+ R + H2O - Le Repaire des Sciences

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Chimie – Terminale S
Chapitre 9
Cours
Contrôle de l’évolution d’un système chimique
L’industrie est avare de rendements optimaux. Si les esters y sont très utilisés, comme nous l’avons constaté, il faut
en revanche revoir leur procédé de fabrication, de sorte à améliorer le rendement. De la même façon, nous allons
découvrir comment le recours à des réactifs bien choisis permet d’utiliser l’hydrolyse de certains esters pour
fabriquer des savons. Enfin, pour l’avoir utilisé déjà à maintes reprises, nous détaillerons le procédé de catalyse,
qui permet de contrôler cinétiquement la réaction.
1 – Contrôle par changement de réactif
1.1 – 1er exemple : sur l’estérification
L’estérification est une réaction lente et limitée, comme nous l’avons montré en Travaux Pratiques, dans
le chapitre précédent.
Il est toutefois possible de la rendre totale et rapide en remplaçant l’acide carboxylique par l’anhydride
d’acide qui lui correspond. Ces composés sont obtenus par déshydratation (par chauffage) de l’acide,
O
R
R
O
O
+
C
R
C
R
OH
OH
+
O
C
H2O
C
O
Exemples :
O
H3C
O
O
C
O
C
H3C
CH3
CH2
anhydride éthanoïque (acétique)
H3C
H3C
CH
O
C
O
C
CH2
CH3
anhydride propanoïque
O
C
O H3C
O
C
CH
CH3
anhydride méthylpropanoïque
Le plus souvent liquides ou solides, les anhydrides réagissent vivement avec l’eau : il faut donc éviter tout
contact avec la peau ou les muqueuses (hotte, gants & lunettes).
Exemple d’estérification à l’anhydride : obtention de l’acétate de butyle
H3C
C
O
O
O
O
C
CH3
anhydride éthanoïque (acétique)
H3C
C
O
CH2
CH2
butan-1-ol
CH3
acétate de butyle
+
+
H3C
(CH2)3
CH2
O
OH
H3C
C
OH
acide acétique
Dans cette estérification, remplacer l’acide acétique par l’anhydride acétique est une des méthodes
permettant d’augmenter le rendement de l’estérification.
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Exemple d’application : l’hémisynthèse de l’aspirine
L’aspirine, ou acide acétylsalicylique, est un ester synthétisé à partir de l’acide salicylique. L’utilisation
d’acide acétique conduirait à un rendement trop faible, inintéressant pour l’industrie : c’est pourquoi on
utilise l’anhydride acétique.
O
O
OH
OH
OH
O
acide salicylique
H3C
O
+
O
C
O
CH3
acide acétylsalicylique
+
O
C
C
CH3
O
H3C
anhydride éthanoïque (acétique)
C
OH
acide acétique
1.2 – 2ème exemple : saponification et savons
La réaction d’un ester avec les ions hydroxyde HO–(aq) conduit à la formation d’un alcool et d’un ion
carboxylate – base conjuguée de l’acide carboxylique –. Cette réaction d’hydrolyse basique de l’ester est
appelée saponification. Il s’agit d’une réaction totale, rapide et exothermique.
O
O
O
CH2
CH3
O
-
ion benzoate
benzoate d'éthyle
+
+
-
H3C
HO (aq)
CH2
OH
éthanol
ion hydroxyde
Les savons sont fabriqués en mélangeant graisses et cendres animales depuis des millénaires. Ce
mécanisme de saponification a été expliqué en 1823 par Eugène Chevreul.
Les savons sont issus de la saponification des triglycérides.
Les triglycérides entrent dans la composition de la plupart des corps gras (ou lipides) naturels, huiles ou
graisses. Ce sont des triesters issus de l’estérification entre le propan-1,2,3-triol (ou glycérol) et les acides
gras (acide à longue chaîne carbonée non ramifiée).
H 2C
OH
HC
OH
H 2C
OH
glycérol
+
3 C17H33COOH
acide
oléique
H 2C
O
CO
C17H33
HC
O
CO
C17H33
H 2C
O
CO
C17H33
+
3 H 2O
oléine
L’oléine est un triglycéride qui entre dans la composition de l’huile d’olive.
D’autres acides gras : l’acide laurique C11H23COOH, l’acide palmitique C15H31COOH ; certains acides
gras sont insaturés (comportent des doubles liaisons).
