Billet économique Le 29 juin 2016 Brexit : Quelles conséquences pour le Canada? Comme dans la plus grande partie du monde, les conséquences économiques directes sur le Canada seront probablement limitées. Toutefois, Frances Donald, économiste principale, Gestion d’actifs Manuvie, observe que l’impact issu des circuits financiers, des réactions des banques centrales et de l’incertitude politique généralisée à court et à long terme pourrait être plus important. L’exposition directe du Canada à l’économie britannique est très limitée, et le Brexit ne devrait pas avoir beaucoup de répercussions économiques directes sur la croissance canadienne. 1 1 • Le Royaume-Uni ne représente que 3 % des exportations canadiennes, et l’Europe, plus près de 7 % . La forte dépréciation de la monnaie britannique risque certes de nuire à cette proportion de 3 %, mais elle ne devrait certainement pas éradiquer tous les échanges commerciaux entre les deux pays. Le gouvernement fédéral du Canada a clairement indiqué qu’il avait l’intention d’approfondir ses relations commerciales tant avec le Royaume-Uni qu’avec l’Union européenne. Il convient de noter que l’Accord économique et commercial global (AECG) qui doit entrer en vigueur en 2017 continuera de s’appliquer avec l’Union européenne, mais qu’un accord distinct devra probablement être négocié avec le RoyaumeUni. La part du Royaume-Uni dans les échanges commerciaux varie toutefois d’une province à l’autre. Terre-Neuve-et-Labrador et l’Ontario font davantage de commerce avec le Royaume-Uni que le Québec, la Colombie-Britannique et l’Alberta, mais les exportations de Terre-Neuve-et-Labrador à destination du Royaume-Uni sont aux trois quarts composées de pétrole, et celles de l’Ontario portent dans une même 2 proportion sur l’or. . • Au lendemain du vote sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, le S&P/TSX s’en est beaucoup mieux sorti que la plupart des grands marchés boursiers développés. Ce résultat est logique, dans la mesure où les entreprises canadiennes n’ont qu’une présence directe limitée au Royaume-Uni : les entreprises du S&P/TSX ne tirent qu’environ 3 % de leur chiffre d’affaires du Royaume-Uni, selon 3 Marchés des capitaux CIBC . Cela correspond à environ 19 actions. En outre, la ruée vers les valeurs refuges favorise actuellement les prix de l’or et les producteurs aurifères, qui représentent 8 % de l’indice 4 S&P/TSX . • L’exposition financière du Canada au Royaume-Uni est légèrement plus élevée. Selon les données officielles, plus de 9 % des investissements directs du Canada à l’étranger se dirigent vers le Royaume-Uni5 et ce dernier est la deuxième destination la plus importante des placements de portefeuille canadiens6. Mais, dans un contexte plus large, ces placements ne représentent que 1 % des placements en actifs financiers canadiens et, combinés aux investissements directs étrangers, ils ne constituent que 0,5 % des actifs de bilan nationaux2. Statistique Canada : Importations et exportations de biens sur la base de la balance des paiements, RBC Marchés des Capitaux, Will Brexit Send Waves Across the Atlantic?, 24 juin 2016 3 Bloomberg : Canadian Stocks and Dollar Fall, Bonds Rally After Brexit vote, 24 juin 2016 4 Gestion d’actifs Manuvie et Bloomberg, 28 juin 2016. 5 Gouvernement du Canada : Bilan des investissements internationaux du Canada, fin 2015 6 Gestion d'actifs Manuvie, Statistique Canada, fin 2015 2 Brexit : Quelles conséquences pour le Canada? Le 29 juin 2016 En bref, le Canada entretient des liens économiques directs limités avec le Royaume-Uni et peut selon nous vraisemblablement faire face à un vent de changement dans ses relations commerciales et aux fluctuations des taux de change. Mais cela ne signifie pas pour autant que le Canada s’en sortira sans dommages : les conséquences les plus importantes du Brexit pour le Canada seront indirectes et porteront essentiellement sur les activités commerciales canadiennes. 1. Le risque exogène le plus important pour la croissance canadienne est lié à la croissance des États-Unis; toute menace sur la croissance déjà fragile des États-Unis pourrait donc avoir des répercussions sur le Canada. Le rééquilibrage du Canada dépend en grande partie de la capacité des activités commerciales américaines à redécoller de manière substantielle : les trois quarts des exportations canadiennes sont 1 toujours destinés aux États-Unis . Aucun autre développement international n’a autant d’importance pour le Canada que l’accélération de la demande américaine, et la détérioration de la confiance des entreprises et des circuits financiers à la suite de l’issue du référendum britannique pourrait arrêter l’économie des États-Unis dans son élan à court terme. L’appréciation généralisée du dollar américain a notamment pesé lourdement sur le secteur manufacturier du pays au cours de la dernière année, et a eu des effets directs sur l’activité manufacturière et commerciale canadienne. 