Le génocide arménien
Il y a 90 ans, le 24 avril 1915, l’arrestation de plus de 600
notables et intellectuels arméniens, lors d’une rafle
ordonnée à Constantinople par les nationalistes Jeunes-
Turcs alors au gouvernement dans l’Empire Ottoman,
scellait le destin des Arméniens d’Anatolie. Accusés de
complot au profit des Russes, alors que la Turquie venait
de s’engager dans la Première Guerre Mondiale aux côtés
de l’Allemagne et de l’Autriche-Hongrie, plus d’un million
d’Arméniens ont été victimes entre 1915 et 1916 d’une
politique de déportations et de massacres.
Pour comprendre l’origine, la nature et les enjeux du génocide
arménien, Laurence Jourdan s’est attachée à remonter jusqu’aux massacres commis contre les
Arméniens pendant les décennies précédentes et à analyser le contexte géopolitique qui a
précédé, et suivi le déroulement du génocide.
Quand, en 1915, le triumvirat Jeune-Turc au pouvoir commence à organiser les déportations,
l’immobilisme des puissances étrangères et le contexte de la Première Guerre Mondiale
contribuent à ce que les nationalistes Jeunes-Turcs du Comité Union et Progrès puissent agir
en toute impunité.
Trois ans plus tard, le 30 octobre 1918, alors que la Turquie vaincue a signé l’armistice avec
les alliés, les principaux responsables des massacres et des déportations, sont jugés par une
cour martiale. En juillet 1919, le verdict du procès des Unionistes qui attribue une liste de
crimes « àla personne morale de l’Association Union et Progrès », se conclue par la condam-
nation à mort « in absentia », d’Enver, Djemal, Talaat Pacha et autres responsables qui ont pris
la fuite.
Le Traité de Sèvres, signé le 10 août 1920 et qui reconnaît l’existence d’une Arménie indépen-
dante n’est jamais ratifié. En Juillet 1923, il est annulé par le Traité de Lausanne signé avec la
nouvelle République Turque de Mustapha Kemal et qui enterre la question arménienne.
Tout au long du film, les rapports et textes des diplomates occidentaux en poste dans l’Empire
Ottoman au moment des faits (Walter Rössler, consul allemand en poste à Alep ; Leslie Davis,
consul américain en poste à Kharpout ; le Baron Wangenheim, ambassadeur d’Allemagne à
Constantinople ; Henri Morgenthau, ambassadeur américain à Constantinople et Wolf Metternich,
successeur de Wangenheim à Constantinople) nous éclairent de manière remarquable. Ils
déroulent le fil de l’histoire de ce génocide : les méthodes utilisées, les axes de déportations.
Ces récits se conjuguent aux témoignages des survivants du génocide qui ont été recueillis
depuis plusieurs années par la diaspora arménienne et aux archives des autorités ottomanes qui
nous retranscrivent les motivations et les mesures prises par le Triumvirat d’Enver, Talaat et
Djemal Pacha.
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…En présence de ces
nouveaux crimes de la
Turquie contrel’humanité
et la civilisation, les
gouvernements alliés font
savoir publiquement à la
Sublime Porte, qu’ils
tiendront personnellement
pour responsables desdits
crimes tous les membres
du Gouvernement Ottoman
ainsi que ceux de ses
agents qui se trouveraient
impliqués dans de pareils
massacres…
Déclaration des
Gouvernements de l’Entente
adressée au pouvoir Impérial
le 24 mai 1915