&² Question de Question de Octobre 2008 Françoise Caudron Quelques lignes d'intro A Verlaine, une collaboration fructueuse s’est mise en place entre les Equipes Populaires et le Service de médiation de dettes pour sortir les personnes de l’isolement et créer des solidarités locales. L'auteure Françoise Caudron est animatrice communautaire aux Equipes Populaires Edité par les Equipes Populaires Rue de Gembloux, 48 à 5002 St Servais 081/73.40.86 -- [email protected] Texte disponible sur le site www.e-p.be Atelier Consommation de Verlaine : Créer du lien social Organisé avec le service rural de médiation de dettes de Hesbaye, cet atelier est destiné aux personnes concernées par le surendettement mais aussi à toute autre personne intéressée. Si le noyau de base de cet atelier est composé d’une dizaine de personnes, de nombreuses autres personnes le rejoignent suivant le thème abordé. Le surendettement est une réalité qui traverse toutes les couches de la population et qui résulte souvent d’un cumul de plusieurs difficultés (perte d’emploi, problèmes de santé, séparation, décès, …) Les rencontres mensuelles sont annoncées par affichage dans les différents CPAS de la région et par voie de presse locale. Un taxi social est mis à disposition des participants et du covoiturage est organisé. Lors de la première rencontre, après avoir brisé la glace entre les personnes présentes, un “brainstorming” sur la consommation a permis de cibler les questions les plus importantes que chacun souhaitait approfondir. Après quelques mois de fonctionnement, de nombreux thèmes ont déjà pu être abordés : l’analyse des techniques de marketing des publicitaires, les dangers des crédits faciles, la construction et la gestion du budget d’un ménage, la libéralisation du marché de l’énergie, l’environnement, … Les participants ont déjà tiré plusieurs constats : L’isolement est une réalité en milieu rural : peu de lieux de rencontres existent et la mobilité fait souvent défaut. Chacun est fort isolé dans ses problèmes. L’atelier permet à chacun de prendre conscience qu’il n’est pas seul. Echanger sur sa réalité de vie permet souvent de relativiser et reprendre un peu confiance en soi. Les participants, d’ailleurs très demandeurs de ces rencontres, ne manquent pas de proposer des sujets à aborder, des animations à faire, des personnes à inviter. C’est dans l’interactivité que le programme se construit petit à petit à partir de toutes les suggestions du groupe. La vie devient de plus en plus complexe pour tous. Suite notamment à la libéralisation des services publics, chacun est amené à faire des choix que ce soit au niveau de la téléphonie, de l’électricité, du gaz, … Ces choix ne sont pas simples car l’information donnée aux consommateurs n’est pas complète, pas comparable et pas égale pour tous. Le manque d’accès à Internet ne facilite pas les choses : comment faire ses choix lorsque vous n’avez pas accès ou que vous ne maîtrisez pas internet ? L’accès à la santé n’est pas évident pour tous. La médecine à deux vitesses est malheureusement une réalité. Certains participants nous ont témoigné de leur difficulté à accéder à des soins pourtant indispensables. Il arrive par exemple qu’un chirurgien exige que le patient prenne une chambre à un lit pour pouvoir demander des suppléments d’honoraires. Ou encore qu’un spécialiste double le prix de sa consultation pour la simple raison que le rendez-vous était urgent et incontournable. L’accès à un logement décent n’est pas chose aisée pour nombre de ménages. L’envolée des prix de l’immobilier empêche pour beaucoup l’accès à la propriété. En milieu rural, les biens mis en location sont plutôt rares. Le coût du loyer représente souvent une part importante du budget du ménage. L’état du logement est parfois très vétuste aussi, provoquant des problèmes de santé. - 2 - Quand le pouvoir d’achat est en baisse, les fins de mois sont difficiles et les ménages doivent parfois faire des choix cornéliens : se chauffer ou se soigner ? Dans ces conditions de vie, comment répondre aux demandes des enfants ? Comment apprendre à dire non sans engendrer un sentiment de frustration et de honte ? La publicité tapageuse contribue évidemment à la frénésie de la consommation de notre société. Les tentations sont nombreuses, les techniques de marketing souvent agressives et beaucoup se laissent abuser par des crédits à la consommation comme les ouvertures de crédit. Le crédit est devenu pour certains un moyen d’accéder à des petits biens de consommation. Petit à petit, le