Portrait des SESSAD : une exploitation de l’enquête ES 20101 par Thibault MARMONT, conseiller technique du CREAI Champagne-Ardenne Carole PEINTRE, responsable des Etudes à l’ANCREAI Ø L’enquête auprès des Etablissements et Services (Enquête ES) Initiée en 1982, cette enquête nationale a couvert d’emblée tous les établissements et services non seulement dans le champ du handicap mais aussi de la Protection de l’enfance et de l’hébergement social (de type CHRS). L’objectif était de disposer de données de cadrage sur l’activité, le personnel et les bénéficiaires des principaux équipements sociaux et médico-sociaux. Depuis 2001, on distingue d’une part, l’enquête ES « handicap », tous les 4 ans, qui interroge les établissements et services médico-sociaux en faveur des enfants et des adultes en situation de handicap et d’autre part l’enquête ES « difficulté sociale » qui se renouvelle aussi régulièrement (2004, 2008, 2012). Pour les SESSAD, le remplissage du questionnaire demande beaucoup de temps, car il nécessite d’y reporter des informations individuelles pour chaque professionnel en fonction et pour chaque enfant présent (au 31 décembre 2010 concernant la présente enquête). Ce recueil individuel permet des traitements statistiques assez élaborés avec de nombreux croisements possibles et fournit donc des informations très précieuses pour la conduite des politiques publiques, en l’absence d’autres systèmes d’informations opérationnels sur notre secteur d’activité. L’enquête ES2010 est en mesure de dire très précisément : - combien d’enfants sont accompagnés par les SESSAD (en le déclinant par région ou département), - quelle est leur situation en termes de scolarité (en fonction par exemple de leur âge ou des déficiences principales et associées qu’ils présentent), - ou encore combien d’entre eux présentent un autisme ou d’autres troubles envahissants du développement (TED). Il existe également huit indicateurs « d’autonomie », huit variables qui permettent de discriminer des profils d’enfants en fonction de la nature ou de l’importance des limitations rencontrées dans la réalisation de ces huit activités. Aussi, l’enquête ES s’avère être une enquête très riche, exploitée par divers acteurs, du national au local : DREES, ARS, Conseils généraux, organismes gestionnaires d’établissements et services… Bien entendu l’enquête ES ne remplace pas complètement le système d’information tant attendu au sein de la MDPH, il manque la connaissance des enfants et adultes en situation de handicap qui ne sont pas utilisatrices de ces établissements et services médico-sociaux. Ainsi, cette enquête ne dit rien : 1 - des personnes en situation de handicap dites « à domicile sans solution », - de celles accueillies dans un établissement médico-social belge (l’enquête ES n’est pas envoyé à ces structures même si certaines sont réservées aux seuls ressortissants français), Cet article correspond à la conférence des auteurs dans le cadre des Journées Nationales SESSAD 2014 à Besançon et sera également publié dans les Actes diffusés par les Cahiers de l’Actif. B . I . d u C R E A I B o u r g o g n e – Dé l é g a t i o n F r a n c h e - C o mt é n ° 3 4 5 M a r s - Av r i l 2 0 1 5 5 Portrait des SESSAD : une exploitation de l’enquête ES 2010 par Thibault MARMONT et Carole PEINTRE - des personnes vivant en permanence à domicile et suivies uniquement par des paramédicaux en libéral, des Services de Soins Infirmiers A Domicile (SSIAD) ou des Services d’Aide à Domicile (SAD). Donc, il y a encore des « vides statistiques » que l’enquête ES n’est pas à même de combler compte tenu de son champ. Cependant, l’enquête ES donne à connaître le profil d’environ 150 000 enfants et 300 000 adultes en situation de handicap. Ø L’équipement territorial et la capacité des services Au niveau national, la majeure partie de l’offre en SESSAD est dédiée aux publics présentant une déficience intellectuelle (42% des places agréées) ou un trouble du comportement (15%). Viennent ensuite, par ordre décroissant, les SESSAD pour les jeunes présentant une déficience motrice (13% des places), une déficience auditive (11%), visuelle (8%), un autisme ou autre trouble envahissant