la continuité et la coordination des soins et de permettre d’anticiper les besoins des patients et de leur entourage. Pour cela, ils doivent être proposés à toutes les étapes de la chimiothérapie, lors de la consultation d’annonce, de la mise en place de la chimiothérapie mais aussi après les traitements. Ils sont donc différents des soins palliatifs qui sont eux proposés uniquement lors de l’arrêt des traitements spécifiques. Les chimiothérapies ont de nombreux effets indésirables pour lesquels les soins de support peuvent apporter un bénéfice au patient. Deux axes ont été définis pour ce travail : la prise en charge des mucites, mal connues des patients et sources de complications ; puis celle des nausées et vomissements, redoutés des patients et dont le contrôle joue un rôle essentiel dans l’adhérence à la chimiothérapie. Dans une première partie, la définition et l’organisation des soins de support oncologiques seront abordés. Ce développement amènera à comprendre à quels besoins les soins de support répondent de manière générale, puis plus spécifiquement dans les thématiques de ce travail : les mucites et les nausées et vomissements. Dans un second temps, les recommandations actuelles de prise en charge de ces effets indésirables seront rappelées, avant de décrire la méthodologie mise en place pour l’harmonisation de la prise en charge des mucites et l’actualisation des protocoles de prise en charge des nausées et vomissements chimio-induits au sein de l’Hôpital Nord Ouest. Enfin les résultats obtenus permettront d’aborder le rôle du pharmacien d’officine et donc l’importance de la mise en place d’une coordination hôpital-ville dans le parcours de soins des patients. 19 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 1. Les soins de support oncologiques 1.1.Définition Les soins de support oncologiques ont été définis pour la première fois en 2004 comme « l’ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades tout au long de la maladie conjointement aux traitements oncologiques ou hémato-oncologiques spécifiques lorsqu’il y en a. ». Cette définition est inspirée de la définition du « supportive care » donnée en 1990 par la Multinational Association of Supportive Care in Cancer (MASCC) : « the total medical, nursing and psychosocial help, which the patients need besides the specific treatment ». Cette définition est étendue puisqu’elle intègre autant le champ de la guérison, avec d’éventuelles séquelles, que celui des soins palliatifs(1). Selon la ligue contre le cancer, les soins de support désignent l’ensemble des soins et soutiens qui permettent aux patients de mieux supporter les conséquences de la maladie(2). Les soins de support répondent aux besoins du patient et de son entourage qui concernent la prise en charge de la douleur, de la fatigue, des problèmes nutritionnels, des troubles digestifs, des troubles respiratoires, des troubles génito-urinaires, des troubles moteurs, des handicaps, des problèmes odontologiques, des difficultés sociales, de la souffrance psychique, des perturbations de l’image corporelle et de l’accompagnement de fin de vie. Les soins palliatifs intègrent donc totalement la problématique des soins de support(3). Figure 1 : Continuité et globalité des soins de support oncologiques(1) 20 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) La première définition officielle des soins de support a été reprise dans la circulaire du 22 février 2005 relative à l’organisation des soins en cancérologie. Cette circulaire précise également que les soins de support ne sont pas une nouvelle discipline, mais une coordination des compétences et leur mise à disposition pour le patient et ses proches(4). 1.2.Objectifs 1.2.1. Améliorer la lisibilité du parcours de soin Le premier objectif des soins de support est de faciliter et de clarifier le parcours de soin du patient et de ses proches. La création d’un « guichet unique » permet une meilleure lisibilité et améliore ainsi le service rendu aux malades et aux équipes, en limitant les démarches et en rassemblant les informations(1)(2)(5). Il est représenté par un médecin référent, avec un secrétariat commun à tous les soins de support de l’établissement, pour permettre une vision globale des ressources disponibles et ainsi pouvoir organiser et coordonner tous les soins dont un patient a besoin. Il peut également participer au soutien des proches et s’assurer de la continuité des soins en dehors de l’hôpital(1)(2). Les patients et leurs proches doivent avoir connaissance des ressources proposées dans le cadre des soins de support. C’est pour cela qu’ils doivent être proposés à chaque patient atteint de cancer dans le cadre du Plan Personnalisé de Soins (PPS) qui lui sera remis. Le PPS contient entre autre les coordonnées des personnes ressources pour chacune des composantes des soins de support et/ou les coordonnées d’un lieu d’information à la disposition du patient. Les autres outils qui peuvent être utilisés pour diffuser ces informations sont : le livret d’accueil de l’établissement, le site internet de l’hôpital, les réseaux de santé et enfin les associations d’aide aux malades(3). 1.2.2. Développer le principe de continuité des soins L’accès aux soins de support doit être possible dès le diagnostic, pendant la phase curative et/ou palliative et jusqu’à l’après cancer(5). Les patients doivent donc pouvoir y faire appel tout au long du parcours du soin, pendant ou à distance des traitements, quel que soit l’endroit où ils se trouvent, en institution ou à domicile(3)(5). 21 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Les soins de support doivent participer à la continuité des soins entre les équipes hospitalières et les équipes au domicile du patient(5). En effet, d’après l’annexe 4 de la circulaire du 22 février 2005, « cette approche globale de la personne malade suppose que, l’ensemble des acteurs de soins impliqués en cancérologie prenne en compte la dimension des soins de support dans la prise en charge de leurs patients, notamment en terme de continuité des soins »(6). De plus, selon la Ligue contre le cancer, la continuité dans le temps et dans l’espace est un aspect fondamental des soins de support. Ils sont dispensés en établissement de soins mais aussi sur le lieu de vie, et cette continuité implique un lien étroit entre la structure de soin et le domicile, qui passe généralement par le médecin traitant. La communication et la transmission des informations sont donc indispensables aux soins de support(2). Par exemple, le cahier ou classeur de liaison permet d’assurer le suivi du patient à son domicile et de donner les informations essentielles à la coordination et la continuité des soins(5). Cet outil a pour objectif d’informer le patient et les professionnels de santé qu’il est amené à rencontrer, sur sa maladie, son traitement et les résultats des examens médicaux qu’il a réalisés. Il permet ainsi au patient de garder une trace écrite de son état de santé au domicile et de faciliter la communication entre les différents professionnels de santé intervenant auprès du patient. 1.2.3. Favoriser une organisation transversale et coordonnée Un des objectifs des soins de support est d’optimiser les pratiques des professionnels de santé qui prennent en charge le patient, en renforçant la transversalité et les pratiques collaboratrices. Les différents acteurs doivent donc mettre en place des moyens pour organiser la complémentarité et formaliser les coopérations dans chaque territoire de santé(7). En effet, les soins de support constituent une organisation coordonnée de compétences qui sont mutualisées et mises en avant pour répondre aux besoins des patients et de leurs proches(8). Il s’agit d’une démarche interdisciplinaire qui nécessite une concertation entre les acteurs concernés afin de permettre un parcours de soin optimal(5). La coordination est justifiée par la pluridisciplinarité, elle-même liée à l’hyperspécialisation et à l’hypertechnicité des professionnels, mais aussi par une insuffisance de communication entre les équipes et enfin par les difficultés administratives que rencontrent les équipes participant aux soins de support(1). 22 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) L’objectif de cette coordination n’est pas de créer des équipes identifiées « soins de support », mais d’organiser et de renforcer les structures déjà en place. L’offre de soins est évaluée au sein d’un territoire de santé, car le but de la mutualisation est de regrouper les compétences. Cette coordination nécessite également le partage de l’information, via le dossier médical partagé ou via l’échange de données médicales transmissibles(3). La mise en place d’une démarche participative avec des réunions pluridisciplinaires au sein des unités de soins est indispensable, tant pour l’élaboration des projets de soins destinés aux patients, que pour l’organisation des soins. Ce décloisonnement peut faire apparaître des recouvrements de compétences ou des carences dans l’offre de soins de support, qui doivent être régulés par la concertation. De plus, il est nécessaire que ce dernier conduise à un changement culturel dans les pratiques et l’organisation des professionnels(7). La coordination en soins de support peut constituer la mission essentielle de certains réseaux de santé transversaux, centrés sur l’approche globale de la personne et dont l’ancrage peut être en ville ou à l’hôpital(7). Ces réseaux de soins assurent donc un rôle de coordination entre l’hôpital et les professionnels libéraux. Ils permettent de préparer la sortie de l’hôpital et veillent à ce que le retour à domicile se fasse dans les meilleures conditions possibles. Ils se composent d’une équipe pluridisciplinaire (médecins, infirmières, diététicienne, assistante sociale par exemple) et agissent le plus souvent au niveau régional(2). 1.2.4. Anticiper les besoins et améliorer la prise en charge En règle générale dans les soins de support, une approche globale de la personne est à privilégier, c’est-à-dire une prise en charge du patient sur le plan physique, psychologique, social, et pas uniquement de sa maladie(8). D’autre part pour orienter précocement les patients vers la prise en charge la plus adaptée, il est nécessaire d’anticiper les besoins et de repérer les situations à risque(3)(7). C’est pourquoi il est indispensable que les équipes soignantes soient formées à repérer les situations à risque(3). 23 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) La mesure 40 du Plan cancer 2003-2007 demande la mise en place d’un dispositif d’annonce, lors du diagnostic, dans tous les établissements traitant des patients atteints de cancer. Celui-ci permet, entre autre, d’effectuer une première évaluation des besoins par l’équipe de soins de support(5). Les besoins sont ensuite réévalués dans les différents domaines de compétences des soins de support, à chaque étape du parcours du patient, par les équipes référentes de l’établissement ou du domicile(5)(7)(8). 1.3.Acteurs et organisation L’organisation des soins de support doit s’appuyer sur les ressources existantes. Les compétences disponibles doivent être mobilisées et celles non disponibles doivent être rendues accessibles(3). 1.3.1. Acteurs 1.3.1.1. Professionnels de santé habituels Les soins de support supposent d’associer autour du patient et de ses proches le médecin traitant, les professionnels médicaux et paramédicaux du domicile et les acteurs des traitements spécifiques dans les équipes hospitalières(7). 1.3.1.1.1. Professionnels de santé référents qui interviennent au domicile En général, la période passée à l’hôpital est beaucoup plus courte que celle passée chez soi : la plupart des soins se font à domicile et sont dispensés par des professionnels libéraux. Le médecin traitant a une présence régulière et rassurante pour le patient. Sa proximité fait qu’il pourra percevoir précocement les besoins du malade(2). Les acteurs référents sont les professionnels de santé habituels choisis par le patient, qui interviennent au domicile dans la prise en charge globale et spécifique, par exemple le médecin traitant, l’infirmier, le masseur-kinésithérapeute, le pharmacien, l’aide soignant. L’hospitalisation à domicile et les réseaux de soins font également partie des acteurs qui peuvent intervenir à domicile, selon le contexte du patient(7). 24 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 1.3.1.1.2. Professionnels de santé spécifiques de l’oncologie et des soins de support Le médecin oncologue est le principal professionnel de santé qui s’investit à la fois dans les traitements spécifiques de l’oncologie et dans les soins de support. En effet, il prend en charge les effets secondaires des traitements, comme les nausées et les vomissements, ainsi que certains symptômes liés à la maladie, comme la douleur. De plus, l’équipe soignante évalue les symptômes inconfortables et organise la prise en charge globale des patients. Le chirurgien fait également partie de ces professionnels puisqu’il peut donner des conseils liés aux interventions chirurgicales, par exemple pour la stomie(7). 1.3.1.2. Professionnels de recours Les professionnels de santé précédemment cités sont les interlocuteurs privilégiés du patient, mais en cas de besoin, ils pourront faire appel à d’autres professionnels, notamment ceux qui s’occupent des traitements spécifiques du cancer comme la radiothérapie, l’oncologie, l’hématologie et les services de spécialité. Par ailleurs, les professionnels de santé peuvent également faire appel à l’équipe d’évaluation et de traitement de la douleur, aux professionnels formés dans les domaines des soins palliatifs, de la prise en charge psychologique, de l’accompagnement social des patients, de la nutrition et de l’alimentation, de la réadaptation fonctionnelle et de la rééducation dont font partie l’ergothérapie et la kinésithérapie, et de l’odontologie pour les soins bucco-dentaires. D’autre part les professionnels non acteurs de santé, formés à la socio-esthétique et à l’art-thérapie peuvent également participer aux soins de support(7)(5). Enfin, les professionnels spécialisés en prise en charge type sophrologie, relaxation et réflexologie, et les professionnels spécialisés en médecines complémentaires type mésothérapie, auriculothérapie et homéopathie, peuvent répondre aux besoins spécifiques des patients(5). Les professionnels de recours doivent se coordonner entre eux et avec les professionnels habituels pour éviter le chevauchement des interventions(7). 25 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 1.3.1.3. Acteurs de la « vie civile » Certains non professionnels de santé peuvent intervenir dans le cadre des soins de support, par exemple les associations de bénévoles d’accompagnement, d’aumônerie et les associations de patients et de représentants des usagers. Leur intervention se fait en lien et en accord avec les équipes soignantes. Ils peuvent être directement sollicités par les patients et leurs proches(7)(5). La ligue contre le cancer, qui est une association loi 1901, en fait partie. Elle joue un rôle d’information, de sensibilisation et de prévention contre le cancer. Elle cherche à améliorer la qualité de vie des personnes malades et de leurs proches. Dans chaque département, il existe des services de soutien financier, d’accès au prêt, d’Activité Physique Adaptée (APA), d’aide psychologique, de soin socio-esthétique, d’amélioration du confort à l’hôpital et d’aide ménagère. Elle œuvre également auprès des institutions et des entreprises pour promouvoir les droits des patients et des usagers du système de santé(9). 1.3.2. Structures Les structures de soins de support font partie d’établissements publics ou participants au service public hospitalier, ou d’établissements privés. En plus des structures qui concernent les différents champs d’action des soins de support, des réseaux de santé de cancérologie et des autres domaines des soins de support sont également présents. Par ailleurs, l’Hospitalisation A Domicile (HAD), les Services de Soins Infirmiers A Domicile (SSIAD), l’équipe mobile ou l’unité ou les réseaux de santé de soins palliatifs et les centres de prise en charge de la douleur chronique rebelle sont également impliqués dans cette démarche(3)(5)(7)(10). Toutes ces structures peuvent interagir avec le Comité de LUtte contre la Douleur (CLUD), le Comité de Lutte contre les Infections Nosocomiales (CLIN) et le Comité de Liaison en Alimentation et Nutrition (CLAN)(10). La création de fédérations, départements ou pôles de responsabilité de soins de support est possible, avec une coordination de base impliquant les activités de prise en charge de la douleur chronique rebelle, de soins palliatifs, de prise en charge psychologique et d’accompagnement social. Cette coordination peut s’étendre en fonction de l’histoire et des missions des établissements(1). 26 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) D’autre part, les professionnels de santé de recours, qui interviennent auprès des services hospitaliers, peuvent également intervenir dans les établissements de santé et médico-sociaux ayant passé convention avec l’établissement de santé auquel ils sont rattachés. De même, ils peuvent intervenir auprès des acteurs du domicile, notamment dans le cadre de conventions passées entre l’établissement de santé auquel ils sont rattachés et le réseau de santé, le service d’HAD, les SSIAD, ou les Centres Locaux d’Information et de Coordination gérontologique (CLIC)(7). 1.4.Mise en place des soins de support 1.4.1. Au niveau national 1.4.1.1. Association Francophone pour les Soins Oncologiques de Support L’Association Francophone pour les Soins Oncologiques de Support (AFSOS) a été créé en 2008 à l’initiative de l’Association Européenne pour les Soins de Confort en Oncologie (AESCO), du groupe de soins de support de la Fédérations Nationale des Centres de Lutte Contre le Cancer (FNCLCC) et du Groupe de Réflexion sur l’Accompagnement et les Soins de Support pour les Patients en Hémato-Oncologie (GRASSPHO), avec le soutien de la MASCC. Cette association constitue une plateforme d’échanges autour de la cancérologie, entre les équipes dédiées aux soins oncologiques spécifiques et celles dédiées aux soins oncologiques de support. Son but est de mutualiser les compétences dans les domaines concernés, au sein d’une société savante unique, de dimension internationale. L’AFSOS a vocation à promouvoir la connaissance et la mise en œuvre des soins de support oncologiques en collaborant avec les sociétés savantes et en servant d’interface entre les professionnels de la cancérologie, de la douleur, de la psycho-oncologie, de la nutrition, de la réadaptation et des soins palliatifs, par exemple. Un de ses objectifs est d’améliorer la prise en charge des symptômes, l’accompagnement et la démarche palliative au sein des équipes intra et extra hospitalières(11). D’autre part elle encourage la formation de Groupes Experts (GEX) dont le but est de promouvoir la recherche et la pratique clinique, dans les différents domaines des soins oncologiques de support. 27 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Leur rôle est de réunir les professionnels de l’AFSOS sur des thèmes d’intérêt ou des symptômes, et de mener des actions qui visent à améliorer la formation, les bonnes pratiques et la recherche sur les thèmes choisis. Les missions des GEX sont de participer à la conception et au déploiement de formations sur le thème du GEX, de participer à la rédaction et à la diffusion de recommandations en lien avec l’Haute Autorité de Santé et l’Institut National du Cancer (INCa), ou encore de référentiels en lien avec les réseaux de cancérologie dans le cadre de l’action nationale menée par l’AFSOS, l’Association des Coordonateurs de Réseaux de Cancérologie (ACORESCA) et l’Union Nationale des Réseaux de Santé (UNR-Santé) et enfin de participer à la recherche sous toutes ses formes sur les thèmes correspondants aux GEX(12). 1.4.1.2. Institut National du Cancer L’Institut National du Cancer (INCa) est une agence sanitaire et scientifique de l’Etat, chargée de coordonner les actions de lutte contre le cancer. Il a été créé par la loi de santé publique du 9 août 2004, dans le cadre du Plan cancer 2003-2007. Il est placé sous la tutelle conjointe du ministère des Affaires sociales et de la Santé et du ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche. Il rassemble les acteurs de la lutte contre le cancer en France, dans le but de contribuer à diminuer la mortalité par cancer en France et d’améliorer la qualité de vie des personnes atteintes d’un cancer. Le programme de travail de l’INCa s’inscrit dans les axes des Plans cancer, c’est pour cela que l’institut participe au comité de pilotage en charge de la mise en œuvre du plan et qu’il en assure le suivi. Ses différentes missions sont d’animer les réseaux d’acteurs territoriaux, tels que les réseaux régionaux de cancérologie et les cancéropôles, d’articuler son action avec les Agences Régionales de Santé (ARS) et de développer des collaborations internationales. Il a également pour objectif d’initier et soutenir l’innovation scientifique, médicale, technologique et organisationnelle(13)(14). 1.4.2. Au niveau des territoires de santé Les territoires de santé sont définis « selon les activités et les équipements » et « constituent un espace infrarégional, régional, interrégional ou national ». C’est la direction de l’ARS qui définie les limites des territoires de santé. Elles doivent tenir compte de la réalité locale et non pas des limites administratives. Les territoires de santé ont pour mission d’assurer la coordination et la continuité des soins. 28 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Les activités et les équipements des territoires de santé relèvent du Schéma Régional d’Organisation Sanitaire (SROS)(5). 1.4.2.1. Schéma Régional d’Organisation Sanitaire En 2009, suite à la loi Hôpital, Patients, Santé, Territoires (HPST), les Schémas Régionaux d’Organisation Sanitaires (SROS) sont devenus les Schémas Régionaux d’Organisation des Soins. Ils s’intègrent aux Projets Régionaux de Santé (PRS) et s’étendent aux soins ambulatoires. Les PRS quant à eux, sont responsables de l’évaluation des besoins de santé, de l’offre de soins et de la détermination des orientations stratégiques de la région en matière de santé. Les SROS doivent faire évoluer l’offre de soins en fonction des besoins de la population, pour garantir l’amélioration de l’état de santé et la réduction des inégalités d’accès aux soins. Pour améliorer la qualité et la sécurité des soins, les SROS doivent poursuivre les restructurations de l’offre de soins, en favorisant les alternatives à l’hospitalisation complète et sans oublier de prendre en compte le contexte macro-économique(15). La circulaire DGOS/R5/2011/311 du 1er août 2011 présente le guide méthodologique d’élaboration du SROS, destiné principalement aux ARS. La première partie de ce guide aborde les enjeux de transversalité et d’articulation du SROS. En effet la loi HPST découpe le SROS en deux volets, l’un relatif à l’offre de soins ambulatoire et l’autre relatif à l’offre de soins hospitalière. De plus, différents aspects des modalités de coordination hôpital-ville sont évoqués, ainsi que les objectifs du SROS pour chacun d’entre eux. La partie 3.11 de ce guide, parle plus précisément des traitements du cancer. En effet, les orientations nationales sont d’améliorer : l’accès aux soins, en garantissant un parcours de soins personnalisé et coordonné comme cela était demandé dans le Plan cancer 2009-2013 ; la qualité et la sécurité des prises en charge ; l’efficience, en renforçant la coordination ville-hôpital avec des réseaux de santé territoriaux, avec l’HAD et avec des maisons de santé pluri professionnelles, par exemple. Un des points d’articulation avec la prévention et le médico-social est l’organisation de la coopération hôpital-ville pendant et après le traitement du cancer. En effet, coordonner les acteurs impliqués dans la prise en charge d’un patient atteint d’un cancer permet d’améliorer la fluidité des prises en charge(16). 29 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 1.4.2.2. Réseaux Régionaux de Cancérologie Les réseaux régionaux de cancérologie (RRC) sont évoqués pour la première fois dans la mesure 29 du Plan cancer 2003-2007. Ils ont un rôle de coordination des soins à l’échelle régionale, entre l’ensemble des acteurs de la prise en charge du patient atteint de cancer, qu’ils se trouvent dans les établissements de soins ou en ville. Ils ont également pour mission d’harmoniser et d’améliorer la qualité des pratiques, de développer l’évaluation et de créer des outils de communication communs. Ils permettent donc d’assurer la continuité des soins, depuis l’annonce du diagnostic jusqu’au retour au domicile du patient. Tout établissement de santé qui traite des malades atteints de cancer doit appartenir au RRC de sa région. D’autre part, le RRC doit signer une convention avec l’ARS de sa région et l’INCa(5)(17). La circulaire du 25 septembre 2007, qui définit l’organisation des RRC, a été rédigée par la Direction de l’Hospitalisation et l’Organisation des Soins (DHOS) qui est devenue la Direction Générale de l’Offre des Soins (DGOS), ainsi que par la Caisse Nationale de l’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés (CNAMTS) et l’INCa. Le but des RRC est d’offrir aux pathologies tumorales une organisation des soins avec une structure régionale de partage des connaissances, de mise en commun des compétences, des ressources techniques et des moyens. En pratique, les RRC élaborent et valident des référentiels régionaux de cancérologie, qui constituent des protocoles de référence et sont garants de la qualité et de la cohérence des pratiques médicales. Ce sont des outils opérationnels qui comportent des arbres décisionnels. Ces référentiels sont évolutifs et des procédures de mise à jour doivent être prévues chaque fois que les recommandations nationales et internationales connaissent des avancées diagnostiques et/ou thérapeutiques significatives, mais aussi en fonction de l’évolution du contexte régional et/ou scientifique qui fera l’objet de transmissions nationales, et, en tout état de cause, tous les deux ans. Le RRC doit assurer la diffusion des référentiels auprès de tous ses membres et partenaires, et notamment aux Centres de Coordination en Cancérologie (3C), aux réseaux territoriaux de cancérologie, aux établissements de santé et aux professionnels de santé concernés dont font partie les médecins traitants et les spécialistes libéraux. Le contenu de ces référentiels régionaux doit également pouvoir être diffusé aux patients. 30 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Enfin, l’INCa assure la coordination nationale des RRC sur les missions précisées dans le référentiel national, et l’accompagnement et l’animation des RRC sont réalisés par l’INCa en concertation avec la DGOS et la CNAMTS et en lien avec les Maisons Régionales de Santé (MRS)(18). 1.4.3. Au niveau des établissements 1.4.3.1. Centre de Coordination en Cancérologie D’après la mesure 32 du Plan cancer 2003-2007, tout établissement de santé prenant en charge des patients atteints de cancer doit organiser ses activités de cancérologie dans le cadre d’un Centre de Coordination en Cancérologie (3C). Il s’agit du pivot de l’organisation territoriale en réseau puisqu’ils coordonnent les soins de support oncologiques et en évaluent régulièrement le fonctionnement. Leur mission principale est de coordonner médicalement la cancérologie au sein de l’établissement. Ils doivent également s’assurer que tous les patients bénéficient d’une Réunion de Concertation Pluridisciplinaire (RCP), du PPS et d’un suivi individualisé(5)(17). 1.4.3.2. Département ou Service ou Fédération Interdisciplinaire de Soins de Support pour le Patient en Onco-hématologie En fonction de la taille des établissements, l’organisation pourra se faire sous forme de Service (SISSPO), de Département (DISSPO) ou encore de Fédération (FISSPO) ou de Pôle de soins de support. Il s’agit d’un regroupement d’unités fonctionnelles ou de services n’appartenant pas aux mêmes institutions(10). Les DISSPO ou les FISSPO, sont des exemples de guichets uniques qui permettent donc de limiter les démarches et de rassembler les informations qui concernent les soins de support. L’équipe du DISSPO et des différentes unités de l’établissement se réunissent régulièrement afin de discuter des projets de soins des patients hospitalisés. Des rencontres hebdomadaires sont également organisées avec les équipes d’hospitalisation à domicile(2). 