groupe prend conscience que nous vivons dans une société du “tout à la consommation». Si nous sommes victimes de ce système, nous pouvons aussi y apporter un regard critique et essayer ensemble, collectivement de réagir et de faire des choix face à ce que la société tente de nous imposer. Au fil des rencontres, on sent la volonté de comprendre les mécanismes qui régissent les différents aspects de notre vie quotidienne. La révolte s’exprime et les participants manifestent une volonté de réagir. Que ce soit par rapport à la publicité, par rapport aux techniques de marketing, par rapport à l’énergie, les gens veulent comprendre ce qui se passe, se mettre debout, faire entendre leur voix et ne pas se contenter d’être un des machines à consommer. Le groupe a eu l’occasion d’inviter une personne responsable d’un système d’échange local (SEL) (voir encadré). L’exemple de ces systèmes d’échange locaux illustre bien la volonté des citoyens de sortir de cette société qui ne jure que par l’”avoir”. Organiser la solidarité entre les membres, participer à un système d’échange local, interpeller les autorités communales sur certaines questions, améliorer l’accueil et les compétences des assistants sociaux des CPAS, démarrer un atelier théâtre pour pouvoir exprimer et partager les découvertes et constats du groupe, créer du lien social dans les quartiers par la création d’un potager collectif, … les idées du groupe ne manquent pas. L’enthousiasme de certains, d’ailleurs très communicatif, est un véritable rempart contre l’individualisme. Partager des savoirs et des savoir-faire Le principe de système d’échange local (SEL) est d’organiser l’entraide entre tous les citoyens d’un même quartier, d’une même région par l’échange réciproque de services ponctuels. Le service reçu ne doit pas être rendu à la personne l’ayant donné mais à n’importe quel membre du réseau d’échange. Ce genre de réseau ne se substitue ni au CPAS ni aux corps de métier. Un carreleur ne pourra pas offrir ses services de carreleur. Par contre, il pourra donner quelques conseils à une personne qui souhaite carreler elle-même sa cuisine. Chacun peut être à tour de rôle bénéficiaire et offreur de services. Ce système n’entretient pas l’assistanat puisqu’il invite chacun à mettre ses compétences au service des autres. Par exemple, Martine va proposer à Claire de l’aider à préparer sa fête familiale, Claire va garder les enfants de Julien quand celui-ci doit se rendre à l’hôpital, Julien va donner quelques cours de guitare au fils de Patricia,... L’idée sous-jacente est bien que nous avons tous quelque chose à offrir à d’autres. - 3 - Le service rural de médiation de dettes En collaboration avec les CPAS de Verlaine, Crisnée, Burdinne, Wasseige, Fexhe-leHaut-Clocher, Donceel et Geer, le Service Rural de Médiation de Dettes de Hesbaye s'adresse aux personnes qui sont confrontées à d'énormes difficultés financières et qui ne peuvent plus faire face à leurs créanciers. L'objectif du service est d'éviter que les familles ne se marginalisent en permettant aux personnes surendettées de rembourser leurs dettes tout en vivant décemment. La médiation de dettes est une aide individuelle qui comporte les aspects suivants : Faire le point et éclaircir la situation financière et sociale de l’intéressé ; Répertorier l’ensemble de ses obligations financières et établir des priorités ; Etablir avec lui un budget équilibré reprenant ses ressources, ses obligations et ses besoins ; Prendre contact avec les différents créanciers et négocier avec eux un plan de remboursement en concordance avec le budget établi ; Le conseiller dans le cadre de la loi du 05.07.1998 relative au règlement collectif de dettes ; Soutenir et informer l’intéressé dans les démarches à entreprendre. Outre la médiation de dette, le service propose aussi un accompagnement et un volet de prévention qui fait l’objet du présent article. Ce volet préventif est possible grâce au partenariat entre les Equipes Populaires et le dit service. Mais il n’aurait pas été possible sans la volonté et la motivation des assistantes sociales du service. Soutenues par leur hiérarchie, celles-ci font preuve de qualités humaines indispensables lorsque l’on travaille avec des personnes en situation de précarité : refus de stigmatisation, refus de jugement, travail dans l’écoute et le respect mutuel. Les ateliers mensuels sont d’ailleurs ouverts à toute personne intéressée et nombreux sont ceux qui participent sans être passé au préalable par le service de médiation de dettes. - 4 -