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La saponification d’un corps gras est réalisée à l’aide des ions hydroxyde HO–(aq) d’une solution de
soude (savons durs) ou de potasse (savons mous). Le glycérol et les ions carboxylate obtenus constituent
alors ce qu’on appelle le savon.
H2C
O
CO
C17H33
HC
O
CO
C17H33
H2C
O
CO
C17H33
oléine
+
-
+ 3 (Na (aq) + HO (aq))
H2 C
OH
HC
OH
H2 C
OH
+
3 C17H33COONa
glycérol
Les savons sont solubles dans l’eau distillée (jusqu’à 100 g/L) ; en revanche, ils le sont très peu dans une
eau salée ou dure (contenant des ions Ca2+(aq) ou Mg2+(aq)), où ils précipitent. Cette faible solubilité est
mise à profit au cours de leur élaboration, dans une étape appelée relargage.
Les ions carboxylate sont issus d’acides gras et ont de ce fait une longue chaîne carbonée. Ceci leur
confère une particularité,
COO
 une tête ionique polaire hydrophile
 une longue chaîne carbonée apolaire hydrophobe (ou lipophile)
A faible concentration, ils s’organisent en un film à l’interface air/eau, tête polaire tournée vers l’eau,
chaînes carbonées vers l’air. Cette configuration est à l’origine de l’explication de l’expérience historique
de Franklin sur le lac Clapham (estimation de la taille d’une molécule d’huile).
En solution aqueuse, les ions carboxylate forment des assemblages particuliers appelés micelles qui peut
permettent d’isoler leur partie hydrophobe. Ces micelles expliquent le caractère détergent d’un savon.
La salissure, composée de graisses, est insoluble dans l’eau.
A l’ajout du savon, les micelles se forment dans l’eau.
Au contact du tissu, le savon sous forme micellaire s’organise
autour de la salissure.
L’action mécanique lors du lavage permet de détacher la salissure.
La graisse, située au cœur de la micelle soluble dans l’eau, est
évacuée.
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2 – Contrôle par élimination d’un produit
Le rendement de l’estérification à alcool peut être amélioré si
l’on élimine l’eau à mesure qu’elle se forme, par exemple à
l’aide d’un appareil de Dean-Stark.
En chauffant, le mélange s’évapore et est recondensé par le
réfrigérant à boules ; toutefois, dans le Dean-Stark, le
condensat tombe dans une colonne remplie de cyclohexane :
l’eau qui s’est évaporée du mélange réactionnelle, plus dense
que le cyclohexane, traverse ce dernier et de retrouve en bas de
colonne, isolée du mélange réactionnel. A mesure qu’elle se
forme, l’eau est ainsi séparée du milieu et la réaction
d’hydrolyse de l’ester, inverse de l’estérification, ne peut avoir
lieu.
3 – Contrôle par catalyse
Dans l’industrie, environ 85 % des réactions sont catalysées. La totalité des processus biologiques sont
catalysés. Pour faire du caramel un peu plus vite, les cuisiniers savent bien qu’il faut ajouter un peu de
vinaigre. Le tourangeau Yves Chauvin a reçu le prix Nobel de Chimie en 2005 pour ses découvertes sur la
métathèse et sur sa catalyse.
3.1 – Généralités sur les catalyseurs
Un catalyseur est une espèce qui augmente la vitesse de réaction sans modifier l’état d’équilibre du
système.
 Un catalyseur ne modifie pas l’état d’équilibre (donc la valeur de K) car il accélère à la fois les
réactions en sens direct et inverse ; il n’apparaît pas dans l’équation de réaction (il est
éventuellement mentionné au-dessus du symbole → ou =). En conséquence, évidemment, il ne
peut pas rendre possible une transformation qui ne serait pas spontanée !
 Un catalyseur est modifié transitoirement pendant la réaction, mais il se retrouve inchangé une
fois le processus terminé : un catalyseur n’est pas consommé par la réaction
 Un catalyseur est introduit en petite quantité par rapport à la quantité de réactif à transformer car il
est de toute façon régénéré.
La catalyse est homogène si les réactifs et le catalyseur sont dans le même état physique.
Le plus souvent, ils sont dissous ou gazeux.
La catalyse est hétérogène si les réactifs et le catalyseur ne sont pas dans le même état physique.