31 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 1.4.4. Au niveau de l’Hôpital Nord Ouest Pour terminer, la mise en place des soins de support s’est effectuée à l’échelle des hôpitaux comme c’est le cas à l’Hôpital Nord Ouest (HNO). Grâce au Plan cancer de 2003-2007, une consultation d’annonce est systématiquement mise en place depuis mars 2010 afin de soutenir et d’accompagner le patient et ses proches face au diagnostic(17). Ensuite, tous les dossiers de nouveaux patients atteints de cancer, ainsi que l’ensemble des changements de ligne de traitement, passent en RCP pour que les professionnels de santé présents décident du parcours thérapeutique prévisionnel et en effectuent une synthèse sous la forme d’un PPS. Le but de la RCP est de respecter l’équité des soins, de faciliter la transmission d’informations et de permettre aux médecins généralistes membres de réseau de soin de cancérologie de participer à la décision(17). Un carnet de liaison est ensuite remis au patient. Il contient le PPS, les éléments principaux du dossier médical, ainsi que les ordonnances et les résultats d’analyses biologiques récentes. Au centre de ce carnet, une partie liaison avec un diagramme de soins de synthèse et des pages de correspondances médicales et paramédicales sont présentes dans le but de faciliter l’échange d’informations entre professionnels de santé. Une fiche de contact pour la ville et pour l’hôpital regroupe toutes les coordonnées des professionnels de santé que le patient est amené à rencontrer. De plus un calendrier prévisionnel permet au patient de visualiser les dates de ses prises de sang, de ses cures de chimiothérapie et éventuellement de ses hospitalisations pour bilan d’évaluation. Une fiche d’information et conduite à tenir rappelle au patient les principaux effets indésirables des traitements anticancéreux et les conseils d’hygiène de vie à respecter. Ensuite, une partie intitulée « dossier médical », résume les antécédents du patient et l’histoire de sa maladie. Enfin, une courbe de poids, à remplir par le patient, permet de détecter un éventuel état de dénutrition. Les principales spécialités qui pratiquent l’oncologie sur l’établissement sont la pneumologie, la gastro-entérologie, l’hématologie et la gynécologie. Un service d’oncologie ambulatoire permet aux patients dont le traitement ne nécessite pas une hospitalisation, de venir à l’hôpital sur la journée pour recevoir leur cure de chimiothérapie. Dans ce cas, les patients effectuent leurs analyses biologiques la veille, en laboratoire d’analyses médicales de ville, puis rencontrent le médecin en consultation. 32 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Le jour prévu de la cure, le médecin effectue un examen clinique du patient et analyse ses résultats biologiques. Il va notamment regarder l’état général du patient, son capital veineux, mais aussi son poids et sa taille afin de définir sa surface cutanée. Une fois que tous les critères sont validés, il établit la prescription de la chimiothérapie et donne son feu vert médical. La prescription de la chimiothérapie est alors soumise à la validation pharmaceutique. Une fois vérifiée, la prescription est préparée sous forme de poches de chimiothérapie par les préparateurs en pharmacie hospitaliers, dans l’Unité de Reconstitution Centralisée des Cytotoxiques (URCC) qui se trouve au sein de la Pharmacie à Usage Intérieur (PUI). En 2014 la production de l’URCC a atteint 7500 préparations, avec une augmentation de 115% entre 2009 et 2014. La dispensation des poches de chimiothérapie s’effectue ensuite au niveau du guichet de la PUI, auprès de l’Infirmière Diplômée d’Etat (IDE) du service de soins. La dernière étape est l’administration de la chimiothérapie par les IDE du service concerné. L’HNO organise également des ateliers saveurs avec une diététicienne qui intervient deux fois par semaine, dans la matinée. Son but est de faire participer les patients présents dans le service d’oncologie ambulatoire et qui le souhaitent, à un atelier de cuisine où la diététicienne propose des recettes adaptées aux patients atteints de cancer. L’intérêt de cette activité est de leur faire retrouver goût à cuisiner leurs repas même s’ils vivent seul, ou que leurs nausées sont trop importantes. Les recettes sont élaborées pour être équilibrées mais enrichies en lipides et en protéines pour contrer la perte de poids qui concernent souvent ces patients et qui peut être responsable d’une dégradation de leur état général. Les recettes sont relativement simples et rapides à réaliser et elles sont suivies d’une dégustation des plats. Cet atelier permet également aux patients de passer un moment convivial et de leur changer les idées pendant l’administration de leur chimiothérapie. 33 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 2. A quels besoins les soins de support répondent-ils ? 2.1.L’impact des chimiothérapies sur la qualité de vie 2.1.1. Contexte Le cancer est une maladie de plus en plus fréquente puisque, selon la Ligue contre le cancer, un homme sur 2 et une femme sur 3 se verra diagnostiquer un cancer avant 85 ans(19). En 2012, le nombre de nouveaux cas de cancer en France métropolitaine est estimé à 355 000, dont 200 000 chez l’homme et 155 000 chez la femme(20). C’est également la première cause de mortalité en France avec plus 150 000 décès liés au cancer chaque année(19). A l’inverse, près de 58% des cancers sont aujourd’hui guéris, ce qui signifie que plus de la moitié des patients vont vivre après un cancer(19). Les progrès réalisés dans la prise en charge et le traitement de nombreux cancers ces dernières années ont permis d’améliorer la survie et les conditions de vie des malades. Cependant tous les cancers ne répondent pas aux traitements et les effets secondaires des thérapies peuvent parfois être difficiles à supporter(21). 2.1.2. Concept de qualité de vie En 1946, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a défini la santé comme un état de complet bien-être physique, mental et social, qui ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité(22). C’est pourquoi l’optimisation de la qualité de vie représente l’un des enjeux majeurs de la prise en charge des personnes atteintes d’une maladie chronique et plus spécifiquement par le cancer. Ainsi, le Plan cancer 2009-2013 et les différents plans nationaux qui concernent des maladies chroniques, ont ciblé comme essentiels les enjeux de qualité de vie(21). Le concept de la qualité de vie est employé en cancérologie depuis une trentaine d’années. A l’époque, elle se limitait à rechercher l’absence de toxicité médicamenteuse et seule la dimension physique était prise en compte. Aujourd’hui, le concept de qualité de vie est une évaluation subjective et globale de la vie du patient atteint de cancer. 34 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Elle est subjective car c’est le patient lui-même qui évalue sa qualité de vie. Cette évaluation doit être globale, en intégrant les dimensions physiques, psychologiques, sociales voire spirituelles(21). Une étude britannique a comparé l’état de santé et le bien être ressenti des patients ayant survécu à un cancer, avec ceux des individus qui n’ont pas eu de cancer et ceux des patients ayant une pathologie chronique sévère autre que le cancer. L’étude a permis de définir 13 critères pour évaluer la santé et le bien-être ressenti par les individus. Le résultat de l’étude montre que les patients ayant survécus au cancer sont significativement plus susceptibles de déclarer des problèmes de santé parmi les 13 critères, que les individus n’ayant pas d’antécédent de cancer ou de pathologie chronique. En revanche, l’état de santé des patients ayant survécu à un cancer est similaire à celui des patients ayant une pathologie chronique sévère autre que le cancer. L’étude a donc conclu qu’un nombre important de patients a un mauvais état de santé et de bien-être après un cancer et des traitements anticancéreux. Dans ce contexte, elle suggère de développer une aide et un soutien spécifiques pour les patients ayant survécu au cancer(23). 2.1.3. Implication des traitements dans l’altération de la qualité de vie Les nombreux effets délétères auxquels les personnes atteintes d’un cancer doivent faire face, peuvent persister à plus ou moins long terme. Ils sont le plus souvent la conséquence des traitements anticancéreux administrés(21). En 2012, 273 892 patients ont été traités par chimiothérapie dans les établissements de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO). Ce nombre est en augmentation de 1 à 2% chaque année depuis 2009(20). Dans le cadre de la deuxième enquête « La vie deux ans après un diagnostic de cancer », 37.9% des personnes interrogées ont déclaré avoir reçu une chimiothérapie et 1.5% ont refusé ce traitement(21). Les thérapies ciblées ont l’avantage d’être mieux tolérées que les chimiothérapies classiques. Elles se sont beaucoup développées ces dernières années. Entre 2004 et 2012, 41 molécules anticancéreuses ont obtenu une première autorisation de mise sur le marché européenne centralisée en cancérologie, dont un peu plus de la moitié étaient des thérapies ciblées. 35 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Avant 2004, seulement 4 molécules de thérapies ciblées avaient une AMM : 3 anticorps monoclonaux (le rituximab, le trastuzumab, et l’alemtuzumab) et un Inhibiteur de la Tyrosine Kinase (ITK) (l’imatinib)(20). Cependant, malgré le développement des thérapies ciblées, les chimiothérapies cytotoxiques traditionnelles restent le traitement médical de référence de nombreux cancers(21). 2.2. Les effets indésirables des chimiothérapies 2.2.1. Généralités Les médicaments de chimiothérapie ont la particularité d’agir sur les cellules dont le renouvellement est rapide. Les cellules cancéreuses en font partie, mais les cellules saines qui se multiplient rapidement peuvent également être touchées, ce qui entraîne un certain nombre d’effets secondaires(24). En effet, une majorité de ceux-ci sont dus à l’activité cytotoxique des chimiothérapies(25). Les principales cellules concernées sont celles qui constituent les cheveux, les ongles, le revêtement de la paroi du tube digestif, mais aussi les cellules de la moelle osseuse qui fabriquent les cellules sanguines que sont les globules rouges, les globules blancs et les plaquettes. Les effets secondaires à court terme peuvent se manifester lors de la chimiothérapie, tout de suite après, ou seulement quelques semaines plus tard. Ils sont en général temporaires(24). Les plus fréquents sont les nausées et vomissements qui peuvent parfois être très sévères. Leur délai d’apparition, leur durée et leur puissance sont variables selon la molécule utilisée(25). La muqueuse digestive est également touchée par des inflammations de la bouche que l’on appelle stomatites ou mucites buccales et par des troubles du transit(24)(25). Les pathologies de la cavité buccale résultent soit de l’action directe du traitement anticancéreux sur la sphère ORL, soit de complications hématologiques de la chimiothérapie(26). Elles peuvent se présenter sous la forme de lésions à l’intérieur de la bouche, d’aphtes ou de rougeurs et sont généralement douloureuses(27). 36 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Les autres tissus les plus affectés sont les tissus hématopoïétiques avec une myélotoxicité provoquant des neutropénies, voire des agranulocytoses, et plus tardivement des thrombopénies et des anémies(25). Une aplasie médullaire peut entraîner un risque d’infection grave en cas de neutropénie, mais aussi des ecchymoses et des saignements en cas de thrombocytopénie et enfin une fatigue, une pâleur ou un malaise en cas d’anémie(24). Cette toxicité est réversible, dose dépendante et non cumulative. Il s’agit du principal facteur limitant de la chimiothérapie et la raison pour laquelle les cures sont espacées. En effet, l’intercure permet la reconstitution des cellules hématopoïétiques. Une alopécie réversible peut apparaître dans les 10 jours à 2 mois suivant la cure de chimiothérapie(25). Des troubles respiratoires tels qu’un essoufflement, une respiration sifflante ou encore une toux peuvent également être observés. Des lésions au niveau des nerfs peuvent s’exprimer sous la forme d’engourdissement ou de picotements dans les mains et les pieds dans le cas d’une neuropathie périphérique, par des bourdonnements ou des tintements d’oreille dans le cas d’acouphènes, ou encore par une baisse d’audition en cas d’ototoxicité. D’autre part, des réactions allergiques peuvent se manifester avec une difficulté à respirer, une éruption cutanée, une urticaire, ou encore des rougeurs au niveau de la face et du cou. Des symptômes pseudo-grippaux avec de la fièvre et des douleurs musculaires et articulaires peuvent apparaître. Enfin, il peut y avoir une asthénie, des malaises avec sensation de faiblesse, des œdèmes des membres inférieurs, ou une perturbation du cycle menstruel chez la femme(24). Les cytotoxiques freinent également les processus de cicatrisation et peuvent causer des troubles de l’appétit avec notamment une perte d’appétit, un amaigrissement, des altérations du goût et une augmentation de la soif(24)(25). Les thromboses veineuses quant à elles peuvent être une complication du cancer lui-même mais les cytotoxiques en augmentent également le risque. Le traitement détruisant rapidement un grand nombre de cellules, il entraîne la libération d’une importante quantité de produits de dégradation. Un syndrome de lyse tumorale est donc observé, associant une hyperuricémie et des troubles hydroélectrolytiques tels que l’hyperkaliémie, l’hyperphosphorémie et l’hypocalcémie. Il peut y avoir plusieurs conséquences, notamment une insuffisance rénale aiguë et des troubles du rythme cardiaque ventriculaire(25). 37 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Enfin, la plupart des cytotoxiques administrés par voie veineuse sont irritants au niveau du site d’administration, ce qui peut produire une douleur locale, une irritation et une inflammation sous la forme de douleur et/ou de rougeur au point d’injection(24)(25). De plus en cas d’extravasation, selon le produit utilisé, il peut y avoir des ulcérations voire des nécroses sévères(25). Les effets secondaires à long terme sont peu fréquents. Ils se manifestent bien après la chimiothérapie et peuvent être définitifs. Les patients peuvent ressentir une fatigue persistante, une perte de l’audition, un retentissement sur la vie sexuelle, une baisse de la fertilité, une insuffisance rénale, une insuffisance cardiaque, une perte de la motricité et de la sensibilité des mains et des pieds. Ces effets sont prévenus dans la mesure du possible par une surveillance attentive tout au long des cycles de chimiothérapie(24). La toxicité sur la fertilité fait intervenir la destruction des cellules germinales qui peut provoquer des azoospermies et des ménopauses précoces. Cet effet indésirable est variable selon la molécule utilisée, la dose administrée et l’âge du patient. De plus, la toxicité rénale est dose dépendante et varie selon la molécule utilisée, la toxicité cardiaque peut être aiguë ou chronique et la neurotoxicité de type neuropathie est cumulative(25). Les effets secondaires de la chimiothérapie sont fréquents mais ils ne sont pas systématiques. Ils dépendent surtout du type de médicament choisi, de la dose administrée et de l’état de santé global de la personne malade. Ils peuvent être variables d’une cure de chimiothérapie à l’autre. Les chimiothérapies n’entraînent pas toutes des effets secondaires et cela ne signifie pas pour autant que le traitement est inefficace. Lorsqu’ils sont présents, ils n’apparaissent pas tous en même temps. Certains des effets secondaires peuvent être prévenus, limités, voire évités par des soins et des médicaments adaptés. Il est important que les patients suivent les recommandations qui concernent les effets secondaires puisqu’elles visent à améliorer leur qualité de vie(24)(28). Les mucites et les nausées et vomissements ont été choisis comme axe de travail car leur prévention et leur traitement font intervenir une prise en charge médicamenteuse. D’autre part, ce sont des effets indésirables aigus pour lesquels une prévention est possible et efficace. Les professionnels de santé ont donc un rôle important à jouer dans l’éducation des patients et avec les conseils hygiéno-diététiques associés. 38 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) En pratique, les protocoles antiémétisants n’avaient pas été mis à jour depuis plusieurs années à l’HNO. Ils intégraient les référentiels validés au moment de leur création et seuls les protocoles les plus récents contenaient les recommandations des référentiels actuels. Concernant les mucites, aucun travail spécifique n’avait été entrepris pour créer des protocoles adaptés à leur prise en charge sur l’établissement. 2.2.2. Mucites 2.2.2.1. Définition La mucite est une toxicité induite par la chimiothérapie à la suite d’un processus irritatif. Cette inflammation de la muqueuse qui recouvre l’intérieur des cavités et des viscères peut s’étendre de la bouche à l’anus, en passant par le tractus gastrointestinal. Il s’agit d’une altération de l’épithélium et de l’ensemble des muqueuses et du tissu conjonctif sous-jacent. Elle est caractérisée par un défaut de renouvellement des cellules épithéliales, allant de l’atteinte superficielle à l’ulcération, voire à la nécrose(26)(29)(30)(31)(32). Elle apparaît 7 à 14 jours après le cycle de traitement anticancéreux et peut durer quelques semaines(33). Les mucites buccales sont également appelées stomatites(29). Elles touchent la muqueuse labiale, les surfaces buccales, le plancher de la langue et le palais. Elles peuvent être associées à une dysphagie parfois totale(33). Les mucites gastrointestinales se présentent avec des symptômes de douleurs, de nausées, de vomissements et de diarrhées(30). Cet effet indésirable est invalidant pour le patient et douloureux dans ses formes les plus sévères(26). 2.2.2.2. Physiopathologie La mucite est l’aboutissement d’une série d’événements et d’interactions biologiques complexes qui se produisent à tous les niveaux de la muqueuse. Des études sur la relation entre les cytokines pro-inflammatoires et la toxicité au niveau de la muqueuse suggèrent que la mucite n’est pas juste un processus épithélial. 39 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) En effet, l’augmentation des taux sanguins périphériques de TNF-α (tumor necrosis factor-alpha) et d’IL-1 et IL-6 (interleukines 1 et 6) est corrélée avec le degré de toxicité non-hématologique chez les patients sous chimiothérapie. De même, les taux d’IL1-β et du gène d’expression du TNF-α au niveau de la muqueuse sont liés au développement de mucites chez le modèle animal. Enfin, les molécules connues pour diminuer l’expression de ces cytokines ont démontré leur efficacité dans la prévention expérimentale et clinique des mucites. L’atteinte de la muqueuse peut être schématisée en 5 phases : l’initiation, la potentialisation avec la production de messagers, la transmission et l’amplification du signal, l’ulcération avec l’inflammation et enfin la guérison(34). Figure 2 : Physiopathologie de la mucite : un processus en 5 étapes(34)(35) La phase 1 est la phase d’initiation, elle correspond aux lésions directes de la chimiothérapie qui provoquent une altération des cellules et des brins d’ADN dans l’épithélium basal et la sous-muqueuse. Des radicaux libres ou Reactive Oxygen Species (ROS) sont générés et jouent un rôle de médiateur dans les événements biologiques des phases ultérieures. Ils peuvent être responsables de dommages directs sur la muqueuse et indirects par l’activation des facteurs de transcription(35). La phase 2 est la phase de potentialisation ou réponse primaire. L’altération des cellules et de l’ADN, ainsi que les ROS, activent une cascade de réponses qui entraîne la production de cytokines pro-inflammatoires. Ces composés stimulent plusieurs voies menant à des lésions ou à l’apoptose des cellules basales. L’activation indirecte des facteurs de transcription et des macrophages est observée, ainsi que la formation et la potentialisation de médiateurs à l’origine de dommages tissulaires complexes(35)(36). 40 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) La phase 3 correspond à l’amplification du signal, c’est-à-dire que le processus biologique au sein du tissu s’accélère pour conduire à l’ulcération(35)(36). La libération de cytokines pro-inflammatoires endommage les cellules et fournit un feed-back positif qui amplifie les lésions causées par la chimiothérapie(35). La phase 4 est la phase d’ulcération. Elle est caractérisée par la colonisation bactérienne du tissu ulcéré. Cette prolifération bactérienne va causer de nouveaux dommages tissulaires et activer la production et la libération de cytokines proinflammatoires supplémentaires par les cellules mononucléaires infiltrantes. A ce stade, il y a donc une augmentation du risque infectieux(35)(36). Enfin, la phase 5 correspond à la cicatrisation pendant laquelle l’épithélium prolifère et se différencie, pour aboutir au rétablissement de la flore microbienne locale(35)(36). Bien que ce modèle semble linéaire, l’atteinte intervient très rapidement et simultanément dans tous les tissus(34). La mucite est généralement un événement aigu disparaissant progressivement après l’arrêt du traitement anticancéreux(35). Ce modèle a été défini pour la muqueuse orale mais il peut aussi s’appliquer aux muqueuses de l’ensemble du tube digestif. Contrairement à ce qui était pensé auparavant, il n’y a pas de raison de supposer que la physiopathologie des mucites gastro-intestinales est moins complexe que celle des mucites orales. Le développement embryologique commun de l’ensemble du tractus gastro-intestinal rend probable que la physiopathologie de base des mucites soit similaire, avec des différences locales dues à la différenciation spécifique de chaque partie du tube digestif(34). Les mucites gastro-intestinales, quant à elles, sont retrouvées au niveau de l’intestin grêle, de l’œsophage, de l’estomac ou du gros intestin. Dans l’intestin grêle, les molécules cytotoxiques agissent à différents niveaux de la hiérarchie cellulaire des cryptes et conduisent à une hypoplasie suivie d’une régénération. Après la chimiothérapie, une augmentation de l’apoptose est relevée dans l’intestin grêle au premier jour de la chimiothérapie (J1), suivie d’une réduction de la longueur des cryptes, de la surface des villosités et de l’index mitotique, qui atteignent leur point le plus bas à J3. Il s’en suit une hyperplasie rebond à J5, puis une normalisation(34). Néanmoins, Pritchard et al. ont montré qu’une augmentation de l’apoptose n’est pas nécessairement corrélée avec la sévérité de la mucite déclarée, ce qui suggère une contribution de p53 et p21(34)(37). Gibson et al. ont confirmé ceci chez un modèle de rat(34)(38). 41 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) D’autre part, le rapport de gènes pro-apoptotiques sur anti-apoptotiques est plus élevé dans l’intestin grêle que dans le gros intestin, ce qui peut expliquer que les mucites s’y développent différemment. Les rapports entre les gènes pro-apoptotiques et antiapoptotiques retrouvés aux différents niveaux du tractus gastro-intestinal sont probablement en lien avec les différences fonctionnelles de ceux-ci. En effet, l’intestin grêle reçoit potentiellement un grand volume de toxines, dont la plupart sont neutralisées avant d’arriver dans le colon(34). Le colon n’est donc pas considéré comme une zone particulièrement sensible aux mucites chimio-induites(34). Gibson et al. ont relevé des atteintes de la crypte au niveau du colon après un traitement par methotrexate et irinotecan, mais l’atteinte observée était moins importante que celle relevée dans l’intestin grêle(34)(39). La détérioration des cellules qui se divisent et se différencient rapidement par la chimiothérapie conduit également à l’amincissement et à l’ulcération de l’épithélium de l’œsophage. Le taux de prolifération des cellules du tissu conjonctif de la lamina propria est modifié, ce qui se traduit par une augmentation de la perméabilité vasculaire et un infiltrât inflammatoire. Ceci provoque ensuite une fibrose et une ischémie tissulaire. Il y a peu d’informations dans la littérature concernant les mucites de l’œsophage car la plupart des symptômes localisés au niveau de l’œsophage sont généralement attribués à la maladie du reflux gastro-œsophagien, ou bien à une infection virale ou fongique, qui peut, par ailleurs, coexister avec toute toxicité chimioinduite directe(34). Enfin, peu de données existent concernant les mucites de l’estomac, cependant Sartori et al. ont décrit des érosions gastriques après une chimiothérapie associant le cyclophosphamide, le methotrexate et le 5-Fluoro-Uracile (5-FU), ou avec du 5-FU seul(34)(40)(41). 2.2.2.3. Evaluation de la mucite Le grade de la mucite est évalué en fonction des possibilités d’alimentation orale, de la déglutition et des douleurs bucco-pharyngées. Pour cela, 9 sites repères sont à examiner : les lèvres, les joues, les faces ventrales et latérales de la langue, le plancher buccal et le voile du palais(35). 42 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) La classification des mucites se fait selon les National Cancer Institute, Common Toxicity Criteria (NCI-CTC) et Radiation Therapy Oncology Group (RTOG) en 6 grades. Les caractéristiques du grade 0 sont : une alimentation solide, l’absence de douleur et une muqueuse d’aspect normal. Pour le grade 1, l’alimentation est toujours solide, mais il y a des douleurs ainsi qu’un énanthème, c’est-à-dire une rougeur de la muqueuse. Pour le grade 2, l’alimentation solide est modifiée et des douleurs, un énanthème et des ulcérations localisées, ou pseudo-membranes, sont observés. Le grade 3 correspond à une impossibilité d’alimenter ou d’hydrater le patient de façon adéquate par voie orale. Il y a également présence de douleurs, d’énanthèmes diffus et d’ulcérations ou pseudo-membranes confluentes. Lors du grade 4, il y a une aphagie et des douleurs et le pronostic vital est en jeu. Des énanthèmes diffus et des nécroses tissulaires sont également observés. Le grade 5 est défini par le décès du patient(35). Il existe une seconde classification par l’OMS avec 5 grades(42). Ils correspondent aux grades 0 à 4 de la classification NCI-CTC et RTOG. Les critères d’évaluation des mucites utilisent la grille Oral Assessment Guide (OAG) qui comprend 8 items (la voix, la déglutition, la langue, la salive, les muqueuses, les gencives, les dents et les lèvres) et pour chacun d’entre eux, un outil de mesure, une méthode de mesure et une graduation de 1 à 3. Les critères sont à évaluer deux fois par jour. Le score est obtenu en faisant la somme des différents items : un score de 8 correspond à une bouche normale et le score le plus élevé, qui est 24, correspond à une bouche très atteinte. Il est possible de choisir les items à réaliser en fonction de l’état du malade : s’il est inconscient par exemple, certains items ne pourront pas être évalués. En fonction du résultat, le type de soin (préventif ou curatif) et le rythme de réalisation de ces soins sont déterminés(42). (ANNEXE 1) Historiquement, la plupart des classifications de mucites sont basées sur celle développée par l’OMS pour l’évaluation clinique des patients recevant une thérapie anticancéreuse. De nombreuses classifications similaires ont ensuite été développées et promues, comme celle du NCI-CTC qui est très utilisée dans le domaine de l’oncologie par les groupes de coopération et les chercheurs. 43 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) La classification NCI-CTC et celle de l’OMS utilisent les mêmes éléments de mesure, qui sont les plus pertinents pour la gestion clinique des mucites. Les avantages de ces classifications sont d’être largement utilisées dans le domaine de la recherche et dans les établissements de soins, mais aussi de contenir des critères d’évaluation spécifiques pour les patients sous radiothérapie de la tête et du cou, sous chimiothérapie, ou pour ceux qui vont subir une greffe de cellules souches hématopoïétiques. L’inconvénient de ces classifications est que le résultat n’est pas forcément révélateur de l’état du patient car, pour un même score obtenu, la combinaison des symptômes, des signes et des changements fonctionnels observés, peuvent être variables(34). 2.2.2.4. Facteurs de risque Les facteurs de risque des mucites sont pour une majorité liés au terrain de l’individu. Parmi ceux-ci : le type de cancer, l’état nutritionnel, les traitements antérieurs et associés, un déficit en acide folinique, en vitamine B12 ou en dihydropyrimidine déshydrogénase, l’état oxydatif tissulaire, une xérostomie et notamment médicamenteuse due aux anti cholinergiques ou aux opiacés, certaines comorbidités comme un diabète chez un patient de moins de 20 ans ou de plus de 65 ans, une maladie cardio-pulmonaire, une insuffisance rénale ou une insuffisance hépatique, et enfin l’âge, car après 55 ans le renouvellement des cellules épithéliales est moins rapide(36)(43). Certains polymorphismes génétiques ont également été identifiés comme influençant le métabolisme des agents cytotoxiques et donc leur toxicité(36). Les facteurs favorisant l’apparition des mucites et qu’il faut éliminer sont : une mauvaise hygiène buccale, l’alcoolisme et le tabagisme(43). L’état bucco-dentaire du patient joue un rôle dans la survenue et la gravité des symptômes(26). D’autre part, la neutropénie est un facteur aggravant pour les mucites(43). Enfin, la flore buccale jouerait un rôle secondaire dans la physiopathologie des mucites(36). Par ailleurs, la stomatite peut devenir plus sévère à chaque cycle de chimiothérapie, du fait d’une cicatrisation partielle de la muqueuse buccale. La probabilité de survenue d’une mucite et son grade de sévérité sont donc d’autant plus importants chez les patients ayant des antécédents de mucites(36). 