en pratique
La découverte d’un corps étranger intranasal est une éven-
tualité qui concerne quasi exclusivement le jeune en-
fant. Le diagnostic est immédiat lorsque l’enfant est en âge
de s’exprimer ou lorsque ses parents ou son entourage sont
témoins de la scène. Il peut aussi être retardé si le geste est
passé inaperçu ou s’il a été dissimulé par l’enfant. Il faut sa-
voir y penser devant certains signes trompeurs [voir enca-
dré]. Les objets incriminés sont aussi variés que l’imagination
de nos jeunes patients. Ils peuvent aller du plus petit (minus-
cule perle en plastique) au plus volumineux (bâton de craie).
PRINCIPE
L’ablation d’un corps étranger intranasal est un geste relative-
ment simple à réaliser à condition de disposer du matériel né-
cessaire : pince coudée adaptée à la morphologie de l’enfant et
à la nature du corps étranger, miroir de Clar (ou à défaut oto-
scope ou petite lampe) et spéculum nasal. Les principales diffi-
cultés sont liées à des tentatives improvisées et hasardeuses
d’extraction réalisées par les parents ou par l’enfant lui-même.
Elles risquent de compliquer le geste en refoulant le corps étran-
ger plus profondément dans la cavité nasale.
TECHNIQUE
L’extraction est réalisée par voie antérieure sous contrôle vi-
suel permanent. La qualité de l’éclairage est un élément déter-
minant pour pouvoir localiser le corps étranger et pour per-
mettre de le saisir efficacement à l’aide de la pince coudée. On
prendra soin de ne pas fragmenter accidentellement un objet
en matière friable (craie) pour éviter une inhalation accidentelle
au cours d’un mouvement d’inspiration forcée.
CHOIX DE L’ANESTHÉSIQUE
L’anesthésie locale n’est pas systématique. Si elle s’avère indis-
pensable, le produit de choix est la lidocaïne-naphazoline en so-
lution à 5 % pour application locale (Xylocaïne®naphazolinée).
Cet anesthésique ne doit cependant pas être utilisé chez l’en-
fant de moins de 6 ans en raison du risque de convulsion lié à
sa concentration élevée en lidocaïne. Chez l’enfant plus grand
et chez l’adulte, l’interrogatoire préalable des parents élimi-
nera une contre-indication éventuelle à son emploi (allergie,
épilepsie non contrôlée, porphyrie).
PRÉCAUTIONS
>Si l’incident est récent et si l’enfant est en âge de se moucher,
il est fréquent qu’un effort de mouchage violent suffise à désen-
claver le corps étranger et à l’expulser ou à l’amener au niveau
du vestibule narinaire où son extraction ne posera plus aucun
problème.
>L’ablation instrumentale d’un corps étranger intranasal n’est
possible que sur un enfant parfaitement immobile. Il faut donc
prendre le temps de rassurer le jeune patient et dédramatiser
la situation en expliquant ce que l’on va faire. Si l’agitation
persiste, il faudra faire appel à un aide ou à la collaboration
des parents pour assurer une contention efficace.
numéro 2241 vendredi 21 mars 2003
Ablation d’un corps étranger intranasal
PRATIQUE EN IMAGES
DRÉRIC TORRES, médecin urgentiste, SDIS 13
Rhinite purulente
unilatérale :
un signe d’appel
trompeur
Le plus souvent d’origine infectieuse, la rhinite cor-
respond à une inflammation de la muqueuse des
fosses nasales. Elle se traduit par une obstruction
nasale et une rhinorrhée aqueuse, séro-muqueuse
ou purulente qui s’extériorise soit en avant par
les narines, soit en arrière par les choanes vers le
pharynx. Cette rhinorrhée peut évoluer de façon
aiguë ou se chroniciser. Si le traitement d’une rhi-
nite purulente ne pose habituellement pas de pro-
blème particulier, le caractère unilatéral ou l’absence
d’amélioration sous traitement doivent mettre le
praticien en alerte et lui faire soupçonner une obs-
truction nasale passée inaperçue : complication
d’une pathologie dentaire chez l’adulte, cause tumo-
rale chez le sujet âgé, ou surtout corps étranger
intranasal chez l’enfant.
FMC
Un outil très utile
Certains corps étrangers
sont plus difficiles à ex-
traire que d’autres. C’est
notamment le cas des
objets très volumineux
enfoncés profondément
(craie, caillou) et dont la
section est telle qu’il est
impossible de les saisir
avec une pince coudée.
Dans cette situation, il
est possible d’utiliser un
trombone pour se confectionner un petit outil très
pratique. Pour cela, on déplie cet ustensile et on cou-
de à angle droit les deux à trois derniers millimètres
de son extrémité distale. On conserve la forme de par-
tie proximale de l’objet de manière à améliorer la prise
en main de l’outil et à permettre la réalisation de mou-
vements de rotation le long de son grand axe. On uti-
lise ce crochet en l’introduisant tangentiellement le
long de la surface latérale du corps étranger. À peine
son extrémité a-t-elle franchi l’obstacle qu’il ne reste
plus qu’à réaliser une rotation de 45 degrés pour
l’accrocher et permettre de le ramener prudemment
vers l’orifice de la narine.
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É. TORRES
Les outils
de base :
pince coudée
et rhinoscope.
L’ablation
instrumentale
d’un corps étran-
ger intranasal
n’est possible
que sur un enfant
parfaitement
immobile.
É. TORRES