7 Le dollar canadien a perdu un peu de terrain face au billet vert à la suite du résultat du référendum , ce qui pourrait stimuler la demande d’exportations canadiennes. Pourtant, comme le gouverneur de la Banque du Canada Stephen Poloz l’a un jour bien décrit, le taux de change est le « glaçage sur le 8 gâteau » , la demande américaine constituant le gâteau lui-même. Je pense en outre qu’il est peu probable que le dollar canadien perde encore beaucoup de terrain face au dollar américain en raison du Brexit, compte tenu du peu de liens économiques directs du Canada et des implications expansionnistes à long terme pour la Réserve fédérale. D’ailleurs, le dollar canadien est l’une des monnaies les plus 9 performantes face au billet vert depuis le référendum, derrière le yen et le franc suisse . 2. Le Brexit ajoutera encore à la longue liste de raisons susceptibles d’inciter la Banque du Canada à maintenir l’orientation expansionniste de ses taux d’intérêt. Jusqu’ici, les cours reflètent une augmentation de la probabilité de baisse des taux de la banque centrale, même si une telle diminution reste loin de l’hypothèse de base du marché. Selon moi, il en faudrait beaucoup pour une baisse des taux canadiens, compte tenu notamment des craintes relatives aux finances des ménages. Toutefois, une forte contraction de l’économie hors énergie, alimentée par un ralentissement marqué de la croissance américaine, pourrait pousser le gouverneur Poloz à répondre à la menace la plus immédiate. Il est toutefois plus vraisemblable qu’au lieu de baisser les taux, la Banque du Canada conservera une orientation expansionniste largement supérieure aux attentes et ce jusqu’en 2018. Le ton plus conciliant de la Réserve fédérale, les nouvelles liquidités injectées par les banques centrales à travers le monde et l’effet de relance modéré de la dépréciation du dollar canadien (autant d’éléments liés au résultat du référendum) donneront en effet à la Banque du Canada plus de latitude pour le faire. 7 Banque du Canada : Taux de change, au 28 juin 2016 Bloomberg : Poloz Calls Low Canada Dollar Icing on Cake for Exporters, 29 octobre 2014 9 Gestion d’actifs Manuvie, Bloomberg, au 28 juin 2016 8 Brexit : Quelles conséquences pour le Canada? Le 29 juin 2016 9 3. Les prix du pétrole ont baissé à la suite du référendum et, si la tendance devait se poursuivre, le secteur canadien de l’énergie pourrait s’en ressentir. Toutefois, comme nous avons déjà eu l’occasion de le signaler, les baisses d’investissements ont pour l’essentiel déjà été réalisées, et il ne reste plus guère de solutions faciles, ou même intermédiaires, à mettre en œuvre. L’effet le plus important de la baisse des prix du pétrole au cours des prochaines semaines résidera probablement dans le renversement du regain de confiance à l’égard de l’industrie pétrolière. 4. Parmi les principaux points soulevés par notre économiste en chef Megan Greene dans la foulée du référendum figurait l’idée que le Brexit constitue une menace existentielle non seulement pour le Royaume-Uni, mais aussi pour le reste de l’Union européenne. Certains politiciens néerlandais et français ont déjà indiqué qu’ils souhaitaient tenir leurs propres référendums. Il est probable que les mouvements souverainistes au Canada suivront les réactions des marchés et des politiciens à travers le monde, notamment s’ils choisissent de respecter le résultat du vote. Le premier ministre du Québec Philippe Couillard, qui n’appartient pas à un parti souverainiste, avait indiqué très clairement qu’il espérait que le Royaume-Uni choisirait de rester dans l’Union européenne, mais il conviendra de surveiller la diffusion de ce type de mouvements dans leurs fiefs traditionnels. Brexit : Quelles conséquences pour le Canada? Le 29 juin 2016 Investir comporte des risques; il est donc toujours possible de perdre de l’argent en investissant dans des valeurs mobilières. Il est important de tenir compte de ces renseignements en ce qui a trait à sa propre tolérance du risque et à ses propres objectifs de placement. Avant d’agir sur la foi des renseignements fournis dans le présent document, prenez le temps d’évaluer votre situation personnelle et de consulter un spécialiste, au besoin. Les événements qui marquent l’actualité politique et économique à l’international ou qui sont liés à la conservation de l’énergie, à la réussite de projets d’exploration, aux prix des produits de base, aux taxes et impôts et à d’autres règlements gouvernementaux peuvent avoir d’importantes répercussions sur le secteur des ressources naturelles. Les turbulences mondiales ont déjà provoqué de la volatilité anormalement élevée sur les marchés des capitaux, au pays et à l’étranger, et pourraient continuer de le faire. Le risque de change s’entend du risque que la fluctuation des taux de change ait un effet négatif sur la valeur des placements détenus dans un fonds. 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