44 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Les mucites sont également plus fréquentes chez la femme et l’enfant à cause de la vitesse de renouvellement plus rapide de la muqueuse, et le sujet âgé à cause du défaut de clairance rénale augmentant la toxicité de la chimiothérapie(36). 2.2.2.5. Epidémiologie et molécules à risque Historiquement, l’épidémiologie des mucites a été biaisée par un certain nombre de paramètres, dont la sous-déclaration, la variabilité des termes utilisés pour les décrire, l’existence de différents critères et grilles d’évaluation, et la corrélation entre les mucites et les autres séquelles cliniquement observées(34). Elting et al. ont observé des mucites orales dans 22% des cures de chimiothérapie myélosuppressive, des mucites gastro-intestinales dans 7% des cures, et à la fois des mucites orales et gastro-intestinales dans 8% des cures(34)(43). L’incidence des mucites est en général de 5 à 15%, sans compter l’allogreffe de cellules souches hématopoïétiques et la radiothérapie de la tête et du cou(31)(44). Dans les cas de conditionnement à la greffe de cellules souches hématopoïétiques, les taux de mucites atteignent en moyenne 75 à 85%. Si l’irradiation corporelle totale y est associée, les taux de mucites de grades 3 et 4 sont supérieurs à 60%. Dans le cas contraire, les taux de mucites de grades 3 et 4 atteignent quand même les 30 à 50%(31). Enfin, la radiothérapie de la tête et du cou provoque 100% de mucites orales, dont 60% de grades 3 et 4(31). Cette toxicité est dose-dépendante, mais aussi schéma-dépendante. En effet, il est connu que l’utilisation de hautes doses peut augmenter le risque de mucites, mais d’autre part l’association radio-chimiothérapie, les perfusions continues d’anti métabolites et l’association de certains cytotoxiques entre eux, peuvent aussi aggraver les mucites(33)(36). Selon le Centre National Hospitalier d’Information sur le Médicament (CNHIM), les principales molécules anticancéreuses impliquées dans les mucites sont : amsacrine, bléomycine, busulfan, chlorméthine, cyclophosphamide, cytarabine, capécitabine, daunorubicine, docétaxel, doxorubicine, épirubicine, étoposide, 5-fluorouracile notamment en perfusion continue, hydroxyurée, idarubicine, melphalan, methotrexate, paclitaxel, procarbazine. 45 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) D’autre part, les anticancéreux sécrétés dans la salive, comme le méthotrexate et l’étoposide, sont directement toxiques pour la muqueuse buccale(33). Les études analysées révèlent que la plupart des traitements à base d’anthracyclines sont associés à un taux de mucites buccales de grades 3 et 4 de l’ordre de 1 à 10%, sauf quand le traitement contient du 5-FU. Des taux équivalents sont répertoriés pour les traitements à base de taxanes et de platines, sauf s’ils sont associés au 5-FU(34). Avec l’administration de 5-FU, le taux de mucites orales peut atteindre 40%, dont 10 à 15% de grades 3 et 4(31)(34)(44). Si le 5-FU est associé à la radiothérapie, les taux de grades 3 et 4 sont supérieurs à 30%(31)(44). Avec l’administration d’irinotecan, l’incidence des mucites gastro-intestinales est supérieure à 20%(34)(44). Les thérapies ciblées sont également responsables de mucites dans environ 22% des cas, et dans 41% des cas pour l’administration de temsirolimus(33). Les nouvelles molécules, comme l’imatinib, sont associées à une très faible incidence de mucites buccales et gastro-intestinales(34). 2.2.2.6. Complications Même si les taux de mucites orales ou gastro-intestinales de grades 3 et 4 ne sont que de 5 à 15%, ils sont quand même significatifs cliniquement, à cause de la gravité des conséquences pour les patients(34). Les mucites se manifestent surtout par des douleurs, une dysphagie et une dysphonie(45). Les complications possibles sont la dénutrition, la déshydratation, le risque infectieux, surtout en cas de neutropénie, le risque hémorragique, et enfin un risque de désocialisation, de détresse psychologique, de dépression, voire un pronostic vital engagé(31)(36)(45). Parmi les patients recevant une dose standard de chimiothérapie, 70% des patients avec une mucite orale de grade 3 ou 4 ont dû bénéficier d’une nutrition entérale pour maintenir un apport suffisant, environ 60% des patients ont eu de la fièvre, et l’état de 62% des patients a nécessité une hospitalisation(34). D’autre part, pendant les cures des patients présentant une mucite, l’incidence des effets indésirables graves conduit à doubler le nombre moyen de jours d’hospitalisation par cure(34). En effet dans une étude chez environ 600 patients, la durée moyenne d’hospitalisation est de 8 jours chez les patients souffrant de mucites orales sévères, versus 4 jours chez les patients sans mucite(45). 46 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Les traitements nécessaires et l’augmentation de la durée de l’hospitalisation ont pour conséquence un surcoût dans la prise en charge de ces patients(31). La fatigue est également un signe plus fréquent dans les cures des patients avec mucite, que dans les cures des patients sans mucite(34). Chez certains patients, les mucites sévères peuvent devenir un facteur limitant en nécessitant la réduction des doses de chimiothérapie ou une pause dans le traitement, ce qui peut influencer négativement le pronostic et conduire à une perte de contrôle de la maladie(30)(31)(34). En effet, la cure suivante de chimiothérapie a dû être retardée pour environ 35% des patients ayant des mucites de grades 3 et 4, les doses de chimiothérapie ont été réduites pour environ 60% des patients, et le traitement a dû être interrompu pour environ 30% des patients(34). Au total, cela revient à une modification du protocole du traitement anticancéreux chez environ un tiers des patients(45). Les mucites peuvent entraîner des modifications du goût, de la salivation et des douleurs intenses. La perturbation de la salivation, à plus long terme, peut favoriser le développement des caries, le déchaussement des dents et des ostéonécroses(46). D’autre part, si la douleur est importante, cela peut compromettre l’apport nutritionnel et la qualité de vie du patient à cause d’une dysphagie(26)(30). Parmi les patients avec une tumeur solide recevant une chimiothérapie, des infections sont apparues dans 73% des cures compliquées par une mucite, et dans seulement 36% des cures sans mucite, avec une myélosuppression similaire(34). Les infections buccales, et notamment les candidoses oropharyngées, sont fréquentes et exposent également à un risque de dénutrition. Cependant, le principal facteur de gravité reste le risque de dissémination systémique(26)(33). En effet, les mucites peuvent constituer une porte d’entrée pour les infections bactériennes et mycotiques, en particulier chez les patients en neutropénie, chez lesquels il y a un risque important de sepsis(26)(34)(46). De plus, la xérostomie est un facteur qui, associé aux complications hématologiques de la chimiothérapie, favorise la survenue d’infections fongiques(26). Les signes cliniques des candidoses buccales sont un enduit blanc sur fond de muqueuse érythémateuse, une perlèche et une coloration de la langue(33). 47 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Les infections virales, notamment à Herpes Simplex Virus (HSV), sont quant à elles très fréquentes chez les malades greffés et elles sont plus douloureuses et prolongées que les autres infections buccales(33). Par ailleurs, dans un contexte de mucite associée, l’état dentaire du patient peut se compliquer d’hémorragies(26). En cas d’hémorragie grave, une intubation préventive peut être mise en place pour protéger les voies aériennes(45). 2.2.3. Nausées et vomissements 2.2.3.1. Définition La nausée est une sensation de malaise général avec envie de vomir et dégoût de la nourriture, souvent associée à une stase gastrique et à des crampes de l’épigastre. Elle peut être accompagnée de sueurs froides, pâleur, salivation, diarrhées, tachycardie ou palpitations. Elle est passagère lorsqu’elle précède le vomissement, ou bien permanente. Ce symptôme est plus difficile à traiter que les vomissements, notamment parce qu’il est subjectif et peu quantifiable(47)(48). En effet, selon l’American Society of Clinical Oncology (ASCO), les cliniciens sous estiment l’incidence des nausées et elles ne sont pas aussi bien contrôlées que les vomissements(49). Le vomissement correspond quant à lui à l’expulsion du contenu gastrique par la bouche, suite à une violente contraction du diaphragme et de l’estomac avec ouverture du cardia. Parallèlement, la respiration est modifiée de façon réflexe et une hyperexcitation vagale provoque une hypersalivation et une bradycardie(47)(48). La chimiothérapie anticancéreuse peut provoquer des nausées et des vomissements, qu’elle soit sous forme de comprimés ou administrée en perfusion. Les nausées débutent souvent le soir ou le lendemain de l’administration et ne persistent généralement pas plus de 3 jours, soit 72 heures. Les vomissements quant à eux ne sont pas systématiques et ils ne persistent en général pas plus de 48 heures après le traitement(50)(51). Il existe 5 types de Nausées et Vomissements Chimio-Induits (NVCI) : anticipés, aigus, retardés, non maîtrisés et réfractaires. 48 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Les NVCI anticipés se produisent typiquement avant même l’administration de la chimiothérapie. Ils sont provoqués par des stimuli externes et potentialisés par l’appréhension et l’anxiété du patient(47). Ce type de NVCI se manifeste dans environ 25% des cas, même si l’incidence peut varier de 20 à 60%. Les nausées anticipatoires sont fréquentes puisqu’elles apparaissent chez 29% des patients, soit 1 patient sur 3, alors que les vomissements anticipatoires se produisent seulement chez 11% des patients, soit 1 patient sur 10. Ils sont plus particulièrement présents chez les patients ayant eu un mauvais contrôle de cet effet indésirable lors d’un cycle antérieur. La principale méthode pour les maîtriser consiste donc à contrôler autant que possible les nausées et les vomissements aigus(47)(48)(33)(52)(53). Ensuite, parmi les NVCI post-administration, les NVCI aigus sont ceux qui apparaissent dans les 24 heures et les NVCI retardés ceux qui se produisent après les 24 premières heures. Même s’il n’y a pas de limite dans le temps pour cette dernière catégorie, ils s’arrêtent généralement après 96 heures. Les NVCI aigus sont parfois immédiats, comme avec l’actinomycine D ou la chlorméthine, mais en général le pic d’apparition se situe entre 5 et 6 heures après l’administration de la chimiothérapie. Avec le cisplatine et le cyclophosphamide, leur apparition peut être plus tardive, avec un pic situé entre la 12ème et la 24ème heure. Le pic des NVCI retardés se situe entre 48 et 72 heures. Dans le cas du cisplatine, les nausées et vomissements peuvent persister pendant une semaine(33)(47)(48)(54). L’importance des NVCI retardés est inversement proportionnelle à la maîtrise des NVCI aigus. En effet, un bon contrôle des NVCI aigus permet de prévenir avec efficacité les symptômes retardés. Le cisplatine, le carboplatine, le cyclophosphamide, la doxorubicine, l’ifosfamide et l’association de cyclophosphamide et d’anthracyclines sont les traitements les plus susceptibles de provoquer des NVCI retardés, notamment si les doses sont élevées ou si l’administration a lieu sur au moins 2 jours consécutifs(47)(48)(53). L’incidence des NVCI aigus et retardés a été étudiée sur des protocoles de chimiothérapie hautement et modérément émétisants, chez des patients provenant de 6 pays différents. Les résultats ont montré qu’en moyenne 59% des patients ont eu des NVCI retardés et 36% des NVCI aigus, dont plus de 35% des nausées aiguës et 13% des vomissements aigus. Chez les patients recevant une chimiothérapie hautement émétisante, 60% ont eu des nausées retardées et 50% des vomissements retardés. 49 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Chez les patients recevant une chimiothérapie modérément émétisante, 52% ont eu des nausées retardées et 28% des vomissements retardés(53). Ensuite, il y a les NVCI non maîtrisés, qui se produisent malgré une prophylaxie adéquate. Ils nécessitent une thérapie de secours et, selon la situation, une modification ou une prolongation de la prophylaxie(47). Enfin, il y a les NVCI réfractaires qui sont ceux qui ne répondent pas à une thérapie habituelle, même si celle-ci est a priori bien menée(47)(54). 2.2.3.2. Physiopathologie Le réflexe émétique est un mécanisme complexe de protection de l’organisme contre un poison ingéré. Il est déclenché par l’excitation du centre de vomissement situé dans le tronc cérébral, au niveau du mésencéphale. Le centre du vomissement a été découvert en 1892 par Thumas, puis exploré en 1923 par Hatcher et Weiss. Il est également appelé Central Pattern Generator (CPG). Actuellement, il n’est pas considéré comme une zone anatomique bien définie, mais plutôt comme un réseau de neurones interconnectés qui pénètrent dans le Noyau du Tractus Solitaire (NTS)(48)(55)(56). Le CPG, ou centre du vomissement, est stimulé par deux voies principales. La première est une voie d’origine périphérique constituée de neurones vagaux afférents(56). Hatcher et Weiss ont constaté que ces noyaux sensitifs du nerf vague jouent un rôle important dans la physiopathologie des NVCI(55). La stimulation des récepteurs, en particulier 5-HT3, provoque un potentiel d’action qui va ensuite remonter le long de la moelle épinière. Ce stimulus afférent arrive finalement dans le tronc cérébral dorsal, au niveau du NTS, où il active le CPG et induit en retour une sensation de nausée et de vomissement(57). La deuxième voie, d’origine centrale et issue de l’area postrema, est également appelée « zone gâchette » ou Chemoreceptive Trigger Zone (CTZ). L’area postrema est une zone du tronc cérébral située dans le plancher du quatrième ventricule(56). Wang et Borison ont identifié la zone de déclenchement des chimiorécepteurs en dehors de la barrière hémato-encéphalique. L’area postrema est donc sensible à la fois aux stimuli émétisants provenant du sang et à ceux provenant du liquide céphalo-rachidien(55). 50 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) La barrière hémato méningée est donc poreuse au niveau de l’area postrema et les antitumoraux ou leurs métabolites peuvent stimuler directement les neurones de la CTZ(56). La CTZ envoie ensuite des influx nerveux au CPG, lequel provoque une stimulation vagale efférente et ainsi le réflexe de vomissement(48). Ce mécanisme dépendant des voies vagales motrices est considéré comme prédominant à la phase aiguë(56). Figure 3 : Mécanisme pharmacologique des nausées et vomissements Le mécanisme des NVCI implique la libération de neurotransmetteurs, comme la dopamine, la sérotonine et la substance P, qui se lient aux récepteurs localisés au niveau périphérique ou au niveau du Système Nerveux Central (SNC), pour transmettre l’influx nerveux(55). Les récepteurs centraux sont situés au niveau de la CTZ, tandis que les récepteurs périphériques sont essentiellement gastro-intestinaux mais aussi vestibulaires, corticaux, gustatifs et olfactifs(48). Par exemple, l’activation des récepteurs D2 par la dopamine au niveau de l’area postrema déclenche un réflexe émétique(57). La substance P, quant à elle, active les récepteurs NK1 présents dans le NTS(55). D’autres neurotransmetteurs sont également impliqués dans l’arc réflex émétique, dont l’histamine, l’acétylcholine, les endorphines, l’acide gamma-aminobutyric et les cannabinoïdes(55). 51 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) En pratique, les anti-tumoraux stimulent la libération de neuromédiateurs par les cellules entérochromaffines présentes dans la partie supérieure de l’intestin grêle, soit par le biais de mécanismes muqueux directs, soit par des mécanismes d’origine sanguine. Une fois libérés, ces médiateurs se lient aux récepteurs présents sur les extrémités terminales des voies vagales afférentes, en particulier sur les récepteurs 5HT3, NK1 et ceux à la cholécystokinine(56). La lyse des cellules entérochromaffines entraîne ensuite la libération des neuromédiateurs et en particulier de la sérotonine qui joue le rôle le plus important(48)(56). En effet, les cellules entérochromaffines sont très riches en sérotonine puisqu’elles synthétisent et stockent 90% de la sérotonine du tractus gastrointestinal. Elles ne représentent que 1% des cellules épithéliales intestinales mais avec une densité plus élevée au niveau du duodénum et du rectum. La sérotonine stimule plusieurs types de récepteurs localisés au niveau du système nerveux entérique, des muscles intestinaux et des cellules sécrétrices. Elle joue donc un rôle dans la motilité intestinale en régulant l’activité des ganglions entériques grâce aux récepteurs 5-HT3 et 5-HT4 et en contractant les muscles lisses intestinaux, gastriques et œsophagiens grâce aux récepteurs 5-HT2. Le réflexe péristaltique est activé par stimulation de fibres nerveuses sensitives tout au long du tube digestif lors du passage du bol alimentaire. La sérotonine libérée par les cellules entérochromaffines participe à cette stimulation en se liant aux récepteurs 5HT3 et 5-HT4 situés sur les fibres sensitives. Ce réflexe correspond schématiquement à une contraction des muscles circulaires en amont du bol alimentaire et à une relaxation en aval. Ainsi, les agonistes 5-HT3 et 5-HT4 sont susceptibles d’augmenter le transit et parallèlement d’augmenter les sécrétions muqueuses, mais, en contrepartie, ils augmentent également les sensations douloureuses. Les agonistes 5-HT4 sont particulièrement efficaces au niveau de l’œsophage avec un effet anti-reflux par stimulation de la motricité du tube digestif. Au contraire, les antagonistes ralentissent donc le transit intestinal et diminuent les sécrétions muqueuses et les douleurs intestinales. Le système nerveux entérique comporte, en plus des fibres motrices parasympathiques (vagales) et des fibres sympathiques, de nombreux petits neurones peptidergiques, notamment opioïdes(57). 52 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Concernant le mécanisme des nausées et vomissements anticipés, plusieurs hypothèses ont été proposées. La plus probable est le conditionnement classique, aussi connu sous le nom de conditionnement pavlovien ou de l’intimé. Le principe du conditionnement classique est qu’un stimulus précédemment neutre suscite une réponse conditionnée après un certain nombre d’appariements ou d’essais d’apprentissage. Dans le cadre d’une chimiothérapie, les premières perfusions sont les essais d’apprentissage. Les médicaments sont les stimuli inconditionnels qui provoquent les nausées et vomissements post-chimiothérapie. Ces médicaments sont ensuite associés à une variété d’autres stimuli environnementaux, comme une odeur, une personne ou un endroit. Ces stimuli, neutres au départ, deviennent alors des stimuli conditionnés et suscitent des nausées et vomissements anticipés lors des prochains cycles de chimiothérapie. Les nausées et vomissements anticipés sont donc une réponse acquise qui, dans d’autres situations de la vie courante, comme une intoxication alimentaire, conduit l’organisme à une réaction d’évitement. Une série d’études empiriques confirment cette théorie de conditionnement classique. Notamment par le fait que la prévalence des nausées et vomissements anticipés avant toute chimiothérapie est très rare et que peu de patients ont des nausées et vomissements anticipés sans avoir eu de nausées et vomissements post-chimiothérapie lors d’une cure précédente. Par ailleurs, la plupart des études ont montré une augmentation de la probabilité de nausées et vomissements anticipés avec le nombre de perfusions de chimiothérapie reçues par le patient, ainsi qu’une augmentation de l’intensité de ces derniers à mesure que les patients se rapprochent du moment de leur perfusion(53). 2.2.3.3. Evaluation Le NCI a élaboré la dernière version de la classification CTC pour les effets indésirables en juin 2010(36). Elle classe les nausées selon 3 grades et les vomissements selon 5 grades. Les nausées de grade 1 consistent en une perte d’appétit sans modification des habitudes alimentaires. Celles de grade 2 sont caractérisées par une réduction des apports alimentaires sans perte de poids, ni déshydratation ou dénutrition significatives et/ou avec une hydratation intraveineuse pendant moins de 24 heures. Enfin, le grade 3 correspond à un apport calorique ou hydrique insuffisant nécessitant une hospitalisation pour hydratation intraveineuse ou nutrition parentérale totale pendant au moins 24 heures(36)(54). 53 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Concernant les vomissements, il y a le grade 1 de un à deux vomissements par 24 heures, le grade 2 de trois à cinq vomissements par 24 heures avec une hydratation intraveineuse pendant moins de 24 heures et le grade 3 qui correspond à plus de 6 vomissements par 24 heures avec une nécessité d’hospitalisation pour hydratation intraveineuse et/ou une nutrition parentérale totale pendant au moins 24 heures. Chaque épisode de vomissements doit être séparé d’au moins 5 minutes pour être comptabilisé en tant que tel. Le grade 4 est atteint lorsque le risque vital du patient est engagé avec des mesures de réanimation nécessaires et enfin le grade 5 correspond au décès du patient(36)(54). Selon l’OMS, le grade 1 des NVCI correspond aux nausées, le grade 2 à des vomissements transitoires, le grade 3 à des vomissements nécessitant un traitement antiémétique et le grade 4 à des vomissements incoercibles(33). Outre ces classifications, il est indispensable d’analyser les caractéristiques des nausées et vomissements : leur quantité, leur nature, leurs circonstances et horaires de survenue. L’inconfort du malade doit également être évalué à l’aide d’échelles d’autoou d’hétéro-évaluation(48). L’outil antiémétique de la MASCC ou MASCC Antiemetic Tool (MAT) est une application pour smartphone destinée aux patients recevant une chimiothérapie et qui a pour but d’aider les médecins à évaluer si, et à quel point, le traitement anticancéreux est à l’origine de nausées et vomissements. Il s’agit d’un questionnaire développé et validé par la MASCC, qui se compose de 4 questions sur l’intensité et la fréquence des nausées et/ou vomissements après une séance de chimiothérapie. En remplissant le MAT, les patients ont la possibilité d’envoyer les résultats aux professionnels de santé en temps réel pour permettre un suivi et une gestion rapide de cet effet indésirable(58). 2.2.3.4. Facteurs de risque liés au patient Le facteur principal de NVCI est le risque émétogène de la chimiothérapie administrée. Cependant il existe également des facteurs individuels qui augmentent également le risque de NVCI : avoir moins de 55 ans, être une femme, avoir des antécédents de nausées gravidiques et/ou de mal des transports, être de nature anxieuse, penser être à haut risque de NVCI et avoir des antécédents de NVCI lors d’une précédente cure de chimiothérapie(54)(56). 54 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) L’incidence et la sévérité des nausées et vomissements lors des précédents cycles de chimiothérapie est à prendre en compte puisque les patients dont les NVCI ont été mal contrôlés lors de leur cure de chimiothérapie, sont plus susceptibles d’en avoir à nouveau lors du cycle suivant(53). La première cure de chimiothérapie est très souvent déterminante dans le succès ou l’échec du contrôle des nausées et vomissements lors des chimiothérapies ultérieures(48). D’autre part, l’état d’anxiété au moment des perfusions de chimiothérapie et l’appréhension du patient vis-à-vis des NVCI sont des facteurs prédictifs de NVCI postchimiothérapie. Cependant, la crainte des patients est un facteur difficile à étudier car c’est un sentiment qui peut évoluer au fil des cures : en effet si les NVCI sont mieux contrôlés par un traitement antiémétique, ce sentiment va diminuer et inversement(53). Le risque de NVCI est également augmenté chez les sujets souffrant de dégoûts alimentaires avant le traitement et chez les malades ayant des pathologies associées. Les facteurs de stress comme le bruit, les odeurs écœurantes, l’attente prolongée et la promiscuité aggravent ces troubles digestifs(48). Enfin, un système nerveux autonome plus réactif, un pourcentage élevé de perfusions de chimiothérapie suivie de nausées, les vertiges et/ou étourdissements postchimiothérapie, un faible temps de latence entre l’administration de la chimiothérapie et l’apparition des nausées et vomissements, sont d’autres facteurs favorisant les NVCI(53). Plusieurs facteurs ont été étudiés comme pouvant avoir une incidence sur les NVCI anticipés. Par exemple, un âge inférieur à 50 ans, des nausées et vomissements après la dernière séance de chimiothérapie, un sentiment de chaleur après la dernière séance de chimiothérapie, une sensibilité au mal des transports et une transpiration ou une faiblesse généralisée après la dernière séance de chimiothérapie sont des facteurs qui semblent augmenter le risque de NVCI anticipés. Un patient avec moins de 3 de ces 8 critères a donc peu de risque de développer des NVCI anticipés(53). D’autres étiologies doivent aussi être évaluées et prises en charge avant la chimiothérapie pour diminuer le risque de NVCI : l’obstruction partielle ou complète du transit intestinal, un dysfonctionnement vestibulaire, des métastases cérébrales, un déséquilibre électrolytique ou des traitements associés de type opiacés(33). 55 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 2.2.3.5. Facteurs protecteurs liés au patient L’intoxication alcoolique est un facteur qui diminue le risque de NVCI(54). En effet, ils sont moins fréquents chez les patients ayant des antécédents d’alcoolisme chronique, c’est-à-dire pour une consommation supérieure à 100g d’alcool ou un mélange d’au moins cinq alcools par jour(53)(48). Des facteurs environnementaux jouent également un rôle dans la tolérance digestive des chimiothérapies, comme la qualité de l’accueil, de l’information, le type d’hospitalisation, le transport et les activités de détente proposées (lecture, musique, télévision, mots croisés). L’entourage familial, les repas conviviaux et les aliments bien présentés et variés sont également des éléments positifs. Enfin comme cela a été vu, le contrôle efficace des NVCI lors de la première cure de chimiothérapie est très souvent déterminant pour les chimiothérapies ultérieures(48). 2.2.3.6. Facteurs de risque liés au traitement Les facteurs de risque liés au traitement sont fonction du potentiel émétisant des molécules et de la dose de la chimiothérapie(53)(56). En effet, le type, la dose et le mode d’administration de la chimiothérapie jouent un rôle dans l’apparition de NVCI(36). Par exemple, les fortes doses sont plus émétisantes que les doses dites standard ou conventionnelles et les injections continues sont en principe mieux tolérées que les bolus. D’autre part, les administrations sur plusieurs jours déclenchent moins de NVCI que la même dose de chimiothérapie délivrée sur une seule journée(48). Les molécules utilisées dans les chimiothérapies sont classées en 4 catégories : hautement émétisantes, modérément émétisantes, faiblement émétisantes et très faiblement émétisantes. En fonction de leur catégorie, la prise en charge des NVCI sera différente. La MASCC et l’European Society for Medical Oncology (ESMO) ont publié des recommandations en 2010 qui ont été mises à jour en 2013. Le référentiel interrégional de l’AFSOS a pour référence celles de 2010. Au niveau national, la Société Française de Pharmacie Oncologique a coopéré avec le CNHIM pour publier leurs recommandations. 