du développement (TED, 4%), un trouble sévère du langage (TSL, 3%), un polyhandicap (2%), un traumatisme crânien ou une autre lésion cérébrale acquise (0,2%). Depuis 2006, toutes les catégories de SESSAD, à l’exception des services pour enfants polyhandicapés ont vu leur capacité augmenter. Les évolutions les plus marquées concernent les SESSAD pour enfants avec TSL, avec TED et avec trouble du comportement. Tous les départements du territoire national bénéficient d’une offre en SESSAD : la moyenne est de 3 places pour 1000 jeunes âgés de 0 à 20 ans. Malgré le développement de l’offre, des disparités territoriales existent toujours (fig. 1). La lecture des taux d’équipement ne peut cependant s’effectuer qu’en prenant certaines précautions : elle ne doit effectivement pas conduire à présupposer que tous les départements présentent les mêmes besoins. Figure 1. Taux d'équipement départementaux2 En grande majorité, les SESSAD sont agréés pour moins de 30 places. La configuration la plus fréquente est celle d’un SESSAD agréé pour 11 à 20 accompagnements. Les services de moins de 10 places, ou disposant d’une capacité de 21 à 30 places sont également habituels. Entre 2006 et 2010, aucune tendance significative d’augmentation de la taille des SESSAD n’est observable. Le redéploiement des places d’IME, conjugué à la dynamique de création de places en SESSAD, conduit certes à renforcer l’équipement existant, mais permet donc également la naissance de petits services. 2 La version colorisée des tableaux et cartes est accessible sur le site internet du CREAI Bourgogne (rubrique BI) B . I . d u C R E A I B o u r g o g n e – Dé l é g a t i o n F r a n c h e - C o mt é n ° 3 4 5 M a r s - Av r i l 2 0 1 5 6 Portrait des SESSAD : une exploitation de l’enquête ES 2010 par Thibault MARMONT et Carole PEINTRE Ø Les personnels des SESSAD L’enquête ES recense 23 587 professionnels présents dans les SESSAD, au 31 décembre 2010. Les personnels de direction (directeurs, médecins directeurs, directeurs adjoints) représentent à cette date 4% du total des équivalents temps plein (ETP). Les cadres (chefs de service, cadre infirmier, personnel éducatif ayant une fonction d’encadrement) sont légèrement plus présents, avec 6% des ETP. Les catégories de personnels les mieux représentées sont sans surprise les personnels éducatifs avec 31% des ETP (éducateurs spécialisés le plus souvent, mais aussi quelques moniteurs éducateurs et éducateurs de jeunes enfants) et les personnels paramédicaux (21% des ETP). Figure 2. Les catégories professionnelles des SESSAD Toutes les catégories professionnelles ne sont cependant pas présentes dans tous les services. L’étude des plateaux techniques montre que les trois quarts des SESSAD disposent d’une direction. Quatre sur dix disposent à la fois d’une direction (y compris adjointe) et d’un chef de service. A l’opposé, près d’un service sur dix est déclaré sans aucun encadrement. Contreintuitivement, les personnels éducatifs ne sont pas présents dans tous les services : certains SESSAD sensoriels, ainsi que quelques services dédiés au handicap moteur, ne les intègrent pas dans leur équipe. Ainsi, la catégorie de personnel la plus systématique dans le plateau technique d’un SESSAD est le psychologue (présente dans 96% des services). Les psychomotriciens sont également déclarés présents dans près de quatre services sur cinq. A l’inverse, les orthophonistes et, plus encore, les ergothérapeutes et kinésithérapeutes sont plus rares (un service sur deux, sur cinq et sur six respectivement). Les médecins sont présents dans 74% des services. Cette proportion tombe à 49% si l’on prend uniquement en considération les pédopsychiatres. Les personnels enseignants sont présents dans un tiers des SESSAD environ. Il s’agit le plus souvent d’enseignants spécialisés, mais les équipes comptent également des enseignants non spécialisés, des éducateurs scolaires, et quelques éducateurs sportifs. Ø La population accompagnée Selon ES, 44 554 jeunes étaient accompagnés dans 1 421 SESSAD agréés au 31 décembre 2010 (contre 34 500 places et 1 176 services en 2006). Le public, aux deux tiers masculin, est en règle générale âgé de 3 à 17 