Christine Gensanne FICHE ÉLÈVE 9 Méthode : Remédiation pour la dissertation Deux problèmes majeurs se posent généralement dans les copies de dissertation : en-tête, le hors sujet, suivi de peu par le manque de qualité technique de l’argument, et de sa structuration dans le plan argumentatif. En conséquence, nous mettrons un coup de projecteur sur ces deux difficultés, dans l’optique de les limiter, en proposant à l’élève un mode opératoire simple, qu’il peut utiliser en autonomie. Support : le professeur sélectionne une liste d’une dizaine de libellés de sujets de dissertation (tirés des annales du Bac Français), qui présentent les cinq types de plans qui peuvent se rencontrer dans une dissertation. Fiche 9.1. « Améliorer l’analyse des libellés de sujets de dissertation ». Définitions utiles : • Le mot « libellé » désigne la totalité des mots qui composent un sujet de dissertation. • « Analyser un libellé de sujet » signifie le « décomposer » pour expliquer et définir très en détail le sens de chacun de ses mots (même ceux qui peuvent sembler a priori sans importance), et les rapports qu’ils entretiennent. Ceci afin de comprendre parfaitement le sens du sujet : donc d’éviter le hors sujet. Qu’est-ce qu’une analyse réussie ? (cf. application en fin de fiche) C’est une quintuple analyse, dans laquelle il faut identifier et donner le sens précis des éléments suivants : • • • • • Les consignes de travail (elles sont en général situées dans la partie qu’on retrouve à l’identique dans tous les sujets de dissertation : voir exemples au dos) = Que dois-je faire techniquement ? Quel exercice ? Combien de choses dois-je faire ? [numéroter tout ce qui doit être fait] Le thème du sujet (= de quoi traite le sujet ? Que signifie-t-il en général ? Que signifie chacun de ses termes ?) La présence explicite (= clairement indiquée) ou implicite (= non dite : à déduire logiquement) : o de termes spécialisés de littérature : il faut les définir précisément (cf. glossaire des manuels scolaires) o d’une citation d’auteur : il faut expliquer en détail son sens, et la reformuler (c’est-àdire la réexpliquer plus clairement : on utilisera obligatoirement cette reformulation dans l’introduction de la dissertation) Les articulations logiques (Y a-t-il des synonymes des mots de liaison de base : MAIS OU ET DONC OR NI CAR dans le libellé ? Si oui : quelle est leur utilité pour le sens du libellé ?) Le type de plan demandé par le sujet, parmi les cinq types de plans de dissertation demandés au bac (voir ci-après) : plan dialectique / plan double / plan à thèse / plan-liste / plan dirigé. © NRP Hors-série lycée, novembre 2011 Christine Gensanne Mode d’action pratique pour l’analyse : • • Recopiez le sujet en entier au centre d’une feuille A4 horizontale ; Choisissez un code-couleur (cinq couleurs différentes correspondant aux cinq parties de l’analyse) pour souligner tous les mots du libellé de façon classée ; • Annotez chaque mot et groupe de mots soulignés à l’aide de flèches, en inscrivant vos remarques au bout de ces flèches, autour du libellé ; • Vérifiez que tous les mots du libellé ont été soulignés et expliqués (on ne peut commencer à travailler que lorsque tout a été réfléchi : s’il reste encore des mots non soulignés ; on termine l’analyse) • Synthétisez l’ensemble de votre analyse pour dégager l’essentiel (ce travail s’appelle « la reformulation » : vous l’utiliserez dans l’introduction de votre dissertation, avant de dégager votre problématique) Les cinq types de plans qu’on peut rencontrer dans une dissertation de type bac, et comment les traiter : Nom et forme du plan Plan dialectique • Thèse • Antithèse = proposer des arguments qui diffèrent de ceux choisis pour la thèse • Synthèse = proposer une troisième voie inédite pour pouvoir dépasser l’opposition Plan double • Thèse = idée isolée par le libellé : à bien détailler Comment le reconnaître ? Le libellé pose une question qui contient une idée unique, à laquelle on peut répondre par oui ou par non. Deux exemples tirés d’annales du bac « Moi, je veux me fâcher et ne veux point entendre » dit Alceste dans le Misanthrope. L’expression du conflit au théâtre peut-elle se passer de mots ? Vous répondrez à cette question en vous appuyant sur le corpus, sur les œuvres que vous avez lues ou étudiées en classe, ainsi que sur les spectacles que vous avez pu voir. Un écrivain peut-il, par ses œuvres, contribuer à l’amélioration de la société ? Vous répondrez en prenant appui sur les textes du corpus, sur ceux que vous avez étudiés en cours et ceux que vous connaissez personnellement. Le libellé contient un mot de type « seul », « seulement », ou un de ses synonymes («ne… que » par ex.) La seule fonction du personnage de roman est-elle de refléter ma société dans laquelle il vit ? Vous répondrez en vous appuyant sur les textes du corpus et sur d’autres œuvres que vous avez lues ou étudiées. © NRP Hors-série lycée, novembre 2011 Christine Gensanne • Antithèse = liste de toutes les autres idées liées Plan à thèse • Premier groupe d’arguments pour la thèse • Second groupe d’arguments pour la thèse • Troisième groupe d’arguments pour la thèse Plan liste • • • Premier groupe d’éléments de la liste Second groupe d’éléments de la liste Troisième groupe d’éléments de la liste Plan dirigé Ces plans sont généralement en deux parties • Première partie obligatoire • Seconde partie obligatoire Le libellé affirme, et ne questionne pas. Il contient un verbe à caractère injonctif, et ne nous laisse pas choisir notre réponse : il impose de ne traiter qu’un aspect d’un sujet. Le libellé contient des formules comme « en quoi ? » ; « dans quelle mesure ? » ou un mot au pluriel précédé du pronom « quels, quelles » ou de son synonyme. Les titres de deux ou trois grandes parties de la dissertation sont déjà imposés par le libellé. Nous ne sommes pas libres de développer autre chose. Lit-on un récit autobiographique seulement par intérêt pour la personne dont on raconte l’histoire ? Vous répondrez dans un développement composé en vous fondant sur les textes du corpus et sur les œuvres que vous avez lues ou étudiées. « Eh bien, dérangez-vous quelques heures, venez avec nous, incrédules, et nous ferons voir de vos yeux, toucher de vos mains, les plaies […] » (extrait du texte de Victor Hugo). Vous montrerez en quoi l’écriture littéraire sous toutes ses formes est particulièrement apte à dénoncer les problèmes de société. Vous vous demanderez dans quelle mesure la poésie permet le dépassement d’une épreuve. Vous vous appuierez sur les textes du corpus, ceux que vous avez étudiés en classe, et sur vos lectures personnelles. Lorsqu’on aborde des notions abstraites ou morales, quelles stratégies vous semblent les plus efficaces pour emporter l’adhésion du lecteur ? Vous répondrez à cette question en un développement composé, en prenant appui sur les textes du corpus, sur ceux que vous avez étudiés en classe et sur vos lectures personnelles. ( ici, il faudra faire une liste de différentes stratégies) Dans quelle mesure le spectateur est-il partie prenante dans la représentation théâtrale ? Vous répondrez en faisant référence aux textes du corpus, aux œuvres étudiées en classe, et à celles que vous avez vues ou lues. ( ici, il faudra faire une liste de différentes raisons) le théâtre permet-il une Comment représentation du pouvoir, et dans quel but ? Un personnage de roman peut-il se concevoir sans souffrance ni désillusion ? Vous répondrez à cette question dans un développement construit et illustré d’exemples tirés des textes du corpus, de ceux que vous avez étudiés en classe et de vos lectures personnelles. © NRP Hors-série lycée, novembre 2011 Christine Gensanne Plus un libellé de sujet est long, plus le risque de hors sujet est élevé Application de la méthode d’analyse sur un sujet d’annales : Type de plan : Plan double Code couleur : • Consignes de travail • Thème du sujet • Termes spécialisés de littérature (pas de citation ; pas d’articulation) Cf. définition dans un glossaire de littérature Ont-ils autre chose que des mots à leur disposition ? (paratexte ; didascalies ; jeux de scène ; costume, maquillage, musique, décor, etc.) Il s’agit du personnage de théâtre seulement : le définir (types théâtraux, Synonyme de rôles théâtraux) « seulement » Où les personnages de théâtre s’expriment-ils avec des mots ? (réplique, tirade, monologue = que disent-ils dans ces types des discours ? Par exemple, monologue = expression des sentiments intimes ; tirade aussi, mais dans une moindre mesure) Comment s’expriment-ils ? (rimes, vers, langage soutenu…) Dire ce qu’ils ressentent profondément : amour, colère, haine... (identifier les sentiments présents dans le corpus) Au théâtre, les personnages ne disposent-ils que des mots pour exprimer leurs sentiments ? Vous justifierez votre réponse dans un développement composé en vous appuyant sur les textes du corpus, sur vos lectures personnelles, ainsi que sur les œuvres étudiées en classe. Il faut relire les parties des textes théâtraux du corpus où des sentiments s’expriment : on identifiera quel type de sentiment apparaît On mobilise les pièces de théâtre qu’on a lues pour son plaisir dans le passé Il faut répondre à la question posée, en prouvant tout