56 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Tableau 1 : Médicaments hautement émétisants Recommandations MASCC et ESMO Molécules ajoutées par la SFPO et le CNHIM 2010 (source de l’AFSOS)(59) 2013(33) cisplatine, cyclophosphamide Médicaments >1.5g/m², carmustine, injectables dacarbazine, mechlorethamine, streptozocine Médicaments per os altrétamine, chlorméthine, procarbazine, association anthracyclines (daunorubicine, doxorubicine, épirubicine, idarubicine, mitoxantrone, doxorubicine liposomale) + cyclophosphamide hexamethylmelamine, procarbazine Tableau 2 : Médicaments modérément émétisants Recommandations MASCC et ESMO 2010 (source de l’AFSOS)(59) alentuzumab, azacitidine, bendamustine, carboplatine, clofarabine, Médicaments injectables cyclophosphamide <1.5g/m², cytarabine >1g/m², daunorubicine, doxorubicine, epirubicine, idarubicine, ifosfamide, irinotecan, oxaliplatine, temozolomide, trabectédine Médicaments per os Molécules Molécules ajoutées retirées par la par la SFPO et le MASCC et l’ESMO CNHIM en 2013(33) en 2013(60) amsacrine, busulfan, dactinomycine, fotémustine, temozolomide, lomustine, trabectédine melphalan, méthotrexate >1g/m² cyclophosphamide, temozolomide, vinorelbine, imatinib 57 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Tableau 3 : Médicaments faiblement émétisants Molécules Molécules Molécules Recommandations MASCC et ajoutées par retirées par la ajoutées par la ESMO 2010 (source de la SFPO et le MASCC et MASCC et l’AFSOS)(59) CNHIM l’ESMO en l’ESMO en 201(33) 2013(60) 2013(60) bortézomib, cabazitaxel, Médicaments injectables catumaxumab, cetuximab, bexarotène, cytarabine <1g/m², docétaxel, nilotinib, doxorubicine liposomale pégylée, pazopanib, étoposide, eribuline, 5- thiotépa, fluorouracile, gemcitabine, topotécan per methotrexate, mitomycine, os, trétinoïne, mitoxantrone, paclitaxel, vandetanib, panitumumab, pemetrexed, vindésine, temsirolimus, topotécan, vorinostat cabazitaxel, éribuline ixabépilone trastuzumab capécitabine, fludarabine, Médicaments per os étoposide, sunitinib, éverolimus, tegafur uracile lapatinib, lénalidomide, thalidomide Tableau 4 : Médicaments très faiblement émétisants Molécules Molécules Recommandations Molécules ajoutées par la retirées par ajoutées par MASCC et ESMO 2010 SFPO et le CNHIM en la MASCC et la MASCC et (source de l’AFSOS)(59) 2013(33) l’ESMO en l’ESMO en 2013(60) 2013(60) asparaginase, bortézomib, bévacizumab, bléomycine, busulfan, 2Médicaments chlorodéoxyadénosine, injectables fludarabine, ipilimumab, vinblastine, vincristine, vinflunine, vinorelbine cétuximab, cladribine, dasatinib, décitabine, gemtuzumab ozogamycine, lapatinib, lénalidomide, mercaptopurine, nélarabine, ipilimumab, vinflunine ofatumumab, panitumumab, pentostatine, rituximab, thalidomide, trastuzumab chlorambucil, erlotinib, gefitinib, hydroxyurée, Médicaments per os méthotrexate, L- melphalan melphalan phénylalaline mustard, sorafenib, 6-thioguanine 58 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 2.2.3.7. Complications Les NVCI peuvent avoir des répercutions sur la qualité de vie, les activités quotidiennes et professionnelles et la vie sociale et relationnelle. Ils peuvent également induire des complications métaboliques graves(36)(47)(54). Un mauvais contrôle des NVCI peut avoir des conséquences néfastes sur le patient, comme favoriser l’anxiété ou détériorer l’état physique et mental avec un retentissement psychologique sur le malade et son entourage ainsi qu’une dégradation de l’autonomie et des capacités fonctionnelles. D’autre part, il y a un risque de retentissement nutritionnel avec dénutrition, perte de poids, faiblesse, déshydratation, hypoglycémie, voire des troubles métaboliques graves. Ensuite, les NVCI peuvent amener à retarder ou à réduire les doses, voire à suspendre le traitement anticancéreux, alors que celui-ci est potentiellement curatif. Ils peuvent également empêcher l’assimilation d’un traitement par voie orale, qu’il soit anticancéreux ou non(47)(53)(48). Il arrive également que la chimiothérapie provoque un goût métallique dans la bouche et masque la saveur des aliments. Les patients peuvent également se plaindre d’anorexie, de satiété précoce ou de sensation de plénitude(47). Enfin certains troubles peuvent venir compliquer la situation, comme les fausses-routes, les pneumopathies de déglutition, les brûlures œsophagiennes, les hémorragies digestives, les perforations de l’œsophage, les fractures et la déhiscence des plaies(53)(48). 59 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3. Prise en charge des mucites chimio-induites 3.1.Objectifs Les objectifs fixés dans cet axe de travail sont : - d’améliorer la prise en charge des mucites et autres problèmes de bouche entraînés par les protocoles de chimiothérapie, - de mettre à jour les protocoles de prévention et de traitement des mucites et des autres problèmes de bouche sur l’établissement - et enfin de communiquer sur la prévention des mucites et autres problèmes de bouche auprès des patients et des professionnels de santé. La prise en charge des mucites dans le cadre d’une radiothérapie et le cas particulier de la prise en charge pédiatrique ne seront pas traités dans ce travail. 3.2.Matériels et méthodes 3.2.1. Références Les recommandations MASCC/International Society of Oral Oncology (ISOO) définissent les recommandations concernant les soins de base à effectuer pour prévenir et traiter les mucites orales(31). Au cours de la dernière décennie, d’autres organisations ont également publié des recommandations contre les mucites, comme l’ESMO, qui a suivi celles de la MASCC/ISOO, et la US Nation Comprehensive Cancer Network, qui a combiné les recommandations de la MASCC/ISOO avec des avis d’experts. Ainsi, les recommandations pour les mucites de la MASCC/ISOO sont les recommandations de référence pour la pratique clinique. Suite au grand nombre de documents publié depuis la dernière mise à jour, la MASCC a entrepris une révision de ses recommandations en 2014(30). Le référentiel interrégional de l’AFSOS de 2010 est la principale référence utilisée qui sera adaptée en fonction des recommandations plus récentes, ou selon ce qu’il est possible de réaliser en pratique. 60 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.2.2. 3.2.2.1. Mesures préventives Bilan bucco-dentaire Quel que soit le type de traitement anticancéreux et la localisation du cancer, il est nécessaire d’effectuer un bilan et une remise en état bucco-dentaire au moins 3 semaines avant le début de la chimiothérapie(44)(61). En premier lieu, un examen clinique et radiologique est toujours effectué. Ensuite, un détartrage sera réalisé si le bilan sanguin ne montre pas de risque de saignement ou d’infection trop important(61). Si cela est nécessaire, une pulpectomie, des soins parodontaux, ainsi qu’un contrôle et un réajustement des prothèses dentaires pourront être effectués afin d’éviter les traumatismes(26)(33). Les dents à haut risque infectieux devront être extraites 15 jours à 3 semaines avant le premier cycle de chimiothérapie, sachant qu’en cas d’absence d’hygiène buccale, l’exérèse est préférée à la réparation(33). Selon la revue « Prescrire », une étude randomisée est en faveur de l’efficacité préventive des soins bucco-dentaires(45). En effet les soins bucco-dentaires réalisés en amont de la chimiothérapie préviennent ou réduisent les complications buccales(26). En règle générale, les soins locaux sont à éviter lors d’une cure de chimiothérapie. Toute décision d’intervention dentaire au cours de la chimiothérapie devra donc tenir compte de l’état hématologique du patient et de l’avis de l’hématologue et/ou de l’oncologue. Lorsqu’ils sont nécessaires et que les taux leucocytaire et plaquettaire le permettent, ils doivent impérativement être réalisés sous surveillance étroite et sous couverture antibiotique à large spectre(26). Au cours de la chimiothérapie, la présence de foyers infectieux, avérés ou potentiels, est à surveiller car une prise en charge précoce permettra d’éviter les complications(61). L’évaluation régulière de l’état de la bouche est indispensable pour prévenir et prendre en charge le plus tôt possible les pathologies buccales. L’état de la bouche est considéré comme normal, score 1 selon la grille OAG, s’il respecte les critères suivants : bouche libre de mucus ou autre débris, lèvres lisses, rosées et humides, dents ou prothèses propres, langue humide, rosée et papilles présentes, gencives rosées et fermes, muqueuses humides, rosées, sans dépôts ni lésions, salive claire présente et aqueuse(42). 61 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.2.2.2. Education du patient Avant le début de la chimiothérapie, il est recommandé d’identifier les populations à risque et d’insister sur l’éducation du patient pour que les soins buccaux soient réalisés correctement(31)(42)(44). L’ensemble de l’équipe soignante doit veiller à la sensibilisation et à l’éducation du patient envers les mesures préventives à effectuer au cours de la chimiothérapie mais aussi au-delà(26). Le patient devra être informé des effets secondaires buccaux possibles pendant et après la chimiothérapie, ainsi que de leur caractère réversible(61). En effet, l’implication du patient favorise une prise en charge adaptée et diminue ainsi la sévérité de la mucite(33). Il est important de boire au moins deux litres par jour, si cela n’est pas contre-indiqué par une insuffisance cardiaque ou une insuffisance rénale, sous forme d’eaux minérales, de thé, tisanes ou de boissons fraîches et pétillantes comme les boissons à base de cola, pour assurer une bonne hydratation des muqueuses(27)(42). Le tabac et l’alcool sont à éviter puisqu’ils favorisent la survenue des problèmes de bouche. Si des douleurs ou des aphtes apparaissent, le patient doit impérativement prévenir son médecin afin de mettre en place un traitement le plus rapidement possible(27). Concernant l’alimentation, les patients doivent privilégier les aliments moelleux ou mixés à la texture douce pour ne pas irriter l’intérieur de la bouche et éviter les aliments secs, durs ou croquants. Les aliments qui favorisent l’apparition d’aphtes, comme les noix, le gruyère ou l’ananas doivent être évités, tout comme les aliments trop épicés ou acides comme le jus de citron, la vinaigrette ou la moutarde(27). Tableau 5 : Aliments à privilégier ou à éviter pour prévenir les mucites(36) Aliments à privilégier Aliments à éviter Aliments secs, écorchant ou croquants : pain Aliments finement hachés Aliments bien cuits Aliments en sauce Produits lactés notamment froids sec, noisettes Aliments acides ou âpres : tomates, agrumes, raisins, pomme Aliments épicés : poivre, sel, curry Alcool et tabac Café 62 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Le comité de la MASCC confirme que l’utilisation de protocoles de soins de bouche qui incluent l’éducation du patient permet de réduire la sévérité des mucites chimioinduites(63). 3.2.2.3. Conseils d’hygiène bucco-dentaire Le patient doit respecter une hygiène bucco-dentaire rigoureuse(26). Pour cela il faut lui rappeler les règles d’un brossage hygiénique des dents(33). Si le taux de plaquettes est supérieur à 30 G/L, le nettoyage peut se faire avec une brosse à dent souple type chirurgicale et un dentifrice fluoré sans menthol après chaque repas(42)(33). L’utilisation d’un fil dentaire est également recommandée. En revanche, si le taux de plaquettes est inférieur à 30 G/L, le nettoyage doit être effectué à l’aide d’un coton tige ou d’un hydropulseur à jet léger(33). Le patient devra également faire en sorte de réduire les risques de traumatismes de la muqueuse buccale pour prévenir les gingivorragies qui pourraient être accentuées par une thrombopénie sévère(26). Si le patient porte des prothèses, il devra en réduire le temps de port et les entretenir convenablement(26)(61). En effet, le nettoyage quotidien des prothèses dentaires est indispensable en les brossant puis en les laissant sécher à l’air libre après chaque repas(64). Le patient doit idéalement hydrater ses lèvres et les protéger avec des bâtonnets glycérinés neutres, du beurre de cacao, de la vaseline ou un gel humidifiant comme la paraffine liquide (Lansoyl®)(27)(42). Ces corps gras sont contre-indiqués si le patient est sous oxygène, à cause du risque de brûlure(27). Le maintien de la salivation est le plus sûr moyen d’empêcher le développement de caries(33). Il est donc important de bien hydrater la cavité buccale pour éviter la xérostomie(31). La consommation de fruits frais comme l’ananas et le kiwi, de sorbets, de glaçons ou de glace pilée, aromatisés ou non, de bonbons acidulés sans sucre ou de chewing-gums est recommandée pour stimuler la salivation(26)(42). L’utilisation de cristaux de citrate de sodium placés sous la langue, de stimulants de la salivation comme la pilocarpine à 5 mg (Salagen®), de gel buccal hydratant Oralbalance®, de salive artificielle, d’humidificateur ou de brumisateur est également possible(31)(33)(42). 63 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.2.2.4. Soins de bouche Les soins de bouche sont définis comme les soins permettant de maintenir une hygiène buccale adéquate, afin d’assurer le confort du patient, de maintenir les caractéristiques physiologiques de la bouche, de prévenir toutes complications ou lésions et de rétablir l’intégrité de la muqueuse et la capacité fonctionnelle de la bouche. De nombreuses études ont montré que les soins de bouche fréquents et réguliers, sont un moyen efficace de prévenir et de traiter les affections de la cavité buccale(64). En effet, les soins de bouche permettent de diminuer la flore microbienne orale, la douleur, les saignements et le risque de complications dentaires comme les caries et les gingivites(31). Les mesures préventives non médicamenteuses visent à rendre la muqueuse buccale aussi saine que possible avant un traitement et à la protéger au cours du traitement(45). Actuellement, il n’existe pas de produit ou de protocole universellement efficace(44). L’importance du soin réside avant tout dans sa fréquence dans le but d’humidifier et d’alcaliniser la bouche(64). En effet les bains de bouche sont à répéter aussi souvent que possible, environ 4 à 6 fois par jour, en gargarisme si possible, en le laissant dans la bouche 30 à 60 secondes avant de le recracher. Une astuce peut consister à le proposer comme solution de rinçage après chaque brossage de dents(33)(62). Ensuite, l’action mécanique prime sur le type de produit utilisé même si les solutions de chlorure de sodium 0,9% ou de bicarbonate de sodium sont à préférer(33)(64). L’avantage du bicarbonate est qu’en plus de dissoudre le mucus et les débris, d’hydrater et de nettoyer la muqueuse buccale, il augmente le pH de la cavité buccale ce qui diminue le risque d’infection fongique(31). Le comité de la MASCC affirme que dans la prévention ou le traitement des mucites orales, aucune recommandation n’est possible entre le bicarbonate de sodium ou les solutions salines pour les soins de bouche, même s’il reconnait que l’usage courant du bicarbonate de sodium peut apporter un confort au patient et être une aide dans le maintien de l’hygiène bucco-dentaire(65). D’après la revue « Prescrire », en l’absence d’évaluation probante des autres préparations, autant en rester au sérum physiologique ou à une solution bicarbonatée(45). Les recommandations actuelles sont donc de ne pas y mélanger des antifongiques ou des antiseptiques pour la prévention des candidoses(33). 64 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) L’association bicarbonate, amphotéricine B (Fungizone®) et lidocaïne (Xylocaïne®) est même contre-indiquée en prévention des mucites orales(62). D’autre part, le mélange de produits et l’utilisation simultanée ou successive d’antiseptiques sont à éviter car il y a un risque d’interférence et d’instabilité entre les différents produits(44). En cas de maintien de mélange, il est recommandé d’éviter les solutions contenant de l’alcool qui sont asséchantes et irritantes pour la muqueuse buccale, ainsi que les formes galéniques contenant du sucre, pour limiter le risque de caries(33)(44). Si une préparation est nécessaire, comme par exemple avec le bicarbonate de sodium en poudre, elle devra être extemporanée, c'est-à-dire réalisée avant chaque soin(44). Les modalités de préparation sont les suivantes : ½ cuillère à café de bicarbonate de sodium en poudre dans un verre d’eau(42). Enfin, le produit de dilution, que ce soit de l’eau minérale ou stérile, du sérum physiologique ou du bicarbonate de sodium 1,4%, doit être renouvelé régulièrement(44). Selon le Vidal, le bicarbonate de sodium Lavoisier 1,4% doit être utilisé immédiatement après ouverture(66). Selon l’AFSOS, il doit être utilisé dans les 8 heures après l’ouverture du flacon(42). En pratique, il est recommandé de toujours dater l’ouverture du flacon et de le conserver au réfrigérateur 24 à 48 heures maximum(44)(67)(68). Même si la chlorhexidine aqueuse pourrait permettre de prévenir les infections de la muqueuse buccale ou d’éviter une carie ou une autre maladie parodontale en diminuant la plaque dentaire, son utilisation à long terme n’est pas possible en raison du risque de coloration des dents(64). D’autre part, l’utilisation prolongée de bains de bouche antiseptiques modifie la flore buccale favorisant le développement de certaines bactéries et de mycoses(45). Selon le groupe de travail de l’AFSOS l’utilisation de chlorhexidine est déconseillée(62). En conclusion, bien que les preuves de leur efficacité ne soient pas assez fortes pour conduire à une recommandation, la MASCC est en faveur de l’utilisation des protocoles de soins de bouche pour la prévention des mucites orales dans toutes les modalités de traitement du cancer(30). En revanche, aucune recommandation n’est possible pour l’utilisation des protocoles de soins de bouche en traitement des mucites orales, à cause de l’insuffisance ou de la contradiction des preuves(65). 65 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.2.2.5. Cryothérapie En parallèle de ces mesures, il est possible de minimiser l’impact des agents cytotoxiques sur les cellules de la muqueuse buccale lors des cures de chimiothérapie. En effet, le fait de sucer des glaçons pendant au moins 30 minutes peut agir en tant que cryothérapie et permettre de réduire de 2 à 5 fois l’incidence des mucites sévères(26)(33). Par le même mécanisme que celui du casque réfrigérant utilisé pour limiter l’apparition d’une alopécie, notamment avec les taxanes, le froid provoque localement une vasoconstriction qui limite les concentrations en agents anticancéreux au niveau des cellules buccales(26). Trois essais comparatifs randomisés ont montré que sucer des glaçons lors de la chimiothérapie réduit leur incidence : 4 à 21% de mucites orales sévères avec les glaçons, versus 14 à 74% chez les témoins(45). En revanche, l’inconvénient de cette méthode est qu’elle ne fonctionne pas avec tous les types de chimiothérapie. Elle est efficace surtout avec les médicaments à demi-vie courte, comme par exemple le melphalan et le 5-FU en bolus. Pour le 5-FU, il est recommandé de sucer des glaçons pendant 30 minutes en commençant 5 minutes avant l’administration. Pour le melphalan, il est recommandé de sucer des glaçons pendant 60 minutes en commençant 15 minutes avant l’administration. Les effets indésirables de la cryothérapie sont une sensation d’engourdissement de la bouche, des céphalées et des nausées(31). Ils sont donc acceptables et aucun autre traitement préventif n’a une meilleure efficacité démontrée, alors qu’ils ont des effets indésirables plus graves ou mal évalués(45). Le comité de la MASCC recommande que les patients recevant une chimiothérapie avec un bolus de 5-FU suivent une cryothérapie orale de 30 minutes pour prévenir les mucites orales(63). Il suggère également que la cryothérapie orale soit utilisée pour prévenir les mucites orales chez les patients recevant une haute dose de melphalan, avec ou sans irradiation corporelle totale(30). 3.2.2.6. Laser de faible puissance Le laser de faible puissance représente une avancée importante dans la prévention des mucites radio et chimio-induites, grâce à ses propriétés antalgiques, anti- inflammatoires et cicatrisantes. Son efficacité et sa bonne tolérance font de lui un des espoirs des méthodes protectrices(26). 66 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Son mécanisme d’action est d’agir directement sur le système énergétique mitochondrial, en diminuant la production de radicaux libres et en activant la transformation des fibroblastes en myofibroblastes. Plusieurs études ont reconnu son efficacité dans le traitement préventif et curatif des mucites. Il est possible d’utiliser le laser helium-néon (longueur d’onde à 632.8nm) ou le laser à diode (longueur d’onde entre 650 et 905nm). En revanche les paramètres, comme le type de laser, la puissance et l’énergie par cm² ne sont pas encore officiellement validés(31). D’autre part, il nécessite un équipement coûteux et une formation spécialisée. De plus les essais cliniques sont difficiles à mener et leurs résultats sont difficiles à comparer à cause de la variabilité interopérateur. Le comité de la MASCC constate l’accumulation des preuves en faveur du laser de faible puissance et pour les centres capables de supporter la technologie et la formation nécessaire, il suggère donc son utilisation dans le but de réduire l’incidence des mucites orales et la douleur associée chez les patients recevant une chimiothérapie à haute dose ou une chimiothérapie avant une transplantation de cellules souches hématopoïétiques(30)(63). Le groupe de travail de l’AFSOS recommande quant à lui l’utilisation du laser uniquement en cas de mucite de grade 2 induite par la radiothérapie(62). 3.2.2.7. Palifermine Le recours à des traitements d’action systémique comme la palifermine (Kepivance®) est une autre option(26). Il s’agit d’un analogue recombinant du facteur de croissance humain des kératinocytes (KGF-1). La palifermine a montré une diminution de l’incidence et de la sévérité des mucites pour les perfusions de méthotrexate à fortes doses et dans les cancers ORL traités par radiothérapie. Elle est recommandée par la MASCC pour réduire l’incidence, la sévérité et la durée de la mucite buccale chez les patients atteints d’une hémopathie maligne et traités par une chimiothérapie et/ou radiothérapie intensives avant une autogreffe de cellules souche à la dose de 60 µg/kg/jour en bolus par voie intraveineuse 3 jours avant et 3 jours après(30)(31)(33). Ses points négatifs sont son coût élevé et ses effets indésirables qui sont surtout des réactions anaphylactiques cutanées de type rash, prurit, éruption multifocale, mais aussi des arthralgies, des œdèmes, une dysesthésie et une modification du goût. Une surveillance des enzymes pancréatiques amylases et lipases est également nécessaire(31)(33)(45). 67 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Concernant les risques à long terme, en particulier de cancers secondaires, ils sont mal cernés(45). A cause du risque de prolifération tumorale, il n’est pas possible de l’utiliser dans le cas de tumeurs solides(31). Elle est également suspectée d’exposer à un risque accru de cataracte. Enfin, d’après la revue « Prescrire », la palifermine n’a pas été comparée à la cryothérapie et son efficacité en prévention des mucites orales n’aurait pas été démontrée(45). 3.2.2.8. Caphosol® Le Caphosol® est une solution électrolytique sursaturée en phosphate de calcium actuellement indiquée comme adjuvant aux traitements standards d’hygiène buccale dans la prévention et le traitement des mucites causées par une chimiothérapie à haute dose, principalement dans le cas d’une sécheresse buccale(31)(33)(62). En effet, le phosphate apporté permet à la cellule de se réparer. Son inconvénient principal est son prix élevé(31). A ce jour, il n’y a pas d’étude permettant de comparer ce produit au traitement de référence que sont les bains de bouche de bicarbonate de sodium(62). 3.2.2.9. Suivi du patient Après la chimiothérapie, le patient devra continuer à avoir une hygiène bucco-dentaire appropriée, ainsi qu’un suivi bucco-dentaire régulier par le chirurgien dentiste de ville, dont la fréquence sera à adapter en fonction du contexte clinique, tous les 6 à 12 mois. Pendant les rémissions et les guérisons, il n’y a pas de prise en charge bucco-dentaire spécifique(61). 3.2.3. Prise en charge curative des mucites buccales Selon le comité de la MASCC, aucune recommandation n’est possible quant à l’usage de protocoles de soins de bouche pour le traitement des mucites orales(30). L’AFSOS recommande d’évaluer l’état de la bouche pour définir la prise en charge. Si la bouche présente une ou plusieurs altérations (ulcérations, saignements ou abcès), la pondération selon la grille OAG sera entre 2 et 3 et il faudra appliquer les conseils pour une bouche à problèmes. 68 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Les problèmes de bouche peuvent être classés en deux catégories : les symptômes (sècheresse, saignements, douleur, etc.) et les lésions (aphtes, candidoses, mucites, herpès, etc.)(42). Tout d’abord, contre la sécheresse buccale, il est recommandé de consommer des boissons pétillantes non sucrées et des jus de fruits frais. Si nécessaire, l’anétholtrithione (Sulfarlem S25®) avec 1 à 2 comprimés 3 fois par jour ou la pilocarpine (Salagen®) avec 1 à 3 comprimés par jour peuvent être utilisés(42). Concernant les saignements buccaux, en plus des soins systématiques de base, il est recommandé d’effectuer des badigeonnages doux de lidocaïne adrénaline (Xylocaïne® adrénaline) avec une compresse stérile ou un bâtonnet pour réduire l’hémorragie par vasoconstriction et la douleur associée par anesthésie locale. Il faut prévenir le patient de ne pas manger ou boire dans les 2 heures qui suivent l’application. D’autre part, le patient devra consommer une alimentation froide et non irritante. En cas de saignements, il pourra réaliser des bains de bouche avec de l’acide tranexamique (Exacyl®) buvable et, selon la gravité, il pourra ajouter 2 à 4 ampoules d’acide tranexamique buvable en 2 à 3 prises par jour. Pendant cette période, le brossage des dents est à proscrire et le port des prothèses dentaires devra être réduit(42). En cas d’aphtes, en plus des soins systématiques de base, des badigeonnages de gel oral de lidocaïne 2%, des bains de bouche de sucralfate (Ulcar®) ou d’acétylsalicylate de lysine (Aspegic®), ainsi que des cataplasmes de sucralfate ou de salicylate de choline et chlorure de cétalkonium (Pansoral®) pourront être effectués. D’autre part, le patient devra éviter les aliments acides comme le café, les agrumes, les tomates, mais aussi ceux qui favorisent les aphtes(42). Concernant les mucites, le grade doit tout d’abord être défini entre 0 à 4 pour adapter la prise en charge. Dans le cas d’un grade 0, qui correspond à une absence d’atteinte, il est recommandé de suivre une hygiène bucco-dentaire adaptée et d’effectuer des bains de bouche avec un sachet de sucralfate dilué dans un verre d’eau. Dans le cas d’un grade 1, il est recommandé d’utiliser les antalgiques adaptés de palier I (paracétamol, néfopam) ou II (codéine, poudre d’opium, tramadol) en plus des bains de bouche de sucralfate et des bains de bouche avec de la glace. 69 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Dans le cas d’un grade 2, il est recommandé d’utiliser, en plus des antalgiques de palier II et des bains de bouche de sucralfate, la préparation suivante : bicarbonate 1,4%, méthylprednisolone (Solumedrol®) 40 mg et ½ flacon de lidocaïne (Xylocaïne®) 1%. De plus, des badigeonnages avec des compresses de gel oral de lidocaïne (Xylocaïne® visqueuse 2%) ou bien avec de la lidocaïne en crème buccale (Dynexan® 2%) pourront être effectués, en attendant 2 heures avant de manger ou de boire(42). Avec un produit anesthésique local, des risques de réaction d’hypersensibilité, de fausse route, de sensation de brûlure et de troubles du goût existent. Les anesthésiques locaux ont une efficacité temporaire et ne sont pas évalués par des essais comparatifs. Les conséquences de leur absorption par une muqueuse lésée sont mal connues(45). Le comité de la MASCC considère qu’aucune recommandation n’est possible pour les agents anesthésiques à cause de l’insuffisance des preuves(30). D’autre part, l’efficacité des corticoïdes en solution pour bains de bouche dans le traitement des mucites orales n’a pas été évaluée par des essais comparatifs. Appliqués sur la muqueuse buccale, les corticoïdes exposent à un risque accru d’infections, notamment de candidoses. De plus, même si le passage systémique des corticoïdes en usage local est limité, il peut toujours y avoir des effets indésirables généraux comme l’hypercorticisme, l’insuffisance surrénalienne, l’hypertension artérielle, l’hypokaliémie, la rétention hydrosodée et les troubles oculaires avec une utilisation prolongée(45). Dans le cas d’un grade 3, des antalgiques de palier III (morphine, oxycodone, fentanyl) devront être administrés, ainsi que des bains de bouche de la préparation suivante : bicarbonate 1,4%, 120 mg de méthylprednisolone et ½ flacon de lidocaïne 1%. Des antibiotiques et des corticoïdes par voie parentérale peuvent également être nécessaires(42). Dans le cas d’un grade 4, la prise en charge doit être décidée au cas par cas en Réunion de Concertation Pluridisciplinaire. Une pompe à morphine ou Patient Control Analgesia (PCA) et une alimentation entérale ou parentérale pourront être nécessaire en fonction du contexte clinique(42). Quel que soit le grade de la mucite, la prise en charge des patients doit reposer avant tout sur la sédation de la douleur et sur les mêmes règles d’hygiène buccale que celles mises en œuvre pour la prévention des mucites(45). En effet selon le CNHIM, l’efficacité et la sécurité d’emploi des autres pratiques ne sont toujours pas établies(33). 