ans. Les très jeunes enfants, comme les jeunes adultes, restent rares dans les SESSAD (2% et 4% respectivement). Les jeunes adultes relevant de l’amendement Creton représentent 0,3% du public accompagné. Au 31 décembre 2010, la moyenne d’âge et la médiane se situent à 11 ans. B . I . d u C R E A I B o u r g o g n e – Dé l é g a t i o n F r a n c h e - C o mt é n ° 3 4 5 M a r s - Av r i l 2 0 1 5 7 Portrait des SESSAD : une exploitation de l’enquête ES 2010 par Thibault MARMONT et Carole PEINTRE La distribution de la clientèle des SESSAD n’a pas changé depuis 2006. Un tiers présente une déficience intellectuelle principale, un quart présente un trouble du comportement. La population avec autisme ou TED se repartit de façon homogène entre ces deux catégories. Néanmoins, 9% des jeunes avec TED sont déclarés sans déficience associée. La population des jeunes avec autisme ou TED s’élève à 2 869 personnes dans ES, soit 6,4% des effectifs totaux. Il est cependant probable que ce résultat soit sous-estimé, compte tenu des difficultés et des débats connus pour établir des diagnostics d’autisme ou de psychoses infantiles. Les jeunes avec déficience motrice et avec déficience auditive représentent respectivement un usager sur dix. Les enfants et adolescents déficients visuels sont à peine moins nombreux. Les publics les moins représentés dans les SESSAD sont ainsi les enfants et adolescents présentant des troubles sévères du langage, un polyhandicap ou un plurihandicap (fig. 3). Figure 3. Déficiences principales des jeunes accompagnés D’après les données disponibles, deux usagers sur trois ne présentent pas de déficience associée. La tendance était la même dans l’enquête ES 2006. Lorsqu’elles existent, les associations de déficiences les plus fréquentes sont la déficience intellectuelle et les troubles du comportement (40% des cas), la déficience motrice et une autre déficience (15% des cas), la déficience intellectuelle et un trouble du langage (14% des cas). Ø Eléments de parcours En s’intéressant aux jeunes qui ont quitté leur SESSAD au cours de l’année 2010 (soit environ 10 000 jeunes au niveau national), il est possible d’obtenir des renseignements sur le parcours des usagers. Bien que la sortie s’effectue en moyenne vers 13 ans, des départs du SESSAD ont lieu à tous les âges. La longévité des accompagnements est étroitement corrélée au type de déficience. Les jeunes avec déficience motrice, visuelle, ou (surtout) auditive présentent des parcours plus longs, supérieurs à 5 ans dans plus d’un tiers des cas. Chez les jeunes avec déficience auditive, 20% des parcours ont duré plus de neuf années. A l’inverse, la moitié des jeunes avec trouble du comportement sortis au cours de l’année 2010 ont fréquenté le SESSAD pendant moins de deux ans (et, pour le quart d’entre eux, l’accompagnement aura duré moins d’un an). Enfin, les parcours très courts (inférieurs à six mois) sont beaucoup plus fréquents chez les enfants polyhandicapés. L’orientation à la sortie présente deux configurations majeures : la cessation de tout accompagnement médico-social dans un tiers des cas, ou au contraire son renforcement, avec une orientation vers un établissement pour enfants et adolescents (un tiers des situations B . I . d u C R E A I B o u r g o g n e – Dé l é g a t i o n F r a n c h e - C o mt é n ° 3 4 5 M a r s - Av r i l 2 0 1 5 8 Portrait des SESSAD : une exploitation de l’enquête ES 2010 par Thibault MARMONT et Carole PEINTRE également). Il arrive aussi qu’un autre SESSAD prenne le relais de l’accompagnement (12% des jeunes sont concernés). La figure n°4 présente les profils des enfants concernés selon les cinq orientations principales – orientations qui cumulent près de 90% des effectifs sortis au cours de l’année 2010. Figure 4. Parcours et profils des sortants Orientation à la sortie du SESSAD Age moyen Déficiences sur-représentées Scolarité après la sortie du SESSAD Etablissement médicosocial (34% des sortants) 11 ans Polyhandicap Plurihandicap Déficience intellectuelle Unité d’enseignement Enseignement avec un autre SESSAD (12% des sortants) 12 ans Déficience auditive Déficience visuelle Scolarité ordinaire à temps complet ; Clis ; Ulis Enseignement sans SESSAD (33% des sortants) 13 ans Troubles sévères du langage Troubles du comportement Scolarité ordinaire à temps complet ; Segpa Milieu ordinaire de travail (5% des sortants) 19 ans Déficience auditive Déficience visuelle / 13,5 ans Polyhandicap Déficience motrice Troubles du comportement Non scolarisés Domicile, sans solution (3% des sortants) Ø La scolarité des jeunes accompagnés par les SESSAD Seuls 5% des enfants accompagnés par un SESSAD ne bénéficient d’aucune scolarisation, et il s’agit avant tout des plus jeunes et des plus âgés d’entre eux. La grande majorité de ces jeunes fréquentent l’école à temps complet (surtout dans le 1er degré), une CLIS ou ULIS. Cumulées, ces situations représentent 80% des effectifs globaux. Figure 5. Scolarité des jeunes accompagnés par les SESSAD 6-15 ans Tous 1,4% 5,1% 0,6% 0,8% 2,4% 2,3% 0,5% 0,9% Ecole-tps partiel (1,5-3j) 3,0% 4,4% Ecole tps cplet 39,5% 39,9% CLIS 26,1% 13,2% 27,9% 24,1% 15,1% 22,3% ULIS 13,2% 12,1% SEGPA 9,6% 8,0% EREA Autre 1,0% 0,9% 1,4% 2,9% Non scolarisé Unité d’enseignement (en établissement médico-social) Unité d’enseignement (dans une école) Ecole-tps très partiel (0,5-1j) er Dont 1 degré e Dont 2 degré B . I . d u C R E A I B o u r g o g n e – Dé l é g a t i o n F r a n c h e - C o mt é n ° 3 4 5 M a r s - Av r i l 2 0 1 5 9 Portrait des SESSAD : une exploitation de l’enquête ES 2010 par Thibault MARMONT et Carole PEINTRE Ces résultats montrent que le dispositif SESSAD est mobilisé essentiellement pour soutenir une scolarité en milieu ordinaire. Cependant, ils ne rendent pas compte de la réussite du parcours scolaire, ni des bénéfices personnels de l’intégration dans un groupe classe. Parmi les jeunes d’âge scolaire qui ne bénéficient pas de cette inclusion, les profils autistiques ou de polyhandicap sont sur-représentés, ainsi que – dans une moindre mesure – les jeunes présentant des troubles du comportement. De façon générale, la situation scolaire des jeunes accompagnés par les SESSAD est étroitement corrélée à leur déficience. A titre d’exemples, plus des trois quart des enfants et adolescents présentant une déficience intellectuelle suivent une scolarité en dispositif adapté relevant de l’Education Nationale (CLIS, ULIS, SEGPA, EREA). Les jeunes avec troubles du comportement se répartissent quant à eux majoritairement entre les classes ordinaires et ces dispositifs. Les jeunes avec déficience auditive sont scolarisés à l’école ordinaire sept fois sur dix… Ø Passer d’une approche populationnelle à une approche situationnelle. Une typologie des profils des enfants accompagnés en SESSAD En dehors de ces grandes données de cadrage sur l’activité des SESSAD, le personnel et le public suivi, il est également intéressant de proposer une « autre » analyse des caractéristiques des enfants accompagnés, centrée sur leur niveau d’autonomie (ce qu’ils sont en mesure de réaliser effectivement dans la vie courante, seuls ou en contraire avec l’aide indispensable d’un tiers). On constate alors qu’il n’y a pas de correspondance absolue et uniforme entre des types d’atteintes fonctionnelles (déficience principale) et des niveaux d’autonomie. Autrement dit, au sein d’un même SESSAD et entre SESSAD ayant le même agrément clientèle, le niveau d’autonomie des enfants peut s’avérer très hétérogène. Cela va se traduire différemment dans les activités quotidiennes, la relation aux autres et, in fine, dans leurs participations sociales, et en l’occurrence, pour ce que nous donne à voir l’enquête ES, sur la forme de sa scolarisation. Aussi, nous avons établi une typologie des profils des 45 000 enfants accompagnés en SESSAD à partir de neuf variables : - quatre des variables relatives aux actes essentiels : se déplacer à l’intérieur de son logement, faire sa toilette, sortir de son lieu de vie, communiquer avec autrui ; - deux variables sur les comportements : se mettre en danger et avoir un comportement anormalement agressif ; - une variable également sur le risque vital de la personne (en lien avec une présence humaine ou l’utilisation d’une aide technique) ; - une variable sur la capacité de la personne à lire (car cette activité renseigne sur