“Intelligence Marketing”, par Jean-Paul Aimetti et Jean-Michel Raicovitch
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Préface de Maurice Lévy, Président du Directoire de Publicis Groupe :
« Cet ouvrage est différent, et par conséquent précieux. Différent car, loin de proposer un cours
de marketing – les manuels de qualité sont heureusement nombreux –, il s’attache à identifier
au travers de situations concrètes les lignes de crête d’un univers en profonde mutation. Des
expériences vécues par des professionnels, des annonceurs, des clients. En cela, il excite notre
curiosité et réveille notre goût d’apprendre, de savoir…
Nul ne sera surpris que j’aborde de front le numérique. En effet, à l’instar de la publicité et de la
communication, le marketing doit aujourd’hui relever le formidable défi de l’ère digitale. Et
vite, car la révolution numérique en cours intervient à un rythme fulgurant.
Elle est affaire de chiffres bien sûr – un milliard d’utilisateurs quotidiens pour Google, plus de 10
milliards d’appareils connectés à Internet –, mais elle va bien au-delà. Elle pose en réalité trois
grands défis au marketing.
Le premier défi est de tenir compte de ce qui se passe dans la société. Logique hiérarchique
centrée sur la production et les achats dans les années 1960, lecture matricielle en termes de
style de vie dans les années 1980, approche plus individualisée et personnalisée depuis les années
1990 ; pour aboutir enfin à la révolution copernicienne qui place pour de bon le client au centre
du modèle. Le comportement du consommateur change plus radicalement encore à l’ère digitale,
sous la double impulsion de l’instantanéité et du partage. Il change plus vite que les réflexes des
marketeurs, d’où la nécessité de rester en contact interactif avec les consommateurs. Pour ne pas
l’avoir mis en œuvre, Gap en a souffert. Car, pour la première fois, le consommateur a voix au
chapitre et le fait clairement savoir : lorsque Gap a voulu changer de logo, les consommateurs,
via Internet, ont tout bonnement refusé. La relation client n’est donc plus verticale, elle se fait
coopérative et partagée. Et nous ne sommes pas au bout de nos enseignements : regardez ce qui
se passe en Afrique – au Ghana, au Nigéria ou en Afrique du Sud –, où il y a peu de téléphones
fixes ; l’utilisation des outils sur le mobile est en avance sur nous. Le consommateur réinvente,
adapte et plébiscite des usages et le marketing se doit de rester une puissante caisse de
résonance et d’adapter son approche pour coller aux nouveaux comportements des
consommateurs.
Le deuxième défi concerne le périmètre même du marketing. Sous l’influence du numérique, les
frontières entre les anciens métiers deviennent de plus en plus floues. On parle souvent de
blurring, du verbe « brouiller » en anglais. Il devient ainsi fréquent d’interagir avec la direction
des services d’information en même temps qu’avec la direction du marketing. De même, la
frontière entre le marketing et les ventes tend à s’estomper : la révélation marketing d’antan, ou
l’effet d’annonce, laisse la place à des programmes qui, plusieurs mois en amont du lancement,
tissent une discussion avec les consommateurs. Cette conversation va jusqu’à la vente grâce à
l’e-commerce, offrant ainsi aux annonceurs de nouvelles voies de distribution et, qui sait,
demain une plus grande maîtrise de la vente directe en s’affranchissant des relais. Le rôle du
marketing est par conséquent plus amont, ses attributions sont plus larges, et l’intégration des
différentes compétences devient un vrai challenge. Ce qui n’est bien sûr pas sans enjeux
humains: il s’agit de faire cohabiter des systèmes différents de rémunération tandis que le
personnel spécialisé est convoité à la fois par les agences, les plateformes et les annonceurs.
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