70 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.2.4. 3.2.4.1. Prise en charge des autres problèmes de bouche Candidoses oropharyngées En prévention des candidoses, il est recommandé de maintenir un bon état buccodentaire, mais aucun traitement médicamenteux n’est préconisé(42). Le fluconazole per os est le seul antifongique actuellement indiqué en prévention des infections fongiques à Candida après une induction ou une consolidation pour leucémie et chez un patient subissant une allogreffe. Ses effets indésirables sont rares mais plusieurs études ont mis en évidence l’émergence de souches résistantes, c’est pourquoi sa prescription systématique n’est plus recommandée et doit être évaluée au cas par cas(33). En cas de candidose avérée, il faudra définir la gravité et l’étendue de l’atteinte(42). Les recommandations actuelles proposent d’utiliser en première intention un antifongique topique et de réserver les formes systémiques pour les candidoses invasives ou sévères(33). S’il s’agit d’une forme minime ou modérée, il faudra donc utiliser un traitement antifongique sous forme : - de comprimés gingivaux muco-adhésifs de miconazole (Loramyc®) à 50 mg à coller une fois par jour au-dessus d’une incisive, - de gel buccal de miconazole (Daktarin®) 2%, deux cuillères mesures à appliquer 4 fois par jour, à continuer une semaine après que les symptômes aient disparu, - de suspension buvable d’amphotéricine B 10%, une cuillère à café 3 à 4 fois par jour à utiliser en bain de bouche et à recracher, de préférence en dehors des repas, - de suspension buvable de nystatine (Mycostatine®) 100 000 UI par ml, à utiliser en badigeonnage local 4 à 6 fois par jour et continuer deux jours après l’éradication des lésions(33)(42). Ces médicaments doivent être pris à distance des repas et des boissons et il est conseillé de maintenir le produit en bouche le plus longtemps possible, dans l’idéal quelques minutes. Le gel buccal de miconazole est contre-indiqué en association avec les antivitamines K et les sulfamides hypoglycémiants et chez les patients sous oxygénothérapie. En cas de port de prothèses dentaires, il faudra également les traiter en les brossant par exemple avec le gel de miconazole(42). 71 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) S’il s’agit d’une forme invasive (atteinte œsophagienne), sévère (patient neutropénique) ou récidivante, il faudra utiliser un traitement antifongique par voie systémique sous forme : - de suspension buvable d’amphotéricine B 10%, une cuillère à café 3 à 4 fois par jour à utiliser en bain de bouche et à avaler, de préférence en dehors des repas, ce qui permet d’avoir une action locale sur la muqueuse buccale mais aussi sur la partie haute du tube digestif, - de comprimés ou de gélules de fluconazole (Triflucan®), de 100 à 400 mg par jour ou d’itraconazole (Sporanox®) 100 mg une ou deux gélules en une seule prise avec une boisson, immédiatement après un repas ; la posologie peut être augmentée à 400 mg en deux prises par jour, - d’injection intraveineuse de fluconazole si la voie orale est non envisageable, entre 3 à 6 mg/kg/j, soit 100 à 200 mg pour un adulte pendant 15 jours(33)(42)(69). Selon le laboratoire, la solution d’amphotéricine B se conserve 10 jours après ouverture à température ambiante(66). Les traitements doivent être administrés jusqu’à disparition des signes cliniques, c’est-à-dire pendant 7 à 15 jours en général. D’autre part, les bains de bouche utilisés ne doivent pas contenir d’antiseptique. Dans le cas de lésions secondaires à l’emploi du méthotrexate, il est possible d’ajouter une ampoule d’acide folinique (folinate de calcium) dans chaque bain de bouche ou de l’administrer en sublingual(33). La solution CESCO ou solution Guggisberg, composée de nystatine, bicarbonate, vitamines et chlorure de sodium a eu l’avantage de sensibiliser le personnel soignant à la problématique des soins bucco-dentaires. En réalité, une étude a montré que l’action antimycosique de cette solution était négligeable, la nystatine étant en trop faible concentration. D’autre part, la nystatine est très sensible à l’air et à la lumière et son activité diminue rapidement avec le temps en présence de vitamines. La solution CESCO était donc instable avec une perte d’efficacité rapide si elle n’était pas conservée au réfrigérateur et à l’abri de la lumière. De plus, il est possible que de multiples utilisations quotidiennes de cette solution provoquent l’apparition de résistances. Les Hôpitaux Universitaires de Genève ont donc conclu qu’il serait préférable de mettre au point une solution sans nystatine et de la réserver au traitement des candidoses avérées. 72 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Plusieurs études et revues de littérature ont comparé les différents types de soins de bouche. Il en ressort qu’aucun produit n’a apporté de preuves cliniques de son efficacité dans le traitement des candidoses buccales, mais que tous sont utiles dans la prévention de ces complications(64). Par ailleurs, une étude a montré que les solutions buvables d’antifongiques, nystatine et amphotéricine B, une fois mélangées au bicarbonate, n’avaient pas d’activité sur Candida albicans, l’espèce la plus fréquemment impliquée dans les candidoses buccales. Selon cette même étude, un bain de bouche à base d’antiseptique tel que l’héxétidine peut être réalisé à distance des bains de bouche antifongiques pour permettre de diminuer l’adhérence de Candida aux cellules épithéliales. L’antiseptique ne doit cependant pas être mélangé aux bains de bouche afin d’éviter toute interaction physicochimique. L’étude conclut que l’association largement répandue d’antifongiques et de bicarbonate doit être proscrite dans tous les cas(69). En effet, le traitement antifongique ne doit jamais être déclenché à titre préventif dans le cas de l’existence d’une mucite seule. Si l’antifongique est utilisé, le bain de bouche doit être effectué de préférence après celui de bicarbonate de sodium et pas en même temps(62). 3.2.4.2. Herpès Le virus herpès peut également créer des lésions au niveau buccal(33). En plus des soins systématiques de base, le gel buccal lidocaïne 2% et la vaseline pourront être appliqués pour soulager le patient. La crème à l’aciclovir (Zovirax®) peut être prescrite dans le but de traiter les lésions. Si cela est insuffisant, le valaciclovir (Zelitrex®) à un comprimé deux fois par jour sur 5 jours pourra être utilisé(42). Si le patient a des difficultés à s’alimenter, le traitement par aciclovir sera initié par voie intraveineuse. Ensuite, un relais per os sera réalisé dès que possible(33). Le comité recommande que l’aciclovir et ses analogues ne soient pas utilisés en routine pour prévenir les mucites(63). La mise en route du traitement antiviral peut être décidée sur la base de la clinique lorsqu’elle est très évocatrice, c’est-à-dire avec des vésicules regroupées en bouquet, ou alors dans les tableaux majeurs c’est-à-dire en cas de mucite de grade 3(62). 73 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.2.4.3. Bouche douloureuse Le traitement antalgique est primordial dans la prise en charge des mucites(33). En raison des risques d’inconfort et de malnutrition inhérents aux mucites, il est indispensable de prendre en charge la douleur associée(26). Dans le cas d’une bouche douloureuse, avec des lésions associées ou non, il est recommandé d’évaluer et de réévaluer systématiquement et quotidiennement la douleur, afin de pouvoir adapter les traitements antalgiques. Localement, le patient pourra réaliser des bains de bouche d’acétylsalicylate de lysine (Aspegic®) 1000mg 3 fois par jour en alternance avec des bains de bouche de la préparation suivante : bicarbonate 1,4% 500 ml avec ½ flacon de lidocaïne 1%, ainsi que des badigeonnages de gel buccal de lidocaïne 2%, en attendant 2 heures avant de manger ou de boire, ou de crème buccale de lidocaïne (Dynexan®) 2%. Par voie générale, les traitements antalgiques selon les 3 paliers de l’OMS seront utilisés(42). Certaines mucites, notamment après greffe, sont très douloureuses et nécessitent un recours aux antalgiques du palier III comme la morphine en perfusion continue à faible dose(33). Les corticoïdes pourront être utilisés en cas d’inflammation importante responsable de dysphagie, sauf en cas d’aplasie où il faudra être prudent(42). Le traitement symptomatique repose donc sur les antalgiques. L’utilisation d’anesthésiques locaux, bien qu’apportant un soulagement certain au malade, doit être prudente car elle expose au risque de fausse route et de troubles du goût(26). Si nécessaire, la douleur sera traitée localement par des anesthésiques topiques et éventuellement par des bains de bouche de morphine(31). Pour soulager la douleur, le patient peut également sucer des glaçons, de la glace pilée, des glaces à l’eau, des sorbets ou des bonbons à la menthe(27). Le comité de la MASCC recommande que l’analgésie contrôlée par le patient (PCA) avec de la morphine, soit utilisée pour traiter la douleur due à la mucite orale chez les patients subissant une greffe de cellules souches hématopoïétiques. Le fentanyl transdermique peut également être efficace pour traiter la douleur causée par les mucites orales chez les patients recevant une chimiothérapie conventionnelle ou à haute dose, avec ou sans irradiation corporelle totale. 74 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) D’autre part, les bains de bouche à 2% de morphine peuvent être efficaces pour traiter la douleur due aux mucites orales chez les patients qui reçoivent une radiochimiothérapie de la tête et du cou. Enfin, les bains de bouche à 0.5% de doxépine peuvent être efficaces pour traiter la douleur due aux mucites orales(30). 3.2.5. Prise en charge des mucites gastro-intestinales Concernant les mucites gastro-intestinales, le comité recommande la ranitidine ou l’oméprazole en prévention des douleurs épigastriques après un traitement par cyclophosphamide, méthotrexate et 5-FU ou après un traitement avec 5-FU avec ou sans chimiothérapie à base d’acide folinique. Dans le cas d’une chimiothérapie combinée à la radiothérapie, le comité suggère l’utilisation de l’amifostine, un cytoprotecteur, pour réduire les œsophagites induites par une chimiothérapie et une radiothérapie concomitantes, chez les patients avec un cancer du poumon non à petites cellules(45)(63). Enfin, en raison de l’insuffisance et de la contradiction des données, aucune recommandation n’est possible pour de nombreuses molécules passées en revue, dont la palifermine fait partie(30). 3.2.6. 3.2.6.1. Sélection des protocoles dans le logiciel Cristal Link Critères d’inclusion Depuis son implantation progressive en 2005 dans l’établissement, la base de protocoles présente dans le logiciel Cristal Link s’est enrichie notamment par des pratiques de services de soins qui ne reposent pas forcément sur les recommandations d’experts. Les protocoles existants ont été recherchés dans le logiciel par les mots clés suivants : « bain de bouche », « soins de bouche » et « mucite ». 3.2.6.2. Critères d’exclusion Les prescriptions de soins de bouche effectuées en dehors d’un protocole informatique n’ont pas été prises en compte. 75 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.3. Résultats Les protocoles préexistants à l’Hôpital Nord Ouest dans le logiciel de prescription sont au nombre de 5 le 14/01/2014. Le nombre de prescriptions de ces protocoles a été évalué le même jour. Les dates de modification relevées montrent que les protocoles ont été peu mis à jour depuis leur création. D’autre part les protocoles ne sont pas cohérents entre eux, excepté les protocoles qui s’adressent aux grades 2 et 3 des mucites. Seulement 2 des 5 protocoles ont déjà été prescrits et l’un des deux 7 fois plus que l’autre. C’est d’ailleurs celui-ci, le plus prescrit, qui est le plus éloigné des recommandations actuelles. De plus il ne précise pas d’indication ni de description de symptômes correspondants. Les 3 protocoles qui n’ont jamais été prescrits sont pourtant proches des recommandations actuelles, ce qui montre qu’une communication insuffisante a nuit à leur utilisation. 76 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Tableau 6 : Protocoles de traitement des mucites à l’HNO Protocoles Bain de bouche fungizone bicar Bain de bouche (mucites) Détails - Bicarbonate de sodium 1.4% 250ml - Fungizone 10% 0.33 flacon Date de modification 1339 entre 09/10/2013 A partir de J1 : bain de bouche 3 fois/jour - Bicarbonate 1.4% 500ml - Fungizone 1 flacon - Xylocaïne 1% ½ flacon=10ml - Solumedrol 120mg A partir de J1 : 1 application 2 à 8 fois/jour - Ulcar 1g 1 sachet dans 20ml d’eau Nombre de prescriptions 11/09/2009 et 13/01/2014 : 308 prescriptions/an 41 entre 14/12/2012 et 10/06/2013 12/12/2013 : 41 prescriptions/an stérile A partir de J1 : en alternance avec la préparation (bicar+fungi+xylo+solu), gargarisme 2 à 3 minutes 4 fois/jour - Ulcar 1g 1sachet A partir de J1 : en gargarisme 2 à 3 minutes ou en application locale par DENTASWAB 8 fois/jour Soins de bouche ulcérée et douloureuse - Bicarbonate 1.4% 500ml - Fungizone 1 flacon - Xylocaïne 1% ½ flacon=10ml - Solumedrol 120mg 15/11/2012 0 18/09/2013 0 18/09/2013 0 A partir de J1 : uniquement si ulcérations mucitiques, 4 à 8 applications/jour - Xylocaïne visqueuse 2% gel A partir de J1 : uniquement si bouche douloureuse, 6 applications/jour ; attendre 2 heures avant de manger Soin de bouche - Méthylprednisolone 40mg mucite grade 2 - Lidocaïne 10mg/ml ½ flacon (ulcère - NaCl 0.9% 100ml érythème) A partir de J0 : 1 application 3 fois/jour Soin de bouche - Méthylprednisolone 120mg mucite grade 3 - Lidocaïne 10mg/ml ½ flacon (ulcération - NaCl 0.9% 150ml douleur majeure) A partir de J0 : 1 application 3 fois/jour 77 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.4. Plan d’amélioration 3.4.1. Fiche conseil d’hygiène bucco-dentaire L’hygiène bucco-dentaire est indispensable à la prévention des mucites, c’est pourquoi il a été décidé de créer une fiche conseil, intégrée au carnet de liaison des patients sous chimiothérapie. (ANNEXE 2) La fiche a été validée par la commission des soins de support de l’HNO (médecin spécialiste en soins palliatifs, infirmières et cadre d’oncologie ambulatoire) et présentée à la réunion des 3C de l’établissement. 3.4.2. Nouveaux protocoles Cristal Link Les protocoles s’adressent à des patients adultes hospitalisés à l’HNO et actuellement sous chimiothérapie. La cause de l’hospitalisation n’est pas un critère pour la prescription des protocoles. Après leur élaboration, les protocoles ont également été validés par la commission des soins de support de l’HNO et présentés à la réunion des 3C de l’établissement. 3.4.2.1. En fonction du grade de mucite Dans chaque protocole, la symptomatologie du grade de mucite correspondant est rappelée au prescripteur. Un document récapitulant tous les protocoles existants et toutes les symptomatologies de mucites associées a également été joint à chaque protocole. (ANNEXE 3) 3.4.2.1.1. Grade 0 L’hygiène bucco-dentaire du grade 0 comprend les bains de bouche de bicarbonate qui sont les soins de bouche de base à effectuer par tous les patients en prévention des mucites. Contrairement à ce que propose le référentiel de l’AFSOS, les bains de bouche de sucralfate n’ont pas été inclus au protocole car des recommandations plus récentes de la MASCC suggèrent que l’efficacité de ce médicament en prévention des mucites n’est pas prouvée. En effet, vingt études examinant l’utilisation de l’agent de revêtement muqueux sucralfate dans divers contextes ont été examinées par la MASCC. 78 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Les preuves soutiennent des recommandations contre l’usage du sucralfate dans la prévention ou le traitement des mucites orales chez les patients recevant une chimiothérapie(30). De plus, cela permet de simplifier les soins à effectuer par le patient, tout en restant efficace, puisque le plus important est d’effectuer des soins de bouche, peu importe le produit utilisé. Enfin, la dernière raison est que le sucralfate est un médicament qui n’est pas référencé au livret thérapeutique de l’HNO et le protocole du grade 0 est celui qui sera le plus largement prescrit puisqu’il concerne, en théorie, tous les patients sous chimiothérapie. Ce médicament peut être commandé sur demande auprès de l’équipe pharmaceutique, si cela est nécessaire. 3.4.2.1.2. Grade 1 Concernant les soins de bouche du grade 1, le sucralfate a été prescrit comme cela est recommandé, à réaliser en plus des bains de bouche au bicarbonate de sodium. Il doit être dilué dans une ampoule d’eau stérile. Concernant la prise en charge de la douleur, en concertation avec le médecin responsable des soins palliatifs sur l’HNO, le tramadol à libération prolongée à 100 mg a été prescrit deux fois par jour avec, en cas de douleurs, 1 g de paracétamol toutes les 6 heures ou un comprimé de paracétamol et tramadol (Ixprim®) si l’Echelle Visuelle Analogique (EVA) est supérieur à 3. Le nombre de prises maximum de paracétamol et tramadol a été calculé pour que la dose totale de tramadol ne dépasse pas 400 mg par jour, soit 5 comprimés de paracétamol et tramadol par jour. La possibilité de prescrire un laxatif dans le protocole, en cas de constipation due au tramadol, a été ajoutée. D’autre part, une auto-évaluation de la douleur par le patient, sous forme d’EVA à faire 4 fois par jour a été insérée. Si le patient a des difficultés à communiquer, une évaluation Algoplus est également possible. (ANNEXE 4) 3.4.2.1.3. Grade 2 Pour la prise en charge de la douleur dans le grade 2, les mêmes antalgiques que le grade 1 ont été prescrits. Le référentiel propose des antalgiques de palier II seuls, mais les discussions avec les différents spécialistes ont abouti à préférer la possibilité de combiner les antalgiques de palier I et de palier II, comme pour le grade 1. 79 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Concernant les badigeonnages d’anesthésique local, le gel oral de lidocaïne 2% a été choisi à la place de la crème buccale de lidocaïne 2%, car c’est le médicament que l’HNO possède à son livret thérapeutique. Concernant la préparation à base de méthylprednisolone et lidocaïne 1%, les bains de bouche sont à réaliser en alternance avec ceux de sucralfate et la préparation se conserve maximum 72 heures au réfrigérateur après le mélange des différents produits, ce qui est en général conseillé pour les mélanges extemporanés ne contenant pas de conservateur. 3.4.2.1.4. Grade 3 Concernant la prise en charge de la douleur dans le grade 3, le paracétamol a été prescrit 1 g toutes les 6 heures et le sulfate de morphine (Oramorph®) en gouttes toutes les 6 heures si l’EVA est supérieur ou égale à 4 malgré des prises systématiques de paracétamol. Le nombre de gouttes est laissé au libre choix du prescripteur. La prescription de laxatif a été prévue en cas de constipation due au sulfate de morphine. Le référentiel recommande également un traitement parentéral par antibiotiques et corticoïdes. Le traitement antibiotique n’a pas été intégré au protocole pour laisser au prescripteur le libre choix de l’antibiotique et de la posologie adaptés pour traiter ou prévenir une infection. Concernant les corticoïdes, le référentiel ne donne pas de notion de posologie, ils n’ont donc pas été inclus dans le protocole. Par ailleurs, il se trouve que les patients sous chimiothérapie ont déjà très souvent des corticoïdes en cure continue ou discontinue dont il faudra tenir compte. Si les corticoïdes sont nécessaires pour soulager le patient, le prescripteur pourra les ajouter en dehors du protocole. 3.4.2.1.5. Grade 4 Pour la prise en charge de la douleur dans le grade 4, même s’il existe déjà des protocoles PCA spécifiques, la pompe à morphine a été incluse dans le protocole pour faciliter sa prescription. En revanche il existe déjà des protocoles de nutrition entérale et parentérale avec une bonne visibilité dans Cristal Link sur l’établissement, ils n’ont donc pas été inclus dans ce protocole. Bien que les recommandations du référentiel pour le grade 4 comportent uniquement une prise en charge de la douleur et de la nutrition, il a été choisi de conserver les soins de bouche du grade 3, c’est-à-dire la préparation et les badigeonnages. Ceci dans le but que des soins locaux soient proposés aux patients, s’ils sont capables de les réaliser. 80 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Le cas de ces patients étant à étudier en RCP, les autres prescriptions souhaitées par l’équipe pluridisciplinaire seraient à réaliser hors protocole. 3.4.2.2. En fonction des problèmes de bouche De même que pour les protocoles de prise en charge des mucites, un rappel de la symptomatologie correspondant aux problèmes de bouche a été inclus dans chaque protocole. Un document récapitulant tous les protocoles existant et toutes les symptomatologies de problèmes de bouche associées a été joint à chaque protocole. 3.4.2.2.1. Bouche sèche Concernant les soins locaux, la salive artificielle (Artisial®) a été ajoutée avec 6 à 8 pulvérisations par jour. Le bicarbonate de sodium a été intégré au protocole en bains de bouche jusqu’à 6 fois par jour pour hydrater les muqueuses. Pour les traitements per os, le référentiel recommande l’anétholtrithione (Sulfarlem®) ou la pilocarpine (Salagen®). L’anétholtrithione à 12,5 mg a été préféré avec un comprimé 3 fois dans la journée, 30 minutes avant le repas. En effet, la pilocarpine peut avoir des effets indésirables plus fréquents et qui peuvent être plus graves comme une détresse respiratoire, une confusion ou des troubles du rythme cardiaque(66). 3.4.2.2.2. Candidoses 3.4.2.2.2.1. Forme minime et modérée Les recommandations proposent diverses formes galéniques d’antifongiques locaux. Le bain de bouche avec la suspension d’amphotéricine B à recracher a été retenu pour ce protocole. Il est précisé que le flacon se conserve 10 jours après ouverture à température ambiante selon le laboratoire qui le commercialise(66). Le bicarbonate de sodium a été ajouté pour lutter contre la candidose en alcalinisant le pH de la bouche. D’ailleurs, d’après l’étude de stabilité et d’efficacité, son utilisation est recommandée avant l’amphotéricine B. En effet, le mélange des deux produits diminue l’efficacité in vitro de l’amphotéricine B(69). 81 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.4.2.2.2.2. Forme étendue, sévère et/ou récidivante Les recommandations proposent un traitement antifongique par bain de bouche avec une suspension buvable à avaler, comprimé, gélule ou injection intraveineuse. Le même protocole que précédemment a été prescrit, en précisant cette fois que l’amphotéricine B est à avaler après le bain de bouche. D’autre part, le prescripteur a la possibilité de prescrire du fluconazole par voie orale en adaptant la posologie puisque celle-ci peut être variable. La forme intraveineuse n’a pas été incluse dans le protocole. 3.4.2.2.3. Herpès La vaseline n’a pas été prescrite à cause du risque de brûlure pour les patients sous oxygène. La crème aciclovir à 5% a été prescrite avec 5 applications par jour. Concernant les traitements par voie systémique, seuls les comprimés de valaciclovir ont été prescrits à la posologie de 500 mg deux fois par jour(66). 3.4.2.2.4. Aphtose Dans ce protocole, une prise en charge de la douleur pouvant combiner les paliers I à III est proposée, avec les mêmes règles de prescription que celles citées précédemment. Une évaluation de la douleur et une prise en charge de l’éventuelle constipation associée avec un laxatif ont été incluses. Concernant les soins locaux, les badigeonnages de gel buccal de lidocaïne 2% et les bains de bouche de sucralfate ont été conservés. Les bains de bouche d’acétylsalicylate de lysine n’ont pas été prescrits à cause du risque de saignement, surtout en cas de thrombopénie. D’autre part, les applications locales de sucralfate et de salicylate de choline et chlorure de cétalkonium (Pansoral®) n’ont pas été prescrites. 3.4.2.2.5. Bouche douloureuse avec ou sans lésions Concernant la préparation à utiliser en bains de bouche, la procaïne 2% a été remplacée par la lidocaïne 1% dans les mêmes proportions. Il est précisé que la préparation une fois mélangée se conserve 72 heures au réfrigérateur et qu’elle est à utiliser en alternance avec les bains de bouche d’un sachet d’acétylsalicylate de lysine 1000mg dilué dans un verre d’eau et recraché pour limiter le risque de saignement. 82 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Concernant le badigeonnage d’anesthésique local, seul le gel buccal de lidocaïne 2% est proposé. Ensuite, le protocole habituel de prise en charge de la douleur a été prescrit, sans inclure les corticoïdes au protocole pour les mêmes raisons que celles citées précédemment. 3.4.2.2.6. Bouche hémorragique Seuls les bains de bouche avec une ampoule d’acide tranexamique ont été prescrits, à renouveler 3 fois par jour, à avaler selon la gravité, ainsi que des badigeonnages d’acide tranexamique à l’aide d’une compresse non tissée à distance des repas. La pommade HEC n’a pas été prescrite car elle est adaptée à la muqueuse nasale mais pas forcément à la muqueuse buccale et son efficacité n’est pas prouvée. D’autre part, les badigeonnages de gel buccal de lidocaïne n’ont pas été prescrits puisqu’ils ne traitent pas l’hémorragie en elle-même. Si le patient a besoin de soulager sa douleur, le protocole « bouche douloureuse avec ou sans lésions » doit être associé puisqu’il contient la totalité des traitements antalgiques et pas seulement un anesthésique local. 3.4.3. Nouvelles ordonnances de sorties Les ordonnances de sortie ont été créées en collaboration avec la secrétaire d’oncologie ambulatoire. Elles ont été mises à disposition dans le service d’oncologie ambulatoire et transmises aux secrétaires des autres services de soins prenant en charge des patients sous chimiothérapie pour qu’elles les intègrent dans le logiciel de prescription de leur service. Les prescriptions sont pour une durée d’un mois, afin que le patient puisse renouveler les médicaments selon ses besoins, jusqu’à la prochaine cure où son état devra être réévalué. Le prescripteur a la possibilité d’ajuster cette durée si nécessaire. 3.4.3.1. En fonction du grade de mucite 3.4.3.1.1. Grade 0 Le bicarbonate de sodium 1,4% a été choisi car cette forme est remboursée. Son inconvénient est que le flacon ne se garde pas plus de 48 heures au réfrigérateur après ouverture et comme le patient doit pratiquer des soins de bouche tous les jours pendant la chimiothérapie, cela représente une grande quantité de flacons à se procurer et à stocker. 83 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Une alternative avec le bicarbonate de sodium sous forme de poudre a été proposée, non remboursée, mais à préparer extemporanément. Cette forme à mettre en suspension peut être préférée par certains patients pour son côté pratique. (ANNEXE 5) 3.4.3.1.2. Grade 1 Le sucralfate est à mettre en suspension dans de l’eau de boisson pour éviter au patient de se procurer des ampoules d’eau stérile puisque la préparation de cette suspension est extemporanée. Concernant le traitement antalgique, deux ordonnances types ont été préparées. La première contient un antalgique de palier I par défaut et la seconde des antalgiques de palier I et de palier II avec un traitement de fond à base de tramadol à libération prolongée associé à des interdoses de l’association de paracétamol et tramadol. La dose totale ne dépasse pas 400 mg de tramadol et 3 g de paracétamol par jour. Pour cela un comprimé 3 fois par jour de paracétamol 500 mg et maximum 4 comprimés par jour de l’association de paracétamol et tramadol par jour ont été prescrits. 3.4.3.1.3. Grade 2 Dans cette ordonnance, le bain de bouche de sucralfate a été prescrit en alternance avec la préparation de bicarbonate, corticoïdes et anesthésique local. Le gel buccal de lidocaïne est prescrit avec des compresses non tissées car elles sont plus douces que les compresses de gaze. Le même protocole antalgique que précédemment a été conservé. 