les capacités d’apprentissage et va beaucoup discriminer les profils des enfants, notamment dans le choix de la scolarité). - la présence d’une déficience intellectuelle sévère a été également prise en compte car elle caractérise fortement l’autonomie de la personne. Le principe de la typologie consiste à un regroupement des individus dans des classes homogènes. Aussi, comme l’analyse statistique multivariée reposait d’abord sur les « incapacités » préalablement citées, les huit classes obtenues se déterminent globalement sur un axe qui symbolise le degré d’autonomie, qui va du groupe 1 « des plus autonomes » au groupe 8 des « plus dépendants ». B . I . d u C R E A I B o u r g o g n e – Dé l é g a t i o n F r a n c h e - C o mt é n ° 3 4 5 M a r s - Av r i l 2 0 1 5 10 Portrait des SESSAD : une exploitation de l’enquête ES 2010 par Thibault MARMONT et Carole PEINTRE Entre ces deux groupes les plus opposés en termes de profils « d’autonomie », six groupes se positionnent sur l’axe horizontal (cf. schéma ci-dessous) qui représente le niveau d’autonomie (en abscisse), mais qui se répartissent également, sur l’axe vertical (en ordonnée) selon la présence plus ou moins fréquente de comportements problème (identifiés dans l’enquête ES par « la mise en danger de soi » et les « comportements anormalement agressifs »). Ainsi, les groupes G2, G3 et G4 ont pour particularité de rassembler des enfants présentant des difficultés sur quelques activités seulement et de façon légère, plutôt en lien : - pour le groupe G2 avec des difficultés ponctuelles en termes de comportement, - pour le groupe G3, les difficultés portent d’abord sur la lecture, la communication et les sorties, en lien d’abord avec leur plus jeune âge et une déficience intellectuelle ou sensorielle, - et le groupe G4 se caractérise par des enfants qui savent tous lire mais avec difficultés, et correspondent d’abord à des enfants avec un retard mental léger et/ou des troubles du langage. Le groupe G5 est un groupe d’autonomie intermédiaire très hétérogène en termes de déficiences pour lesquels tous les domaines d’activité sont potentiellement impactés mais sans pour autant qu’il s’agisse nécessairement des mêmes activités selon les enfants. Tous les enfants du groupe G6 présentent des comportements problème et ce groupe rassemble la très grande majorité des enfants accompagnés par les SESSAD qui sont souvent « anormalement agressifs » et « se mettent souvent en danger ». L’impact sur la réalisation des activités courantes est beaucoup plus fort que dans le groupe 2 : ils sont deux fois plus nombreux à ne pas pouvoir sortir seuls et trois fois plus nombreux à avoir besoin d’une aide pour la toilette ; les non lecteurs sont également deux fois plus nombreux (28% contre 14%) et les problèmes de communication sont plus fréquents. Le groupe 7 concerne des enfants aux limitations importantes dans les déplacements et la toilette, en lien avec une déficience motrice et/ou une combinaison de déficiences. Le groupe 8 « des plus dépendants » se distingue du groupe 7 notamment par un risque vital engagé pour les deux-tiers d’entre eux (en l’absence d’une surveillance humaine et/ou d’une aide technique) en lien d’abord à une fragilité de leur état somatique (cependant 20% ont parfois ou souvent un comportement anormalement agressif). Ce groupe rassemble les scores d’autonomie les plus bas pour toutes les activités, y compris les actes essentiels comme faire sa toilette (ils sont plus nombreux que les enfants appartenant à la classe 7 à nécessiter une aide humaine « pour tout »). Figure 6. L’autonomie des jeunes usagers d’un SESSAD Comportements + G6 Comportements pb +++ G2 Légers pbs de comportement G1 - Les + autonomes G3 Légères diff. Lecture, com, sorties G4 Lisent avec difficultés + B . I . d u C R E A I B o u r g o g n e – G7 Jeunes enfants / limitations actes essentiels Degré d’autonomie Dé l é g a t i o n G8 - Les plus dépendants G5 Autonomie intermédiaire F r a n c h e - C o mt é n ° 3 4 5 M a r s - Av r i l 2 0 1 5 11 Portrait des SESSAD : une exploitation de l’enquête ES 2010 par Thibault MARMONT et Carole PEINTRE Ø Une majorité d’enfants présentant des difficultés