Le plus souvent, le catalyseur est solide alors que les réactifs sont gazeux, liquides ou dissous.
La catalyse est enzymatique lorsqu’elle est réalisée par une protéine issue du vivant, une enzyme. En
particulier, les enzymes rendent possibles cinétiquement des réactions aux températures compatibles avec
les constituants cellulaires.
Catalyse homogène
Catalyse hétérogène
avantage
Toutes les molécules du catalyseur
catalysent la réaction
La séparation du catalyseur et des
produits est facile
inconvénient
La séparation du catalyseur et des
produits est difficile
Seuls les atomes en surface du
catalyseur catalysent la réaction
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3.2 – Sélectivité et spécificité des catalyseurs
Pour un système susceptible d’évoluer selon plusieurs réactions, un catalyseur est dit sélectif s’il accélère
préférentiellement l’une d’elles.
Selon le catalyseur utilisé, poudre
de cuivre (1) ou poudre d’alumine
(2), on observe la précipitation de la
DNPH (1) ou la décoloration de
l’eau de brome (2)
H3C
O
H3C
C
+
H2
+
H2 O
oxydation
H
Cu(s)
éthanal
CH2
OH
éthanol
Al 2O 3(s)
alumine
Voir Annexes 1 et 2 de ce cours.
H2C
CH2
déshydratation
éthène
On utilise ici les mêmes réactifs, dans les mêmes conditions expérimentales, et seuls les catalyseurs
changent : on obtient des produits différents, signes de la sélectivité des catalyseurs utilisés !
Un catalyseur est spécifique d’un type de réaction chimique :
Le cuivre catalyse l’oxydation des alcools : il peut catalyser la réaction d’oxydation de l’éthanol en
éthanal e présence de dioxygène (lampe sans flamme), mais aussi la réaction d’oxydation du méthanol en
méthanal dans les mêmes conditions expérimentales.
Un catalyseur de type enzyme possède pour sa part deux spécificités :
 Elle ne catalyse qu’un seul type de réaction comme n’importe quel catalyseur.
 Elle est aussi spécifique d’un type de réactif donné (appelé substrat).
Les applications de la catalyse enzymatique sont très nombreuses dans les mécanismes biologiques de par
cette spécificité.
3.3 – Quelques exemples
La réaction de préparation est la suivante : N2(g) + 3 H2(g) = 2 NH3(g)
Une augmentation de la température lors de cette réaction augmenterait la vitesse d’obtention de l’état
d’équilibre, mais est défavorable au taux d’avancement de la réaction (le rendement diminue).
Pour trouver un compromis, on utilise un catalyseur, Fe(s), et on travaille à une température intermédiaire
: 450°C.
Les enzymes protéases et amylases sont ajoutés lors de la phase de brassage de la bière, elles permettent
de transformer plus rapidement l’amidon de l’orge en acides aminés et en sucres.
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Le souci industriel est la fragilité de ces enzymes, qui freinent leur fréquence d’utilisation.
Hydrolyse d’un ester
L’hydrolyse d’un ester est très lente à température ambiante. Elle est très accélérée lorsque de l’acide
sulfurique est introduit dans la solution contenant l’ester et l’eau. En effet, l’acide sulfurique cède un
ion hydrogène H+ à la molécule d’ester, permettant à la molécule d’eau de réagir plus vite avec elle.
L’utilisation de ce catalyseur n’est cependant pas sans conséquence : afin de récupérer les produits de la
réaction et d’éliminer les traces de catalyseur, il est nécessaire d’effectuer une séquence d’extractions et
de lavages appropriés, en contrôlant bien le pH des solutions lors de chaque étape.
Fonctionnement d’un pot catalytique
Les pots catalytiques actuels contiennent une grille alvéolée en céramique, recouverte de minuscules
particules de platine (Pt) et de rhodium (Rh), qui catalysent la transformation du monoxyde de carbone
CO(g), des oxydes d’azote et des hydrocarbures résiduels contenus dans les gaz d’échappement.
L’utilisation de très petites particules métalliques sur une structure céramique en nid d’abeille permet
d’accroître la surface de contact entre les gaz et les métaux, et de réduire le prix de revient du dispositif
en diminuant la quantité de métaux nécessaire (platine et rhodium sont très chers).