ce qu’on écrira avec de brefs extraits de textes théâtraux Il faut faire un plan bien construit, dans les règles : problématique ; idées principales, idées secondaires ; preuves des I.S. ; mots de liaison ; introductions et conclusions des parties ; introduction et conclusion générales (elles-mêmes bâties dans les règles) Souvenez-vous des textes théâtraux que vous avez étudiés dans l’année, pour les réutiliser Tout ce qu’on dit doit être prouvé avec des extraits de théâtre (brefs) © NRP Hors-série lycée, novembre 2011 Christine Gensanne Fiche 9.2. « Améliorer l’argument ». Le candidat au baccalauréat trouvera ci-après des rappels techniques sur la fabrication d’un argument, et un guide de brouillon pour la dissertation, qui est un exercice basé sur un plan argumentatif. On remarque qu’un plan argumentatif est en fait une liste classée d’arguments, tous bâtis sur le même plan en trois parties (Résumé + Explication + Preuve). Réaliser une argumentation, c’est donc reproduire mécaniquement ces trois parties dans chaque argument, à raison d’environ trois arguments par grande partie. Grille de critères la réussite technique de l’argument L’argument est un paragraphe de 10 à 15 lignes entièrement rédigé, qui débute par un alinéa et commence par un mot de liaison (ce dernier correspond au rapport logique entretenu avec l’argument précédent : addition, opposition, explication, alternative, déduction). L’argument développe une seule et même idée, laquelle démontre la problématique, et aussi l’idée principale de la partie. (sinon : hors sujet) L’argument forme un ensemble logique cohérent, composé de trois parties qui se complètent utilement : • Le RESUME DE TOUT L’ARGUMENT (maximum une phrase entièrement rédigée) : tout le paragraphe qui va suivre ne parle que de cette idée exprimée à son début (qui elle-même développe l’idée principale correspondante, et la problématique). Situé dans la première phrase du paragraphe argumentatif (ou « argument »), ce résumé est très clair. • Son EXPLICATION : on explique ce résumé en le développant clairement, on dit ce que l’idée qu’on vient de résumer signifie, et pourquoi elle valide la problématique (en quelques lignes). • Sa PREUVE : on prouve le résumé et l’explication qui précèdent, de la façon la plus convaincante possible. La preuve est plus longue que l’explication, mais reste brève. C’est un extrait d’un texte littéraire de préférence (ou la référence à d’autres arts, si le sujet le demande : peinture, sculpture, musique, film, BD…) : les extraits choisis doivent provenir de sources variées (ne reprenez pas toujours le même exemple, ni un exemple tiré de la même œuvre). Ce peut être aussi simplement une référence littéraire bien expliquée. La preuve est présentée (références auteur/œuvre) et analysée (c’est-à-dire qu’on dit clairement en quoi elle prouve le début de l’argument) © NRP Hors-série lycée, novembre 2011 Christine Gensanne Application : création d’un argument pour la problématique du sujet analysé plus haut Problématique du sujet : (synthèse de l’analyse du sujet) « Le personnage théâtral est-il vraiment limité à ses seules paroles pour faire passer les sentiments que l’auteur souhaite le voir manifester ? » Idée principale n°2 : « Si la parole est un vecteur important pour exprimer des sentiments au théâtre, elle est loin d’être la seule à pouvoir le faire : le personnage théâtral dispose d’un nombre important d’autres ressources, qui sont de l’ordre du paratexte et du décor » Argument 2.2. (10 lignes) RESUME Le maquillage présente aussi une importance énorme dans l’expression des sentiments au théâtre : il amplifie l’effet des paroles. EXPLICATION En effet, les metteurs en scène cherchent souvent à harmoniser l’apparence du personnage avec sa personnalité. Le maquillage est là pour accentuer le sens du texte déclamé : ainsi, un long monologue qui exprimerait un sentiment de tristesse infinie sera renforcé si l’acteur a un maquillage pâle, une bouche tombante, des cernes sous les yeux. PREUVE Dans le théâtre asiatique (Nô, Kabuki japonais), le maquillage-type est essentiel pour comprendre le sens de la pièce : il clarifie immédiatement les traits de caractère du personnage et les sentiments qu’il éprouve. Chaque couleur et chaque dessin du maquillage a une signification précise que le spectateur asiatique sait décoder. Par exemple le maquillage Kabuki, appelé keshō, composé de lignes stylisées et de couleurs vives, amplifie les expressions du visage. Le rouge, le bleu ou le violet véhiculent respectivement la passion, les sentiments négatifs, la noblesse. © NRP Hors-série lycée, novembre 2011