légères et/ou isolées Tous ces groupes ne sont pas de taille identique, loin s’en faut ! Ainsi, le groupe des plus autonomes représente plus d’un quart des enfants accompagnés par les SESSAD (29%) et les trois groupes aux difficultés « légères » rassemblent près d’un enfant sur deux. Les trois groupes d’enfants (G6, G7, G8) aux limitations d’activité et de participation sociale les plus importantes représentent moins de 15% des enfants accompagnés par les SESSAD. Ø La situation scolaire selon le groupe « d’autonomie » En termes de scolarisation, les caractéristiques varient non seulement en fonction des incapacités (nature et niveau de gravité) mais aussi de l’âge des enfants. Le taux d’enfants non scolarisés est faible (de 1% à 7%), à l’exception de la classe 8 (30%). La classe des plus autonomes (G1) se caractérisent par des enfants plus âgés, scolarisés plus souvent dans le second degré, dans une classe ordinaire à temps complet. La déficience principale est extrêmement diversifiée. On retrouve aussi bien des enfants qui présentent au premier plan une déficience auditive (les difficultés porteront alors essentiellement sur la communication), que ceux atteints d’abord d’une déficience intellectuelle (pour lesquels, ce sera essentiellement la lecture qui sera impactée), une déficience visuelle (seulement l’autonomie hors du logement pose problème) ou encore une déficience motrice (dont les répercussions se feront essentiellement sur la réalisation de la toilette). Le groupe 2 rassemble aussi plus souvent des adolescents et donc correspond davantage à une scolarité dans le 2e degré, avec une grande proportion d’enfants scolarisés dans des classes d’inclusion ou spécialisées de l’Education nationale (on retrouve en particulier dans ce groupe la proportion la plus importante d’enfants scolarisés en SEGPA – 15%). En termes de déficiences, sont surreprésentés des enfants présentant au premier plan une déficience du psychique et/ou une déficience intellectuelle. 80% des enfants appartenant à ce groupe sont des garçons. Pour le groupe 3, il s’agit plutôt de jeunes enfants scolarisés en maternelle ou en CLIS présentant plutôt une déficience intellectuelle ou sensorielle. Pour le groupe 4, l’impact sur les apprentissages (tous les enfants appartenant à ce groupe savent lire mais « avec difficultés ») est en lien avec un retard mental léger et/ou des troubles du langage. La majorité d’entre eux est scolarisé en CLIS (30%), ULIS (19%) et SEGPA (11%). Le groupe 5, à l’autonomie intermédiaire, est un groupe très diversifié en termes de déficiences. Ainsi, quand la toilette est davantage impactée, il s’agit plus souvent d’enfants présentant une déficience motrice alors que les problèmes de communication concernent davantage d’enfants avec déficience intellectuelle. Ils sont majoritairement scolarisés dans les classes d’inclusion (CLIS et ULIS), mais la proportion d’enfants scolarisés en SEGPA est faible (6%). Les enfants du groupe 6, aux comportements problèmes prégnants, présentent le plus souvent une déficience du psychisme, mais surtout c’est la classe où la proportion de la combinaison « déficience du psychisme + déficience intellectuelle » est la plus représentée (28% contre 14% pour l’ensemble). De même, environ d’un quart des enfants présentent un autisme, d’autres TED ou une psychose infantile. Ce groupe se caractérise par une des plus faibles scolarisations en classe ordinaire de l’éducation nationale à temps complet (28%) et un des taux les plus élevés de scolarisation en CLIS (27%). B . I . d u C R E A I B o u r g o g n e – Dé l é g a t i o n F r a n c h e - C o mt é n ° 3 4 5 M a r s - Av r i l 2 0 1 5 12 Portrait des SESSAD : une exploitation de l’enquête ES 2010 par Thibault MARMONT et Carole PEINTRE Au sein du groupe 7, les trois quarts des enfants ont au moins deux déficiences, avec la présence d’une déficience motrice au premier plan pour la moitié d’entre eux. Il s’agit majoritairement de jeunes enfants scolarisés dans le 1er degré (30% en maternelle ou au CP). Les enfants appartenant à ce groupe ressemble à ceux du groupe 3 mais pour une autonomie globale bien moindre. Enfin, les plus dépendants du groupe 8 se