LE MARCHÉ – DERNIÈRE HEURE Page 2
d’introduire une législation pertinente et efficace. Certains Américains vous diront que leur système est le meilleur au monde et
qu’il faut changer lentement pour s’assurer que le gouvernement ne prenne pas de raccourci. Nous ne sommes pas d’accord.
Avec le temps, nous saurons si le « supercomité » bipartisan, créé dans le cadre de cette entente sur la dette, s’accordera pour
mettre en place des politiques fiscales et budgétaires qui permettront enfin de s’attaquer au déficit budgétaire américain.
Alors que les négociations s’achevaient, Standard & Poor’s a averti le gouvernement américain qu’il devait réduire ses dépenses
de 4 billions de dollars au cours des 10 prochaines années afin d’éviter un abaissement de sa cote de crédit. Puisque les
politiciens ont produit une entente qui en a fait la moitié, S&P a abaissé la cote de crédit des États-Unis de AAA à AA+ vendredi
soir dernier. Cet évènement devrait avoir plus d’impact sur le marché obligataire que sur la Bourse, mais la portée symbolique de
la toute première décote de l’histoire de la plus importante économie du monde a effrayé une majorité des investisseurs. Selon
nous, il s’agit plus d’un réflexe pavlovien que d’un mouvement raisonnablement fondé. Bien que les marchés boursiers se
ressentiront de la décote des États-Unis au cours des prochains jours, nous ne croyons pas que cet évènement justifie à lui seul
de vendre des actions. Il est important de souligner que si S&P a abaissé la cote des États-Unis, les autres agences, telles que
Fitch et Moody's, ne l'ont pas fait. Ce n'est pas pour dire qu'elles ne le feront pas, mais il faut se rappeler que S&P est l'une de
plusieurs agences de notation et qu'elle n'avait franchement pas le choix d'abaisser la cote de la dette américaine, après avoir
menacé de le faire. La colère des marchés a plus à voir avec le moment de la décote que la décote elle-même, car plusieurs
investisseurs croyaient que S&P attendrait de voir ce que le « supercomité » proposerait en guise de réductions des dépenses
plus tard cette année. La politique américaine étant ce qu’elle est, il y a fort à parier que peu de progrès seront réalisés pour
équilibrer les finances publiques d’ici aux prochaines élections présidentielles de 2012.
La crise de la dette et l’incertitude économique en Europe
Pendant que certains observateurs digèrent la décote des États-Unis, l’Europe nous apparaît comme une menace beaucoup plus
importante pour les investisseurs boursiers. Vous êtes déjà au courant pour la Grèce, l’Irlande et le Portugal; au cours des
dernières semaines, l’Italie et l’Espagne, deux économies d’envergure se sont rajoutées à la liste des pays en difficulté. L’entente
sur la dette grecque conclue voilà quelques semaines n’est pas une solution à la crise de la dette souveraine européenne et
pourrait bien s’avérer une solution temporaire pour la Grèce elle-même. En fait, cette entente qui comprend, entre autres, le
nouveau fonds européen de stabilité financière doit être approuvée par les 17 pays de la zone euro avant que la Banque centrale
européenne puisse se servir de ce fonds. Mais, l’Europe demeure notre principale préoccupation parce que la crise de la dette et
les mesures d’austérité requises pour l’enrayer replongeront ces pays dans la récession. Assurément, tant que la croissance se
poursuivra en Allemagne et en France, les effets d’une récession dans les autres pays seront minimisés. Mais si la crise de la
dette européenne engouffre tous les pays de la région dans une récession, les craintes au sujet de la croissance économique des
États-Unis se raviveront. Nous supposons que des efforts seront déployés à l’échelle mondiale pour éviter que la crise de la dette
européenne ne déborde, mais le défaut de paiement de n’importe quel pays pourrait provoquer un effet domino dans cette région,
les institutions financières seraient touchées et nous ferions face de nouveau à une crise de liquidité mondiale. Encore une fois,
nous croyons que les banques centrales du monde entier devraient pouvoir éviter ce scénario, mais celui-ci est reflété dans les
marchés boursiers à titre de « scénario catastrophe ». Soyons clairs : la mise en œuvre d’une solution à la crise en Europe ne se
mesurera pas en semaines ou en mois, mais en années. Il va sans dire que les marchés sont mécontents de l’incertitude qui
accompagne une perspective à si long terme.
Ça va si mal que ça?
Nous dirons bien franchement qu’il serait facile d’adopter une perspective des marchés négative, après avoir été bombardés de
manchettes pour le moins inquiétantes au cours des dernières semaines. Cependant, nous croyons qu’il est important de vous
rappeler quelques-uns des éléments positifs à retenir à propos du marché actuellement. D’abord, si les gouvernements trouvent
difficile d’équilibrer leurs finances, les sociétés n’ont pas ce problème; leur bilan demeure sain et leurs résultats financiers ont fait
preuve de résilience au cours de cette reprise économique. Ensuite, il existe toujours plusieurs valeurs défensives offrant un très
bon dividende au Canada, pour les clients qui cherchent un revenu. Au-delà des frontières du Canada, il est important de rappeler
aux investisseurs que même en resserrant les taux d'intérêt depuis l'automne dernier, la Chine continue d'afficher une croissance
de son PIB très respectable, tout en essayant de freiner l'inflation. S’il n’y a aucune garantie que cette croissance durera, nous
croyons que la Chine gère efficacement son économie, ce qui lui permettra d’éviter qu’elle ne fléchisse subitement. En d’autres
mots, la Chine gère sa croissance de manière à réaliser un atterrissage en douceur plutôt qu’un écrasement, ce qui est bon pour
tout le monde, y compris le marché canadien. Par contre, force est d’admettre que si les difficultés en Europe et aux États-Unis
persistent, il sera de plus en plus difficile pour la Chine de maintenir son taux de croissance actuel.