et développer des rituels dans l’espoir d’en venir à bout. Elles font de gros efforts, qui
fonctionnent à contresens, faute de la connaissance de lois psychologiques.
Mieux se gérer soi-même, ce n’est pas donné à tout le monde…
D’une certaine façon, tout le monde se gère dans une certaine mesure. Depuis l’enfance,
nous apprenons à adopter des comportements qui devraient, à moyen ou à long terme,
nous préserver de souffrances ou nous apporter davantage de bonheur qu’un plaisir
immédiat. C’est ce que fait l’étudiant qui renonce à des sorties pour étudier en vue
d’obtenir un diplôme. Parmi les choses à faire pour améliorer notre vie quotidien, c’est
apprendre à trouver davantage de plaisirs dans une série d’activités routinières. D’où
l’importance de ce courant qu’on appelle la pleine conscience ou « mindfulness ».
Un exemple ?
D’apprendre à petit déjeuner avec un réel plaisir. Quand on pense à tout ce que des gens
ont dû faire pour le beurre qui est dans notre assiette, par exemple, c’est fantastique.
Nous avons intérêt à devenir davantage conscients de tout ce que nous offre notre
civilisation.
Pour les enfants, le rôle des parents est capital à ce niveau…
L’être humain se distingue des animaux par ses capacités d’apprendre et d’anticiper à long
terme. Il peut user de ces capacités pour mieux visualiser des conséquences
dommageables ou agréables de ses propres comporments, et ainsi se motiver à changer
méthodiquement. Cela s’apprend dans l’enfance, notamment par imitation des réactions
des adultes.
En 1992 vous avez écrit « La gestion de soi », aujourd’hui place à « La
nouvelle gestion de soi ». Qu’est-ce qui a changé en vingt ans ?
Le livre a été entièrement réécrit et simplifié pour atteindre un public plus large. En vingt
ans, la psychologie scientifique a fait pas mal de progrès. J’ai évoqué l’exemple des
processus qui conduisent aux obsessions et compulsions. Un autre exemple : des
recherches ont montré que la célèbre méthode Coué pouvait faire plus de tort que de bien
pour certaines personnes. De bonnes auto-instructions ont des règles précises.
L’ouvrage est résolument d’orientation scientifique. Je sais que science peut être très
dangereuse, mais elle nous donne des outils efficaces, en psychologie comme en
médecine. Pour la psychologie, beaucoup d’idées fécondes se trouvent déjà chez des
penseurs de l’antiquité : Bouddha, Epictète, Sénèque et tant d’autres. Ce que fait la
psychologie scientifique, c’est trier et prolonger ce qui marche le mieux. Karl Popper, un
des plus grands épistémologue et philosophe du XXe siècle, disait que le probl ème de la
science c’est « que laisser de côté et que garder ? » C’est ce que la psychanalyse ne fait
pas. Les disciples de Freud répètent, commentent et ajoutent. Ils n’utilisent pas de
poubelle.
L’impact des nouvelles technologies ?
On peut prévoir que les cyberdépendances vont devenir un problème redoutable pour les
enfants et les étudiants. J’ai eu l’occasion de voir plusieurs étudiants rater leurs études à
cause d’une cyberdépendance : chats, images pornographiques ou tout simplement la
curiosité. Nous sommes tous fort tentés, une fois que nous sommes sur Google d’aller voir
à gauche à droite. Moi, je mets une minuterie pour me gérer.