Maladie de Whipple
Nicolas Chavanis et coll.
Cas clinique
48 Chirurgie Thoracique Cardio-Vasculaire - 2009 ; 13 : 47-48
excroissances blanches mesurant 2 cm de grand axe,
appendues à la sigmoïde coronaire gauche (fi gure 2).
Après résection des sigmoïdes, l’anneau est indemne de
lésions macroscopiques, ce qui permet l’implantation
d’une prothèse mécanique de taille 25. Les suites
opératoires sont simples, le patient est extubé à la 4e
heure postopératoire, l’hémodynamique est stable sans
support pharmacologique. Les cultures bactériologiques
sur la valve restent stériles. L’anatomopathologie
décrit des lésions d’endocardite composées d’infi ltrats
macrophagiques et histiocytaires avec des granulations
cytoplasmiques PAS positives. La recherche d’ADN
bactérien par Poly-Chain-Reaction (PCR) universelle
s’avère positive et son séquençage identifi e la bactérie
Tropheryma whipplei. Ces deux éléments permettent
d’affi rmer le diagnostic de maladie de Whipple.
L’association doxycycline et hydroxychloroquine est
instaurée pour une durée de 18 mois.
2. Discussion
La maladie de Whipple, dont l’incidence est
estimée à 1/1.000.000, est une maladie encore plus
exceptionnelle dans sa forme exclusivement cardiaque
[1]. Sa description originale en 1907 par George
Whipple correspond à un syndrome de malabsorption
intestinale compliqué de diarrhée et d’amaigrissement
[2]. La maladie peut s’exprimer par des signes
neurologiques, rhumatologiques ou cardiaques [3].
Suspectée depuis les années 50, ce n’est qu’en 1992 que
son origine infectieuse est prouvée et le germe causal
identifi é, de la famille des actinomycetes, est baptisé
Tropheryma whipplei [1]. La localisation cardiaque, et
plus particulièrement les lésions d’endocardite, sont
exceptionnelles. Elles sont le plus souvent associées
à des arthralgies infl ammatoires migratrices et
symétriques [4, 5]. Avant l’avènement de la PCR, le
diagnostic de la maladie de Whipple, avec des lésions
d’endocardite, était souvent établi en post mortem
[6]. Relativement aux cas rapportés dans la littérature,
la particularité de notre observation repose sur son
caractère paucisymptomatique, sans atteinte viscérale
ou articulaire associée. Seules les images vibratiles à
l’échographie cardiaque permettent de suspecter une
étiologie infectieuse. L’indication chirurgicale est
portée sur les critères hémodynamiques et non sur le
risque infectieux proprement dit. Le diagnostic positif
repose sur l’étude histologique de la valve (coloration au
PAS) et sur la PCR universelle qui se présente comme
l’examen spécifi que. Comme l’ont montré auparavant
Aïouaz et al, la PCR universelle est essentielle car les
hémocultures sont toujours stériles [7]. L’implantation
d’une prothèse mécanique semble préférable car la
maladie de Whipple a été rapportée sur une bioprothèse
porcine [8]. Après la chirurgie, son évolution est le plus
souvent favorable lorsqu’une double antibiothérapie
associant doxycycline et hydroxychloroquine est
administrée pendant 18 mois [1].
3. Références
1. Schneider T, Moos V, Loddenkemper C, Marth T,
Fenollar F, Raoult D. Whipple’s disease: new aspects
of pathogenesis and treatment. Lancet Infect Dis.
2008;8 :179-90.
2. Whipple G.H. A hitherto undescribed disease
characterized anatomically by deposits of fat and fatty
acids in the intestinal mesenteric lymphatic tissues.
John Hopkins Hospital Bulletin 1907;18:382-91
3. Misbah SA, Mapstone NP. Whipple’s disease
revisited. J Clin Pathol. 2000;53 :750-5.
4. Jeserich M, Ihling C, Holubarsch C. Aortic valve
endocarditis with Whipple disease. Ann Intern Med.
1997;126 :920.
5. Gubler JG, Kuster M, Dutly F et al. Whipple
endocarditis without overt gastrointestinal disease:
report of four cases. Ann Intern Med. 1999;131:
112-6.
6. Marín M, Muñoz P, Sánchez M, del Rosal M,
Rodríguez-Créixems M, Bouza E; Tropheryma
whipplei infective endocarditis as the only
manifestation of Whipple’s disease. J Clin Microbiol.
2007;45 :2078-81.
7. Aïouaz H, Célard M, Puget M et al. Whipple’s
disease endocarditis: report of 5 cases and review of
the literature. Rev Med Interne. 2005;26 :784-90.
8. Dreier J, Szabados F, von Herbay A, Kröger T,
Kleesiek K. Tropheryma whipplei Infection of an
acellular porcine heart valve bioprosthesis in a patient
who did not have intestinal Whipple’s disease. J Clin
Microbiol. 2004;42 :4487-93.
Figure 2 : vue anatomique des trois sigmoïdes aortique avec
deux excroissances blanches, mesurant 2 cm de grand axe,
appendues à la sigmoïde coronaire gauche