caractérisent comme on l’a vu d’abord par un taux élevé d’enfants non scolarisés (30%). Quand ils sont scolarisés dans une école ordinaire, il s’agit le plus souvent d’une scolarité à temps partiel, essentiellement en maternelle ou en CLIS. Le groupe huit rassemble la plus forte proportion d’enfants polyhandicapés et d’enfants autistes. Ø Pas de correspondance automatique entre un type de SESSAD (agrément clientèle) et un « groupe d’autonomie » La description des huit groupes homogènes en terme de niveau global d’autonomie montre bien qu’il n’y a pas de correspondance entre la déficience principale (et donc l’agrément clientèle du SESSAD) et un groupe spécifique d’autonomie (G1 à G8). Figure 7. Des niveaux d’autonomie hétérogènes dans chaque type de SESSAD D’une façon générale, ce sont les SESSAD pour enfants polyhandicapés, les SESSAD pour enfants visuels et les SESSAD pour enfants présentant des troubles du langage qui présentent les profils les plus homogènes ; la majorité de ces enfants accompagnés sont répartis dans 2 ou 3 groupes maximum. Ainsi, les deux-tiers de la clientèle des SESSSAD « polyhandicap » appartiennent au groupe 8 des plus dépendants. De leur côté, les enfants accompagnés par un SESSAD « troubles du langage » relèvent, pour plus de moitié, du groupe 4 « des enfants lecteurs mais avec difficulté » et les autres se retrouvent essentiellement parmi les plus autonomes du groupe 1. Enfin, les enfants accompagnés par un SESSAD pour enfants déficients visuels sont pour plus de la moitié dans le groupe des plus autonomes et sinon dans celui de la classe 3 (de jeunes enfants en CLIS ou maternelle présentant d’abord des difficultés en lecture, pour communiquer ou encore pour sortir seuls). A l’inverse, les enfants accompagnés par des SESSAD spécialisés sur l’autisme ont des profils très hétérogènes. Ils se retrouvent dans tous les groupes d’autonomie mais principalement quand même dans le groupe 3 des enfants présentant des limitations peu importantes en lien avec des comportements problèmes relativement légers ou peu fréquents, ou sinon carrément parmi les plus dépendants (G 8). B . I . d u C R E A I B o u r g o g n e – Dé l é g a t i o n F r a n c h e - C o mt é n ° 3 4 5 M a r s - Av r i l 2 0 1 5 13 Portrait des SESSAD : une exploitation de l’enquête ES 2010 par Thibault MARMONT et Carole PEINTRE Ø Une approche par incapacités qui « décale » l’observation L’analyse multivariée des données basée sur les incapacités fait apparaître une réalité différente des besoins des enfants, de celle qui privilégie l’entrée par déficience ou par troubles (comme l’autisme ou les troubles du langage). Sous l’angle individuel, du projet personnalisé de l’enfant, l’approche par « incapacité » permet au sein du SESSAD de croiser les évaluations cliniques des différents membres de l’équipe pluridisciplinaire dans le cadre de la synthèse. Ce langage commun, qui n’appartient à aucune discipline particulière, facilite cette synthèse. Il favorise également le dialogue avec les familles mais aussi les différents partenaires des SESSAD. Et cette évaluation partagée a vocation à être transmises à la MDPH, dans un langage GEVA « compatible » (on retrouve dans le GEVA cette approche par grand domaine de vie, réalisation des activités et participations sociales). Sous l’angle collectif (ou « agrégé »), et c’est le cas dans l’enquête ES, l’introduction de données sur les incapacités et son traitement multivarié est déterminante car elle vient bousculer les approches par déficience qui prévalaient jusqu’ici dans la programmation d’équipement ou dans les plans d’action. Ce « pas de côté » est d’autant plus important que les orientations actuelles des politiques publiques en faveur des personnes en situation de vulnérabilité nous invitent à sortir d’une logique d’institution, où chaque structure répond à un groupe de personnes ayant en commun la même déficience principale et répond à TOUS ses besoins – et quels que soient ces besoins (approche globalisante), tout au long de sa vie (effet filière). Chaque établissement ou service doit davantage se penser comme une ressource du territoire susceptible de participer, à un moment donné, pour