518 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XX - n° 8 - octobre 2011
SOINS DE SUPPORT
EN ONCOLOGIE
commensales jouant ainsi un rôle de prévention des
candidoses (28).
Y a-t-il donc une réelle différence dans la prévention
de l’une ou l’autre des formes ? Tout dépend en fait
du diagnostic posé et de l’examen clinique pratiqué.
En l’absence de ce dernier, les mesures préventives
restent très semblables et mêlent mesures hygiéno-
diététiques et traitements curatifs (tels que les anti-
fongiques).
Traitement des mucites
Une prise en charge antalgique spécifique des
mucites buccales est indispensable en raison de
leur bruyante traduction clinique, alors que les
antalgiques opiacés systémiques ne sont pas d’une
efficacité majeure.
La chlorhexidine et le sucralfate ne sont pas recom-
mandés en curatif (grade IIA).
On peut utiliser des antalgiques topiques, tels que
la lidocaïne ou la morphine.
Le traitement au laser à basse énergie a également
été proposé par plusieurs équipes et est régulièrement
présenté dans les congrès internationaux avec des
résultats intéressants, notamment chez les patients
sous chimiothérapie à haute dose. Les limites du
traitement par laser sont les difficultés liées à l’acqui-
sition du matériel ainsi que la nécessité d’un temps
de formation pour les soignants devant l’utiliser.
L’existence de lésions hémorragiques peut amener le
prescripteur à proposer des bains de bouche d’acide
tranexamique, dont l’action sera topique locale.
Dans tous les cas, les mesures hygiénodiététiques
habituelles telles que bains de bouche au bicarbo-
nate, soins de bouche, brossage des dents avec une
brosse à poils souples, éviction des aliments agres-
sifs, etc., doivent être poursuivies.
Pour mémoire, les recommandations récentes de
Saint-Paul-de-Vence dans le cadre du cancer du
sein proposent, pour les mucites digestives basses,
le maintien d’une hydratation per os adéquate, la
prescription de gélules de lopéramide 4 mg, pour une
dose totale maximale de 16 mg/j. La manifestation
de ce type de mucite, sous forme de selles liquides,
devra impérativement être corrélée au transit habi-
tuel du patient (par exemple, un patient n’aura un
diagnostic de diarrhée qu’en cas de transit supérieur à
4 selles quotidiennes par rapport au débit habituel).
En cas d’échec à 48 heures, on peut administrer de
l’octréotide par voie sous-cutanée, à la dose de 100 μg
toutes les 8 heures, posologie pouvant aller jusqu’à
500 μg par prise. Cette indication n’est pas spécifiée
actuellement dans le libellé d’AMM du produit.
Traitement des candidoses
oropharyngées
Pour diminuer le risque d’émergence de résistances,
les molécules topiques sont à privilégier dès la
première ligne et dans les cas de forme localisée
oropharyngée. Les traitements azolés systémiques,
qu’ils soient administrés par voie orale ou injec-
table, sont à réserver aux cas de non-réponse aux
topiques ou d’atteinte œsophagienne ou systé-
mique (29).
Le fluconazole bénéficie d’un profil de tolérance bien
établi ; il s’agit d’un antistatique fongique, recom-
mandé dans cette indication. Il est actif contre les
levures, mais résistant à Candida krusei, et de sensi-
bilité diminuée à Candida glabrata (30).
Un essai de non-infériorité a comparé 2 galéniques
du miconazole : une tablette de 50 mg muco-
adhésive buccale (1 dose/24 h) versus un gel oral à
500 mg (4 doses/24 h) dans les cancers de la sphère
ORL. À J7, l’efficacité thérapeutique était de 56 versus
49 % respectivement (p < 0,0001), avec une obser-
vance supérieure à 80 % en faveur du comprimé
muco-adhésif, justifiant la préférence de cette galé-
nique pour le traitement local des COP (31).
Tous ces produits ont l’AMM dans l’indication du
traitement des candidoses chez le patient immuno-
déprimé.
Conclusion
La mucite et la candidose digestive, a fortiori oropha-
ryngées, sont 2 entités pathologiques distinctes, la
seconde venant souvent compliquer la première.
Pour autant, seul un examen clinique rigoureux et
complet permettra de différencier les 2 entités et
d’obtenir une prise en charge adéquate des patients.
Les formes localisées restent accessibles à des
traitements sous forme de topique local, avec des
progrès récents faits dans la galénique d’administra-
tion, notamment avec les formes muco-adhésives.
Plusieurs études sont encore en cours afin d’amé-
liorer l’efficacité des traitements, notamment en
termes de prévention. Encore faut-il rester vigilant
vis-à-vis de ces symptômes parfois secondaires en
fonction des disciplines, et s’imposer une rigueur
d’évaluation clinique des patients. Seule cette
évaluation clinique rigoureuse permettra d’évaluer
au mieux l’incidence de la mucite et de la candidose
oropharyngée. Le traitement proposé pourra alors
suivre les recommandations existantes, que chaque
équipe doit s’approprier. ■
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bibliographiques
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Références
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