3.4.3.1.4. Grade 3 Le bain de bouche de sucralfate a été supprimé car, à ce stade, l’effet bénéfique est trop minime pour soulager le patient. La préparation de bicarbonate et anesthésique local contient une dose plus élevée de corticoïdes pour augmenter l’effet antiinflammatoire. Les antalgiques n’ont pas été prescrits car le sulfate de morphine nécessite une ordonnance sécurisée, il devra donc être prescrit à part. 84 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.4.3.1.5. Grade 4 Cette ordonnance de sortie n’a pas été créée à cause des antidouleurs stupéfiants qui nécessitent une ordonnance sécurisée, ce qu’il n’est pas possible de réaliser de façon pré-remplie. D’autre part l’intérêt des soins locaux sera discuté au cas par cas en RCP. 3.4.3.2. En fonction des problèmes de bouche 3.4.3.2.1. Bouche sèche Dans la première version créée, seuls les bains de bouche au bicarbonate de sodium et la salive artificielle sont prescrits. Dans la seconde, l’anétholtrithione a été ajoutée dans le cas où les traitements locaux s’avèrent insuffisants. 3.4.3.2.2. Candidoses Pour ces ordonnances, la durée de traitement n’a pas été pré-remplie afin que le prescripteur puisse choisir la durée minimale de traitement et ainsi éviter que le patient utilise l’amphotéricine B en continu. Une première version a été créée pour les candidoses minimes à modérées, le bain de bouche d’amphotéricine B est à recracher, tandis que pour les formes étendues, sévères ou récidivantes, le bain de bouche d’amphotéricine B est à avaler. 3.4.3.2.3. Herpès Dans la première version, l’antiviral a été prescrit uniquement par voie locale à 5 applications par jour. Dans la seconde version, l’antiviral par voie locale a été associé à la voie orale à un comprimé de valaciclovir 500 mg deux fois par jour pendant 5 jours. La voie intraveineuse est réservée aux cas d’hospitalisation. 3.4.3.2.4. Aphtose La première version comprend le traitement antalgique de palier I associé aux soins locaux. La seconde version comprend une combinaison d’antalgiques de palier I et de palier II. 85 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.4.3.2.5. Bouche douloureuse avec ou sans lésions Les soins locaux et le traitement antalgique de palier I ont été prescrits dans une première version. Dans la seconde, les antalgiques de palier I et II ont été combinés. 3.4.3.2.6. Bouche hémorragique Les ampoules d’acide tranexamique ont été prescrites en applications locales et en bain de bouche à avaler sur la même ordonnance pour que le patient adapte en fonction de ses saignements si les applications sont insuffisantes. 3.4.4. Communication Une communication la plus large possible sur les nouveaux protocoles a été entreprise pour éviter qu’ils ne soient pas prescrits ou mal utilisés comme les protocoles préexistants. Pour commencer les anciens protocoles ont été désactivés afin d’éviter qu’ils continuent à être utilisés. Ensuite, un lien vers un fichier PDF résumant tous les stades de mucites ou tous les problèmes de bouche avec les recommandations associées a été inclus dans chaque protocole. Ces protocoles ont également été présentés à la réunion des 3C, auprès des principaux médecins oncologues de l’hôpital. Un mail a été envoyé à tous les médecins et les internes en médecine de l’hôpital pour les informer de la création des protocoles et des ordonnances de sortie correspondantes. Les internes en pharmacie ont également été informés pour qu’ils diffusent l’information dans les services dans lesquels ils interviennent. Enfin, les documents PDF résumant la prise en charge et les symptômes des grades de mucites et des différents problèmes de bouche ont été inclus au module des aides soignantes et des infirmières afin qu’elles puissent alerter le médecin sur des signes observés et surtout pour qu’elles soient au courant de la méthode de prise en charge. 86 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 3.5. Evaluation Les patients ont été interrogés grâce à un questionnaire à propos des ordonnances de sortie prescrites et des traitements qu’ils pouvaient avoir à réaliser chez eux. Ce questionnaire a été élaboré pour prendre moins de 5 minutes et pour s’adresser aux patients ayant reçu une ordonnance contenant des traitements contre les mucites. Seulement 10 patients ont été interrogés. (ANNEXE 6) Les points positifs des résultats du questionnaire sont : - L’échantillon varié de patients obtenu puisqu’ils avaient des antécédents de 2 à 48 mois de chimiothérapie. - La bonne compréhension de l’ordonnance de soins de bouche, même pour ceux qui ne les effectuaient pas en pratique. - La satisfaction des conseils qui leur ont été donnés lors de la dispensation à l’officine. En réalité, concernant ce qui leur a été conseillé, la plupart répondent qu’ils n’ont pas reçu de conseils, mais qu’ils ne jugeaient pas cela nécessaire car ils ne voient pas ce qui aurait pu leur être expliqué à ce sujet et ils n’ont aucune question à poser. Pour beaucoup de patients, cette ordonnance « n’a rien de compliqué ». Beaucoup ont dit que, comparé à la complexité de la chimiothérapie ou des traitements antiémétiques, cela n’était « pas grande chose ». Les patients ont plus de commentaires à faire sur les antiémétiques et la cortisone, qui se trouvent parfois sur la même ordonnance, que sur les bains de bouche. Les patients n’ont donc pas reçu de conseils d’hygiène bucco-dentaire, ni de conseils d’hygiène de vie. Un des patients, qui avait la bouche sèche, ne savait pas qu’il pouvait utiliser le bain de bouche de bicarbonate de sodium plusieurs fois dans la journée pour hydrater la muqueuse et il n’a pas entendu parler de la salive artificielle. En creusant un peu, la majorité des patients ne savaient pas comment, ni combien de temps conserver le bain de bouche, mais ils ne s’étaient même pas posé la question et cela n’était pas un problème pour eux. D’autre part, il est recommandé de conserver au réfrigérateur les solutions de bains de bouche une fois ouverte mais l’utilisation froide est impossible pour certains patients à cause d’une sensibilité dentaire. 87 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Par ailleurs, l’efficacité préventive des traitements est difficile à évaluer car une majorité de patients n’a pas de symptômes et n’en aurait peut être pas non plus sans les traitements. A contrario, pour les patients qui ont une mucite, les traitements se révèlent souvent insuffisants pour les soulager. En résumé cette ordonnance parait négligée par les patients et par le pharmacien, alors que des conseils simples pourraient augmenter l’efficacité de la prévention des mucites. 3.6. Conclusion Comme cela a été décrit, les traitements sont plus symptomatiques que spécifiques et leur efficacité est sans cesse remise en cause devant des résultats peu convaincants. Grâce à l’évolution des connaissances sur le processus biologique qui aboutit aux mucites, de nouvelles cibles sont en train de voir le jour pour de potentiels nouveaux traitements(34). A l’heure actuelle, les mesures préventives sont le traitement le plus efficace et même si elles peuvent paraître contraignantes, elles évitent aux patients de connaître les désagréments des mucites(45). C’est pourquoi le rôle des professionnels de santé est si important dans l’information, la motivation et l’éducation des patients(64). D’autre part, les référentiels scientifiques fournissent peu de réponse pour la majorité des patients. Ce travail s’est basé sur des référentiels plus pratiques, rédigés par des professionnels de santé qui souhaitent apporter des solutions aux patients, malgré la faible efficacité des produits. Ainsi, faute de mieux, et dans l’espoir de soulager les patients, les bains de bouche combinant corticoïdes et anesthésique local ont été conservés dans les protocoles et les ordonnances de sortie, malgré le fait qu’ils ne soient pas recommandés par les référentiels scientifiques plus récents. Le but de ce travail a été de tenter de diffuser au niveau local les recommandations actuelles et de sensibiliser les professionnels de santé à une pathologie qui peut être négligée dans un contexte de cancer. 88 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 4. Prise en charge des nausées et vomissements chimio-induits 4.1.Objectifs L’objectif principal de ce travail est la mise à jour des protocoles de prévention et de traitement des nausées et vomissements chimio-induits. D’autre part, le développement de la communication sur les conseils d’hygiène de vie et les médecines complémentaires qui peuvent jouer un rôle dans le contrôle de cet effet secondaire est également un axe majeur de ce travail. 4.2. Matériels et méthodes 4.2.1. Références Pour cet axe de travail, les référentiels utilisés sont ceux de l’AFSOS, mis à jour en 2013 à partir des recommandations MASCC/ESMO de la conférence de Perugia en 2009 et de celles de l’ASCO publiées en 2011. Une étude sur plus de 1200 patients a montré que l’adhésion aux recommandations du MASCC a augmenté de 31% la chance de n’avoir aucun événement émétisant dans les 5 jours suivant une chimiothérapie hautement ou moyennement émétisante par rapport aux patients pour lesquels ces recommandations n’étaient pas pleinement suivies(70). 4.2.2. 4.2.2.1. Mesures non médicamenteuses Education du patient Avant toute chose, il est important d’établir une relation de confiance avec le patient en lui expliquant l’objectif thérapeutique et l’intérêt des antiémétiques. Optimiser l’observance du protocole antiémétique est indispensable et le patient doit respecter rigoureusement les horaires de prise des médicaments antiémétiques. Les formes galéniques sont également variées pour favoriser l’observance. En effet, certaines spécialités sont présentées en lyophilisats oraux ce qui présente l’avantage de pouvoir se prendre n’importe où et sans eau puisqu’il se disperse en quelques secondes sur la langue. Enfin, si le patient ne supporte pas la prise par voie orale, il existe des suppositoires pour certaines spécialités(48). 89 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) L’éducation thérapeutique doit permettre d’insister sur l’observance, même si les symptômes de nausées et vomissements sont absents, et les éventuelles conséquences du non suivi du traitement doivent être expliquées(47). 4.2.2.2. Conseils hygiéno-diététiques Au-delà du traitement antiémétique, des mesures hygiéno-diététiques existent. Elles permettent de réduire les nausées et vomissements induits par la chimiothérapie, même si, de manière générale, l’adoption de bonnes habitudes de vie fait partie intégrante des traitements du cancer(47)(54). Il est par exemple conseillé d’éviter le tabac et, si le patient le souhaite, d’arrêter de fumer(50). Un accompagnement peut être proposé dans ce cas. Pendant les 24 heures qui précèdent la cure, afin de limiter l’incidence des aversions alimentaires chimio-induites et de réduire les nausées et vomissements, il est recommandé d’éviter la consommation d’aliments nouveaux ou que le patient aime particulièrement. En effet, plus l’alimentation des 24 heures précédant la première cure est diversifiée, plus le risque d’aversion alimentaire est important(48). La chimiothérapie peut également affecter la sensibilité de l’odorat. Certaines odeurs, jusque là supportables, deviennent désagréables et accentuent les nausées et les vomissements. Il est donc préférable d’éviter les odeurs prononcées comme les fritures, les poissons, les choux, les oignons, les peintures, les parfums et de modifier la préparation et la cuisson de certains aliments, en pensant par exemple à réchauffer à basse température pour limiter les odeurs(48). Après la cure, il est conseillé d’adapter son alimentation(50). Les aliments froids comme les sandwichs, les salades, les produits céréaliers, le pain grillé, les biscottes et les fruits frais sont à privilégier(47)(48). Il faudra éviter les aliments acides, les marinades et les aliments lourds ou difficiles à digérer comme les aliments frits, gras ou épicés(47)(50). Les repas conviviaux, soigner la présentation des aliments et varier les menus, sont des éléments qui peuvent faciliter la prise alimentaire(48). D’autre part, le patient doit prendre son temps et manger lentement afin de faciliter la digestion(50). Il est également recommandé de rester en position assise pendant 30 minutes après le repas. 90 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Si la position couchée est utilisée, il est préférable de se mettre sur le côté droit afin de favoriser la vidange gastrique(54). Le patient ne doit pas s’angoisser si la quantité d’aliments ingérée est insuffisante car le plus important est qu’il mange ce qui lui fait plaisir et envie(48)(50). En cas de perte d’appétit, il faut favoriser l’hydratation afin de prévenir une insuffisance rénale, fractionner l’alimentation en 6 à 8 petits repas, encourager l’enrichissement de l’alimentation avec du beurre, des sauces, des jus, des œufs et de la crème par exemple et privilégier les aliments à haute densité calorique(47)(50)(54). Si le patient ne peut plus du tout manger pendant plusieurs jours, il peut être utile de lui proposer des compléments hyperprotéinés et hypercaloriques aux parfums et textures variés(48). Enfin, le patient devra boire plutôt avant ou après les repas des boissons à son goût en variant entre eau, infusions, jus de pomme et boisson à base de cola dégazé, par exemple. Si besoin, il pourra utiliser une paille dans une tasse fermée pour faciliter les petites gorgées et éviter les odeurs(50)(54). De plus, les boissons gazeuses fraîches, notamment les sodas frais à base de cola, peuvent participer à diminuer les nausées(48)(50). Si des vomissements surviennent, le patient doit se rincer la bouche à l’eau froide et attendre 1 à 2 heures avant de manger à nouveau(50). En cas de vomissements récurrents, des bains de bouche mentholés peuvent être proposés. L’horaire de survenue, la fréquence des vomissements et une éventuelle perte de poids et d’appétit devront être transmis rapidement au médecin(48). A la suite de la chimiothérapie, les saveurs sucrées ou salées peuvent être perçues différemment de manière temporaire. Les aliments peuvent également laisser un goût métallique ou amer dans la bouche qui peut favoriser l’apparition des nausées. En cas de goût métallique, il faut privilégier les poissons, les œufs et les laitages plutôt que les viandes et remplacer les légumes verts par des féculents comme les pommes de terre, les pâtes et le riz. Boire beaucoup peut également permettre d’atténuer le goût étranger qui persiste dans la bouche, par exemple de l’eau, du thé, des jus de légumes ou de fruits frais, des boissons gazeuses citronnées ou de la limonade. D’autre part si la viande dégoûte le patient, il faut plutôt lui conseiller la volaille, les œufs, le fromage et le poisson(48). 91 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 4.2.2.3. Médecines complémentaires Il est important de lutter contre les facteurs favorisant les nausées et vomissements, comme l’anxiété et le stress(48). Sur ce point, les médecines complémentaires ont un rôle à jouer dans la prévention des NVCI(54). L’efficacité de l’acupuncture est validée depuis 1997 et il est recommandé d’effectuer une séance d’acupuncture la veille ou quelques heures après la chimiothérapie. L’électrostimulation aurait une efficacité supérieure à l’acupuncture simple, sur l’incidence des vomissements aigus. De même, l’acupression permet de diminuer la sévérité des nausées aiguës mais il n’y a pour l’instant pas de données sur l’efficacité sur les événements retardés. Ces méthodes présentent peu d’effets indésirables et ils sont tous liés à l’électrostimulation : rash transitoire, irritation de la peau aux points de l’électrode, choc électrique et aggravation de la paresthésie chez un patient atteint de neuropathie périphérique(54). D’autre part, la pratique d’activités relaxantes comme le yoga ou les techniques de respiration peuvent être bénéfiques. Le patient doit idéalement se libérer le plus souvent possible des contraintes ménagères et professionnelles et surtout juste avant ou après la cure(48). 4.2.3. 4.2.3.1. Médicaments disponibles Antagonistes des récepteurs dopaminergiques de type 2 Il existe 5 types de récepteurs dopaminergiques, mais jusqu’à de récentes découvertes, seuls les récepteurs dopaminergiques de type 2 (D2) étaient connus pour être impliqués dans la physiopathologie des nausées et vomissements(55). Les antagonistes des récepteurs D2 agissent au niveau central. Ils bloquent de façon spécifique et réversible les récepteurs D2 de l’area postrema. Ces médicaments appartiennent à la classe thérapeutique la plus ancienne et avec l’index thérapeutique le plus faible dans la prise en charge des NVCI(36)(48). Les benzamides (alizapride et métoclopramide), les butyrophénones (dompéridone, halopéridol) et les dérivés des phénothiazines (métopimazine) font partie de cette famille. L’alizapride, le métoclopramide et la métopimazine agissent seulement sur l’area postrema. L’halopéridol agit également sur le noyau du tractus solitaire et le centre du vomissement. 92 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) A fortes posologies, ils bloquent également les récepteurs sérotoninergiques 5-HT3 mais leur activité antiémétique reste inférieure à celle des sétrons. Le métoclopramide exerce en plus une action facilitatrice sur la vidange gastrique et tonique sur la motricité intestinale. Il est notamment utilisé pour contrôler les nausées et vomissements iatrogènes induits par l’administration d’antalgiques opiacés adjuvants au traitement anticancéreux(48). Tous les antagonistes dopaminergiques exposent à un risque de somnolence, d’asthénie, de tremblements, d’étourdissements, d’anxiété et d’agitation ainsi qu’à des effets neurovégétatifs tels qu’une hypotension orthostatique, une sécheresse buccale, une constipation, des troubles de l’accommodation ou une rétention urinaire(47)(48). L’halopéridol, en franchissant la barrière hémato encéphalique, peut être à l’origine d’effets indésirables moteurs dose-dépendants, avec une akinésie, une rigidité musculaire et des dystonies aiguës. L’alizapride, le métoclopramide, la métopimazine ou la dompéridone ont moins d’effets secondaires centraux car ces molécules franchissent difficilement la barrière hémato encéphalique(48). Des effets endocriniens à type d’élévation de la prolactinémie avec gynécomastie, galactorrhée ou troubles des règles, sont également décrits avec la métopimazine ou l’alizapride(48). Des troubles extrapyramidaux ont été décrits de façon exceptionnelle pour le métoclopramide. Par ailleurs, les effets secondaires tout comme l’efficacité du métoclopramide augmentent avec la dose, probablement en raison de ses capacités d’inhibition des récepteurs 5-HT3 à des concentrations sanguines élevées(36). L’alizapride traverse peu la barrière hémato-méningée, ce qui explique qu’il ait la toxicité neurologique la plus faible. Il vaut donc mieux préférer l’alizapride intra veineux (IV) au métoclopramide IV(54). Les antidopaminergiques sont le traitement privilégié en cas de mauvaise tolérance des sétrons, d’échec de l’association sétrons et corticoïdes, de traitement de secours et de prophylaxie des chimiothérapies faiblement émétisantes en cas de contre-indication aux corticoïdes(36)(48). En prophylaxie secondaire, il faudra préférer la perfusion continue d’alizapride avec 5 à 20 mg/kg/24h, soit 6 à 8 ampoules de 50 mg en perfusion continue. En traitement de secours, la posologie d’alizapride sera de 2 à 4 ampoules de 50 mg en perfusion de 15 minutes, renouvelable 3 fois(54). Les doses usuelles, soit 20 mg pour le métoclopramide et 100 mg pour l’alizapride par injection, peuvent être doublées. En cas d’inefficacité, il est recommandé de faire une rotation avec d’autres antiémétiques plutôt que d’augmenter encore les doses(36). 93 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 4.2.3.2. Antagonistes des récepteurs sérotoninergiques de type 3 ou sétrons Les sétrons sont des antagonistes hautement sélectifs des récepteurs 5-HT3 dont la densité est élevée dans l’area postrema et dans les terminaisons nerveuses vagales afférentes de l’intestin(48). L’inhibition périphérique de ces récepteurs au niveau des fibres vagales afférentes constitue le principal mécanisme par lequel les anti-5-HT3 exercent leur effet antiémétique(56). En effet, les sétrons bloquent les influx vagaux émétisants induits par la libération massive de sérotonine par les cellules entérochromaffines de l’intestin, lorsque la muqueuse entérique est agressée par les agents cytotoxiques. A cela s’ajoute une action antagoniste sérotoninergique centrale par blocage des récepteurs de l’area postrema et du NTS(48). Il existe 4 molécules : ondansétron, granisétron, tropisétron et palonosétron(54)(57). Ces molécules sont sur le marché depuis les années 1990, sauf le palonosétron qui est un sétron de deuxième génération commercialisé en France seulement depuis 2012(56). Une étude chez des patients recevant du cyclophosphamide a montré que les sétrons sont meilleurs que le placebo pour prévenir les vomissements(71). Ils sont utilisés en prévention des NVCI aiguës. Les formes injectables sont administrées par perfusion ou par intraveineuse lente avant la chimiothérapie. La voie orale à dose adaptée est aussi efficace que la voie intraveineuse. Les formes orales sont également administrées avant la chimiothérapie et la prise peut être renouvelée au bout de 12 heures, ce qui correspond au temps de demi-vie des sétrons de première génération. D’autre part, l’efficacité des doses uniques quotidiennes est similaire à celles des doses multiples(48)(54). Une méta-analyse de 8 études a évalué l’utilisation des sétrons pour prévenir les vomissements retardés après une chimiothérapie modérément émétisante. Elle a conclue à une réduction minime du risque relatif de vomissements. Par ailleurs, une analyse ultérieure met en doute la rentabilité de l’utilisation des sétrons dans la prévention des vomissements retardés en ce qui concerne le rapport coût / efficacité. En effet, l’une des plus grandes études incluse dans la méta-analyse évoquée précédemment, est un essai qui compare un placebo versus la dexaméthasone, versus la dexaméthasone et un sétron. Cet essai a démontré que la dexaméthasone est supérieure au placebo pour diminuer les vomissements retardés, mais que la dexaméthasone et le sétron ne sont pas supérieurs à la dexaméthasone seule. D’autre part, l’association provoque plus de constipation chez les patients l’ayant reçu(71). 94 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Selon l’AFSOS il n’y a aucun bénéfice à donner un sétron en phase retardée des NVCI, c’est-à-dire après J1(54). L’impact sur les nausées et vomissements anticipés n’est pas clairement défini. Une étude a montré une incidence plus faible des nausées et vomissements anticipés grâce aux antagonistes des récepteurs 5-HT3 et trois études ont montré des taux similaires de nausées et vomissements anticipés avec ou sans les antagonistes 5-HT3. Il semblerait que ces molécules réduisent les vomissements post-chimiothérapie mais pas les nausées post-chimiothérapie(53). De manière générale, les différents sétrons sont équivalents en termes d’efficacité et d’innocuité. Leur activité est puissante puisqu’en monothérapie ils donnent des taux de réponse complète compris entre 40% et 60% pour les chimiothérapies hautement émétisantes et entre 60% et 80% pour les chimiothérapies moyennement émétisantes(48)(71). Le palonosétron a montré une efficacité supérieure aux sétrons de première génération dans les NVCI retardées des chimiothérapies modérément émétisantes. Sa demi-vie est de 40 heures, contrairement aux sétrons de 1ère génération et il a une meilleure affinité pour les récepteurs 5-HT3(54)(71). Bien que le palonosétron ait montré sa supériorité aux autres sétrons dans deux études, la majorité du comité de la MASCC estime pour l’instant qu’il n’y a pas suffisamment de preuve pour soutenir une recommandation en sa faveur. Il n’y a que dans le cas d’une chimiothérapie modérément émétisante, hors association anthracycline et cyclophosphamide, que le palonosétron est recommandé en première intention. Aucune étude randomisée n’a évalué l’association du palonosétron avec les antagonistes des récepteurs NK1, donc en cas d’association anthracycline et cyclophosphamide il est préférable d’utiliser un autre sétron(59). La MASCC et l’ASCO ne recommandent pas un sétron plus qu’un autre(71). Les sétrons bénéficient en général d’une bonne tolérance. Les principaux effets indésirables sont des céphalées, des sensations vertigineuses, des bouffées de chaleur, des flushs, une rare élévation des transaminases, des douleurs abdominales transitoires et surtout une constipation par diminution de la motilité intestinale et des sécrétions liquidiennes entériques. Si cet effet peut s’avérer bénéfique chez des patients soumis à un traitement anticancéreux induisant des diarrhées, il tend à aggraver une constipation induite par l’administration d’antalgiques opiacés. L’usage de sétrons n’induit ni troubles neurologiques extrapyramidaux, ni sédation. 95 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) En revanche, il existe un risque d’hypersensibilité croisée entre tous les sétrons ainsi qu’un risque cardiovasculaire de type douleurs thoraciques, hypotension, troubles du rythme, fibrillation ventriculaire, notamment avec les formes injectables(48). 4.2.3.3. Corticoïdes Les corticoïdes limitent la réponse aux stimuli émétisants causés par la libération massive dans le sang de produits de lyse cellulaire intestinale. Une régulation négative de l’activité des cytokines et des prostaglandines pro-inflammatoires et émétisantes est également un mécanisme décrit(48). Ils sont indiqués dans la prophylaxie des NVCI retardés et leur intérêt, seul pour une chimiothérapie peu émétisante, ou en association à d’autres médicaments pour une chimiothérapie plus émétisante, a été démontré par plusieurs études randomisées. En effet, les corticoïdes potentialisent l’effet des autres antiémétiques comme le métoclopramide et les sétrons. L’association dexaméthasone et sétron permet un gain compris entre 20% et 30% dans la réduction des nausées et des vomissements chez des patients traités par cisplatine(47)(48). Les corticoïdes s’administrent en prise unique journalière et l’efficacité per os est similaire à celle par voie intraveineuse(47). Le corticoïde de référence est la dexaméthasone, cependant il n’y a pas de supériorité par rapport aux autres corticoïdes à posologie équivalente(47). La posologie recommandée est de 20 mg de dexaméthasone en cas de chimiothérapie hautement émétisante et de 8 mg en cas de chimiothérapie moyennement émétisante. La méthylprednisolone ou la prednisolone peuvent également être utilisées selon l’équivalence suivante : 0,5 mg de dexaméthasone équivaut à 8 mg de méthylprednisolone et à 10 mg de prednisolone(48). La supériorité de la dexaméthasone par rapport au placebo dans la prévention des vomissements retardés chez les patients recevant une chimiothérapie modérément émétisante a été démontrée dans plusieurs études(71). Les effets indésirables fréquents des corticoïdes sont une insomnie, une agitation et des bouffées vasomotrices de la face survenant le jour-même de la prise ou le lendemain(54). Il peut également y avoir, à plus long terme, une hyperglycémie, des œdèmes, une prise de poids, une augmentation de l’appétit et de l’acné(47). 96 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 4.2.3.4. Antagonistes des récepteurs aux neurokinines de type 1 Les tachykinines sont une famille de peptides de petites et moyennes tailles. Leurs récepteurs sont couplés aux protéines G et sont appelés récepteurs aux neurokinines (NK). La substance P a plus d’affinité pour les récepteurs NK1 que la tachykinine(55). La substance P est un oligopeptide de onze acides aminés exerçant une activité neuromédiatrice. Elle se trouve dans les fibres vagales afférentes au niveau du tube digestif ainsi qu’au niveau du centre du vomissement dans l’encéphale. Son injection déclenche chez l’animal des vomissements corrélés à sa liaison aux récepteurs NK1. Les antagonistes des récepteurs NK1 s’opposent à l’action de la substance P sur les fibres vagales et au sein même des structures cérébrales impliquées dans le contrôle des vomissements(48). Mais même si les antagonistes des récepteurs NK1 peuvent avoir un site d’action périphérique, leur efficacité clinique repose essentiellement sur leur action centrale(56). Pour exercer leur action antiémétique, les antagonistes des récepteurs NK1, doivent traverser la barrière hémato-encéphalique. Cette contrainte explique leur délai d’action(55). L’aprépitant, chef de file de cette famille, a été mis sur le marché en 2000(54)(56). Une étude à grande échelle a confirmé que le fosaprépitant en une seule injection intraveineuse est aussi efficace que l’aprépitant mais cette molécule n’est pour l’instant pas disponible en France. Il n’y a donc qu’une forme par voie orale(36)(49). L’aprépitant n’a été indiqué au départ que dans la prévention des nausées et des vomissements aigus et retardés associés à une chimiothérapie anticancéreuse hautement émétisante comprenant du cisplatine(48). Puis en 2005, il a obtenu l’indication dans les chimiothérapies moyennement émétisantes(72). Une étude a montré que malgré la prophylaxie par ondansétron, la majorité des patients recevant une chimiothérapie avait des nausées. La fréquence des nausées retardées était même deux fois plus élevée que celle des nausées aiguës. Ceci montre bien quelle était l’importance de trouver un traitement efficace pour contrôler les nausées retardées(52). L’aprépitant associé aux autres antiémétiques améliore significativement le contrôle des NVCI à la phase aiguë et retardée(36). 