Les chimistes se sont intéressés à l’interaction du rhodium et des monoxydes de carbone et d’azote que
l’on peut traduire ainsi :
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La catalyse enzymatique
Les enzymes sont des catalyseurs courants dans les systèmes biologiques. Elles ont en commun une structure
protéique : une succession d’acides α-aminés liés entre eux par un enchaînement –CO–NH– appelé liaison
peptidique. Les enzymes enchaînent ainsi de 50 à plusieurs milliers d’acides α-aminés : ce sont donc des
macromolécules. Leur structure à trois dimensions fait apparaître des cavités de formes bien définies, et présentant
des groupes caractéristiques (alcools, amines, …) bien en évidence. Les molécules qui ont une forme s’adaptant à
cette cavité peuvent y pénétrer et se lier aux groupes caractéristiques accessibles. Elles subissent alors une réaction.
Une fois transformées, ces molécules n’ont plus la forme adaptée à la cavité et sont expulsées de l’enzyme, laissant
la place à une nouvelle molécule, et ainsi de suite. La première découverte d’une enzyme est généralement attribuée
à Anselme Payen et Jean-François Persoz en 1833, qui ont traité un extrait aqueux de malt à l’éthanol puis précipité
une substance labile à la chaleur qui hydrolysait l’amidon. Aujourd’hui, de nombreux procédés industriels ont lieu
par catalyse enzymatique, comme par exemple la synthèse de l’aspartame, un des édulcorants rencontrés dans les
boissons dites « light ».
Avec quelle vitesse, et quelle sélectivité, les réactions biologiques sont-elles catalysées par les
enzymes ?
I1 n'est pas du tout inhabituel pour un enzyme d'accélérer une réaction chimique d'un facteur 10 milliards.
S'il vous a fallu cinq secondes pour lire la phrase précédente, il vous aurait fallu 10 milliards de fois plus
de temps, 1500 ans, sans l'accélération de vos réactions enzymatiques (catalysées par des enzymes).
L'effet est énorme. Cela rend la vie possible.
Une autre particularité de la catalyse enzymatique, c'est sa sélectivité. Un catalyseur chimique simple, tel
que l'acide sulfurique, peut accélérer un grand nombre de réactions chimiques différentes, mais ce
manque de sélectivité n'est normalement pas un problème pour les chimistes. On peut ajouter le
catalyseur à un mélange réactionnel qui ne contient que les produits chimiques nécessaires à la réaction
qu'on veut entreprendre.
Les enzymes, cependant, doivent fonctionner dans des systèmes vivants, avec des centaines de réactifs
potentiels dans la cellule. Les enzymes doivent donc être sélectifs pour ne provoquer que les réactions
nécessaires. La sélectivité provient du fait que les enzymes se lient à leur substrat avant de catalyser la
réaction. La poche de l'enzyme dans laquelle le substrat se fixe a une forme bien précise, qui n'accepte
que certains substrats et pas les autres.
Cette sélectivité permet à l'enzyme de ne catalyser que la réaction du substrat voulu, mais il y a aussi une
autre forme de sélectivité. Un substrat donné peut subir plusieurs réactions; l'enzyme sélectionnera
seulement celle qui donne le produit souhaité.(…)
En décrivant la liaison d'un substrat dans la cavité d'une enzyme, on supposait que la cavité avait déjà une
forme bien définie, prête à recevoir le substrat. C'est inexact. On a pu démontrer que pour beaucoup
d'enzymes, et on pense que c'est vrai pour tous, la cavité a une forme plutôt ouverte qui permet au substrat
d'y entrer aisément et qu'ensuite, la cavité de l'enzyme se referme autour du substrat pour "l'agripper "
plus fermement.
Au départ, les gens parlaient d'un substrat ajusté à l'enzyme de la même façon qu'une clé entre dans une
serrure. En fait, on sait maintenant que le modèle de la plante carnivore est plus proche de la réalité. Cette
plante se referme sur les insectes malchanceux. Le repliement de la fleur est déclenché par la présence de
la mouche, de la même façon que la présence du substrat déclenche le repliement de la protéine. Quand la
réaction catalysée est terminée, l'enzyme se redéploie pour éjecter les produits et recevoir une nouvelle
molécule de substrat.
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Chimie – Terminale S
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Annexe 1 : déshydrogénation catalytique de l’éthanol
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Annexe 2 : déshydratation catalytique de l’éthanol
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