une étape du parcours de vie de la personne, à la stratégie globale d’intervention qui est mise en place pour répondre à ses besoins et attentes. Cette approche d’observation sur le territoire peut aider notamment à l’élaboration d’appels à projets transversaux des ARS / CG, pour lesquels les associations gestionnaires ou encore établissements sanitaires n’auront plus à présenter un projet d’établissement ou de service mais un dispositif articulant plusieurs ressources territoriales (sociale, médicosociale, sanitaire) pour répondre à un type de besoin (l’accompagnement à la scolarité, au maintien dans le logement, etc.). Enfin, cette approche par incapacité est au cœur d’enjeux importants sur la connaissance des publics en situation de handicap, que ce soit : - en termes de généralisation de l’approche GEVA (l’outil réglementaire des MDPH) dans la transmission des informations aux différents échelons territoriaux, au niveau individuel et collectif ; - en termes de choix de variables discriminantes au sein des systèmes d’information. Ces systèmes sont aujourd’hui mis en place par les établissements et services médico-sociaux dans la gestion des activités de la structure. Les structures buttent cependant à élargir les systèmes d’information au dossier individuel et la description concrète de ces situations de handicap. Or, les données contenues dans ES pourraient servir de socle minimum commun à tous ces systèmes d’information : âge, sexe, déficiences, scolarisation, mode d’hébergement, huit incapacités et des données de parcours (avant et après l’admission). Ce socle « minimum » d’informations à déterminer au sein des futurs systèmes d’information des structures médico-sociales est d’autant plus important à formaliser qu’ils auront vocation, à terme, à venir alimenter le système d’information de la MDPH (lequel a vocation à nourrir lui-même le SIpaPH). B . I . d u C R E A I B o u r g o g n e – Dé l é g a t i o n F r a n c h e - C o mt é n ° 3 4 5 M a r s - Av r i l 2 0 1 5 14 Portrait des SESSAD : une exploitation de l’enquête ES 2010 par Thibault MARMONT et Carole PEINTRE Ø Une enquête perspectives… ES 2014 dématérialisée qui ouvre de nouvelles Début janvier 2015, l’enquête ES 2014 sera lancée (« photographie » au 31 décembre 2014). La très grande nouveauté de cette édition « 2014 » est sa forme dématérialisée ! Fini le remplissage sur papier, et place à la révolution numérique ! En effet, les SESSAD auront à saisir ces informations directement en ligne. Chaque SESSAD recevra un courrier lui indiquant un code d’accès personnalisé et aura quatre mois pour saisir les informations : de mi-janvier à mi-avril 2015. En dehors des aspects fonctionnels de cette version « dématérialisée » (aides et commentaires pour guider le remplissage), l’enquête ES 2014 permettra à chaque service de récupérer ses propres données. Toute l’énergie passée à remplir aura donc un retour sur investissement pour le SESSAD qui pourra, dès qu’il aura terminé la saisie de ses informations, récupérer toutes les données saisies sur un fichier Excel (qu’il pourra donc ensuite exploiter comme il le souhaite), ainsi que des tableaux de résultats déjà mis en forme pour certaines variables (comme la répartition par âge, par déficience, etc.). Ces données alimenteront utilement des documents tels que le rapport d’activité. Cette saisie en ligne a un autre avantage immédiat : les informations seront disponibles plus rapidement au niveau national, et donc on aura un moindre décalage entre la date d’observation et le moment où l’on utilise ces données. Enfin, avec cette enquête dématérialisée, on peut rêver « raisonnablement » que l’enquête ES soit transformée à termes en une base de données pérenne où les établissements et services viendraient par exemple chaque année réactualiser les informations sur leur public accompagné et leur personnel (uniquement en renseignant par exemple les entrées et les sorties). On passerait alors à un vrai système d’informations qui pourrait aussi à terme être en lien avec le SI des MDPH et le SIpaPH. B . I . d u C R E A I B o u r g o g n e – Dé l é g a t i o n F r a n c h e - C o mt é n ° 3 4 5 M a r s - Av r i l 2 0 1 5 15