97 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) L’aprépitant améliore la qualité de vie évaluée par le Functional Living Index, puisque 74% des patients l’ayant reçu reportent peu ou pas d’impact sur leur vie quotidienne dû aux nausées et vomissements, contre 64% des patients témoins. D’autre part, les données suggèrent que l’administration d’aprépitant annule le facteur pronostic défavorisant qu’est le sexe féminin, chez les patientes qui reçoivent une chimiothérapie hautement émétisante. Par ailleurs, ces études randomisées précisent également le rôle de l’aprépitant dans la prophylaxie des vomissements retardés. Deux études ont comparé la bithérapie qui associe l’aprépitant à la dexaméthasone dans les jours qui suivent la chimiothérapie, contre la dexaméthasone seule. Individuellement ou par une analyse groupée, ces études ont montré que la bithérapie avec l’aprépitant est associé à une diminution significative des vomissements retardés, comparés à la dexaméthasone seule(71). Le traitement par aprépitant bénéficie d’une bonne tolérance. Les effets iatrogènes rapportés sont des céphalées, une asthénie, des sensations vertigineuses, une anorexie, des troubles digestifs de type constipation, diarrhée, dyspepsie, éructation et un risque de survenue de hoquet(36)(48)(54). L’aprépitant subit un important métabolisme hépatique au niveau de l’isoenzyme CYP3A4 vis-à-vis duquel il agit à la fois comme inducteur et comme inhibiteur. De plus, l’aprépitant est inducteur du CYP2C9(48). Par conséquent, les interactions médicamenteuses sont nombreuses. L’aprépitant accélère le catabolisme de divers médicaments anticancéreux, dont le cyclophosphamide(48)(54). L’association avec l’ifosfamide entraîne un risque de toxicité neurologique sous forme d’encéphalopathie(36)(54). La diminution des doses d’ifosfamide est donc à réaliser si les deux molécules doivent être associées(36). L’AFSOS recommande même de ne pas associer l’aprépitant à l’ifosfamide en première intention. De même avec la trabectédine, qui présente un risque d’hépatotoxicité de type cytolyse hépatique, majoré par l’association à l’aprépitant. L’aprépitant n’est donc pas recommandé en première intention avec cette molécule et si l’association est nécessaire, l’aprépitant sera donné à dose diminuée et sous surveillance de la fonction hépatique(54). 98 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) D’autre part, il inhibe le catabolisme de la dexaméthasone, avec laquelle il doit être associé. Il est donc important de diminuer la posologie du corticoïde(48). La dose orale habituelle de dexaméthasone et de méthylprednisolone doit être réduite d’environ 50% et la dose habituelle de méthylprednisolone administrée par voie intraveineuse doit être réduite d’environ 25%(36). Selon l’AFSOS, la posologie des corticoïdes à visée antiémétique doit être diminuée de 40% quand ils sont associés à l’aprépitant : soit une diminution de 20 mg à 12 mg pour la dexaméthasone dans les chimiothérapies hautement émétisantes(54). L’aprépitant diminue l’efficacité des contraceptifs à base d’éthinyloestradiol et de norethindrone et il est donc recommandé de recourir à un second moyen de contraception(36). Les inducteurs enzymatiques comme la carbamazépine, le millepertuis, la phénytoïne, la rifampicine, le phénobarbital risquent de rendre inefficace l’aprépitant(48). Avec la warfarine, l’INR doit être surveillé étroitement au cours du traitement par l’aprépitant et au cours des 2 semaines suivantes. Les essais ont montré que chez ces patients l’administration d’aprépitant était suivie d’une réduction de 34% de la concentration résiduelle de la S-warfarine et d’une diminution de 14% de l’INR 5 jours après la fin du traitement par aprépitant(36). 4.2.3.5. Benzodiazépines Les benzodiazépines ont une faible activité antiémétique indirecte. Elles ont un intérêt dans la prophylaxie et le traitement des nausées et vomissements anticipés. Leur activité est probablement liée à leur action sédative, anxiolytique et amnésiante. Ces molécules potentialisent l’action de certains antiémétiques plus puissants comme le métoclopramide et les corticoïdes. Elles peuvent également être utilisées en complément des autres associations d’antiémétiques chez les patients anxieux. Sont surtout prescrits le lorazépam, le clorazépate dipotassique et l’alprazolam. Il est recommandé de préférer les benzodiazépines à demi-vie courte comme l’alprazolam pour éviter le risque d’accumulation chez les patients âgés et les insuffisants rénaux(48)(54). 4.2.3.6. Autres médicaments L’olanzapine dispose d’un effet inhibiteur sur les récepteurs dopaminergiques, sérotoninergiques, alpha 1 adrénergiques, muscariniques et histaminergiques de type 1. 99 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Elle a été testée à 5 mg par jour contre placebo chez 44 patients recevant également une prophylaxie antiémétique optimale. La fréquence d’événements antiémétiques était significativement réduite dans le bras olanzapine(36)(73). Une étude a montré que l’olanzapine était aussi efficace que l’aprépitant contre les nausées et vomissements dus aux chimiothérapies hautement émétisantes. L’ajout de l’olanzapine aux traitements antiémétiques classiques a permis de réduire les nausées de grade 3 de 42 à 8% et les vomissements de grade 3 de 67 à 0%. 42% des patients n’ont pas eu besoin de traitement antiémétique de secours malgré le mauvais contrôle de cet effet indésirable lors du cycle précédent(73). Enfin, une étude a comparé l’utilisation de l’olanzapine à 10 mg par jour durant 3 jours au métoclopramide à 20 mg par jour pendant 3 jours chez des patients présentant des NVCI réfractaires malgré une chimio-prophylaxie optimale dans des chimiothérapies hautement émétisantes. Sur les 108 patients, 70% de ceux sous olanzapine n’ont présenté aucun événement contre 39% de ceux sous métoclopramide(74). L’olanzapine est donc efficace pour prévenir les NVCI aigus et retardés et notamment en cas de NVCI réfractaires. Cette indication est pour l’instant toujours hors AMM et elle n’est donc pas remboursée, sauf accord du médecin conseil. La posologie recommandée est de 10 mg par jour(54). L’ASCO, le National Comprehensive Cancer Network (NCCN) et l’ESMO/MASCC considèrent tous l’olanzapine comme une option thérapeutique(36). Concernant sa tolérance, 67% des patients se sont plaint de somnolence et de vertiges de grade 1 et 33% de grade 2. Ceci a conduit à diminuer la dose ou la durée du traitement par olanzapine tout en maintenant l’efficacité(73). La mirtazapine et l’halopéridol entre 0,5 à 2 mg per os ou intraveineux toutes les 4 à 6 heures peuvent également apporter un bénéfice dans le contrôle des nausées(36)(54). D’autre part, l’histamine et l’acétylcholine ont un rôle important dans le mal des transports. La scopolamine transdermique pourrait avoir une efficacité, de même que les phénothiazines, cependant les études concernant les antihistaminiques et les anticholinergiques montrent un faible effet ou pas d’effet contre les nausées et vomissements chimio-induits(36)(55). 100 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Le seul autre neurotransmetteur connu pour être impliqué dans les vomissements chimio-induits est le récepteur cannabinoïde de type 1 (CB1). Contrairement aux autres antiémétiques, les cannabinoïdes exercent leur effet antiémétique par agonisme sur les récepteurs CB1. Dans les années 70 et 80, des études ont montré que les molécules comme le dronabinol et la nabilone ont un effet antiémétique chez les patients recevant des chimiothérapies modérément émétisantes, mais leur utilisation est restreinte à cause des effets indésirables associés, particulièrement chez les patients âgés(55). 4.2.4. Protocoles de prise en charge Plusieurs voies émétogènes se combinent lors de l’administration d’une chimiothérapie, ce qui justifie le recours à des médicaments ayant des mécanismes d’action différents(48). Tout d’abord la prophylaxie primaire consiste à donner un traitement préventif dès le 1er cycle de chimiothérapie, à la phase aiguë et retardée. Ensuite, la prophylaxie secondaire consiste à réévaluer le traitement préventif et à l’adapter en fonction des symptômes apparus lors du précédent cycle de chimiothérapie. Enfin, le traitement de secours est à mettre en place en cas d’apparition de NVCI, en dépit d’une prophylaxie bien conduite(54). 4.2.4.1. Définition du niveau émétisant des molécules Par le passé, plusieurs classifications ont été proposées dans lesquelles les molécules étaient divisées en 3 à 5 niveaux émétisants(59). Aujourd’hui, les molécules sont classées en 4 niveaux émétisants, en fonction du pourcentage de patients souffrant de NVCI avec chaque molécule. Au-delà de 90% la molécule est hautement émétisante, entre 30 et 90% elle est modérément émétisante, entre 10 et 30% elle est faiblement émétisante et en dessous de 10% elle est très faiblement émétisante(54). Cf Tableaux 1, 2, 3 et 4. 101 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 4.2.4.2. Définition du niveau émétisant des protocoles La molécule la plus émétisante du protocole de chimiothérapie définit le niveau émétisant du protocole. En revanche, les niveaux émétisants ne s’ajoutent pas : avec deux molécules moyennement émétisantes, le protocole est moyennement émétisant. D’autre part, si le protocole se déroule sur plusieurs jours, chaque jour est considéré comme un J1(54). Selon la conférence de Perugia en 2009, la seule exception à ce protocole est le cas de l’association d’une anthracycline (doxorubicine ou épirubicine) avec le cyclophosphamide. Selon une étude sur 866 patientes atteintes de cancer du sein, l’association de cyclophosphamide et de doxorubicine s’est révélée être une chimiothérapie modérément émétisante particulièrement puissante et qui nécessite un protocole antiémétique plus agressif que la normale(59)(71). L’association d’anthracycline et de cyclophosphamide a donc été reclassée en tant que hautement émétisante par l’ASCO(49). 4.2.4.3. Prophylaxie en fonction du niveau émétisant du protocole 4.2.4.3.1. Hautement émétisant Tableau 7 : Prophylaxies recommandées pour les molécules hautement émétisantes(54) Prophylaxie primaire Prophylaxie secondaire Aprépitant Aprépitant Phase aiguë Corticoïdes Sétron Corticoïdes Sétron + Benzodiazépines 1 heure avant + Anti D2 +/- Olanzapine * Aprépitant J2-J3 Phase retardée Aprépitant J2-J3 Corticoïdes J2-J4 + Corticoïdes J2-J4 + Anti D2 + Benzodiazépines matin et soir J2-J4 +/- Olanzapine * * : hors AMM 102 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) L’administration du sétron par voie orale ou, si besoin, intraveineuse, est recommandée 15 à 60 minutes avant l’administration de la chimiothérapie(48). A J1, 60 mg de méthylprednisolone ou 80 mg de prednisone sont administrés. De J2 à J4 la dose recommandée est de 60 mg de prednisone. L’aprépitant est administré à 125 mg à J1, puis à 80 mg à J2 et J3. En cas de protocole hautement émétisant sur plusieurs jours, par exemple Bléomycine, Etoposide, Platine sur 5 jours, il faudra prendre 125 mg d’aprépitant à J1, puis 80 mg de J2 à J7(54). Quatre études ont comparé l’ajout d’aprépitant au sétron et à la dexaméthasone dans les protocoles de chimiothérapie hautement émétisants à base de cisplatine. Elles ont toutes montrées une réduction significative des vomissements aigus. Plusieurs preuves permettent aux experts d’affirmer que l’utilisation de la trithérapie pour la prévention des vomissements aigus dans les chimiothérapies hautement émétisantes est la norme minimale à recommander, ainsi que l’utilisation de la bithérapie pour la prévention des vomissements retardés pour les mêmes chimiothérapies(71). 4.2.4.3.2. Tableau 8 : Modérément émétisant Prophylaxies recommandées pour les molécules modérément émétisantes(54) Prophylaxie primaire Prophylaxie secondaire Aprépitant Phase aiguë Aprépitant Corticoïdes Corticoïdes Sétron Sétron + Benzodiazépines 1 heure avant ou Anti D2 +/- Olanzapine * Aprépitant J2-J3 Phase retardée Aprépitant J2-J3 + Corticoïdes J2-J3 +/- Olanzapine * * : hors AMM En prophylaxie primaire, pour la phase aiguë, le protocole est le même que les molécules hautement émétisantes. 103 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) En ce qui concerne la phase retardée, seul l’aprépitant est administré à J2 et J3. En cas d’échec, 60 mg de prednisone, et éventuellement l’olanzapine hors AMM, pourront être ajoutés(54). Une méta-analyse a examiné 11 études utilisant les sétrons dans les chimiothérapies modérément émétisantes. Elle a montré que le risque de vomissements aigus diminue et qu’il est réduit encore d’avantage s’ils sont associés à la dexaméthasone (71). 4.2.4.3.3. Faiblement émétisant Tableau 9 : Prophylaxies recommandées pour les molécules faiblement émétisantes(54) Prophylaxie primaire Phase aiguë Phase retardée Corticoïdes Ou Anti D2 Prophylaxie secondaire Corticoïdes + Sétron Ou Anti D2 + Corticoïdes +/- Olanzapine * / / * : hors AMM Ce protocole ne possède pas de traitement pour la phase retardée(54). Il n’y a pas d’essai recherchant le traitement antiémétique approprié pour les chimiothérapies faiblement émétisantes. La recommandation d’utiliser la dexaméthasone est basée sur les preuves des bénéfices de cette molécule dans le contrôle des NVCI dans les chimiothérapies hautement et modérément émétisantes. Une méta-analyse de 32 essais incluant 5 613 patients a démontré que la dexaméthasone était supérieure au placebo ou à l’absence de traitement pour assurer la protection contre les vomissements aigus et retardés. En résumé, bien qu’il y ait des preuves pour soutenir l’utilisation de la dexaméthasone dans la prévention des vomissements aigus dans les protocoles faiblement émétisants, les experts recommandent aux cliniciens de prendre une décision en se basant sur le type de chimiothérapie utilisée et sur les caractéristiques du patient(71). 104 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 4.2.4.3.4. Très faiblement émétisant Tableau 10 : Prophylaxies recommandées pour les molécules très faiblement émétisantes(54) Prophylaxie primaire Prophylaxie secondaire Phase aiguë / Phase retardée / Anti D2 +/- Olanzapine * / * : hors AMM En prophylaxie primaire aucun traitement ne sera utilisé. En revanche en cas d’échec, des antagonistes des récepteurs à la dopamine de type 2 et éventuellement l’olanzapine hors AMM pourront être utilisés(54). 4.2.4.3.5. Traitement de secours Dans la mise à jour de ses recommandations en 2011, l’ASCO rappelle l’importance de surveiller l’apparition ou l’évolution des symptômes tout au long du traitement(49). Dans cette partie sont regroupés tous les traitements qu’il est possible d’utiliser en cas d’échec immédiat des prophylaxies primaires et secondaires, ainsi qu’en cas de NVCI réfractaires. En cas d’échec immédiat, il est possible d’administrer une seconde injection de sétron 12 heures après la précédente, soit jusqu’à 32 mg par jour. Cette augmentation de posologie est contre-indiquée en cas de syndrome du QT congénital, car elle entraîne un risque d’allongement du QT. Il est également possible de recourir à une autre molécule que celle précédemment administrée, par exemple le sétron de première génération peut être remplacé par le palonosetron(36)(48)(54). Concernant les antagonistes des récepteurs D2, le métoclopramide à 40 à 80 mg par jour ou la métopimazine à 30 à 50 mg par jour peuvent être ajoutés(48)(54). Par voie injectable, les 2 à 4 ampoules à 50 mg d’alizapride administrées en perfusion de 15 minutes pourront être renouvelées 3 fois. Le métoclopramide peut également être 105 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) donné par voie intraveineuse, cependant l’alizapride est à préférer car il passe moins la barrière hémato-encéphalique(54). La métopimazine semble avoir un effet synergique avec les sétrons et la dexaméthasone(36). Le renouvellement de l’injection de corticoïdes est inutile, de même que l’augmentation des doses de l’aprépitant qui n’est pas recommandée. En revanche en cas de NVCI réfractaires, une nouvelle cure d’aprépitant à 80 mg pendant 2 à 3 jours peut être utile, dans le but de saturer les récepteurs NK1(36)(54). En cas de symptômes d’angoisse et si les autres traitements échouent, il est recommandé d’associer un anxiolytique comme les benzodiazépines per os ou par voie intraveineuse(36)(54). Dans tous les cas, la survenue de NVCI réfractaires devra faire réévaluer le traitement de chimiothérapie pour les cures ultérieures(36). 4.2.4.3.6. Cas particuliers 4.2.4.3.6.1. Dans la prévention et le Nausées et vomissements anticipés traitement des NVCI anticipées, les traitements comportementaux et la prévention des NVCI aigues ou retardées sont également essentiels. Les techniques de relaxation peuvent également trouver leur place(48). L’administration d’une benzodiazépine deux jours avant la chimiothérapie peut diminuer le risque. En effet, les benzodiazépines sont les seules molécules qui réduisent l’apparition de NVCI anticipés mais l’inconvénient est que leur efficacité tend à diminuer au fil des cures(48)(59). 4.2.4.3.6.2. Chimiothérapie en continue Les protocoles précédemment décrits sont adaptés pour des chimiothérapies qui ont lieu sous forme de cure, ce qui est le plus courant, mais pas pour des chimiothérapies qui ont lieu en continue. C’est le cas par exemple de la capécitabine. 106 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Les recommandations ne proposent pas d’utiliser les corticoïdes au long cours. Pour la prophylaxie primaire, 10 mg de métoclopramide pourront être pris une heure avant la chimiothérapie. Si ce n’est pas efficace, un sétron pourra être administré de façon quotidienne en prophylaxie secondaire(54). 4.2.5. Sélection des protocoles dans le logiciel Asclépios II Les protocoles de prise en charge des NVCI à actualiser sont édités à partir du logiciel de gestion du circuit des chimiothérapies Asclépios II. 4.2.5.1. Critères d’inclusion Les protocoles inclus sont ceux contenant les molécules hautement, modérément, faiblement et très faiblement émétisantes. Ces protocoles sont prescrits uniquement à des patients adultes sur l’Hôpital Nord Ouest. Seule la prophylaxie primaire est intégrée aux protocoles de chimiothérapie car les médicaments prescrits seront donnés systématiquement aux patients. Si une prophylaxie secondaire est nécessaire elle devra être prescrite au cas par cas. 4.2.5.2. Critères d’exclusion Les protocoles des catégories « validés médicalement », « non validés », « bloqués » et les protocoles d’essais cliniques n’ont pas été inclus dans ce travail. Les molécules injectables suivantes n’étaient pas utilisées dans des protocoles de chimiothérapie à l’Hôpital cyclophosphamide à une dose Nord Ouest : méchloréthamine, streptozotocine, supérieure à 1.5g/m², daunorubicine, idarubicine, clofarabine, alemtuzumab, trabectédine, témozolomide, ixabépilone, catumaxumab, éribuline, cabazitaxel, busulfan, 2-chlorodexyadénosine, ipilimumab. Concernant les médicaments per os, n’étaient pas utilisées dans des protocoles de chimiothérapie à l’Hôpital Nord Ouest les molécules suivantes : hexamethylmelamine, temozolomide, imatinib, sunitinib, everolimus, lapatinib, lenalidomide, thalidomide, chlorambucil, hydroxyurée, L-phenylalanine mustard, 6-thioguanine, methotrexate, sorafenib. 107 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 4.3. Résultats 4.3.1. Protocoles hautement émétisant Prophylaxie secondaire Prophylaxie primaire Phase aiguë Aprépitant 125mg Méthylprednisone 60mg IV Sétron : 1 ampoule renouvelable Phase retardée Aprépitant 80mg : J2-J3 Prednisone 60mg : J2-J4 Phase aiguë Aprépitant 125mg Méthylprednisone 60mg IV Sétron : 1 ampoule renouvelable + BZD 1h avant +/- Anti D2 Phase retardée Aprépitant 80mg : J2-J3 Prednisone 60mg : J2-J4 + BZD matin et soir + Anti D2 Figure 4 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules hautement émétisantes Les corticoïdes injectables sous forme de méthylprednisone ont été préférés pour le premier jour de la chimiothérapie. Les benzodiazépines (BZD) sont administrées à partir de la veille de la chimiothérapie. En pratique l’alprazolam est prescrit sur l’HNO. Concernant les anti-D2, les ampoules injectables de métoclopramide sont prescrites de façon conditionnelle dans certains protocoles à risque. Elles sont peu utilisées en pratique et c’est pourquoi il a été décidé de conserver le métoclopramide qui est au livret thérapeutique de l’HNO plutôt que de prescrire l’alizapride comme cela est recommandé par les référentiels. La première colonne du tableau ci-dessous « protocoles contenant la molécule » représente le nombre de protocoles créés dans le logiciel même si ceux-ci ne sont plus utilisés à l’heure actuelle. La seconde catégorie correspond au nombre de protocoles qui sont prescrits en pratique sur l’établissement, pour chaque molécule. La troisième colonne correspond au nombre de protocoles qui ont dû être modifiés lors de ce travail et la quatrième à ceux qui avaient déjà été mis à jour pour une autre molécule. 108 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) La dernière catégorie correspond aux protocoles qui n’avaient pas besoin d’être modifiés, parce qu’ils étaient à jour ou parce qu’ils convenaient à la pratique en l’état. Tableau 11 : Résultats du travail effectué pour les protocoles hautement émétisants Protocoles contenant la molécule Molécules Protocoles utilisés en pratique Protocoles modifiés lors de ce travail 82 31 30 Carmustine 6 1 1 Dacarbazine 5 1 Procarbazine (per os) 3 2 1 96 35 32 Cisplatine Total Protocoles déjà modifiés pour une autre molécule Protocoles non modifiés car corrects 1 1 1 1 2 Les modifications principales ont été d’ajouter l’aprépitant et d’harmoniser les doses et la durée de prise des corticoïdes. Les doses de corticoïdes n’ont pas été diminuées avec l’aprépitant comme cela est recommandé car aucun problème n’est rencontré en pratique. Dans cette catégorie 32 protocoles ont été modifiés sur 35 utilisés, soit 91,4%. 4.3.2. Protocoles modérément émétisants Prophylaxie secondaire Prophylaxie primaire Phase aiguë Aprépitant 125mg Méthylprednisone 60mg IV Sétron : 1 ampoule renouvelable Phase retardée Aprépitant 80mg : J2-J3 Phase aiguë Aprépitant 125mg Méthylprednisone 60mg IV Sétron : 1 ampoule renouvelable + BZD 1h avant +/- Anti D2 Phase retardée Aprépitant 80mg : J2-J3 + Prednisone 60mg : J2-J4 Figure 5 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules modérément émétisantes 109 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Tableau 12 : Résultats du travail effectué pour les protocoles modérément émétisants Molécules Protocoles contenant la molécule Protocoles utilisés en pratique Protocoles modifiés lors de ce travail Protocoles déjà modifiés pour une autre molécule Protocoles non modifiés car corrects Cyclophosphamide(IV)<1,5g/m² 65 37 34 1 2 Cyclophosphamide (per os) 18 8 8 / / Oxaliplatine 26 10 6 / 4 Ifosfamide 11 5 5 / / Carboplatine 57 31 29 2 / Doxorubicine 43 21 5 16 / Epirubicine 10 3 / 3 / Irinotécan 26 15 10 2 3 Azacitidine 1 1 / / 1 Bendamustine 3 3 3 / / Vinorelbine (per os) 9 3 3 / / Cytarabine (IV) ≥ 1g/m² 8 5 / 5 / 282 142 103 29 10 Total Les principales modifications effectuées sont les mêmes que pour les protocoles hautement émétisants. Parmi les 34 protocoles modifiés contenant du cyclophosphamide en voie intraveineuse à dose inférieure à 1.5g/m², 13 protocoles contiennent l’association cyclophosphamide IV et doxorubicine pour lequel la prophylaxie retardée de corticoïdes (de J2-J4 : prednisone 60 mg) a été ajoutée puisque cette association a un risque émétisant plus élevé que chaque molécule séparément(49)(59). L’aprépitant a été retiré des protocoles contenant de l’ifosfamide comme cela est recommandé par l’AFSOS, en première intention(54). 110 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Dans cette catégorie, 103 protocoles ont été modifiés sur 142 protocoles utilisés, soit 72,5%. 4.3.3. Protocoles faiblement émétisants Prophylaxie primaire Phase aiguë Méthylprednisone 60mg IV ou Anti D2 Prophylaxie secondaire Phase retardée Rien Phase aiguë Méthylprednisone 60mg IV + Sétron ou Anti D2 + Méthylprednisone Phase retardée Rien Figure 6 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules faiblement émétisantes Il a fallu, dans la majorité des cas, supprimer des prises de corticoïdes et harmoniser les doses. Certaines doses de corticoïdes ont été laissées plus élevées volontairement car les protocoles étaient mal supportés en pratique. D’autre part, comme cela est recommandé pour le docétaxel, une prise de corticoïdes a été laissée la veille de la chimiothérapie pour le docétaxel et le paclitaxel, à cause du risque important d’hypersensibilité avec ces molécules. Un protocole contenant du topotécan n’a pas été modifié car il s’agit d’un protocole de dernière ligne pratiqué chez des patients dont l’état de santé est altéré et le choix a été fait de ne pas réduire la prise en charge antiémétique. Trois protocoles contenant du trastuzumab n’ont pas été modifiés car ce sont des monothérapies et en pratique elles sont bien tolérées sans corticoïde, ils n’ont donc pas été ajoutés dans ces protocoles. Le bortézomib IV a été remplacé par le bortézomib SC car il a une biodisponibilité et une efficacité équivalente avec une meilleure tolérance(75). Les protocoles existants n’ont pas été modifiés car par voie sous cutanée il semble y avoir moins de NVCI que par voie intraveineuse. 111 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Dans cette catégorie, seulement 26 protocoles ont été modifiés sur 178 utilisés, soit 16,85%. Il se trouve que 68,5% des protocoles avaient déjà été modifiés lors des précédentes catégories. Tableau 13 : Résultats du travail effectué pour les protocoles faiblement émétisants Molécules Protocoles contenant la molécule Protocoles utilisés en pratique Protocoles modifiés lors de ce travail Protocoles déjà modifiés pour une autre molécule Protocoles non modifiés car corrects 1 1 / 1 / Docétaxel 54 26 / 13 13 Paclitaxel 43 27 8 13 6 Mitoxantrone 3 2 / / 2 Doxorubicine liposomale pégylée 8 4 3 1 / Topotécan 6 3 / 2 1 24 11 / 10 1 9 0 / / / 19 6 2 4 / Méthotrexate 9 4 2 2 / Mitomycine 5 3 3 / / Gemcitabine 23 15 / 12 3 5-fluorouracile 78 35 5 30 / Temsirolimus 1 1 1 / / Bortézomib (IV) 9 / / / / Cétuximab 15 11 2 9 / Trastuzumab 39 24 / 21 3 Panitumumab 2 2 / 1 1 Capécitabine (per os) 4 / / / / Fludarabine (per os) 5 3 / 3 / 357 178 26 122 30 Cytarabine (IV) < 1g/m² Etoposide (IV) Etoposide (per os) Pemetrexed Total 112 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 4.3.4. Protocoles très faiblement émétisants Prophylaxie secondaire Prophylaxie primaire Phase aiguë Phase aiguë Phase retardée + Anti D2 Rien Rien Phase retardée Rien Figure 7 : Prophylaxies utilisées en pratique pour les molécules très faiblement émétisantes Tableau 14 : Résultats du travail effectué pour les protocoles très faiblement émétisants Molécules Protocoles contenant la molécule Protocoles utilisés en pratique Protocoles modifiés lors de ce travail Protocoles déjà modifiés pour une autre molécule Protocoles non modifiés car corrects Bléomycine 6 3 / 3 / Fludarabine (IV) 6 2 / 2 / Vinblastine 4 2 / 1 1 Vincristine 38 24 1 23 / Vinorelbine 23 11 6 5 / Bevacizumab 37 25 4 17 4 Géfitinib (per os) 2 / / / / Erlotinib (per os) 2 / / / / Vinflunine 1 / / / / 119 67 11 51 5 Total Pour les protocoles très faiblement émétisants, peu de modifications ont été effectuées dans l’ensemble, si ce n’est de mettre à jour le grade émétisant du protocole. 113 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Dans cette catégorie, 11 protocoles ont été modifiés sur 67 utilisés, soit 16,4%. De même ici, 76,1% des protocoles utilisés avaient déjà été modifiés lors des catégories précédentes. 4.4.Conclusion L’évolution des connaissances sur la physiopathologie des vomissements ainsi que les nouvelles classes d’antiémétiques à fort index thérapeutique ont permis l’amélioration du contrôle des NVCI ces dernières années(56). En revanche les nausées restent un symptôme plus difficile à appréhender puisqu’elles ne sont pas mesurables de façon objective. Il est donc nécessaire de rester attentif au ressenti du patient(59). Bien qu’une prise en charge convenable existe déjà sur l’établissement et même avec un traitement antiémétique adapté, une certaine probabilité de nausées et vomissements aigus persiste. Par exemple, avec les chimiothérapies hautement émétisantes, environ 11 à 17% des patients auront toujours des vomissements aigus, malgré une trithérapie et environ 25 à 32% des patients auront toujours des vomissements retardés malgré une bithérapie bien menée(71). Les NVCI continuent d’altérer la qualité de vie des patients, malgré l’utilisation des traitements préventifs recommandés(76). Il est donc toujours possible d’améliorer la prise en charge des NVCI et la mise à jour des protocoles a permis de modifier 88,9% des protocoles antiémétiques sur l’HNO. Cependant une étude descriptive menée aux Etats-Unis montre que dans le domaine particulier de l’oncologie thoracique, ces recommandations ne sont pas encore entrées pleinement dans la pratique ce qui peut être extrapolé à la situation en France et entraîne une perte de chance pour les patients(77). 114 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 5. Discussion 5.1.Analyse du travail effectué Lors de ce travail, deux axes ont été définis mais les méthodologies choisies sont différentes. Pour la prise en charge des mucites, chaque professionnel du centre hospitalier prescrivait en fonction de ses connaissances personnelles. Le seul protocole utilisé sur l’établissement dans le logiciel de prescription était le mélange d’amphotéricine B et bicarbonate de sodium, quel que soit le problème de bouche, en l’absence de consensus au sein de l’établissement. Les objectifs principaux de l’uniformisation de la prise en charge étaient la prévention des mucites et le soulagement de la douleur. Ils ont été traités grâce à la réalisation d’une fiche conseil sur l’hygiène bucco-dentaire et à la pratique systématique de soins de bouche d’une part et grâce à l’utilisation d’anesthésiques locaux et d’antalgiques adaptés d’autre part. En revanche, le protocole de prise en charge des mucites de grade 0 qui s’adresse à tous les patients sous chimiothérapie quels que soient leurs facteurs de risque, n’est pas clairement qualifié de protocole préventif par l’AFSOS. Ceci fait donc intervenir le libre arbitre des praticiens d’effectuer ou non la prescription pour tous leurs patients. De plus, ces mesures de soins de bouche à faire systématiquement pendant la cure peuvent paraître contraignantes pour les patients qui, jusqu’alors, ne souffraient d’aucun symptôme de mucite. Ils sont là encore libres d’utiliser ou non cette prescription et d’en faire part ou non à leur pharmacien d’officine. Ce protocole de grade 0 demeure donc encore très théorique et il est donc important de continuer à élargir sa pratique puisqu’il s’agit du seul protocole qui ait fait la preuve de son efficacité. Pour la prise en charge des NVCI, les recommandations sont très encadrées et les traitements majoritairement efficaces. Elles ne sont donc pas complexes à mettre en œuvre, même si le nombre de protocoles existant dans le logiciel a rendu la tâche fastidieuse. Il s’avère que les protocoles créés récemment étaient à jour par rapport aux dernières recommandations. Cependant, les classifications des molécules en fonction de leur potentiel émétisant ainsi que les recommandations de prise en charge sont en constante évolution puisqu’elles sont mises à jour au fil des nouvelles publications. 115 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Les anciens protocoles n’étaient pas mis à jour à cause d’un retard dans l’actualisation des connaissances et d’un manque de réactivité. D’autre part, l’exploitation des résultats des études de NVCI est confrontée à une difficulté d’ordre physiologique car même si les nausées et les vomissements semblent apparaître et répondre aux traitements de manière identique, en réalité, ils ne sont pas dus au même mécanisme. Le vomissement peut être mesuré objectivement en un nombre d’épisodes, tandis que les nausées sont plus subjectives et requièrent différents outils de mesure. Pour les études, une réponse complète est donc définie comme « l’absence de vomissement et la non utilisation de thérapie de secours » mais celle-ci ne se réfère pas aux nausées ou à une protection complète contre ces dernières. Tout comme l’efficacité des médicaments antiémétiques est variable entre les vomissements aigus et retardés, elle peut être variable entre les nausées et les vomissements(59). Enfin, le palonosétron, recommandé par la MASCC/ESMO depuis 2009 et par l’ASCO depuis 2011, a fait son entrée sur le marché français seulement fin 2012. Selon la commission de transparence de la HAS, il a prouvé sa non-infériorité par rapport aux autres sétrons mais son utilisation n’est pas encore très répandue en France, où les habitudes de prescription peuvent être difficiles à changer. Il a donc été décidé de ne pas prescrire le palonosétron dans les protocoles de prise en charge(54)(78). Par ailleurs, un des biais de ce travail est que la prise en charge des soins de support n’a pas été évaluée avant de commencer la mise à jour des protocoles. Pour les mucites, dont la mise en place a été plus précoce, le ressenti des patients a été sondé à l’aide d’un court questionnaire. Au vu des résultats, les questions choisies ne paraissent pas les plus pertinentes et seulement 10 patients ont pu être interrogés. L’analyse est donc plus qualitative que quantitative mais les patients ont quasiment tous eu les mêmes réponses ce qui limite l’interprétation des résultats. Finalement, les informations récoltées en dehors du questionnaire ont été plus intéressantes sur la vision des traitements qu’avaient les patients et sur la prise en charge à l’officine. Ils savaient quelles étaient les conditions d’utilisation des soins de bouche et, pour eux, ils permettent d’éviter « les aphtes », car la plupart des patients ne connait pas le mot « mucite ». Ils paraissent satisfaits de la dispensation en officine mais en réalité ils n’ont pas reçu de conseils d’utilisation ni d’hygiène bucco-dentaire, ce qui pourrait donc être un point à améliorer. 116 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) La mise en place des protocoles de prévention et de traitement des NVCI n’a pas été évaluée au vu des nombreuses publications qui démontrent déjà l’efficacité des traitements. D’autre part, pour les mucites, les référentiels de l’AFSOS étaient moins encadrés que pour les NVCI. Les recommandations de la MASCC étaient souvent faites par la négative et ne concernaient que des cas très précis. Des choix ont donc dû être faits et les recommandations ont été adaptées à ce qui était possible en pratique. Les décisions prises hors référentiels ont été discutées aux réunions de concertation des soins de support avec les professionnels concernés qui ont fait part de leur expérience, tout en respectant dans la mesure du possible le livret thérapeutique de l’établissement, puis elles ont été validées par les membres du 3C. Les documents produits suite au travail sur la prise en charge des mucites et autres problèmes de bouche, réalisés en collaboration avec le service d’oncologie ambulatoire, ont également été ouverts aux patients bénéficiant d'une chimiothérapie en service d'hospitalisation conventionnelle et aux patients sous chimiothérapie hospitalisés pour un autre motif. Ceci dans le but d’harmoniser les pratiques sur l’ensemble de l’établissement. Par ailleurs, les nouveaux protocoles de prescription avaient pour cible le site principal de la communauté hospitalière de territoire (CHT), c’est-à-dire l'HNO, même si les services de gériatrie inclus n’ont pas fait l’objet d’un travail spécifique. Les pharmaciens des autres sites (Tarare et Trévoux) ont cependant été informés de la création des protocoles de soins de bouche afin d’harmoniser les pratiques au sein de la CHT. En effet, le logiciel de prescription commun facilite la standardisation de la prise en charge, ce qui renforce l’équité des soins entreprise depuis le Plan cancer 20032007(17). 5.2. Bilan sur les soins de support oncologiques Les Plans cancer ont permis le financement des soins de support et l’uniformisation des pratiques au sein des établissements, notamment avec la mesure 42 du Plan cancer 2003-2007 qui prévoit le développement des soins de support(17)(79). 117 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Ces dernières années, l’organisation de l’accès aux soins, la coordination du parcours de soins, la continuité de la prise en charge, ainsi que l’équité dans l’accès aux traitements et à l’innovation se sont améliorés(28). Actuellement, la communication sur les soins de support oncologiques est en développement. Par exemple la revue « le Moniteur des Pharmacies » a publié en septembre 2015 un cahier de formation sur l’accompagnement du patient cancéreux à l’officine qui aborde sous plusieurs angles les soins de support et les conseils associés(80). De plus, au niveau local, le journal « Le Progrès » a publié un supplément dans son édition du 10 septembre 2015 sur la prise en charge des patients cancéreux et les soins de support disponibles à l’HNO. Malgré des efforts indéniables d’information et de sensibilisation, certaines personnes affrontent encore seules les conséquences de leur traitement, en ignorant ou en n’ayant pas accès aux soins de support. Des inégalités en matière de prise en charge demeurent d’une région à l’autre, voire même d’un établissement à l’autre(2). Une étude au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Grenoble avait pour objectif d’évaluer les attentes des patients suivis en hôpital de jour d’oncologie hématologie. Les entretiens ont montré que la prise en charge des effets indésirables pouvait être optimisée par une meilleure connaissance et une meilleure utilisation des soins de support(81). Par exemple, la revue « le Moniteur des Pharmacies » a publié en 2014 un article sur les soins de support oncologiques, déclarant qu’ils étaient encore trop méconnus. En s’appuyant sur les résultats du second baromètre Soins Oncologiques de Support (SOS) de l’AFSOS, elle suggère que les professionnels de santé de proximité comme les pharmaciens pourraient participer à leur diffusion. Elle précise également que les soins de support, mis en place précocement, permettrait d’augmenter de 25% l’espérance de vie des patients, alors qu’à l’heure actuelle la mise en place est plus souvent tardive, sous la forme de soins palliatifs(82). En effet, une majorité de patients n’a jamais entendu le terme « soins de support », alors qu’à l’inverse une grande majorité connait le terme « palliatif » pour laquelle il signifie d’abord « un accompagnement des traitements anticancéreux, pour améliorer mon confort et ma qualité de vie », soit en réalité la définition des soins de support. 118 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) D’autre part, il faut attendre le stade métastatique et les soins palliatifs pour que les soins de support soient proposés systématiquement dans 78% et 85% des cas. Au moment du diagnostic et au stade adjuvant, ils ne sont pas systématiquement proposés dans plus de la moitié des cas, ce qui confirme une prise en charge tardive. Le fait que les soins de support n’interviennent qu’au stade palliatif souligne le manque d’information sur les bénéfices de ces pratiques auprès des professionnels de santé et des patients. Le pharmacien d’officine apparaît malgré tout dans les 6 intervenants ayant informé le patient des effets positifs et négatifs des soins de support, avec l’oncologue référent, l’équipe soignante du service hospitalier, le médecin traitant, l’infirmière d’annonce et une autre équipe spécifique(83). Une autre mesure du Plan cancer 2003-2007 était de former plus spécifiquement les professionnels de santé, comme les infirmières, à la prise en charge des patients atteints de cancer(17). Au niveau de l’HNO, les IDE dites « pivots » ont reçu une formation spécifique et elles interviennent au niveau du service d’oncologie ambulatoire dès la consultation d’annonce et à toutes les étapes de la chimiothérapie. Elles organisent des réunions d’information en atelier collectif et rencontrent les patients individuellement au sein du service d’oncologie ambulatoire. Ce sont des acteurs de première ligne puisque les patients peuvent les joindre directement en cas de problème de santé, ce qui permet de les orienter selon la gravité vers les urgences ou vers une consultation avec le médecin, ou simplement de leur donner des conseils. D’autre part, elles ont participé à l’élaboration du cahier de liaison qui a pour but de faciliter le lien hôpital-ville en apportant toutes les informations nécessaires aux professionnels de santé. En pratique, il s’avère que les patients utilisent ce cahier presque exclusivement à l’hôpital auprès des différents professionnels qu’ils sont amenés à rencontrer. Les acteurs de santé en ville comme le médecin traitant, l’IDE intervenant au domicile et le pharmacien d’officine n’ont malheureusement que rarement connaissance de ce cahier alors que les informations qu’il contient pourraient leur être utile. 119 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) 5.3.Coordination hôpital-ville et rôle du pharmacien d’officine Parmi les professionnels de santé avec lesquels les patients sont en contact en dehors de l’hôpital, le pharmacien d’officine apparaît en 3ème position après le médecin traitant et l’infirmière libérale, avec 56%, soit à peine plus d’un patient sur deux l’ayant désigné. Ceci peut être expliqué par le fait que ce professionnel, contrairement aux autres, se déplace rarement au domicile du patient et d’autre part, un aidant ou un membre de la famille peut venir chercher les traitements à la place du patient luimême, surtout si l’état de santé de ce dernier est détérioré. Ce fait complique la communication car les aidants ont souvent peu d’informations à fournir au pharmacien(83). Le développement des chimiothérapies orales et leur sorties progressives de la réserve hospitalière nécessitent une surveillance et un encadrement accrus(79). Leur mécanisme d’action est plus spécifique mais engendre des effets indésirables jusque là rarement rencontrés par le pharmacien en ville. Dans les officines, ce type de dispensation est aujourd’hui peu fréquent puisque les patients sont répartis dans le réseau des 22 279 officines(84). La maîtrise de cette nouvelle classe pharmaceutique ainsi que la bonne connaissance des effets indésirables associés est indispensable. Le pharmacien d’officine doit fournir un engagement de plus en plus spécifique dans sa pratique et sa formation au quotidien(79). C’est un acteur privilégié dans la prise en charge de ces patients mais pour cela la formation ainsi que la mise à jour de ses connaissances sont indispensables(85). Les équipes officinales doivent prendre le temps de se former afin d’être capable d’informer les patients et d’encadrer la dispensation des traitements. A l’heure actuelle, les formations d’éducation thérapeutique ou de Diplôme Universitaire spécialisé en oncologie par exemple sont très demandées. L’HNO propose des formations, notamment en coopération avec le Centre Léon Bérard, dans le domaine de l’oncologie aux professionnels de ville (médecins, pharmaciens, infirmières) dans le but de créer un échange avec les professionnels hospitaliers et de favoriser la coopération hôpital-ville. Travailler sur la création de formations dans le domaine de l’oncologie visant spécifiquement un public de pharmaciens d’officine est un des objectifs à court terme de l’équipe pharmaceutique de l’HNO, en collaboration avec les autres professionnels hospitaliers. Une expérience « test » a été menée avec succès sur la prise en charge du cancer du poumon en décembre 2014. 120 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) D’autre part, le premier référentiel de pharmacie d’officine publié en 2014 par la Société Française de Pharmacie Clinique (SFPC) doit être un outil de travail pour tous les pharmaciens d’officine afin d’améliorer la qualité de prise en charge des patients. La loi HPST a défini précisément le cadre de l’intervention du pharmacien d’officine et son rôle a été élargi, ce qui ouvre de grandes perspectives à l’exercice officinal. C’est dans cette optique que ce professionnel doit allier ses compétences en oncologie avec une large culture pharmaceutique lui permettant de faire appel aux médecines complémentaires telles que l’homéopathie, la phytothérapie, l’aromathérapie et l’oligothérapie. Par exemple, la revue « le Moniteur des Pharmacies » a publié en 2012 un cahier de formation sur les soins de support homéopathiques en oncologie agréée pour la formation continue des professionnels de santé. Celui-ci détaille les souches homéopathiques adaptées pour soulager des principaux effets indésirables, ainsi que celles pouvant être utilisées en prévention dans les chimiothérapies les plus courantes(86). Les pharmaciens peuvent ainsi répondre aux attentes des patients en leur proposant une prise en charge non iatrogénique des effets secondaires des traitements anticancéreux. Tous ces protocoles complémentaires personnalisés se feront idéalement en concertation avec l’équipe soignante et donc en toute transparence(79). Les nouvelles missions du pharmacien telles que précisées dans la loi HPST le revalorise en le projetant à la pointe d’un problème majeur de Santé Publique(79). Il reste cependant rémunéré sur le volume de médicaments dispensés. Quelques évolutions ont déjà eu lieu avec la mise en place des entretiens pharmaceutiques et des honoraires de dispensation et d’ordonnance complexe, mais cela n’est pas encore jugé suffisant pour compenser le temps passé à effectuer toutes les missions qui lui sont confiées. D’autre part, il est important que les patients atteints d’une pathologie chronique soient suivis dans une même pharmacie, ce qui est souvent le cas en pratique. Mais il peut arriver, en déplacement ou pour des questions de commodités que les patients aillent dans une autre pharmacie et c’est là que les Dossiers Pharmaceutiques (DP) jouent un rôle important. En effet, le DP permet à la pharmacie qui ne connait pas le patient d’avoir un historique de sa consommation médicamenteuse des 4 derniers mois. De plus, certains hôpitaux, comme c’est le cas à l’HNO, peuvent consulter le DP, ce qui s’avère très utile en cas d’hospitalisation en urgence afin de pouvoir tenir compte des traitements des patients. 121 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) L’éducation thérapeutique est également appelée à devenir un outil d’amélioration et de sécurisation de la prise en charge thérapeutique sur l’ensemble du parcours de soins, permettant d’impliquer davantage le patient dans sa prise en charge(87). La cancérologie est d’ailleurs un domaine où l’éducation thérapeutique est très importante notamment pour pouvoir proposer aux patients des thérapies de soutien et de gestion des effets indésirables. L’observance est également un paramètre essentiel pour l’efficacité du traitement et il est donc nécessaire de sensibiliser le patient au bon suivi de la prescription(47). Ceci est d’autant plus vrai avec les chimiothérapies par voie orale qui peuvent entraîner une négligence de la part des patients, car cette forme peut leur faire penser que c’est un traitement moins efficace que les perfusions. Tout comme les traitements chroniques devant être pris sur le long terme, l’observance est plus mauvaise avec les traitements par voie orale(88). Au niveau de l’HNO, des consultations pharmaceutiques, voire pluridisciplinaires quand la coopération avec l’IDE pivot est possible, sont mises en place depuis deux ans. L’information du patient est une activité partagée entre les prescripteurs, l’équipe soignante et le pharmacien. Elle doit comporter des recommandations en vu d’optimiser la prise en charge thérapeutique notamment sur le bon usage des médicaments et la gestion du risque médicamenteux(87). En effet, la bonne information ainsi que l’obtention de bons réflexes participent à une prise en charge optimale des patients. Lors d’une enquête sur les conditions de vie des patients cancéreux, 38% des répondants ont estimé que le médecin n’avait pas pris assez de temps pour répondre à leurs questions, 48% d’entre eux ont trouvé l’information trop compliquée et 33% des patients ont jugé que l’information avait été donnée en trop grande quantité(81). C’est pourquoi il est important que l’ensemble des professionnels du parcours de soins participe à l’information du patient, puisque l’étude montre que les patients ne sont pas toujours réceptifs et ils peuvent avoir des questions à propos de ce qu’il leur a été dit précédemment. Le pharmacien, en tant que spécialiste du médicament, dispose d’une position stratégique puisqu’il se trouve en fin du parcours « consultation, diagnostic, prescription, dispensation ». Ainsi, il doit participer à la prise en charge globale du patient, puisqu’il voit toutes les ordonnances de l’oncologue ou des spécialistes d’autres maladies chroniques et connait également les traitements d’automédication utilisés par le patient. De plus, il entretient une relation de confiance avec les patients, ce qui facilite le dialogue et permet au patient de se confier plus facilement. 122 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Le pharmacien est également en première ligne pour détecter l’apparition d’éventuels effets indésirables. Dans le guide de la HAS qui s’adresse aux patients hospitalisés, il est fait référence du rôle du pharmacien d’officine, ce qui montre l’omniprésence du lien hôpital-ville dans la prise en charge des patients. A l’HNO, une coopération hôpital-ville est déjà mise en place pour les instaurations de traitement anticoagulant par voie orale. Dès que possible, le service de soins contacte la pharmacie hospitalière pour demander la réalisation d’un entretien pharmaceutique auprès du patient. Après avoir fait le point sur ses connaissances, la pharmacie hospitalière contacte, avec l’accord du patient, la pharmacie qu’il a désignée pour les prévenir de l’instauration du traitement et elle leur transmet le compte rendu de ce premier entretien pharmaceutique. La pharmacie de ville est ainsi prévenue que son patient va venir chercher un nouveau traitement et aura une idée de l’état de ses connaissances à ce sujet et des points plus précis à revoir avec lui. Dans l’idéal, le pharmacien d’officine devrait avoir accès aux analyses biologiques du patient, comme cela est le cas à l’hôpital grâce au logiciel commun entre les services de soins et la pharmacie hospitalière. Malgré des progrès observables sur l’organisation des soins de support au niveau des établissements, l’information sur les pratiques et l’éducation thérapeutique des patients peuvent encore être améliorés. La perception des patients est en décalage avec celle des médecins, ce qui suggère que l’information sur les soins de support doit intervenir plusieurs fois dans le parcours de soins et être fournie par plusieurs interlocuteurs pour être assimilée par le patient. Les liens ville-hôpital sont à développer pour favoriser la continuité des soins mais pour cela, tous les acteurs doivent s’impliquer dans une organisation transversale. Actuellement, seulement deux interlocuteurs ressortent (l’oncologue référent et l’équipe soignante du service hospitalier) et peu d’intermédiaires dans des pratiques qui sont pourtant par essence pluridisciplinaires(83). 123 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) CONCLUSIONS Le nombre de cas de cancer croît chaque année, toutefois des traitements de plus en plus ciblés permettent d’augmenter l’espérance de vie des patients atteints de cancer. Les soins de support, soit « l’ensemble des soins et soutiens nécessaires aux personnes malades en dehors des traitements spécifiques », peuvent intervenir dans de nombreux domaines et il est indispensable d’en faire bénéficier tous les patients sous chimiothérapie afin d’améliorer leur qualité de vie. Parmi l’ensemble des soins de support, deux axes de travail ont été sélectionnés : la prise en charge des mucites et celles des nausées et vomissements. Actualiser les protocoles de prise en charge des nausées et vomissements, ainsi que créer une prise en charge adaptée des mucites au sein de l’établissement ont été définis comme prioritaires après discussion au sein de l’instance des 3C (Centre de Coordination en Cancérologie). Dans le cas des mucites, le maintien d’une bonne hygiène bucco-dentaire est primordial pour éviter tous les problèmes de bouche qui peuvent compliquer une chimiothérapie. Le traitement préventif des mucites repose essentiellement sur des soins de bouche. Les autres traitements, qu’ils soient curatifs ou préventifs n’ont pas fait la preuve de leur efficacité et certains peuvent même avoir des effets indésirables. C’est pourquoi très peu d’entre eux sont utilisés en pratique et de nouvelles thérapies ciblant le mécanisme des mucites seraient nécessaires. Un des objectifs de ce travail était une homogénéisation des pratiques au sein de l’établissement, qui se résumait initialement à l’utilisation de l’association amphotéricine B et bicarbonate de sodium en traitement préventif. La prévention et le traitement des nausées et vomissements reposent sur des protocoles antiémétiques bien précis qui s’appliquent aux molécules de chimiothérapie en fonction de leur potentiel émétisant. Ces médicaments antiémétiques ont prouvé leur efficacité dans de nombreuses études mais ils possèdent des effets indésirables qui peuvent être invalidant pour les patients. L’actualisation des protocoles a permis notamment de requalifier l’association d’anthracyclines et cyclophosphamide en hautement émétisante et de ne pas prescrire l’aprépitant avec l’ifosfamide en première intention à cause du risque de neurotoxicité. 124 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) Le pharmacien d’officine est un acteur central du parcours de soin grâce à sa proximité géographique et à la relation privilégiée qu’il entretient avec les patients. Son rôle d’écoute et de conseil a une place d’autant plus importante avec les patients sous chimiothérapie parfois perdus face à la somme d’informations qui leurs sont transmises, aux différents traitements qui leur sont prescrits et aux divers effets indésirables qu’ils peuvent ressentir. Ce travail ébauche le développement d’une coordination hôpital-ville qui s’inscrit dans la création d’une organisation transversale, dans le but d’améliorer la continuité des soins et donc la prise en charge des patients. 125 LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0) BIBLIOGRAPHIE 1. Krakowski I, Boureau F, Bugat R, Chassignol L, Colombat P, Copel L, et al. Pour une coordination des soins de support pour les personnes atteintes de maladies graves : proposition d’organisation dans les établissements de soins publics et privés. Oncologie. 2004 ; 6(1) : 7-15. 2. Ligue contre le cancer. Brochure Soins de support. 2009. http://www.liguecancer.net/sites/default/files/brochures/soins-de-support-2009-08.pdf consulté le 16/07/2014. 3. Groupe de travail de la DHOS. Les soins de support dans le cadre du Plan cancer. 2004. http://www.oncolie.fr/wp-content/uploads/2009/08/Rapport-DHOS-juin2004SS-dans-plan-cancer.pdf consulté le 16/07/2014. 4. 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L’objectif de ce travail est de mettre à jour les protocoles de prise en charge des mucites et nausées et vomissements chimio-induits au sein d’un centre hospitalier général. Pour cela, les référentiels inter-régionaux de l’AFSOS qui adaptent les recommandations de la MASCC à la pratique ont été les principales références utilisées. Dans un premier temps, une fiche conseil sur l’hygiène bucco-dentaire a été élaborée dans le but de prévenir les mucites et les autres problèmes de bouche. Les protocoles de prise en charge et les ordonnances de sortie hospitalières ont ensuite été adaptés en fonction des grades de mucite et des différents problèmes de bouche. Dans un second temps, les potentiels émétisants des protocoles de chimiothérapie ont été mis à jour et la prise en charge antiémétique ajustée en fonction des recommandations actuelles. La mise en place des soins de support dans les établissements hospitaliers est effective grâce aux Plans cancer, mais ils sont encore peu connus par les patients et les professionnels intervenant en ville. C’est à ce titre que la coopération hôpital-ville joue un rôle, afin de proposer les soins de support aux patients le plus précocement possible et dans le but d’améliorer la continuité des soins et donc la prise en charge des patients. MOTS CLES Soins de support Mucites Nausées et vomissements Chimiothérapie JURY Mme RIOUFOL Catherine, Maitre de Conférences des Universités et Pharmacien Hospitalier Mme COURSIER Sandra, Pharmacien Hospitalier M. ODIER Luc, Médecin Hospitalier M. DUPUY Julien, Pharmacien Officinal DATE DE SOUTENANCE Jeudi 1er octobre 2015 ADRESSE DE L’AUTEUR 133 Rue de Stalingrad – 69400 Villefranche sur Saône LAPOSTOLET (CC BY-NC-ND 2.0)